Chapitre 7 : Monde parfait ?

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Quelques heures plus tard, Matthew se lève de bonne humeur. Pour la première fois depuis presque un mois, son sommeil s'est apaisé. Pas de cauchemars ni d'insomnies. Son inconscient ne le torture plus de visions dérangeantes. Maintenant qu'il sait que Meg 15 existe, il n'a plus rien à craindre. Pour lui, la réussite de SysMeg ne fait plus aucun doute. Son stress a considérablement diminué. Il le sent, quelque chose a changé. L'espoir a écrasé toute source de pessimisme. Il est en pleine forme.

« -Bonjour Litz !

-Bonjour Matthew, bien dormi ?

-Oui, splendide ! Je n'ai pas dormi aussi bien depuis des années.

-J'en suis ravie.

-Quelle est la situation ?

-Meg 15 est toujours sous observations. Les premières études sont en cours.

-Parfait ! »

Tout en sifflant, l'homme s'étire puis enfile des vêtements civils décontractés. Aujourd'hui, le Darwin entame son exode final vers la planète cible. Chaque instant se grave dans les annales. A présent, plus rien ne l'arrêtera jusqu'à la ligne d'arrivée. Malgré son humilité, Matthew ne peut s'empêcher de songer à un tapis rouge se déroulant à ses pieds.

Tandis qu'il se rend à la salle à manger, l'explorateur questionne Litz sur les nouvelles de cette nuit.

«-Comment ont évolué les dégâts de l'incendie ? Pas d'autres incidents ?

-Négatif. Les lieux sont sécurisés. Je conseille tout de même un entretien de la zone touchée par les flammes.

-Très bien, je le ferai .... As-tu fait des découvertes sur Meg 15 ?

-Affirmatif. Premièrement, la planète ne possède pas de satellites naturels. En tout cas, aucun suffisamment massif pour dépasser le millier de kilomètres de diamètre. Les télescopes n'ont rien repéré depuis notre position.

-Très bien ! Autre chose ?

-Affirmatif, j'ai déterminé la nature possible des principaux composants de l'atmosphère de Meg 15.

-Ah oui ?

-Je ne peux pas l'affirmer encore avec certitude. Mais nous sommes en face d'un très grand potentiel Matthew ! »

-Un très grand potentiel ? C'est-à-dire ?

-J'ai analysé des images spectrales de son rayonnement. J'ai détecté une forte présence de diazote. Une très forte présence. De l'ordre de soixante-dix pour cent. Ensuite, une couche dense d'ozone dans la haute atmosphère, de l’eau, du dioxygène en faible proportion, et des traces de dioxyde de carbone.

-Incroyable... »

Décidément, les surprises se succèdent. Cette planète mérite bien toute l'attention qu'on lui porte depuis plus d'un siècle. Si Litz dit vrai, la tâche de terraformation se réduira très largement. En effet, tous les gaz cités ici sont des éléments primordiaux de la vie. Les chercheurs ont réfléchi à l'atmosphère parfaite pour rendre une planète habitable. Et dans ce modèle idéal, toutes ces molécules sont essentielles. C'est d'ailleurs pour cela qu'avant toute colonisation, une première tâche consiste à introduire dans l'air les gaz manquants dans cette liste par différents procédés.

Mais sur Meg 15, il n'y a rien à faire. Tout y est déjà ! A croire qu'elle n'attend que l'homme. D'après les estimations de l'ordinateur, il suffit de produire plus de dioxygène, pour rendre l'environnement potentiellement respirable. Tout bonnement incroyable. Aucune planète connue à ce jour n'est autant propice à la vie. L'aléatoire de l'univers a placé à cet endroit précis toutes les conditions nécessaires. Un miracle !

Cette information agit comme une explosion à l'intérieur de Matthew. Quoi de plus fantastique pour SysMeg ! Et ce n'est qu'une mise en bouche. Rien que d'imaginer ce qu'il reste à découvrir, son cœur s'emballe. Maintenant plus que jamais, il réalise que là est sa place. L'exploration coule dans ses veines.

