Chapitre 9 : L'aube sur la montagne

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Lucie avait laissé Razab commander les chambres de cette mystérieuse auberge. Et lorsqu'elle lui souhaita bonne nuit pour aller enfin s'allonger sur son lit, elle fut assaillie d'une profonde fatigue ; ce qui ne lui paraissait pas très naturel étant donné qu'elle se trouvait dans un lieu totalement étranger, entourrée d'inconnus parfois menaçants, et dépendante d'un garçon qu'elle avait rencontré le jour même. Tout ceci aurait dû la maintenir éveillée jusqu'à l'aube, mais une fois de plus, elle sentait qu'au milieu de cet environnement il y avait des choses qui la dépassaient ; et si on voulait qu'elle dorme, elle avait du mal à y résister. Finalement elle ne put lutter et tomba dans le sommeil en tenant le petit flacon qui contenait Moz serré contre elle.

Le lendemain, les rayons du soleil l'aveuglèrent à travers ses paupières fermées ; impossible de dormir plus longtemps. Elle s'étira dans les draps cotonneux de son lit, avant de se lever d'un bond. Aujourd'hui, elle partait enfin dans les montagnes : c'était la dernière ligne droite.

S'étirant pour bien se réveiller, elle sortit une boulette de tissu de sa tunique et la fit rouler un instant entre ses doigts. Puis après inspection, elle sembla finalement satisfaite : oui, elle porterait ça aujourd'hui. Par chance, il y avait un lavabo dans sa chambre, et le robinet de cuivre qui scintillait au soleil semblait lui dire de l'utiliser. Elle en fit couler une goutte limpide, dont elle humidifia la boulette de tissu : celle-ci se mit immédiatement à gonfler jusqu'à s'envoler dans les airs en prenant la taille et l'aspect d'une tunique neuve qui plana un instant avant de retomber sur Lucie. La jeune femme attrapa les habits et les porta à son visage pour en humer l'odeur : ça sentait bon le propre, un vrai plaisir à porter !

Quelques minutes plus tard, elle descendait les escaliers de bois pour rejoindre les salles d'accueil de l'auberge, toute fringuante, une nouvelle cape voltigeait derrière elle tandis que sa main écarlate deumeurait cachée sous un gant de soie neuf. Elle n'avait aucune idée d'où se trouvait Razab, peut être dormait-il toujours, ou bien peut être qu'il était parti tout simplement sans l'attendre. Lucie n'écartait pas la possibilité qu'il soit en fait un charlatan, aussi n'espérait-elle pas trop de lui. Elle l'attendrait tout de même jusqu'à l'après midi, au cas où. Les gens allaient et venaient dans les couloirs grinçants ; c'était une foule si colorée et si variée que la jeune femme aurait eu bien de la peine à pouvoir y reconnaître qui que ce soit. Elle ne revenait toujours pas du fait qu'un tel établissement, avec autant de fréquentation, puisse exister à ce point en marge de Capitale-ville ou de toute autre civilisation.

Le lieu finit par l'opresser et elle sortit pour respirer un peu d'air frais. Elle espérait juste ne pas retomber sur le mage invisible, mais si cela devait arriver elle savait comment lui faire mal, et elle se convint qu'il ne lui faisait pas peur.

Le temps passa, elle observait à bonne distance les gens qui arrivaient dans l'auberge, ils semblaient venir de loin et apporter avec eux des cultures très différentes ; d'autres s'en allaient, ils paraissaient parés pour un long périple et Lucie se demanda quelle était l'histoire de tout ce petit monde. Après tout, elle-même avait son propre passé, aussi compliqué soit il, mais elle ne doutait pas que tous ceux qui se trouvaient ici en avaient un au moins aussi étonnant que le sien. Elle se demandait bien ce que Razab aurait à raconter à ce sujet ; sûrement beaucoup de choses, il lui semblait avoir une profondeur insondable.

Mais elle n'eut pas plus de temps pour y penser : se frayant un chemin dans la foule, le jeune homme sortait de l'auberge, ses yeux marrouges fixés sur Lucie d'un air résolu. Il semblait tester sa détermination du regard : était-elle toujours décidée à partir en expédition dans les montagnes ? Sans hésiter, elle lui rendit son regard sans toutefois parvenir à cacher un sourire en coin, trahissant son excitation face au grand départ. Razab, sans venir jusqu'à elle, lui fit un signe de tête impassible pour lui indiquer de le suivre. La jeune femme, soulagée, se saisit du petit flacon blanc qu'elle gardait toujours avec elle et le déboucha avec grand plaisir : une germe de flammes ardentes, et Moz apparut en tourbillonnant dans l'herbe verte tandis que les cheveux au vent, sa maîtresse faisait le premier pas d'une ligne droite dans les montagnes.

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