Chapitre 4 - La mystérieuse femme paladin

6 minutes de lecture

Jaelith se leva enfin et s'étira en baillant. Elle frotta ses yeux embués par le sommeil, et se dirigea vers la fenêtre de sa chambre pour l'ouvrir. Une douce brise lui caressa le visage, et les rayons du soleil lui réchauffèrent le corps, alors qu'elle regardait le jardin fleuri qui s'étendait un peu plus bas. Le printemps s'était bien installé.

Elle était bien ce matin, mais elle se détourna vers le lit, et ce sentiment, toujours le même, la submergea. Une bouffée de tristesse. Et comme tous les matins, elle se força à sourire, à ne pas pleurer, à ne pas y repenser. Jaelith respira un grand coup. Ne pas penser.

Elle se lava rapidement dans la petite salle d'eau puis s'habilla. Lorsqu'elle passa devant son miroir, elle arrangea ses cheveux, puis sortit rapidement. Jaelith n'allait pas avoir le temps de prendre un petit déjeuner, comme très souvent ses derniers temps.

Silverlake était une grande ville, beaucoup plus grande qu'Aesina. Elle se trouvait autour d'un grand lac, et pouvait prétendre être une des villes les plus sûres du royaume. C'était aussi la patrie de ceux qui suivaient la voie de la lumière. Les paladins. Jaelith avait rapidement été acceptée parmi eux. Elle avait même commencé son apprentissage afin de devenir paladin. Comme sa mère avant elle.

La jeune femme courait à travers les longs couloirs afin de rejoindre la terrasse où l'attendait le capitaine Elrynd Kervalen. C'était cet homme qui lui avait tout appris depuis son arrivée il y a deux ans. Elle lui devait beaucoup.

Jaelith était encore en retard et il n'allait pas manquer de le lui dire.

— En retard comme d'habitude.

Elrynd Kervalen n'était pas vraiment plus vieux que la jeune femme. Il avait vingt-neuf printemps et était extrêmement doué dans l'art d'utiliser son épée. Il n'était donc pas étonnant qu'il soit déjà capitaine à son âge. Jaelith en était persuadée. Honteuse, cette dernière baissa la tête.

— Je suis désolée mon capitaine.

— Alors commençons sans plus attendre.

Il tira son épée de son fourreau, et elle fit de même.

Jaelith donna une fois de plus le premier coup, puis un autre, ils étaient tous deux parés. Aucun n'arrivait à toucher l'autre, Ils paraient, évitaient, contre-attaquaient. Les deux adversaires étaient maintenant immobiles, le premier qui bougeait perdrait son avantage, le premier qui bougerait, perdrait. Jaelith leva son épée. Trop tôt.

Elrynd lui donna un coup qui la fit retomber lourdement sur le sol. Elle se releva, honteuse d'avoir laissé passer cette occasion.

— Tu es trop distraite Jaelith. Si tu te concentrais un peu plus, tu pourrais me battre sans aucun problème.

— Vous dîtes ça juste pour me faire plaisir capitaine.

— Je le pense vraiment. La voie de la lumière t'est toute tracée. Mais il faut vraiment que tu fasses des efforts.

— Oui, mon capitaine.

***

Ainsi se passaient le plus souvent les journées de la jeune femme. Entrainement au lever du jour, prières collective dans la grande chapelle, apprentissage de la voie de la lumière... Jaelith se sentait bien ici. Mais il lui manquait quelque chose.

Souvent, elle se laissait aller à se promener dans les rues de Silverlake sans but précis, mais se rendait toujours, au final, sur les rives du lac. Elle cherchait la solitude pour pouvoir laisser ses larmes couler. Son cœur s'était brisé une fois lorsqu'on lui avait annoncé la mort de sa mère. Et il s'était brisé une seconde fois lors de la mort de son père, assassiné sous ses yeux... Et elle avait laissé libre cours à sa peine cet après-midi-là, quand une voix familière l'interpella.

— Et bien Jaelith, qu'est-ce qu'il vous arrive de si grave pour vous morfondre toute seule ici ?

La jeune femme se retourna et vit Alma qui revenait de chez l'herboriste. Elle portait un panier rempli d'herbes médicinales. Jaelith s'essuya alors les yeux, honteuse d'avoir laissé paraitre cette faiblesse de sa part. Elle se releva puis lança un léger sourire à la prêtresse.

— Il n'y a rien... Rien du tout, Dame Alma.

— Vos yeux sont encore mouillés de larmes, cessez donc de me prendre pour une idiote. Je suis peut être âgée, mais je n'ai pas encore perdu la tête. Dites-moi ce qui vous met dans cet état.

— Je repensais... Au passé...

Il y eut un long silence. Alma savait très bien ce qui était arrivé à la jeune fille le jour même où elle avait posé le pied dans l'académie des Paladins. Elle savait qu'elle avait assisté à l'une des pires choses possible et imaginable. Pourtant, Jaelith donnait l'impression d'aller bien lorsqu'elle se trouvait avec ses camarades. Alma se doutait très bien qu'elle cachait en elle une profonde tristesse.

