Chapitre un : Evan

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Je tente de m’écarter de Simon. Plus de quinze ans qu’il s’endort sur mon épaule, et malgré l’engourdissement que ça provoque, j’aime toujours le sentir près de moi. D’abord en tant qu’ami, et désormais en tant que compagnon, petit ami, mon mec, quoi ! Mon mec tout nu. Je résiste à l’envie de passer mes doigts sur son corps, de caresser la toison sur son torse. On le surnomme pas Chewie pour rien, il est grand, imposant et velu ! Et tout nu, j’ai déjà dit qu’il était tout nu ?

J’ai eu du mal à passer ce stade, je dois l’avouer. Dormir nu, sentir mon matos se balader durant la nuit, le sentir frôler le corps de Simon. Mais petit à petit, je commence à en percevoir les avantages. Pas de calbut à virer, c’est au moins trente secondes de gagné pour le voyage vers le septième ciel, et j’adore me réveiller en sentant son sexe contre mon cul. Je soulève la couette, mais la pénombre m’empêche d’entrapercevoir quoi que ce soit. Simon pousse un grognement et rabat la couette sur nous, puis il pose un bras possessif sur mon torse et me tire vers lui.

Après quelques secondes à guetter ses mouvements, lentement, je me dégage, je glisse jusqu’à ce que la tête de Simon repose sur l’oreiller et je me lève, sentant une envie me dévorer l’intérieur de la bouche, m’obligeant à déglutir. Il me manque un truc, et Simon peut râler, je n’arrive pas à m’en passer. En tâtonnant, j’attrape un caleçon pour m’habiller, puis mon téléphone et je gagne le salon sans faire un bruit. Je commence à farfouiller dans la poche de mon manteau pour y trouver mon paquet de tabac à rouler et mes feuilles.

J’ai fait le fier en montrant mes achats. C’était d’une logique imparable, plus de temps à rouler, moins de temps à fumer, j’allais forcément diminuer. Et au final, c’est pire. Je veux tellement une vraie clope que je reste dans une insatisfaction perpétuelle. Au point d’en fumer encore plus. Aucun bénéfice et en plus, ça me prend un temps fou pour un résultat très moyen. Je tire des brins de tabac du paquet, les dépose dans la feuille et roule ma cigarette entre mes doigts. Ma clope est moche, avec trop de tabac au milieu et une extrémité est à moitié vide. On dirait les derniers décors que j’ai voulu pocher en ganache, ça devait ressembler à des roses délicates et aériennes, elles ressemblaient à des champignons écrasés. Je sais exactement où je me suis planté, quand j’ai pas changé de douille, par flemme, persuadé qu’en modulant un peu mon appui sur la poche, j’allais pouvoir faire des pétales magnifiques. Tout ça pour gagner trois minutes. C’est toujours le même problème. C’est pareil pour rouler une clope, je n’ai pas la patience de m’appliquer, de prendre le temps. Comme quoi, je ne devrais pas sous-estimer mon manque de retenue. Jusque dans des détails anodins, mon impulsivité me dessert.

Je pousse la porte-fenêtre et coince mes pieds sur le balcon. C’est abusé d’appeler ça un balcon, j’y rentre pas mes talons. Ça doit être un balcon Cendrillon et je suis une des demi-sœurs moches. Je ricane de ma bêtise, mais je suis proche de la vérité, on peut pas dire que je suis super beau. J’ai cette couleur de cheveux pas très franche entre châtain et roux, une barbe un peu clairsemée que je ne sais pas comment tailler, et si je commence à prendre du muscle dernièrement, je sais bien que je suis loin d’être un athlète. Je lève la main et frotte mon visage. Je suis fatigué, mais l’excitation ne retombe pas pour autant. Ce n’est pas une bonne excitation, mais un mélange douloureux d’envie, d’anxiété, de peur et tout au fond, bien cachée, se trouve une étrange fierté que je ne me sens pas en droit de ressentir.

Simon me dit qu’il est fier de moi, Yassine aussi. Mais je n’arrive pas à l’être moi-même. Il y a quelque chose à l’intérieur de moi qui me dit que je ne fais rien de bien intéressant ou d’extraordinaire. C’est faux, je n’ai pas de talent. Et non, je n’ai pas travaillé dur, faut qu’ils arrêtent de me dire ça. Ils se trompent tous, je sais que je suis ni doué ni intelligent. Ils ont juste eu la chance de tomber sur un bon jour, un jour où je n’ai pas raté ma meringue, un jour où j’ai tempéré mon chocolat correctement, un jour où le beurre ne s’est pas échappé de cette foutue pâte feuilletée levée. Les croissants sont les pires viennoiseries au monde et je n’en referai plus jamais de ma vie ! Peut-être que je pourrais tester cette méthode, celle que j’ai vu sur un site, avec un pliage moins classique pour emprisonner le beurre. Je tenterai demain.

