Partie 1

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La procession avançait bon train entre les imposantes dunes du désert. Rien ne semblait pouvoir perturber les chevaux, pas même le sable qui dansait au grès du vent sur la route et dans les airs. Les carrosses, en file indienne, étaient ornés de magnifiques décorations qui en disait long sur leurs occupants. Les cavaliers, eux, se protégeaient sous de longues capes aux couleurs claires faites pour arrêter le soleil avant qu’il ne soit trop agressif, même pour leurs peaux dorées. Les lances des soldats dissuadaient quiconque de s’approcher de l’homme à la tête de l’étrange caravane.

La bête qu’il chevauchait était imposante, d’un noir profond sans imperfections. Les pierres et les étoffes qui décoraient son harnachement n’avait rien à envier à l’or que portait son cavalier, caché sous la longue toile de sa cape au motif de la lune se profilant sur le désert. Droit et fier, il ne semblait pas particulièrement souffrir de la chaleur. Quelques rares mèches d’un noire de jais s’échappaient de sous son capuchon et caressaient ses épaules au rythme de la chaude brise du désert.

Le prince d’Aleria avait quitté quelques jours plus tôt l’immense ville scintillante qu’était Nyma. Les hautes tours de la Capitale s’étaient fièrement dressées sur l’horizon de longues heures durant après leur départ, défiant le soleil de toute leur hauteur. Elles avaient semblé si proches, et pourtant Seth le savait, la belle cité se trouvait déjà à une journée de chevauchée lorsqu’elles avaient enfin disparu. Si proche et pourtant si loin.

La lune, quant à elle, flirtait avec les dunes et donnait la chasse à l’astre du jour qui partait déjà se cacher de l’autre côté du ciel.

A l’exact opposé se profilait un horizon nettement moins agréable. Une immense barrière ocre barrait le ciel, et avançait toujours plus vite dans leur direction. Le bruit assourdissant du vent qui fouettait le vide et charriait le sable leur arrivait déjà, preuve de l’immensité du phénomène. La tempête s’annonçait violente.

Ils avaient quitté Nyma depuis trop longtemps déjà pour espérer pouvoir faire demi-tour à temps. Ils en étaient réduits à chercher un abri au beau milieu du désert, là où même une ombre était un miracle. Chaque dune pouvait dissimuler une cache potentielle, et ils n’avaient pas le temps de grimper au sommet de chacune d’entre elles pour voir ce qui se cachait derrière.

Il y avait deux cavaliers plus en avant de la tempête qui arrivait également dans leur direction. On ne voyait d’eux que deux trainées de poussière à la progression rapide. Ils distançaient avec beaucoup de peine la masse d’air. Dans moins de cinq minutes, ils seraient sur eux.

— Prenons le même chemin qu’eux. S’il n’y avait rien dans les environs, ils se seraient déjà arrêtés.

L’ordre avait claqué, suffisamment fort pour couvrir le bruit naissant de la tempête. Ils allaient bon train mais avançait pourtant moins vite qu’ils n’auraient dû. Seth souhaitait laisser aux deux cavaliers le temps d’arriver à leur hauteur afin de s’assurer qu’ils ne se dirigeaient pas n’importe où. Il leurs faudrait un peu de temps, ils le savaient, mais il n’était pas totalement fou au point de se jeter à corps perdu vers l’inconnu.

Le vacarme de la tempête s’empara bien vite d’eux, noya les quelques mots que les soldats s’adressaient ainsi que les échanges inquiets dans les carrosses pour plonger la procession dans un mutisme inquiétant. Malgré tout, Seth avait vu les deux silhouettes arriver à leur niveau et se porter à leur rencontre.

— Suivez-nous !

Ils n’avaient pas ralenti et entraînaient maintenant avec eux les montures de la caravane. Les chevaux piaffaient de peur face à la tempête de sable qui avançait inexorablement vers eux. La voix avait résonné au-dessus des rafales, assez forte pour être entendue de tous. Lui n’avait rien eu à dire pour que ses hommes suivent, l’injonction étant suffisamment claire pour tous.

Il n’aurait su dire dans quelle direction ils se dirigeaient exactement. Il sut en revanche qu’ils n’étaient pas loin du but recherché lorsqu’ils se mirent à gravir l’une des immenses dunes recouvrant l’horizon. Les montures montraient déjà des signes de fatigue, sans parler de celles de leurs guides qui écumaient sous l’effort intense qu’elles fournissaient. Mais leurs cavaliers les poussaient toujours plus sans céder le moindre centimètre à la nature qui les poursuivait.

Et finalement, une fois qu’ils eurent atteint le sommet de l’immense monticule de sable, l’horizon leur offrit le spectacle le plus saisissant qu’ils n’aient vu depuis bien longtemps.

Non loin de leur position s’élevait une falaise dans laquelle avait été taillée une fantastique statue de pierre. Il n’y avait rien d’autre que la roche brute et unicolore pour orner le magnifique visage de la représentation, et pourtant cela n’enlevait rien à sa grandeur ni même à sa beauté.

C’était ce genre d’endroit - à la vue de tous mais pourtant caché par la grandeur du désert - qui rendait le territoire si riche et complexe. Le colossal temple du désert appartenait à la famille royale de Renis. Un joyau qu’ils n’avaient jamais cédé à qui-que-ce-soit, préservant jalousement ses secrets, car on disait que seuls ses membres pouvaient le trouver.

On lui en avait longuement parlé. Evidemment la rumeur était devenue une légende et gardait le lieu loin de toutes activités humaines. On disait bien après tout que personne n’entrait dans le bâtiment sans une bonne raison. A moins de ne pas vouloir en sortir indemne.

Ils pénétrèrent en catastrophe dans l’immense bâtisse, toujours perchés sur leurs montures. Les carrosses furent abandonnés à l’extérieur et leurs occupants se précipitèrent à leurs suites. Les palefreniers prirent tout de même le temps de détacher les chevaux avant d’entrer à leur tour.

Personne ne prit le temps de noter la beauté des lieux.

Les plafonds étaient hauts, si hauts qu’on ne pouvait les voir. La pénombre les engloutissait bien avant que la lumière ne les touche. Les parures qui décoraient les murs racontaient mille et une histoires, et les fils d’or qui les composaient ne pouvaient que mieux retranscrire chacune d’elle. Les tapis au sol étaient d’une facture remarquable, faisait honneur aux artisans Renissiens et à leur talent mondialement reconnu. Rien dans ces lieux n’était réellement ostentatoire même si le luxe était bien présent. Mais la moindre pièce décorant le bâtiment faisaient écho à sa beauté et à sa grandeur, mais accentuaient l’impression de solennité que tous ressentaient.

Et au dehors, la tempête faisait rage. Les immenses portes de pierres que les soldats venaient de repousser ne grinçaient même pas devant la force du vent, gardiennes des lieux, plus sûres que n’importe quels soldats.

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