Chapitre 44 - La fin des ténèbres

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Chacun d'entre eux était légèrement blessé malgré les soins que Jaelith leur avait prodigués. La lumière de la jeune femme se dissipa rapidement des yeux du dragon qui semblait encore plus en colère. Une gerbe de flammes sortit de sa gueule, manquant de peu le petit groupe. La jeune femme fit à nouveau appel à la lumière qui pénétra l'épée qu'elle portait. Sans attendre un instant de plus, elle se lança sur son adversaire, évitant les coups, tentant elle aussi d'atteindre sa gorge, ou du moins, la seule partie qu'elle pouvait transpercer. Mais Varen Draze avait l'œil sur tous. D'un revers de patte, elle la repoussa en arrière. Jaelith manqua de tomber à terre. Freyki fonça à son tour, suivit de près par Elrynd. Ils furent rapidement repoussés.

Feiyl se maudissait. Si seulement il était un véritable dragon comme celui qui se tenait devant lui... Il pourrait rivaliser avec. Mais il était encore trop jeune. S'il reprenait sa véritable forme, il ne serait qu'un dragonnet inutile... Il pensa qu'il pourrait peut être utilisé la lumière lui aussi, mais secoua la tête. La lumière ne lui avait jamais répondu. Alors à quoi servait-il dans cette bataille ? Que pouvait-il faire pour aider ses amis ?

Freyki s'était relevé face au dragon noir qui ouvrit la gueule en reprenant son souffle. Le souverain se tourna vers Elrynd, mais ce dernier se trouvait encore à terre. La flamme arrivait droit sur lui. Cette fois, il n'y aurait pas de miracle. Elrynd n'aurait pas le temps de le protéger. Le roi loup ferma les yeux, attendant ce qui allait être la mort. Mais rien ne vint. Lorsqu'il les rouvrit, il vit quelqu'un devant lui. Une petite silhouette, frêle. Un cri sans fin, d'une voix claire, hantait ses oreilles.

— Non.

Il ne voulait pas que ce soit ça. Il ne voulait pas que quelqu'un se sacrifie pour lui. C'était la pire des choses qui pouvaient arriver. Les flammes disparurent, et le corps tomba à terre. Il se précipita sur lui et découvrit avec stupeur qu'il s'agissait de Feiyl. Ce dernier était assez mal en point. Il avait de multiples brûlures sur tout le corps. Il était en vie. Il s'accrochait à la vie. Freyki hurla à Jaelith, qui venait de se relever, de s'occuper de lui. Sans attendre plus longtemps, elle avait foncé vers le petit corps, l'inondant de lumière. Elle mettait tout ce qu'elle pouvait pour le sauver. Car elle ne voulait pas le perdre. Feiyl, un léger sourire sur son visage crispé par la douleur, semblait fier de lui.

Freyki se releva, un immense sourire carnassier sur le visage. Ses yeux noirs ne reflétaient plus que haine et colère. Ils se posèrent sur la créature, puis d'une voix froide, il hurla :

— Tu vas payer. Tu vas payer pour tout ce que tu as fait !

Varen Draze se rapprocha. Tout s'était passé rapidement. Freyki fonça sur son adversaire. Le dragon allait l'envoyer à terre d'un coup de patte bien placé, mais quelque chose attira son attention sur sa gauche. C'était Elrynd, qui fonçait lui aussi sur la terrifiante créature. Varen Draze fonça sur ce dernier, toute gueule devant.

Puis une horrible douleur le pris à la gorge. L'homme à la cicatrice venait d'y enfoncer son épée jusqu'à la garde. Il la fit remonter de toutes ses forces vers le museau du dragon noir, mais ce dernier le secoua si fortement qu'il tomba à terre quelques mètres plus loin.

Jaelith, qui était toujours penchée sur Feiyl, sentait sa lumière diminuer. Les brûlures sur le corps du petit dragon disparaissaient à vue d'œil. Elle leva la tête vers Varen Draze qui hurlait de douleur. Sa gorge, qu'il avait protégée jusque-là, venait enfin d'être atteinte. Pourtant, quelque chose n'allait pas. La jeune femme plissa les yeux pour y voir plus clair. Ce n'était pas du sang qui coulait de la blessure du dragon. C'était autre chose. Une chose qui la fit frissonner alors qu'elle ne savait même pas ce que c'était réellement. Varen Draze tomba à terre, secoué par de multiples tremblements. Un liquide noir comme la nuit coulait de sa blessure. Freyki et Elrynd reculèrent.

— Qu'est-ce que c'est que ça ?

La voix du paladin tremblait. Il ressentait les ténèbres.

— Je n'en sais rien. C'est... Bizarre...

Freyki n'avait aucune idée de ce que cela pouvait être, mais quelque chose lui disait de s'éloigner le plus loin possible. Jaelith laissa Feiyl, qui venait de s'endormir, à terre. Elle rejoignit les deux hommes près du cadavre, paniquée.

— Je sens les ténèbres. C'est ce pouvoir que les dragons noir ont obtenu ?