J’émets un rire éraillé, non, voilà, aucun talent, aucun travail, juste des astuces glaner à droite à gauche, des conseils sur les bons ingrédients et des ratés par milliers. Pas de quoi être fier, vraiment. C’est mieux comme ça, la fierté, c’est trop facile de le balayer d’une phrase comme l’a fait ma famille. Je porte la cigarette à mes lèvres, l’allume et tire dessus fortement. Je veux que mon cœur se calme, que mon corps se calme au lieu de bondir au moindre bruit. Je veux que ma tête arrête de tourner sur tout ce que je dois faire, sur tout ce que je suis incapable de faire. Et bordel, je veux une clope, une vraie !

Je suis dépendant de plein de trucs, de la bouffe, du sexe, de Simon… je suis tellement dépendant de Simon. Mais je croyais réellement avoir été épargné par l’addiction à la nicotine. Mais il a suffi de quelques mois pour créer une mauvaise habitude, un peu de stress, des commandes de gâteaux à honorer, mes parents qui me raccrochent au nez quand je les appelle pour Noël.

Je ne peux pas toujours me réfugier dans les bras de Simon, j’y passerais ma vie ! Ça me semble pas une si mauvaise idée. Sauf en été, il tient trop chaud. Et pourtant, je meurs d’envie de me coller à lui sous une chaleur torride et lourde. Je glisse la cigarette entre mes lèvres, recherchant un apaisement qui ne vient pas.

Je ne veux pas m’accrocher à Simon dès que j’ai un problème. Je ne sais que m’accrocher à lui, ou à Yassine quand tout va mal, je suis un putain de boulet.

Issun dit que c’est parce que je manque de fondations, de bases solides. Et je pense qu’il a raison. Bon sang, je sais qu’il a raison, il a une sacrée propension à avoir raison, ce foutu gamin. Mais c’est trop tard pour moi, je ne suis pas une maison, ou un immeuble, personne ne va pas me démolir pièce par pièce pour me reconstruire.

Alors je fume. Un peu comme une baraque pourrie et mal isolée dont on pousse le chauffage à fond pour compenser. Et j’espère ne pas me faire choper par Simon.

« Eve ? »

Bordel de sa mère, c’est un ninja ! En voulant jeter ma clope, je la lâche sur mon caleçon. Et cette saloperie glisse pile entre les deux boutons de l’ouverture. Non ! Non ! Mais non !

Je m’affale sur le parquet en hurlant et enlève mon calbut en trente secondes, j’attrape le mégot, le lève au-dessus de ma tête ! Re-putain de bordel ! Je veux pas regarder, je peux pas regarder. Je n’ai pas mal, je n’ai pas mal. Nuance, je n’ai pas encore mal… Je me suis cramé tous les doigts, la paume, les poignets, même les avant-bras en cuisinant, mais s’il y a bien un endroit que je croyais à l’abri, c’est ma bite !

« Ça t’arrive souvent d’hurler à la mort en te foutant à poil ? demande Simon. Et pourquoi ça sent le cochon brûlé ici ? »

J’écrase le mégot dans le cendrier sur le balcon et plaque le caleçon sur mon entrejambe quelques secondes en adressant une prière au ciel. Puis, j’ose contempler le désastre en me tournant vers la lumière de la rue. Mon pubis ressemble à une forêt après le passage d’un incendiaire bourré, même pas fichu de faire le travail correctement ! En plein centre, j’ai une clairière où les poils se sont racornis sous la chaleur, et autour, des fiers arbres qui ont résisté, mais qui ont trouvé drôle de frisotter un peu plus. Heureusement, je ne suis pas brûlé, je crois. Je n’ai pas mal, enfin, si, mon égo agonise. Et si je cherchais le peu de fierté qu’il me restait, il a décampé.

Simon s’avance jusqu’au canapé et sa main remonte le long de la tige du lampadaire pour trouver l’interrupteur.

« N’allume pas !

– Pourquoi ? Oh bon sang, Evie, t’as cramé quoi ? »

Je peux presque entendre le « encore » dans sa voix. J’ai pas cramé tant de choses que ça, la preuve, on a toujours un toit au-dessus de notre tête. Mais j’admets, avec le froid, j’ai eu tendance à me mettre à moitié dedans et pas complètement sur le balcon. Puis, j’y rentre même pas sur ce balcon !