— Jaelith... Vous avez le droit d'être triste. Ne vous forcez pas à sourire pour ne pas inquiéter vos camarades. Personne ne vous en voudra si vous vous laissez aller à pleurer une fois de temps en temps. Nous savons tous ce que vous avez vécu par le passé. Qui pourrait vous blâmer ?

— Je la sais, mais... On attend tellement de moi... Je sais très bien que je suis la fille de Palia Librevent, la célèbre femme paladin. Mais il n'y a pas eu qu'elle... Si ?

— Non, effectivement. Palia n'était pas la seule.

Alma avait posé son panier sur l'herbe fraîche et s'était assise, faisant signe à Jaelith d'en faire autant, ce que cette dernière fit.

— Non, Palia n'était pas la seule femme paladin. Il y en a eu quelques-unes, mais la plupart n'ont pas supporté les moqueries de leurs camarades et se sont faites prêtresses. Comme moi.

Jaelith écarquilla les yeux. Bouche-bée, elle eut bien du mal à prononcer :

— Comme... Vous ? Vous étiez paladin ?

— Absolument. Même si mes pouvoirs me permettaient de soigner mes camarades, je me défendais pas mal à l'épée à cette époque. J'étais déjà une femme mûre quand j'ai intégré l'académie des paladins à cette époque... Palia n'était encore qu'une adolescente.

— Quel âge avait-elle ?

— Elle disait qu'elle avait dix-sept ans, mais je la soupçonnais d'avoir au moins trois ans de moins.

— Elle était si jeune que ça ?

— Oui Jaelith. Une petite adolescente qui avait fui sa famille pour se réfugier à l'académie. Elle n'a jamais voulu parler de son passé à quiquonque.

Jaelith, en y repensant, n'avait jamais posé de questions à ses parents sur leurs origines. Ils l'aimaient, elle les aimait. C'était tout ce dont elle avait besoin. Mais les paroles d'Alma avaient éveillés en elle la curiosité.

— Alors... Il n'y a que ma mère qui soit finalement devenue paladin ?

— A Silverlake ? Oui...

— Ca veut dire qu'il y'en a d'autres... Ailleurs ?

— Et bien, Jaelith, je suppose que le seigneur Libram vous a déjà raconté comment votre mère...

La jeune femme acquiesça d'un léger signe de tête. Alma continua.

— Il vous a sûrement parlé de cette guerrière aux cheveux dorés qui a sauvé le prince à l'époque, non ?

— Le seigneur Gareth a effectivement mentionné cette personne mais sans m'en dire vraiment plus...

— Cette femme était apparemment un paladin. Mais personne ne l'avait jamais vu avant. Moi-même je ne sais pas à quoi elle ressemblait. Je sais juste ce dont le seigneur Libram m'a parlé. Une femme paladin, que personne ne connaissait, et qui ne venait pas d'ici, de Silverlake... Ne trouvez-vous pas cela étrange Jaelith ?

— Il n'est pas possible que quelque part se trouve un autre endroit où s'entrainent des paladins ?

— Il y a des personnes qui viennent d'autres horizons pour entrer dans cette académie. Et il n'y a pas d'autres endroits connus pour former les apprentis à la lumière.

— Dame Alma, quel était le nom de cette femme ?

La prêtresse secoua la tête.

— Je ne le sais pas. Mais peut être que le seigneur Libram pourrait vous répondre ?

Jaelith se releva, des tonnes de questions l'assaillaient. Mais personne ne pourrait lui donner de réponses. Sa mère était morte, et elle n'allait pas déranger Gareth pour ce qu'elle considérait comme des questions futiles. Jaelith voulait savoir mais quelque chose au fond d'elle-même la retenait. Alma lui demanda :

— Vous allez rentrer à l'Académie ?

— Oui... J'aurais voulu poser quelques questions au seigneur Libram, mais j'ai vraiment peur de le déranger pour ces broutilles.

— Il y a une autre personne à qui cette femme a parlé ce jour-là, mais je ne pense pas qu'elle soit plus disponible que notre bon paladin.

— Une autre personne ?

La question lui brûlait les lèvres.

— Qui ?

Alma eut un petit sourire en coin avant de répondre.

— Il s'agit tout simplement du roi Freyki Ewall Nenvel.

Annotations

Vous aimez lire Elizabeth Fendel ?

Commentez et annotez ses textes en vous inscrivant à l'Atelier des auteurs !
Sur l'Atelier des auteurs, un auteur n'est jamais seul : vous pouvez suivre ses avancées, soutenir ses efforts et l'aider à progresser.

Inscription

En rejoignant l'Atelier des auteurs, vous acceptez nos Conditions Générales d'Utilisation.

Déjà membre de l'Atelier des auteurs ? Connexion

Inscrivez-vous pour profiter pleinement de l'Atelier des auteurs !
0