Elle avait posé la question sans attendre de véritable réponse. Le cadavre du dragon fondit rapidement, emporter par le liquide noir qui s'en échappait. Il ne restait désormais de Varen Draze qu'une énorme flaque noire. Le dragon était mort, mais quelque chose n'allait pas. Chacune des personnes présentes le ressentait au plus profond d'elle-même.

— Qu'est-ce que c'est que ce sang noir ?

Cette question que Jaelith n'aurait pas de réponses. Tous fixaient cette énorme flaque à l'odeur nauséabonde. Quelque chose y bougea. Une patte griffue qui ressemblait à celle d'un dragon semblait en sortir, très vite suivie d'un bras, puis d'une tête étrange, allongée, dont quatre longues cornes sortant du front en une courbe élégante, d'un corps imposant. La sombre silhouette possédait deux yeux rouges qui brillaient comme des flammes. Une silhouette sombre leur faisait face, ressemblant étrangement à la créature que Jaelith et Freyki avaient combattue dans les sous-sols de la cité. Une horrible voix caverneuse retentissait.

— Le dragon a échoué. Pourtant, la puissance que je lui aie offerte aurait dû lui permettre de mener à bien ses projets...

— Qui êtes-vous ?

La voix peu assurée de Freyki lui avait lancé la question sans attendre plus longtemps. La créature n'avait pas de visage. Elle absorbait la flaque de sang noire qui se trouvait au sol. Et au bout de quelques secondes, le sang avait disparu.

— Qui je suis ?

L'horrible créature leva les bras au ciel.

— Je suis les ténèbres qui ont été offertes par la déesse au cœur de Varen Draze. Je suis ce qui a entretenu sa haine pendant toutes ses années. Je suis celui qui lui a offert ses pouvoirs, à lui et à sa famille. Je suis sa noirceur d'âme. Voilà ce que je suis. Et vous...

Le monstre ténébreux fonça sur Freyki, l'enserrant de toutes ses forces entre ses immenses bras. Le roi loup ouvrit la bouche pour hurler, mais aucun son n'en sortit. C'est à peine s'il arrivait à respirer. La morsure des ténèbres était atroce, il lui semblait qu'elle lui dévorait les entrailles petit à petit. Une sensation horrible, insoutenable. Cette impression de brûler de l'intérieur, à petit feu. Il sentait que ses forces l'abandonnaient, petit à petit. Sa vue se brouillait, et c'est à peine s'il entendit la voix lui murmurer :

— Laisse toi aller aux ténèbres. Donne-moi ton âme.

La lumière frappa les ténèbres de plein fouet. Il y eut un hurlement inhumain, et elles relâchèrent le roi loup qui tomba à terre, le cœur battant à cent à l'heure. Alors, c'était cela les ténèbres ? C'était cela que vénéraient les membres du culte des ombres ? C'était cela qui donnait vie aux êtres terrifiants comme Varen Draze ?

La voix maléfique semblait venir de partout à la fois.

— Je vais vous broyer dans les ténèbres. Je vous dévorerais chacun, et je prendrais vos âmes pour les offrir à la déesse.

— Alors viens au lieu de continuer à parler !

La voix de Jaelith était furieuse. La lumière qui était en elle ne serait peut-être pas suffisante pour mettre fin aux agissements des ténèbres, mais il fallait qu'elle essaye. Elle avait peur. Les ténèbres s'avancèrent vers elle, et la jeune fille appela la lumière qui lui répondit en l'enveloppant dans sa chaleur protectrice. Pourtant, lorsque les ténèbres frappèrent son épaule, une entaille profonde s'y forma, détruisant une partie de son armure. Mais Jaelith, portée par la colère, n'y avait même pas fait attention. L'épée qu'elle portait, celle de Feiyl, s'illumina et pénétra dans le corps des ténèbres, l'engloutissant petit à petit. La jeune femme sentait ses forces l'abandonner. La lumière allait disparaitre, et il ne fallait en aucun cas que cela ne se produise. Puisant dans es dernière réserves, elle réussit à faire passer au travers de son arme toute la lumière qui lui restait. Les ténèbres s'effritaient rapidement, et dans un long cri d'agonie, elles disparurent dans la lumière.

Elle tomba au sol, épuisée, blessée. Elle venait de se rendre compte que son armure avait été partiellement détruite, et du sang coulait le long de son bras. Freyki la rattrapa avant qu'elle ne touche le sol et l'allongea doucement.

— Est-ce que ça va ?

— Oui...

— On va te soigner. Tu as réussi à vaincre les... Ténèbres...

— Non.

La voix de la jeune femme était lasse. Le roi loup ne comprenait pas.

— Mais pourtant...

— Les ténèbres sont partout. Elles ne mourront jamais totalement.

Jaelith essaya de se relever. Les jambes tremblantes, elle retomba presqu'aussitôt à terre. L'homme à la cicatrice la força à s'allonger.

— C'est fini. Repose-toi.

La voix de Freyki était douce, mais ferme. Jaelith secoua doucement la tête.

— Laisse-moi...

— Jamais. Plus jamais je ne te laisserais.

Elle ferma alors les yeux, et ce furent les dernières paroles qu'elle entendit avant de tomber inconsciente.

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