Chapitre 3

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Elle regarda sa fille avec amour, replaçant une mèche blonde derrière son oreille minuscule. Elle avait eu si peur pour son bébé quand ce sauvage avait réduit sa porte en lambeaux, les yeux fous. Elle s’était jetée près du berceau, faisant de son corps une barrière entre son enfant et l’ennemi. Le garçon qui ne devait être âgé que d’une quinzaine d’année s’en était donné à cœur joie à détruire sa maison, jetant les chaises sur les murs, renversant la table et cassant toutes les poteries, dans un ricanement démoniaque. Il avait ensuite pillé le coffre, remplissant sans vergogne sa besace des seuls objets de valeurs qu’elle possédait. Lorsqu’il eut fini, il s’était retourné vers elle et son regard s’était posé sur ses courbes. Elle s’était sentie salie, humiliée, pétrifiée par la peur face à ce prédateur qui lorgnait son corsage avec avidité. Il l’avait rejoint en un bond, l’attrapant par les cheveux pour la plaquer au sol. De nombreuses femmes avaient été violées par ces monstres mais jamais elle ne pensait un jour en faire elle aussi l’expérience. Elle avait appris des victimes que n’opposer aucune résistance permettait d’en sortir indemne, du moins physiquement. Ainsi, regardant une dernière fois en direction de sa fille qui pleurait dans son landau, elle s’était coupée de la réalité, résignée. Au moment où le garçon s’apprêtait à la briser, une sauvageonne était entrée en trombe dans la pièce et avait poussé l’énergumène d’un violent coup de botte. Tout s’était passé très vite, sans qu’elle ne puisse vraiment comprendre. Tout ce qu’elle savait, c’était qu’elle et sa fille étaient désormais hors de danger. Au son de la corne de brume ennemie, elle avait regardé partir le garçon et tous les autres guerriers, laissant derrière eux la pauvre jeune fille. Comment avaient-ils pu abandonner l’une des leurs en terres hostiles ? Elle avait détaillé le visage ensanglanté de l'adolescente, sorti une fiole et placé le récipient sous les narines de la jeune fille, sans succès. Ainsi, était-elle restée auprès d’elle, attendant que l’enfant reprenne ses esprits. Elle avait gardé ses distances, car cette fille restait tout de même une ennemie, mais n’avait pu s’empêcher de ressentir de l’affection pour cette inconnue qui l’avait sauvée. Par précaution, elle s’était tout de même cachée dans l’ombre, son bébé dans les bras. Quand la jeune sauvage avait enfin ouvert les yeux, elle avait quitté la maison en toute hâte, sans se retourner.

La jeune mère regarda ébahie le trou s’agrandir comme par magie, formant peu à peu une ouverture dans le mur au fond du moulin. Les bords de la brèche brillaient d’un bleu vif presque douloureux à regarder, illuminant l’entièreté de la pièce. Elle resta ainsi stupéfaite, à peine plus surprise de voir la jeune sauvageonne débouler dans la pièce dans une roulade maladroite. Les deux femmes se dévisagèrent, ne sachant comment réagir. Puis la mère remarqua le gant étrange qui enserrait le bras droit de l'enfant. Toute la suite se passa en un instant. Elle se retrouva bloquer au sol, les poignets bloqués du même cristal qui avait troué son mur et la jeune fille, à califourchon sur elle, montrait sa main droite en parlant dans une langue incompréhensible. Elle pointait du doigt la commode, sa main, et sortit deux objets de son sac. La femme reconnu instantanément la pierre de ses ancêtres et elle comprit. Pauvre enfant. Elle pouvait lire la panique dans les yeux de la jeune fille tout en étant incapable de répondre aux questions qu’elle lui posait. Quand le flot de paroles cessa, la jeune sauvage était prête à craquer.

« Détache-moi, et je t’aiderai. »

Bien que la barrière linguistique les empêchât de se comprendre, la fillette sembla déchiffrer le sens de la demande et posant sa main magique sur les poignets prisonniers, la libéra de ses liens dans une pluie de cristal brisé. Elle attendit que la mère se redresse et la regarda avec intensité.

« Je sais que tu ne parles pas notre langue donc je ne peux pas t’expliquer ce qu’il t’arrive, mais tu cours un grave danger. La pierre que tu as volée est une pierre sacrée mais maudite. Elle contenait des larmes de dragon, les cristaux qui enserrent désormais ton bras. Ils te donnent certes des pouvoirs mais ils te consumeront jusqu’à te tuer ! »

La jeune fille sembla saisir l’importance de ses paroles mais pas leur sens. Ainsi, la femme s’approcha doucement de la commode et en sorti un parchemin en mauvais état. Elle le tendit à l'inconnue, continuant de l’avertir de sa situation critique. La fille semblait perdue. Entendant des voix dehors, la mère attrapa une miche de pain, deux pommes et un morceau de fromage, les fourra dans le sac de la sauvageonne et la poussa vers la brèche dans le mur.

« Va maintenant ! Je ne peux pas t’aider plus et tu dois partir avant qu’ils ne te découvrent. Lis le parchemin, il te guidera ! »

L’adolescente se pencha dans un salut solennel puis se faufilant à l’extérieur. Au moment où deux hommes armés entrèrent dans le moulin, les cristaux reprenaient leur danse hypnotique pour sceller le mur, ne laissant du trou qu’une ligne bleutée sur la paroi.

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