Alors, j’ai cramé un pot de fleurs, un rejeton de Micheline, le ficus blob du bar d’Étienne. Simon avait pris énormément de temps à le faire pousser, mais bon, s’il l’aimait vraiment, il lui aurait choisi un joli pot en terre, bien résistant, et pas un en plastique, ça brûle trop bien le plastique. Oh, j’ai fait tomber une cendre sur un plaid. D’accord, pas n’importe quel plaid, celui de Dracofeu. Ben, il porte mal son nom celui-là, s’il résiste pas à une toute petite cendre. Elle a pas fait rire mon homme, cette blague. Je m’attendais à quelque chose, une colère, qu’il boude, qu’il me prive de lui, de sexe, de tout. Mais rien, à peine quelques mots de reproches et des soupirs.

Des fois, je me demande comment Simon me supporte encore. Parfois, je me demande comment il peut m’aimer. Depuis quelques semaines, j’ai l’impression de ne rien faire correctement, je suis pire que d’habitude.

« Evan ? T’as cramé quoi ? »

Sa voix manque de patience, mais je n’entends pas le petit ton qui me dit qu’il va basculer, craquer. Simon ne se met plus jamais en colère contre moi. Depuis qu’on s’est foutu sur la gueule alors qu’on avait quinze ans, il ne l’a plus jamais fait comme s’il avait peur de céder à une rage incontrôlable, peur de me briser. Il ne s’éloigne plus jamais de moi non plus, pas quand il sait ce que ça me fait, combien je me sens abandonné. Il agit en fonction de moi, tout le temps avec un tel self-control que ça en est effrayant. Je redoute le moment où il va en avoir marre. Marre de devoir me rassurer, me soutenir, marre d’aimer un raté.

« Evan ? Qu’est-ce que tu as cramé ? »

J’entends un autre de ses soupirs agacés et je finis par répondre :

« Ma dignité. »

La lumière m’éblouit un instant. Et quand j’ai fini de cligner des yeux, Simon a les siens fixés sur mon entrejambe couvert du caleçon froissé en boule dans ma main. Ouais, je suis aussi con que ça, merci ! Mais si mon mec pouvait éviter d’en avoir la preuve tous les jours, ce serait bien. Un sourire se dessine sur les lèvres de Simon et ses épaules sont prises de tremblements. On a été potes avant d’être amoureux, et je crois qu’on n’échappera pas à notre fonctionnement d’adolescents débiles.

« T’as pas intérêt, menacé-je en fermant les cuisses. On peut rire de tout, mais pas de la dignité d’un gars. »

Il serre les lèvres pour se contenir.

« Ta dignité a tendance à se placer dans les endroits les plus surprenants.

– Elle se place un peu où elle peut.

– Dis-lui de dégager, cet endroit est à moi, s’amuse-t-il en s’approchant. »

Je rampe jusqu’au tapis, pour poser mes fesses sur un endroit un peu plus moelleux. Simon contourne la table basse et s’installe face à moi. Il a tellement pris en assurance, en calme. Comme si me voir m’exciter à ses côtés lui permettait de s’assagir. C’est injuste, moi aussi, je voudrais avoir ce calme qu’apporte l’amour, mais je n’ai qu’une ivresse de plus en plus forte. Plus il m’aime, plus je tangue, plus je sens le besoin de m’accrocher à lui. Est-ce qu’il sait à quel point il déclenche une envie incontrôlable, une dépendance déraisonnable ?

« Fais-moi voir cette fameuse dignité que je m’en occupe, murmure-t-il en posant ses mains sur les miennes.

– Humm… J’adore quand tu t’en occupes.

– Evie, oublie la pipe, je me retiens déjà de rire. »

Et moi, je me retiens de gémir. Parce que ses mains ont commencé à caresser les miennes, pour que je lui montre les dégâts et je ne sais pas comment il arrive à faire ça avec ses grosses paluches, mais ça me transporte. Il remonte sur mes poignets, les entoure. Je ne suis pas mince, pas vraiment, mais ses doigts en font le tour complet sans souci. Il tente de les écarter avec douceur et je résiste.

« Tu rigoles pas !

– Promis.

– T’avais déjà promis ça quand j’ai tenté de sauter de bouée en bouée dans la piscine !

– J’avais dix-sept ans ! Et tu as fini avec le caleçon accroché au cou du flamant rose ! Et la tête coincée sous le crocodile ! évidemment qu’on s’est marrés ! Tu te serais marré aussi !

– Je pouvais pas, j’étais en train de me noyer. Heureusement que je peux compter sur Yassine pour me sauver les miches. »

Simon rit encore. J’aime son rire grave, tout en lui est dramatiquement masculin. Je fixe un instant son torse d’ours, il a toujours eu un temps d’avance sur moi. Déjà adolescent, puis jeune adulte, à grandir plus vite. Et c’est là sous mes yeux, mon homme. Je veux tendre la main, la poser sur son torse, tirer un peu ses poils par pure taquinerie.

Mais j’ai une dignité à protéger, alors je ne bougerai pas, peu importe combien j’ai envie de me jeter sur lui.

