Chapitre 43 - L'affrontement

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Tandis que le groupe d'humains prenait la direction du port, un autre dragon les attaqua. Des deux côtés, il y avait eu de nombreuses pertes. Les dragons étaient ceux qui avaient le plus perdu au final, car les humains restaient nombreux. Freyki serra son épée et fonça, exécutant plusieurs arabesques, évitant les coups de la créature. Le combat était une manière pour lui de revivre. Son attaque était si parfaite qu'au bout de quelques minutes, le dragon gisait au sol, gorge tranchée.

Plus que quelques centaines de mètres, et le roi loup la rejoindrait enfin... Enfin... Il courait à en perdre haleine, à travers les rues de la cité. Derrière lui, ses camarades le suivaient avec beaucoup de mal.

Une ombre imposante passa au-dessus d'eux, et Freyki entendit un cri qui le glaça d'effroi. Il releva la tête et reconnu le terrifiant dragon qui avait juré sa mort. Le cri qu'il avait entendu, cette voix qu'il connaissait plus que tout... Il l'avait aperçu, petit être emprisonné entre les griffes de l'horrible créature, et murmura son nom, la colère montant rapidement en lui.

— Jaelith.

Elle hurla à nouveau. Cinq hippogriffes tentèrent d'attaquer Varen Draze. Mais ce fut un échec cuisant. D'un souffle, il les brûla vifs avec leurs cavaliers. Continuant de tourner au-dessus de la cité, à la vue de tous, il hurla d'une puissante voix rauque :

— Il est temps de mettre fin à vos misérables vies !

Il souffla sur le quartier commerçant, en brûlant une bonne partie. La plupart des paladins et guerriers qui se trouvaient là s'éparpillaient dans la cité, cherchant à sauver leurs propres vies. Si les jeunes dragons n'avaient pas posés trop de problèmes, celui-ci, c'était une toute autre histoire.

L'homme à la cicatrice hurla de rage devant l'horrible spectacle qui se déroulait sous ses yeux. Il se sentait impuissant devant cette destruction massive. Près de lui, l'un des membres de la garde ailée se posa. D'une voix mal assurée, et avec beaucoup de mal étant donné qu'il ne connaissait que quelques mots du langage humain, il demanda :

— Roi... Que nous doive faire ? Abandonner ? Dragon très puissant. Rempli de ténèbres.

Freyki secoua la tête. Abandonner ? Jamais de la vie ! Ce dragon devait payer pour toute la misère qu'il avait apportée, pour toutes les vies qu'ils avaient détruites. Il fit signe au cavalier de descendre de sa monture et prit sa place.

— J'en ai besoin quelques minutes, le temps d'arriver jusqu'à ce monstre.

Et avant que l'elfe n'ait le temps de répliquer quoi que ce soit, le roi loup s'envola vers sa proie.

***

Sa respiration s'affaiblissait au fur et à mesure que les secondes passaient. Elle commençait déjà à y voir flou autour d'elle. Elle sentait qu'elle allait sombrer dans l'inconscience dans les minutes à venir si elle ne faisait pas quelque chose. Jaelith avait vu une forme s'approcher du dragon, mais ne savait pas ce que c'était exactement. Ses yeux se fermèrent, lentement, et tout devint noir.

Varen Draze, dans sa folie, n'avait pas fait attention à la petite créature qui arrivait derrière lui. Cette dernière prit de l'altitude, jusqu'à ce retrouver au-dessus du dragon noir. Freyki n'avait pas peur de mourir. Il s'était de nombreuses fois préparé à cette éventualité.

Il se laissa tomber sur le dos du dragon, abandonnant l'hippogriffe qui redescendit vers la terre ferme retrouver son maitre. Varen Draze n'avait pas fait attention, trop occupé qu'il était à saccager la cité. Il n'avait pas senti le roi loup remonter lentement le long de son dos. Il avait compris que quelque chose n'allait pas au moment où une terrible douleur se fit ressentir au niveau de son aile gauche. Il avait rapidement tourné la tête vers l'arrière pour découvrir que son pire ennemi venait de lui lacérer une aile. Et ce dernier continuait de plus belle. Le dragon noir tourna sur lui-même plusieurs fois afin de faire tomber l'opportun. En vain. Ce dernier s'accrochait de toutes ses forces aux écailles noires qui couraient dans le dos du reptile. Son épée, qu'il serrait à s'en faire blanchir les phalanges, s'enfonça encore dans l'aile gauche. D'un grand geste, il perça la membrane d'un immense trou. Varen Drazen arrivait plus à contrôler son vol.

