Chapitre 6- Réconciliation

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Le frère Philémon se dirigea vers le cloître pour dire à ses frères qu’il allait confesser et leur raconta aussi, qu’après les complies, il serait préférable de faire une réunion pour mettre un point sur le futur prieur. Ils se mirent en accord pour se retrouver à la chapelle, quand les retraitants eurent fini de prier et se dirigea vers son père, pour lui dire de patienter encore. Il fit le tour du cloître pour ouvrir une porte à l’aide d’un trousseau de clés qui menait à la chapelle. Il vit sœur Humbeline, contemplait la Sainte-Vierge au bout de l’autel. Elle avait le regard doux et murmurait des prières, vers la clarté de l’aube qui s’assoupit tendrement. Le frère Philémon s’excusa d’interrompre sa prière et elle fit le signe de croix pour achever son adoration.

— Désolé de vous interrompre ma sœur, mais je voulais savoir ce que vous désirez faire pour ce soir. Vous préférez rester ici ou vous voulez qu’on vous dépose à la gare ?

— Serait-ce possible de rester encore deux jours ?

— Bien sûr ma sœur, avec plaisir, répondit-il en s’inclinant devant elle.

— Et les autres ? Resteront-ils pour répondre aux questions du cardinal ?

— J’ai demandé à Coline et à son mari de rester ici, le temps de se consacrer au Seigneur et pour mon père, je l’ignore encore… Il désire se confesser.

— Pourvu qu’il accepte, susurra-t-elle avec espoir.

Le moine prit place à côté d’elle pour contempler à son tour, la douce et Sainte-Vierge qui portait l’enfant Jésus dans ses bras.

— Elle le convaincra, j’en suis persuadée.

La jeune sœur lui sourit et se mit à regarder plus attentivement la statue, qui représentait l’emblème de l’Église.

— Vous pensez que le cardinal lira tout le journal ?

Surpris, le frère ignorait que son meilleur ami entretenait un journal intime.

— Je n’en ai aucune idée, où vous l’avez trouvé ?

— Il me l'a confié pour que je puisse le donner au cardinal Maximilien. Quand vous êtes tous partis, j’en ai profité pour aller le récupérer et le lui donner.

— Comment saviez-vous que c’était le cardinal Maximilien ?

— Il s’était présenté avant votre arrivée, il me racontait qu’il était très proche de lui.

— Décidément, Barthélémy ne cessera de me surprendre.

Soeur Humbeline comprit qu’il s’agissait du père Théophane et se mit à se lever pour quitter les lieux.

— Espérons que le Seigneur fasse des miracles…

— Je l’espère aussi ma sœur, à ce soir pour les complies.

Ils se quittèrent dans un silence de vœux d’obéissance et Philémon se dirigea vers son père qui attendait sagement, derrière une porte. Il ouvrit en cherchant la bonne clé et l’invita à passer en premier. Son père s’installa vers son bureau et tira la chaise vers lui pour s’asseoir. Le frère Philémon échangea sa tenue en enlevant son aube pour en mettre une nouvelle et posa une écharpe violette autour de ses épaules. Il accrocha ses anciens vêtements sur le porte manteau et s’installa à son tour en tendant la feuille de pénitence. Il bénit son père en faisant le signe de croix ensemble et continua son discours en racontant que le Seigneur était avec eux et que l’Esprit Saint ressortit toute vérité de ses lèvres. Vincent mit du temps à trouver les mots, il avait les larmes aux yeux et se massa les jambes. Philémon était ému et prêta attentivement de l’attention en croisant ses mains, posées sous son menton.