« Désolé, dit-il dans un sourire. Déjà à l’époque, mon inconscient était trop occupé à te mater à poil pour que mon conscient pense à aller te sortir de l’eau. Ta survie, c’était très accessoire sur le moment. »

Il lâche un de mes poignets et fait courir sa main le long de ma hanche nue. J’inspire d’un coup à la caresse. Ses mains… je ne sens que ses mains. Depuis la première fois, la toute première fois où on a fait l’amour, je suis tombé fou amoureux. J’étais amoureux de lui, je le suis devenu de ses mains. Je les connaissais déjà, quand il me serrait très fort contre lui pour me consoler. Mais quand je les ai rencontrés pour la première fois sur certaines parties de mon corps, elles ont comme exalté tout l’amour que je ressentais pour Simon. Je réprime un frisson, mais un autre me prend par surprise alors que sa paume se pose entièrement sur ma peau.

À chaque fois qu’il me touche, j’en ressors épuisé, essoré de ressentir autant de choses. Le bout de ses doigts caresse mes côtes, et c’est pire que des chatouilles, c’est de la torture. Ok, j’aime d’abord ses mains et lui vient après. Il redescend sur ma hanche et revient sur mes poignets.

« Je sens comme une rediff au niveau des costumes, dit-il. Toi, nu, et je me rappelle que tu avais mis cinq minutes pour décrocher ton maillot du flamant rose.

– T’étais en train de courir autour de la piscine avec cette stupide bouée, espèce de connard ! Je me demande encore ce qu’il t’a pris !

– L’inconscient, Eve. Tu te doutes pas de ce qu’il fait faire à un gars.

– Ça t’avait plu ? À l’époque ? »

Simon relève les yeux vers moi, ses deux mains se posent autour de ma taille avec fermeté, comme s’il allait me soulever dans l’instant. Je veux qu’il le fasse, qu’il m’installe sur ses cuisses, qu’il attrape mes fesses à pleine mains et me ramène vers lui. Mais à la place, ses mains reviennent sur mes bras.

« Tu veux dire, toi, me courant après avec la bite à l’air et ton petit cul tout blanc ? Ouais, c’est fort possible que ça m’a plu. Mais je voulais pas me l’avouer. »

Il détourne les yeux quelques instants, comme hanté encore par son comportement.

« Bon, on reparle de ta tendance à mettre le feu à l’appart ou pas ?

– Bah, comme je fais pas partie de l’appart, non.

– Ok, juste de ta tendance à mettre le feu aux trucs qui m’appartiennent.

– Je ne t’appartiens pas !

– Oh tu crois ça ? »

Je m’arrête, il sourit, puis ses mains se replacent tout doucement sur les miennes et tentent de les retirer.

« Non, tu vas te foutre de moi ! »

Il lève les yeux, fixant le plafond comme si ce dernier allait lui apporter un quelconque secours. Je m’avance et plonge sur son torse, enfonçant le visage dedans. Je ferme les yeux, je veux seulement qu’il m’étreigne fort. Un frisson me parcourt le long du dos. Je m’en fiche qu’il se foute de moi en vrai. Je crois que c’est mon stress qui rejaillit. J’en suis à me ridiculiser devant l’homme que j’aime. Tout ça parce que je fume trop, que je n’ai pas envie qu’il voie l’état dans lequel je suis capable de me mettre. Et je ne parle même pas de mes poils ! Il a confiance en moi, il est fier de moi et je n’arrive pas à l’être.

Mon front se fait une place sur sa clavicule et je sens ses mains qui remontent pour frotter mon dos et me réchauffer.

« Tu te rappelles, tu m’as demandé si je voulais que tu arrêtes de fumer, dit-il.

– Ouais. Et tu m’as proposé de me kidnapper, option menottage au lit.

– C’est toi qui as évoqué l’option.

– Elle avait pas l’air de te faire peur, mon option. Et on sait où se servir. »

Simon ricane à l’évocation du sexshop de Max et ses mains retournent caresser mes poignets, les entourer, comme s’il fermait des menottes imaginaires autour. Je manque de fondations, mais pas d’attaches, je suis attaché à Simon depuis des années, et je dois avouer que ça ne me déplairait pas d’y être attaché autrement, que ce soit avec du métal à mon doigt ou autour des poignets.