***

Feiyl et Elrynd venaient de rejoindre le seigneur Gareth. Ce dernier leur demanda quelles étaient les dernières nouvelles. Le capitaine, légèrement inquiet, prit la parole.

— La plupart des dragons sont tombés, mais il reste toujours Varen Draze. Il détruit la cité petit à petit...

— Il n'y a vraiment aucun moyen de le vaincre ?

Gareth n'eut pas de réponse. Le jeune homme et le petit dragon regardaient le ciel, les yeux écarquillés de stupeur. Le dragon noir tombait. Il luttait contre quelque chose ou quelqu'un, et tombait vers le sol. Sans se préoccuper de son supérieur qui continuait à lui demander ce qui se passait exactement, Elrynd attrapa le premier cheval qui se trouvait là et, accompagné de Feiyl, tous deux suivirent le terrible dragon jusqu'à son point de chute. Ils sortirent rapidement de la cité, et se dirigèrent vers le grand lac. Une fois arrivé à destination, il n'y avait rien. L'eau du lac, d'habitude si calme, était perturbée. Plusieurs ondes circulaires se propageaient à partir du point d'impact. Varen Draze devait se trouver au fond du lac. Elrynd descendit de monture, très vite suivit par Feiyl.

— Il est mort ?

La voix du capitaine tremblait lorsqu'il se tourna vers son camarade.

— Je sens encore quelque chose, mais je suis incapable de préciser ce que c'est exactement.

Le petit dragon ne bougeait pas ses yeux dorés de la surface de l'eau. Il s'approcha alors lentement, scrutant à la recherche de quelque chose, ou de quelqu'un. Soudain, une main gantée sortit de l'eau pendant quelques secondes avant de s'y enfoncer à nouveau. Feiyl, qui portait une simple armure en cuir se jeta à l'eau. Il ne lui fallut que quelques instants pour attraper cette main qu'il connaissait. Il avait remonté Freyki, inconscient, à la surface, et le ramena près du bord où Elrynd le hissa. Le capitaine observa rapidement son souverain, mais ne décela aucune blessure sérieuse. Il le secoua doucement pour le réveiller.

Avec difficulté, l'homme à la cicatrice ouvrit les yeux et se releva. Son regard se porta immédiatement sur le lac et il repensa immédiatement à Jaelith. Cette dernière se trouvait encore dans les griffes de Varen Draze lorsqu'ils étaient tombés dans l'eau. Freyki hurla le nom de la jeune femme. Elrynd ne comprenait pas.

— Elle va bien ! Elle doit sûrement être à la cité, comme la plupart...

— Non ! Elle était là !

Le roi loup s'approcha de l'eau et continua :

— Elle était là ! Il la tenait ! Elle va se noyer si je ne vais pas la sauver !

Il allait se jeter à l'eau, mais le capitaine lui attrapa le bras, l'empêchant de faire un pas de plus.

— C'est trop tard ! C'est déjà un miracle que nous ayons pu vous retrouver en vie majesté. Mais il est trop tard...

Freyki repoussa violemment le paladin qui manqua de tomber au sol. Il se tourna vers Feiyl, les yeux remplis de tristesse et de colère, et lui demanda d'une voix sèche :

— Elle est morte ?

Le dragonnet trembla et secoua la tête.

— Je ne sais pas.

— Comment ça tu ne sais pas ? Je croyais que tu pouvais sentir sa présence sans aucun problème !

Il secouait l'adolescent, lui serrant les épaules à lui faire mal. Feiyl n'avait jamais vu le souverain agir ainsi avec lui. Il l'avait déjà sermonné lors de l'attaque sur la montagne noire, mais là... C'était autre chose. Il avait peur.

