Ch.1 - 1 | Gill & Diane

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Il avait fermé les yeux, il s’attendait à ne plus jamais les ouvrir à nouveau. A sa grande surprise, non seulement il n’avait pas disparu, mais le monde était exactement le même qu’une seconde auparavant. En fait, les choses étaient, en tout point, identiques. Figées dans le temps. Une note filait dans l’air, c’était un “sol” qui émanait de la radio, et qui semblait frustré de ne pas pouvoir passer le relais au reste de la chanson. Les cages thoraciques ne bougeaient pas, alors qu’elles auraient dû s’élever aux rythmes des respirations. Lui non plus, ne bougeait pas.

Et puis, plus rien.

Gill Yatt allait naître, et il le savait.

Que le soleil soit témoin de cet instant, il avait déjà les joues en sueur, le corps calciné, les mains tremblantes et les jambes repliées. Il reçu une énorme frappe dans le dos, ce qui lui fit expulser du sang par la bouche. L’instant d’après, il vint s’écraser sur une matière sèche, tandis qu’il entendait déjà les cris autour de lui, affolés, et les couleurs, rouges et bleues se projetaient sur sa rétine, comme on arrache des larmes à un tableau passé au jet à haute pression. Des pointes percèrent sa peau dans les endroits les plus perméables, la face intérieure de ses articulations.

Bientôt, le calme revint, et le noir s’installa. Une vive nausée le pris, ainsi qu’il perdait progressivement tout point de repère: le haut, le bas, les limites de son propre corps. Il sentait l’écoulement du temps, pesant. A présent, il expérimentait l’ennui.

Gill se souvint de la première leçon:

“Tout se rencontre au point zéro.”

Il en avait bien besoin.

Méthodiquement, il se retira donc de ses sensations, désinvestit sa respiration ainsi que tout désir de vie en lui-même. Ce savoir-faire était devenu un automatisme à force de pratique. Cela ne lui demandait aucun effort, bien qu’il choisi cette fois-ci d’observer le processus, pour tromper sa lassitude. Un vrai jeu d’enfant. Il pouvait presque déjà voir venir le point d’impact avec la non-dimension, le fameux point zéro.

Cependant, cette fois-ci, il n’y avait personne.

Alors, patiemment, il demeura où le néant fait loi. Au coeur même de la non-matière.

Enfin, une présence jaillit. A sa grande surprise, elle lui était inconnue. Elle fut la première à engager la conversation:

“Wow! …Tu m’as trouvé? Génial!

- De quoi tu parles, répondit-il. Ça n’a rien d’étonnant, nous sommes au point zéro: c’est précisément là que l’on trouve absolument tout dans l’univers. Tu sors d’où ?

- Je ne sais pas, j’ai tout oublié! Ha ha, fantastique!

- Donne-moi ton nom.

- Non… Je ne veux pas faire ça…”

Le visage de la fillette venait de s’éteindre.

“Pourquoi donc, qu’est-ce qui te fait peur?

- Si je te donne mon nom, et si tu me donnes le tien, alors, nous ne seront plus jamais réunis.

- Nous ne le sommes déjà plus.”

La fillette se mit à pleurer, et Gill entrepris de la réconforter en l’entourant de ses deux bras.

“Je m’appelle Diane, et tu es Gill.

- Comment le sais-tu?

- C’est écrit sur l’étiquette que tu portes.

- Quoi? Quelle étiquette? NON!”

Quelqu’un était en train de retirer les aiguilles de ses coudes, la douleur lui fit perdre le contact avec Diane ainsi qu’il se retrouvait à nouveau projeté dans la temporalité classique.

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