Il me bascule sur le sol, relève mes poignets et les plaque contre le tapis. Tant pis pour ma dignité, elle fait pas le poids comparée à mon envie. Je suis gelé, mais suis toujours en manque. Mais c’est plus du tout de nicotine. Enfin, disons que si on me proposait une vraie clope, là maintenant, j’hésiterais au moins deux secondes. Ma langue a un mouvement dans ma bouche, il lui manque quelque chose. Je tends le cou, mais Simon se recule avec un sourire et sa prise s’accentue sur mes poignets. Il me domine complètement, son corps immense sur le mien. Parfois, j’ai du mal à réaliser qu’on fait pratiquement la même taille tant il est massif. Certains diraient en surpoids, bah, qu’ils aillent se faire foutre ! J’ai toujours aimé Simon tel qu’il est. Il se réhausse un peu, prend appui sur ses genoux et me fixe du regard. Je me sens aimé, désiré. Enfin, jusqu’à ce qu’il baisse les yeux et explose de rire.

« Mais va te faire foutre ! T’avais promis ! crié-je en me débattant et en le repoussant.

– Je sais, mais j’étais pas prêt. Bon sang, ce carnage. T’es chauve de la bite, mon pote.

– J’t’emmerde ! »

Je crois que Simon prend plaisir à martyriser mon égo cette nuit. Il descend la main et caresse mon pubis, son pouce explore la forêt survivante.

« Tu n’es pas brûlé ?

– Non.

– Bon, alors, ça va, t’as évité le pire. »

Je chuchote, son pouce est allé frôler la base de mon sexe avant de remonter. Il s’arrête et se laisse tomber à mes côtés, s’appuyant sur son coude pour me regarder.

« Stressé ?

– Ouais. Et frustré maintenant, merci mon pote. »

Sa main s’installe sur mon ventre.

« Par quoi ?

– Par quoi je suis frustré ? »

Je ricane et lui aussi. Puis, il attend quelques secondes que je parle.

« Je suis allé à la Chambre de commerce, pour savoir si je pouvais bénéficier de subventions pour acheter des équipements, peut-être un local, je sais pas encore.

– Et t’as eu des réponses ?

– Ouais. »

J’en ai eu beaucoup trop, et beaucoup avec des termes techniques, des pourcentages, des taux de retenues. Et tous ces papiers sur lesquels je devais marquer mon nom, développer mon projet ont provoqué une véritable chute dans le vide. J’ai déjà eu du mal à réaliser les démarches pour monter ma micro-entreprise. Heureusement, Yassine m’a aidé à chaque étape, prenant son air de premier de la classe et me donnant l’impression d’être un abruti comme à l’époque du lycée. Cette fois encore, je ressens ça. Sans Yass ou Simon pour m’épauler, je me perds, je ne sais pas par où commencer. Je voudrais tant que ce soit simple, comme une recette, avec des ingrédients et un ordre précis. Quelque chose qui pose mon cerveau, qui lui dise exactement où aller. À la place, j’ai cent cinquante kilos de paperasses et tout ce que je vois, c’est une occasion de me planter en beauté.

Je n’ai même pas un vrai diplôme en cuisine, seulement une équivalence passée rapidement. Je ne suis qu’un imposteur. Les gourmandises d’Evan, tu parles d’une blague ! Je rate encore des recettes et il me faut des semaines pour maîtriser une technique. Je comprends pas pourquoi les gens m’achètent mes gâteaux ou mes petits plats quand ils pourraient trouver bien mieux ailleurs !

Pourtant, je ne peux pas continuer à cuisiner mes desserts dans l’appart, je commence à manquer de place, et c’est de plus en plus compliqué de laisser le travail envahir ma vie privée. Je ne sais pas ce qui me terrorise le plus : me lancer et échouer ou me lancer, que ça marche un temps puis échouer parce que je vais merder quelque part. Je vais forcément merder quelque part.

« Eve ? Tu as toujours envie de développer ta boite, n’est-ce pas ?

– C’est un peu tard pour se poser la question, non ? »

Il hausse les épaules, puis sa main tourne autour de mon nombril avant de glisser en travers de mon ventre pour me rapprocher de lui.

« Non, c’est pas trop tard. Si tu le sens pas, tu peux aller bosser pour quelqu’un. Des horaires, un salaire, pas d’emmerdes, je comprends.

– Tu serais déçu ? »

Il lève la main jusqu’à mon visage et vient enserrer ma joue, ramenant son front contre le mien. Ce geste est notre tout, un geste de compréhension, de confiance, de pardon, d’amitié et d’amour. Tout.

« Bien sûr que non. »

Puis, il s’avance les lèvres et m’embrasse. Je sens le recul de sa langue au goût de la cigarette. Je n’arrive pas à savoir si ça lui déplait ou si ça lui manque. Quand sa langue se plaque contre la mienne, je choisis la deuxième option.

Il m’attire contre lui, me soulève, écarte le caleçon brûlé qui se déplie avec le mouvement… Oh merde !

« Evvviiie !

– Quoi ?

– C’est mon calbut Dragon Ball que t’as pris !

– J’ai pioché au hasard dans le tiroir, je te jure ! »

Je me recule un peu et je m’agenouille en posant les orteils au sol.