— Il y a quelque chose au fond du lac. Mais je ne sais pas si c'est Jaelith ou le dragon noir... On dirait autre chose.

Ce fut la seule réponse qu'il fut capable de dire devant cet homme qui lui inspirait une terrible peur à cet instant. Freyki le relâcha et leva les yeux au ciel. Il repensa à son aimée, et s'en voulait de ne pas lui avoir dit tout ce qu'il avait sur le cœur avant qu'elle ne disparaisse. Il sentit quelque chose couler le long de ses joues : c'étaient des larmes.

***

C'était le noir complet autour de la jeune femme. Jaelith était incapable de respirer. Pourtant, elle se sentait bien. Elle avait l'impression de flotter. Quelque chose l'attrapa délicatement, l'enserrant avec une grande douceur. Quelque chose la ramenait à la surface, mais elle ne se réveillait pas pour autant.

La tête de Varen Draze apparut à la surface de l'eau dans un hurlement inhumain. La créature remonta sur les bords du lac, à une centaine de mètres des trois hommes. Sa tête se tourna immédiatement vers le roi loup. Sa voix rauque murmura :

— Toi... Je vais te faire souffrir comme jamais auparavant...

Freyki n'avait pas relevé les paroles de la terrifiante créature. Ses yeux s'étaient posés sur ce qu'elle tenait dans l'une de ses pattes. Une silhouette inerte qu'il reconnaitrait n'importe où. Les longs cheveux dorés de Jaelith étaient trempés, et sa respiration était très faible. Varen Draze la posa sur le sol avant de s'avancer vers ses autres proies. Sans se tourner vers Elrynd, l'homme à la cicatrice ordonna, tendant la main vers lui :

— Donne-moi ton épée.

Le capitaine avait obéit. Le dragon noir était blessé, mais ne pourrait plus prendre la fuite en s'envolant. Il était contraint à rester au sol pour se battre. Prenant l'épée du paladin à deux mains, Freyki s'approcha de son ennemi, les yeux rivés sur la jeune femme allongée à terre.

— Je vais t'égorger comme je l'ai fait avec les membres de ton clan...

Feiyl eut un mouvement de recul. La voix de Freyki était dénuée de tous sentiments. S'il voulait faire peur, alors il y était arrivé. Agrippant sa petite épée en tremblant, le petit dragon resta aux côtés du paladin. Varen Draze hurla, ce qui fit sortir le roi loup de son étrange transe. Le monstrueux animal fonçait vers son adversaire. Freyki esquiva sans aucun mal la gueule grande ouverte du dragon et tenta de se glisser prêt de sa gorge. Varen Draze le repoussa sans aucun problème, et l'homme à la cicatrice recula, se protégeant comme il pouvait. L'horrible voix du dragon résonna à ses oreilles, froide, inhumaine.

— Meurs ! Meurs ! Meurs !

Il répétait ses paroles, comme si il s'agissait d'une invocation capable de terrasser l'humain qui se tenait devant lui et qui luttait de toutes ses forces pour survivre. L'animal utilisa ses griffes, que Freyki esquiva sans mal. Lui, riposta immédiatement avec une pluie de coups, mais qui ricochèrent tous sur les écailles quasi indestructibles. Il n'y avait pas trente-six manières de venir à bout d'un dragon. Le souverain l'avait bien comprit. Il fallait qu'il trouve le moyen d'approcher la gorge de son ennemi et de lui enfoncer son épée au plus profond.

Varen Draze ouvrit grand la gueule. Freyki crut qu'il allait tenter de l'attraper entre ses mâchoires et le briser en deux, mais ce n'était pas ça. D'un coup de museau, il projeta son adversaire qui s'écrasa contre un arbre. La douleur fit grimacer le roi loup tendit qu'il se relevait. Arme à la main, la douleur dans les épaules était supportable, il se mit à courir vers le dragon noir. Chacun des deux adversaires mettait toute son énergie dans cette terrible bataille.

