Ils sont beaux sur leur serviette, des double-faces de rouge et de blanc, la peau rôtie par le soleil d’été quand pour un temps leur moteur oublie de les retourner. Alors ils exhibent leur gros ventre écarlate comme par fierté, comme pour prouver qu’ils sont restés plus longtemps que leurs voisins moins brûlés qu’eux. Un concour d’adultes restés en adolescence, je suis plus rouge que toi, je suis plus borné que toi. Et plus tard quand l’épiderme mort s’envole par petits lambeaux ils se sentent comme l’animal qui perd ses poils d’Hiver, “c’est un renouvellement !” disent-ils. “Et puis j’ai payé pour venir ici, j’ai payé pour cette plage, pour ce soleil et pour cette mer alors c’est pas une petite rougeur qui va m’empêcher d’en profiter.” Moi j’y vois des morceaux de viande rôtis au soleil et marinés au pognon, des bouts d’Humains qui par mimétisme s’en vont se faire griller la pillule - ou serait-ce se dorer ? - tous les ans à la même date, sur le même mètre carré de sable. Alors je me demande qui est l’instigateur de cette pratique. Quel esprit farouche c’est en premier laisser brûler sa blancheur en plein cagna puis est allé raconter à ses voisins quels biens fous cela lui avait procuré. Quel esprit tordu c’est pris au jeu de torturer ses congénères, pir même, de convaincre ses congénères de se torturer eux-même en dépensant leur argent à rester immobile sous un soleil de plomb. Très peu pour moi, d’ailleur voilà l’automne qui arrive et avec lui le froid revient. Pendant qu’ils soigneront leur peau séchée moi je me la coulerai douce à me roussir le poil trop proche d’un brasero, à me retourner toute les trentes secondes parce que j’ai trop chaud d’un côté et trop froid de l’autre…

Absurde Humanité.