« T’as cramé les cheveux de Sangoku ? »

Je contracte mes mollets et décolle un tout petit peu. Contre Simon, le mieux, c’est encore de compter sur la rapidité. Bien que ce gros ours cache bien son jeu.

« Moi, j’ai rien fait, c’est lui, il est entré en mode super Saiyen ! »

Je bondis et je m’empresse de courir pour lui échapper. Ok, j’aurais pas dû la tenter non plus, cette blague ! Franchement, les geeks ont aucun humour. Mon dieu, mais c’est qu’il grogne en plus ! J’ai comme un sentiment de redif en courant, la bite à l’air. Sauf que cette fois, c’est lui qui me poursuit en hurlant. Les voisins vont nous haïr. Je bifurque, passe la porte de notre chambre et je me retourne pour le choper à bras le corps.

L’entraînement ultime, me fighter un ours toutes les nuits. Ça renforce les abdos et je dors comme un bébé après. Mes poumons se vident sous le choc, les siens aussi, mais très vite, je l’entraîne avec moi jusqu’au lit. Le sommier émet un cri d’agonie. Le caleçon ne sera pas la seule chose à souffrir cette nuit. Simon se redresse et tente de m’immobiliser, mais je gigote et je glisse une main dans son boxer. Oh bon sang, ce cul !

« Stop, Chewie, sinon, je chope les poils.

– Sérieux, Eve ! »

Je serre mes doigts sur son cul, le serrant. Simon se laisse aller contre moi avec un soupir.

« Goku, bordel ! marmonne-t-il.

– Je suis désolé. Je t’en rachèterai un. »

Je caresse ses fesses.

« Il a une valeur sentimentale, celui-là, je l’ai depuis des années.

– Ça explique pourquoi mes couilles passaient à travers.

– C’est un caleçon d’été, aération incluse, rétorque-t-il en boudant. »

Je ris de sa tête empreint de mauvaise foi, puis m’excuse d’un mouvement de la main sur ses fesses et d’un baiser sur son front.

« Je suis désolé. »

Et il n’a sans doute pas idée à quel point. Je suis désolé d’être dépendant. De la clope, mais de lui aussi, de lui surtout. Parce que là, j’ai une envie à laquelle je ne peux pas résister, et je m’en fiche qu’on soit en pleine nuit, que je me réveille tôt pour ces stupides croissants et qu’il soit rentré super tard. Mes lèvres dérivent sur sa tempe, ma main glisse en une caresse plus appuyée et mes doigts trouvent leur chemin entre ses fesses. J'adore cette sensation. Avec Simon, je deviens un amoureux, un amant avide de plonger dans le corps de son homme.

Il a un long frisson contre moi, je suis à l’affut de chacun de ses actes, son soupir et sa peau sous mes doigts. Je veux savoir, être sûr qu’il appréciera chacun de mes gestes. Mais malheureusement, mon manque de retenue se manifeste également dans notre lit. Je veux prendre le temps, faire comme lui, arriver à laisser monter la tension, l’excitation, mais je n'ai aucune patience. J'aimerais réellement arriver à prendre le temps de le caresser partout. Mais en règle générale je ne veux que quatre choses de lui : sa bouche, son sexe, son cul et ses mains... ok ça fait cinq si on compte les deux mains.

Je remonte pour jouer avec le creux en haut de ses fesses, puis redescend.

« Evan..., soupire-t-il encore. »

Mais son ton n’est plus agacé, il a pris une teinte grave, rauque, je préfère de loin le faire soupirer ainsi. Je pose mes lèvres sur sa joue à l’endroit précis où une tache de naissance lui a pourri la vie pendant des années. Simon a toujours l’impression de la sentir, mais que ce soit sous mes lèvres ou sous mes doigts, il n’y a plus rien. Il me laisse faire, l’embrasser, lécher sa peau, c’est presque animal. Puis lentement, il se tourne pour attraper mes lèvres entre les siennes. À quel moment on se lasse d’embrasser quelqu’un ? Quand est-ce qu’on trouve mieux à faire ? Quand est-ce que l’envie est remplacée par une dépendance plus grande encore ? J’embrasse Simon, et mon manque disparaît un peu. J’ai honte de voir qu’il ne s’efface pas complètement, honte que rien ne suffise à calmer mon mal-être, mon anxiété. Mon majeur part en éclaireur, longeant la courbe de ses fesses puis s’insinuant dans le sillon. Je le veux ! Je veux Simon, je veux être en lui, me sentir rempli de lui... oui, je sais, c’est pas possible. Dans la vie, il faut choisir, et ben, la vie est franchement mal faite ! Simon se dresse sur les mains pour me surplomber. Puis pouffe à la vue de mon sexe dressé au milieu d'une clairière désolée.