***

Les bruits d'épée qui frappe, des cris, des hurlements, le sol qui tremble... Jaelith ouvrit les yeux à son tour et se releva, lançant un regard perdu autour d'elle. Que s'était-il passé ? Elle se souvenait avoir été entre les griffes de Varen Draze, puis le noir complet. Elle se releva, manquant de tomber tant ses jambes tremblaient, puis observa le combat qui avait lieu non loin de la position où elle se trouvait.

Les prunelles du roi loup reflétaient toute la haine qu'il portait pour son adversaire. Malgré les coups qu'il prenait, il ne renonçait pas. A chaque fois, malgré la douleur, il revenait au combat toujours plus fort, plus hargneux. Face à lui, Varen Draze s'énervait de ne pouvoir réussir à tuer ce petit humain qu'il haïssait de toute son âme. Ce dernier hurla à nouveau :

— Rien ne pourra m'empêcher d'obtenir votre mort !

Le sol trembla. Freyki avait du mal à tenir debout. Non loin de là, Elrynd et Feiyl s'approchaient. Ils ne voulaient pas rester les bras croisés sans rien faire. Et même si le capitaine n'était pas vraiment d'accord, il ne pouvait pas laisser Feiyl derrière lui. Le petit dragon voulait se battre. Il voulait faire quelque chose pour changer le destin. Il avait décidé, et personne ne le ferait changer d'avis.

Le dragon noir prit son souffle. Haletant, Freyki se demandait s'il arriverait à échapper à ce déluge de flammes à temps. Les flammes s'approchaient à une grande vitesse. Le roi loup leva son épée au-devant lui, prêt à encaisser de son mieux. Une sphère lumineuse apparut, et à ses côté se tenaient Feiyl et Elrynd. Le paladin maintint la protection magique jusqu'à ce que le dragon cesse de cracher des flammes.

— On ne peut pas vous laisser vous faire tuer aussi facilement majesté. Jaelith ne nous le pardonnerait jamais.

La voix d'Elrynd, bien qu'elle tremblât légèrement, se voulait rassurante. Freyki n'était pas seul pour ce combat. Il n'était pas seul et ne le serait pas. Varen Draze, exaspéré, fonça vers le petit dragon qui lui semblait être la proie la plus simple à éliminer. Feiyl esquiva rapidement les coups, reculant de plus en plus. Le dragon détruisit les quelques arbres qui se trouvaient là. Freyki, qui tenta une nouvelle fois de se glisser près de sa gorge, fut renvoyé au sol d'un coup de patte, tout comme Elrynd. La gueule du dragon n'était plus qu'à quelques mètres de Feiyl. Ce dernier serra son épée de toutes ses forces et donna un coup sur le museau de son adversaire. Coup qui fut inutile. Varen Draze ouvrit grand sa gueule. Il allait briser son ennemi entre ses mâchoires.

Une forme humaine s'interposa, attrapant l'épée de l'adolescent au passage. Feiyl voyait la silhouette de dos, mais la reconnut instantanément. C'était Jaelith. Elle donna un grand coup d'épée sur le museau de la créature qui recula, surprise. D'une voix claire, elle appela la lumière :

— Lumière, ferme les yeux de ce dragon et éclaire son cœur.

A l'instant même où elle acheva sa phrase, une lumière vive semblait s'insérer dans les yeux du dragon noir qui secoua la tête en hurlant. La jeune femme attrapa Feiyl par le bras, et tout deux coururent vers leurs camaradent qui se trouvaient à terre.

— J'espère que je n'arrive pas trop tard...

Freyki, qui se trouvait allongé sur le sol, avait reconnu la voix. Il avait senti qu'on le prenait doucement dans les bras. Une douce chaleur l'entourait tendit qu'il ouvrit à nouveau les yeux.

— Jaelith...

Un léger sourire apparut sur son visage, mais elle ne lui avait pas répondu. Les blessures de Freyki se refermèrent d'elles même. Ce dernier se releva lentement, et observant leur adversaire, il murmura à la jeune femme :

— Il n'est pas comme les autres dragons...

— Je sais.

— Tu pourrais te faire tuer...

— Je sais.

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