Attendant que la nourriture sorte du cryoconservateur, son esprit s'amuse à imaginer les paysages à la surface de la planète. Meg 15 se situe bien dans la zone habitable, elle possède une atmosphère visiblement riche, et aucun satellite naturel. Les possibilités sont multiples, mais tout porte à croire à des conditions plutôt douces. Il pense à de vastes territoires de roches, baignant sous un ciel bleu. Litz a détecté de la vapeur d'eau dans son air. Avec un peu de chance, des nuages blancs flottent paisiblement au gré des vents. Les températures varient suivant la latitude, mais le climat est globalement chaud. La couche d'ozone, l'eau et le dioxyde de carbone provoquent un effet de serre. En gardant prisonnier une partie de l'énergie solaire, le milieu est ainsi réchauffé.

Le décor se dresse dans la tête de l'homme. Il se voit seul, perdu parmi ces étendues, respirant le dioxygène d'un autre monde. Un monde accueillant.

Accueillant certes, mais silencieux.

Silencieux ?

Serait-ce vraiment le cas ?

Un doute le gagne.

Par silence, Matthew entend la stérilité. Meg 15 tel qu'il la décrit se réduit à un amas de cailloux. Pas d'êtres. Aucune bactérie, aucune plante, aucun animal. Aucun organisme quel qu'il soit. Cependant, peut-il bannir définitivement cette idée ? L'idée de la vie sur cet autre monde ? Plus il y réfléchit, plus la question mériterait qu’il s’y attarde. Après tout, Meg 15 rassemble tous les critères d'un foyer adéquat. Son atmosphère, sa distance de Meg Alpha, et la présence d'eau. Il se souvient d'un rapport d'étude réalisé par la fédération avant sa naissance. Les télescopes spatiaux les plus perfectionnés ont étudié Meg 15 à l'époque. Et dans leurs résultats, ils émettaient l'hypothèse de vastes zones liquides : des océans, recouvrant une partie de sa surface. Evidemment dans ces conditions, ces mers seraient composées d'eau. Un élément supplémentaire à prendre en compte. Serait-ce une vérité ? Impossible de le deviner pour le moment. Mais pourquoi un environnement comme celui-ci n'abriterait-il pas un écosystème ?

Prouver qu'elle n'est pas seule : le but de l’Humanité depuis des millénaires. Pourtant, après avoir conquis une vingtaine de mondes, aucune présence d'une autre espèce n'a jamais été détectée nulle part. Les tentatives de contact ont été abandonnées avec le désintérêt et le manque de ressources. Le constat d'une vie extraterrestre potentielle effraie Matthew autant qu'il le fascine. Mais pour lui cela ne relève que de la fiction. Le genre de petites histoires qui perdent leur valeur une fois que l’espace n’a plus de secret. Un explorateur se doit de garder les pieds dans le concret avant tout.

« - Le repas est prêt, informe Litz. »

Matthew saisit le plateau et le pose sur la table. Au menu, une purée de céréales mélangée à une sorte de compote, des parts de fruit déshydratées, et de l'eau. Ce matin, il n'a pas très faim. Sa soif de connaissance inhibe son appétit. Trop excité pour s'attarder sur ce repas, il l'engloutit en dix minutes à peine.

« -Tu as bien terminé les calculs de trajectoire, demande-t-il ?

-Affirmatif. J'ai déterminé l'itinéraire précis jusqu'à la zone de présence.

-Est-tu bien certaine que Meg 15 sera là-bas ?

-Matthew... Je suis programmée pour ne commettre aucune erreur. Tu m'as déjà posé cette question.

-Je sais... Pardonn-moi. C'est que, j'ai tellement envie que tout soit parfait.

-C'est pour ça que je suis là.

-C'est vrai. »

Impatient de prendre les commandes du Darwin, il se sert un dernier gobelet d'eau et le boit d'une traite.

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