« Si c'est pour te marrer, regarde pas !

– Pardon. Le Vin Diesel de la bite. Chauve mais toujours debout et imperturbable ! s'amuse-t-il encore.

– Chewie ! »

Je serre ma main sur son cul.

« Aie ! M’arrache pas mes poils ! Tu t’en feras pas une greffe, ça jurerait avec les tiens ! »

Je finis par rire. Quand on est un loser tel que moi, il vaut mieux savoir accepter les vannes. Je ne suis pas vexé en vrai. Je me sens surtout toujours très con. Simon grandit, avance et moi, j'ai peur de le faire. Pire, j’en suis incapable.

Simon s’affale, mort de rire à mes côtés et j’en profite grimper sur son dos et m’y caler. Pendant des mois je me suis senti comme son apprenti. Mon savoir sur le sexe se résumait à quelques coups d’un soir, des relations éphémères avec des filles. Oh allez, je peux être franc, deux ! J’ai couché avec deux filles dans ma vie. J’ai fait croire pendant des années que j’étais à la recherche d’aventures, de sexe. En vérité, j’étais resté bloqué à l’année de mes quinze ans, à embrasser mon meilleur pote et à ne jamais vouloir quelqu’un d’autre que lui. Alors, oui, je suis arrivé à lui avec une expérience proche de zéro, mais une tête emplie de beaucoup trop d’idées et de fantasmes. Alors, je ne suis pas à son niveau, mais je suis un élève désireux d'apprendre. Je tends la main vers la table de chevet pour récupérer le lubrifiant. Pendant ce temps, mon sexe n’a pas arrêté ses aller-retours entre les fesses de Simon et ses mains se sont serrées petit à petit sur le drap.

Bordel ! Bordel ! C’est trop étrange ! Et à chaque fois, c’est ainsi. Je suis obligé de m’imprégner de la réalité que j’ai sous les yeux pour y croire. Je vais baiser mon meilleur pote ! Putain, je vais sodomiser mon meilleur pote et je vais aimer. Bon sang que je vais aimer ! Je sais que je vais devoir me retenir, que ça va être une torture infinie. La première fois que je me suis retrouvé en lui, j'ai même pas tenu dix secondes. C'était trop excitant, trop étrange. Désormais, j’ai à cœur de le faire jouir. Le voir ou l’entendre jouir, c’est extraordinaire. Ça me provoque une sensation de… ouais, je suis fier de faire jouir mon mec, c’est normal comme sentiment, non ?

C’est normal d’être excité ainsi par lui, que ça me démange d’être en lui, de le faire crier malgré toute l’étrangeté de la situation. C’est mon meilleur pote, je le connais sur le bout des doigts, le bout des lèvres, bordel, je le connais même sur le bout de la queue !

« Est-ce que ça te fait ça aussi ? demandé-je. »

Je fais un mouvement entre ses fesses et apprécie le fourreau doux et chaud.

« Ça me fait bander de te sentir contre mon cul ? Carrément !

– Non… Enfin, tant mieux pour ça ! Mais je sais pas comment le dire… c’est toi, Chewie, et c’est moi. Bordel, c’est…

– Comme une sensation d’irréalité ? »

J’acquiesce alors qu’il ne peut pas me voir. Simon passe pour frustre auprès des gens. Ils ne voient parfois que son physique d’ours. Mais il est très cultivé et a un esprit aiguisé, là où je ne suis qu’une boule d’émotions. J’aime qu’il pose des mots sur chacune d’elles. Irréalité. Depuis ce premier soir où il m’a enfin pris dans ses bras comme un amant et plus comme un ami, je suis resté dans cette sensation entre rêve éveillé et futur imparfait.

« Oui, c’est exactement ça.

– Je la ressens aussi, Eve. Mais si tu voulais bien me faire ressentir autre chose, là, tout de suite ! Et du domaine de la très dure réalité, merci. »

Je me mets à rire et je lui donne un coup de bassin pour l’enfoncer dans le matelas. Il a un grognement appréciateur. Je m’allonge contre lui, et je glisse mes doigts jusqu’à son anus. Je n’arrête pas pour autant d’onduler contre lui.

Mon meilleur ami, mon amant, mon peut-être-futur-mari. J’imagine bien qu’une bague pourrait orner sa main. De mon autre main, j’attrape ses doigts et vient caresser l’annulaire.

« Si tu cherches à me faire passer un message, c’est l’autre main, Eve !

– Fais chier ! Faut que je potasse les trucs romantiques !

– Potasse les trucs érotiques, c’est mieux !

