Évaluation

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Dés son éveil, elle part voir Tsadir, mais la guerrière est déjà partie pour les interrogatoires. Elle retourne alors voir son mentor méditant sur la terrasse qui fait face aux jardins. Le dôme des ambassades est le seul dôme d'Elysium à ne pas avoir de grande tour en son centre. Il semble plus à un anneau de tours plantées dans un grand parc. Elle demande à la maîtresse des jeux si elle peut lui obtenir l'accès aux entretiens, mais Zuko lui répond par la négative.

La réplicante commence à l'assaillir de questions et Zuko doit se rendre à l'évidence : elle n'aura pas la paix ce matin. C'est le souci avec les IA de Ley-Wan : elles n'ont pas de temps de récupération, le seul repos dont elles ont besoin, c'est pour leur enveloppe. Même au réveil, elle sont vives et alertes et n'ont pas besoin de remettre leurs idées en ordre.

Elle se lève donc et conduit sa protégée à la cantine, s'installant à une table et commandant sur le réseau de quoi manger. Quelques terriens à côté s'empiffrent d'une nourriture habituellement chère et rare sur Terre, profitant de l'abondance des colonies au point de s'en écœurer. La scène amuse les deux solaires qui évitent tout éclat de rire pour ne pas gêner les visiteurs.

À peine une demi-heure plus tard, Tsadir elle-même les rejoint. Elle a l'air excédée et quand Greenstar lui demande si tout va bien, elle répond qu'elle aimerait bien qu'on débranche quelques minutes son IA de supervision, le temps qu'elle étrangle Verner. Si Hendell s'est montré relativement coopératif, le diplomate s'obstine sans se rendre compte qu'il ne fait qu'aggraver sa situation.

Le Syntha qui fait office de serveur apporte des œufs au bacon à la samouraï. Elle explique que son autre instance est probablement aussi en train de manger ce genre de truc là-bas et qu'elle aimerait bien en connaître le goût. Au final, ça ne lui plaît pas et sa mine déçue amuse grandement la réplicante : après tout l'héroïne des colonies a ses propres faiblesses.

Durant le repas matinal, les processus de son intelligence artificielle, extension de son inconscient, poursuivent son analyse des entretients : chaque parole, chaque signe, qu'il soit involontaire ou non, a été inscrit dans sa mémoire externe et ils passent désormais au crible des logiciels d'analyse. Même sans ça, les mensonges de Verner étaient flagrants mais Tsadir aurait aimé découvrir la vérité derrière. Quant à Hendell, il semble avoir reçu une formation pour tromper les lecteurs d'intentions et s'il est probable qu'il mente, rien ne permet de le prouver.

Mais les logiciels ne se limitent pas qu'aux réactions des interrogés. Ainsi Tsadir, ou plutôt son IA, peut étudier son propre comportement pour tenter de trouver des améliorations. Ainsi son jeu d'acteur est classé “Pauvre” tandis que ses capacités d'intimidations semblent “Efficaces”. Les faits et gestes de Trend sont aussi dans les données recueillies. Les analyses inconscientes étudient sa façon de poser ses questions et son cheminement logique, il semble être un bon interrogateur et ses questions semblent toujours avoir de l'avance par rapport à la défense des interrogés et de leurs avocats. Le taux de prédiction de ses questions dépasse les quatre-vingt-quinze-pour-cent… une alerte se déclenche dans le processus qui vient de faire la découverte et il redirige ses résultats au noyau de l'IA qui décide d'en faire part à l'esprit sentient en injectant la remarque dans son espace mémoriel proche.

Comment, peut-il avoir autant d'avance ? C'est comme s'il possédait des informations par un autre moyen. C'est un cybernétique, il ne peut pas utiliser un implant psi… Aurait-il fait un brainscan en douce ?

Un humain aurait sans doute fait cette remarque à l'oral, mais son IA s'est assurée que cette réflexion ne quitte pas le cadre privé de ses pensées. Mieux encore, il met en évidence les incohérences qui démontrent que le Solar Wardner connaît déjà la vérité.

Tsadir se lève avec un air grave et part pour le bureau des diplomates : elle envoie en même temps un message pour y inviter Trend. Zuko et Greenstar la suivent ; la femme cyborg n'essaie même pas de les semer : d'une part Greenstar avec son implant peut retrouver sa position sans mal, et de l'autre, il paraît important pour Tsadir que la réplicante voie de ses yeux, les sombres moyens nécessaires pour apporter la lumière dans certaines affaires. Et puis, il serait dommage qu'elle n'ait que l'image d'un soldat de lumière un peu bourrin : souvent l'importance d'une mission peut conduire un enquêteur au pire ou presque.

Arrivée au bureau, Tsadir est surprise de ne pas y trouver l'éthérée. De plus, Trend adossé au mur du fond semble l'attendre. Il la salue d'un hochement de tête, puis voyant les deux autres solaires qui la suivaient, il se redresse et invite tout le monde à s'asseoir. Ceci fait, la porte se referme derrière eux et le brouillage de confidentialité de la salle s'enclenche.

« Vous m'auriez déçu si vous n'aviez pas trouvé », annonce Trend en s'adressant visiblement à Tsadir. Il leur explique que oui, dès son arrivée dans les colonies, le Solar Wardner s'est procuré un brainscan de Verner. Il sait pour l'enfant et la soit-disante expérimentation qui aurait mal tourné.

Quand Hendell est arrivé dans les colonies, il s'est montré assez maladroit pour attirer l'attention du réseau sentinelle. Trend surveille ces fouineurs depuis quelque temps déjà et du coup, c'est comme s'ils avaient alerté eux même les Solar Wardners. De toutes façons, si vous voulez attirer l'attention des Wardners, vous ferez difficilement mieux qu'un terrien s'adressant directement à des absolutistes d'Aesir à propos de recherches sur la mémétique. Quel idiot, quoi qu'il ait pu souhaiter d'eux, ça se serait retourné contre lui dès qu'il serait revenu sur Terre.

Du coup, quand Verner est arrivé et qu'il a cherché à avoir des nouvelles d'Hendell, le cybernétique a été prévenu aussi sec par l'une de ses IA de surveillance. Évidemment, le message destiné à l'homme d'affaire n'est jamais parvenu à bon port, comme ça Hendell n'était pas au courant de la maladresse de son compatriote et restait ainsi à un niveau gérable de paranoïa. Il suffisait d'attendre qu'il fasse un mauvais pas pour le prendre sur le fait. Ainsi, dès le début de cette affaire, les cibles étaient déjà à portée et apprêtée. Le facteur temporel ne dépendait plus que de l'évaluation de Tsadir.

À cette dernière allusion, la cyborg se lève de sa chaise et exige ses explications. Zuko fait un clin d'œil à la joueuse et lui fait signe de ne rien dire ou faire. Le cybernétique répond très calmement : « Il ne reste plus qu'une seule épreuve ma très chère héroïne. Et tout ceci sera définitivement terminé. » Il explique ensuite, en se tournant vers la joueuse, qu'il ne s'agit pas d'un jeu en dépit des apparences et que ce moment est très important. Il s'excuse pour le dérangement tout en précisant qu'il ne s'agit en aucun cas d'une perte de temps. Avec la lucidité permise par son IA, Tsadir acquiesce : quels que soient les plans du Wardner, les enjeux portent bien au-delà de l'affaire et de cette évaluation.

Le Solar Wardner s'assied enfin et propose à tout le monde de se préparer pour revenir à l'orbite. Après tout, l'autre instance de Tsadir est sur le chemin avec Ney.

« Qui est Ney ? », demande la réplicante.

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