— Pardonnez-moi mon père car j’ai péché… En pensée et en parole… Depuis que ma femme m’a demandé de quitter le foyer, j’ai… J’ai perdu tous les moyens… Je, je m’en veux terriblement de n’être pas venu voir mon fils… Elle, elle me racontait qu’il n’était plus question de le voir et qu’elle n’aimait pas le genre de mon espèce qui perdait son temps à dépenser de l’argent dans n’importe quoi… Je, je lui ai obéi en quittant désespérément le foyer, sans plus jamais revoir mon fils… Je, je m’en veux de l’avoir abandonné, je m’en veux de m’être noyé dans mon argent et d’avoir dépensé autant de bénéfice dans des jeux d’alcool… Je, je suis ingrat de l’avoir abandonné, d’avoir lâché mon propre fils alors que je l’ai toujours aimé… Oui, il m’est arrivé de l’avoir oublié quand je me noyais dans l’alcool… Il m’est arrivé d’avoir loupé des messes en rejetant la faute au Seigneur…. Je, je m’en veux terriblement d’avoir tué autant de soldats, je suis un monstre mon père, j’en suis un… Je ne suis qu’une horrible créature au visage de ma femme et de mon propre fils ! Et j’ai tué des pauvres innocents, pardonnez-moi mon père, pardonnez-moi, balbutia-t-il en explosant en larmes.

En découvrant toute la vérité, Philémon ne manqua pas de verser des larmes et à serrer la tête de son père contre la sienne. Son cœur baignait dans une mangeoire en sang. Après tant d’années, il savait enfin la raison pour laquelle son père avait quitté le foyer. Depuis plus de vingt et un an, il cherchait une figure paternelle en s’étant tourné vers le père Théophane qui lui racontait depuis son plus jeune âge que Dieu pouvait remplacer tous les pères du monde entier. Aujourd’hui, Dieu lui montra la vérité en lui envoyant un nouveau papa sincère et très aimant. Mais où-était donc passé cet amour paternel qu’il cherchait depuis longtemps ? Les yeux luisants de larmes, il pressa la tête de son père contre sa poitrine et l’embrassa en demandant pardon à son tour.

— Pardon papa de ne pas t’avoir cru, pardon… J’ignorais que maman avait fait cela…

— Tu, tu n’étais pas au courant ?, demanda-t-il en regagnant sa place.

— Maman disait que tu avais quitté le foyer du jour au lendemain… Jamais je n’aurai crû qu’elle m’aurait menti… Pourquoi ?

— Elle voulait sûrement te protéger, mon fils… Je, je suis désolé, je pensais que tu étais au courant…

— La vérité ? Papa ! La vérité c’est que maman t’a lâché pour un autre homme ! Je l’ai vu cet autre homme qui rôdait autour d’elle, tout s’explique maintenant, tout cet argent qu’elle gagnait…

Tous les deux, le cœur brisé et anéantis, ils quittèrent leur place pour s’enlacer l’un à l'autre, dans leurs bras.

— Je suis désolé aussi pour toi mon fils, j’ai appris que Coline était avec un autre homme et je suis désolé si tu l’aimais…

De nouveau le cœur contracté, Philémon pleura tout ce qu’il pouvait en restant agrippé à son père. Le père qui comprit cet amour blessé, le rassura en le berçant et en le réconfortant.

— Que Dieu te bénisse papa, tu n’as rien fait de mal… Tu as reconnu qu’être avare était mal et tu as sut vendre tes biens en me proposant ton aide pour Coline…

— Ça été très dur de quitter tous mes biens, crois-le ou non…

Philémon rit dans les bras protecteurs de son père. Il sentit une nouvelle sensation qui lui réconfortait l'âme.

— C’est maman qui nous a trompé, tous les deux… mais aujourd’hui, rendons grâce au Seigneur car il nous a montré la vérité et l’amour que nous pouvons porter tous les deux. Que Dieu puisse te pardonner papa, il est plein de tendresse et de miséricorde, ne l’oublie pas, il te pardonnera pour les soldats que tu as tués.

Vincent le serra très fort dans ses bras et l’embrassa sur la tête.

— Merci mon fils… Je, je voulais aussi te dire que j’allais témoigner pour le père Théophane.

Tout content de l’entendre, il écrasa son cœur contre le sien.

— Je t’aime papa.

— Je t’aime aussi, mon fils.

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