– Je suis pas au niveau ? »

J’ai laissé échapper quelque chose dans ma voix. Simon a tellement été à l’aise avec le sexe, depuis le début, et je tente de le rattraper à ma façon. Je déborde d’envie, mais ça ne suffit peut-être pas. Il tente de se retourner et je l’en empêche. C’est bon, j’en ai marre de lui balancer mes doutes à la figure. Je veux pas qu’il me voit, je veux qu’il me sente, fort, vite. Non, pas trop vite, je veux l’amener à l’orgasme, je veux bien faire les choses. Je suis toujours tellement impatient.

« Tu es très bien, Eve. Tu es…

– Parfait ? »

Je me marre à l’idée d’un moi parfait.

« Faut pas déconner ! Tu es toi. Et ça me va. »

Je suis pris d’une impulsion, mes doigts poussent en lui, comme si je voulais m’y enfoncer entièrement.

« Je t’aime, Simon ! Et j’ai tellement envie de toi !

– Moi aussi, Evie. Pour les deux ! »

Il hoquète. Mes doigts reviennent jouer encore et encore alors que mon sexe s’agite contre sa hanche.

« Je t’aime !

– Là, t’aimes… surtout… me faire languir… »

C’est bien possible. Et franchement, je ne pensais pas que je prendrais un plaisir aussi intense à faire frémir un gars du bout de mes doigts. Mais à chaque petit mouvement de ses épaules, de ses hanches, comme si un arc électrique le touchait, je me sens sourire. Sans parler de ses soupirs qui se transforme en inspirations hachées.

Quand enfin, je le pénètre, l’irréalité se fait encore plus présente. Je fais l’amour à mon meilleur ami… Je nous revois nous amuser, nous charrier. Je revois tant de nous. Mais jamais mon cerveau ne m’avait permis de penser à ce nous-là, ce nous si proche, à se fondre l’un dans l’autre. Mon esprit exulte, et pourtant, il n’y croit toujours pas. J’ai beau embrasser tout Simon, son cou, ses épaules larges, j’ai beau sentir mon corps claquer contre le sien, mon entrejambe tendu, mon sexe pris dans cette chaleur étroite, mes couilles qui viennent taper contre les siennes, ça reste irréel. Et pourtant, chaque détail me rappelle l’imparfait de la situation, de notre couple. Mon imparfait, mon impatience, ma dépendance, je veux Simon, je le veux trop, tout le temps.

J’essaie de me retenir du mieux que je peux. J’ai vraiment l’impression qu’une éternité se déroule alors que la sensation autour de mon sexe devient trop intense, que mes hanches veulent juste accélérer. Je veux prouver que je ne suis pas un bon en rien, au moins en matière de sexe. Et alors que je le fais soupirer, gémir et crier mon nom, mes doutes s’apaisent, une petite fierté flotte sur mon cœur, y posant un baume léger. L’irréalité se transforme, ne laissant que deux mecs imparfaits pris dans un orgasme bruyant.

* * *

Simon me retrouve une heure plus tard, devant la fenêtre et j’ai même pas tenté de faire croire que je m’installais sur le balcon. Au début, je longeais le balcon, les pieds de côté, pour me mettre bien à l’extérieur. Après, je passais seulement la moitié du corps dehors. Là, j’en suis au dernier level de la flemme, j’ai juste poussé la fenêtre et la fumée, attirée par la chaleur, reste dans l’appart en grosses volutes.

Je l’entends mais je continue de scroller sur mon téléphone, scrutant les demandes de subventions, le prix du matos dont je vais avoir besoin si je vois plus grand, la TVA applicable, non applicable. Moi qui pensais qu’avoir réussi à pocher cette foutue meringue correctement était un exploit, j’avais pas encore tenté l’administration. Je ne vais pas y arriver, je vais me planter et entraîner Simon avec moi. Simon, Yass, Étienne, ils vont tous me regarder comme un raté. Je ne me suis senti ainsi que sous le regard de ma famille. Je peux presque voir ma mère et mon frère en train de sourire de concert, presque amusés à l’idée que j’essaye de monter mon entreprise, quand mon père attend que je cesse enfin de leur faire honte.

Simon s’installe et me prend dans ses bras, puis il m’enlève la cigarette des mains. Pendant une seconde, je vois bien qu’il résiste à l’envie de la porter à sa bouche. Je lui reprends sans un mot, honteux, et l’écrase dans le cendrier.

« On va reparler de cette histoire de sevrage, Evan. »

Je hoche la tête, cherchant qu’est-ce qui pourrait bien taire mon anxiété si je n’ai plus une clope pour me calmer. C’est pas possible de rester pour toujours dans l’irréalité de notre lit ?

« Pense aux menottes, alors, Chewie. Parce que je crois que je suis sacrément dépendant.

– Ne me tente pas, ça pourrait finir par arriver, soupire-t-il en regardant la fumée gagner le plafond. »

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