Chapitre 2

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Loup laissa la ville de Tarbes loin sur sa gauche, préférant emprunter les petits sentiers qu’il avait coutume de parcourir dans ses jeunes années aux côtés de son seigneur. Son cheval mâchouilla le mors et gratta le sol quand son cavalier sembla hésiter sur la direction à suivre entre la plaine d’Adé et la lande de Bartrès. Loup caressa l’encolure de Myrtille, calmant les tressaillements du fidèle destrier qui partageait sa vie depuis plus de huit ans. La jument était née dans les lointaines contrées de la Terre sainte et sentait certainement que sa vie se terminerait, ici, dans ces paysages qu’elle ne connaissait pas. Le chevalier la fit grimper vers la lande de Bartrès, d’où on pouvait voir la résidence principale du comté. Ils longèrent le bois touffu avant de s’avancer au milieu d’un champ où broutaient paisiblement des moutons. Des bergers l’observaient, au loin, sans s’aventurer plus avant face à cet homme en tenue de combat et dont ils ne connaissaient pas les armoiries frappées sur le bouclier attaché à la selle de voyage. Le château comtal de Lourdes, imposant, se dressait fièrement sur son piton rocheux, flanqué par ses deux gardiens, le Jer et le Béout. En arrière-plan, les Pyrénées, vieilles montagnes sombres et inquiétantes, attendaient, silencieuses, que le temps des humains s’écoule. Loup, les mains sur le pommeau de sa selle se dressa sur ses étriers pour se détendre un peu les jambes. Il se dirigea vers les bergers dont le plus ancien leva son bâton : à la fois pour saluer et mettre en garde. Le chevalier arrêta sa monture et descendit, la tenant par la bride, son autre main levée, paume vers les bergers, en signe de paix.

— Je suis Loup d’Ostèr, de la vallée de Castelloubon.

Les bergers s’appuyèrent sur leur bâton. Ils reconnaissaient le nouveau venu comme un des leurs. Il parlait la langue du pays.

— Tu reviens de loin on dirait, Loup d’Ostèr ? demanda le plus jeune, s’attirant aussitôt un regard mauvais de la part de son aîné.

— Dioubiban ! Ne vas-tu pas apprendre les bonnes manières ! On ne donne pas du tu à un chevalier ! Veuillez l’excuser, Mon Seigneur, il est encore jeune et n’a pas croisé les gens du grand monde, vous savez.

— Il n’y a pas d’offense ! Je ne suis pas un seigneur, mais un simple chevalier qui s’en revient des croisades. Il se fait tard, et je n’ai pas envie d’arriver dans cet état de fatigue à Lourdes. Vous savez si une famille pourrait m’offrir le gîte et un bain ce soir ? Je paye, bien sûr.

— Y a le curé, pour sûr, là-bas, on aperçoit son clocher. Mais question bain, le gars, il ne semble pas connaître. Venez chez nous. On a une belle source qui nous donne une bonne eau qui lave bien.

Il envoya son fils en éclaireur pour prévenir la maisonnée de l’arrivée imminente d’un invité. Le chevalier sortit une bourse de cuir mais l’aîné posa la poignée de son bâton de berger sur sa main.

— Pas besoin de ça, Chevalier. Pas besoin de ça pour les envoyés du comte de Toulouse.

Le chevalier leva légèrement la tête, dardant son regard vert sur le visage franc de son interlocuteur.

— Comment que je le sais ? Votre chevalière là, sur votre main, elle est frappée de la croix du comte. J’en ai vu une, quand j’étais allé à Toulouse pour une affaire dans ma jeunesse. On en parlera ce soir, si vous voulez bien, quand la maisonnée sera couchée.

Le berger se rapprocha, ses yeux noirs scrutant tout autour, il prit le bras du guerrier avec une poigne étonnement forte mais légèrement tremblante.

— Vous venez pour les Disparitions, c’est ça ? Non, ne me dites rien ! Quand on en parle trop, le Malheur arrive. Venez, suivez-moi !

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