#Bonus 3 : On trace sa route par Brian

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Sarah était à la bibliothèque. C'était étrange, elle n'était pas censée être en cours de Chimie ? Je remis ma casquette, mes lunettes de soleil et je me dirigeai vers elle. Elle n'étudiait pas, mais envoyait des SMS. Ça ne m'étonnait pas trop de sa part. Je posai mon sac sur la table et je la vis sursauter. Elle leva ses grands yeux vers moi et j'y lus une pure incompréhension.

-Mais qu'est-ce que tu fais ? 

-Je suis incognito.

Je souris. Elle eut un petit air excédé et je retirai à moitié mes lunettes pour qu'elle voit l'éclat de rire de mes yeux.

-Mais bref, trêve de plaisanterie. Ce soir, toi et moi, on trace la route. Comme Christophe Maé.

-Comme qui ? fit-elle sans comprendre.

Je me mis à rire doucement. Ce n'était pas étonnant. J'avais désormais cette chanson en tête « Viens, faire un tour dans ma tête pour voir tout ce qu'il s'y passe et ce qui m'empêche de sourire » Ça m'apprendra à faire des blagues sur la culture française. 

-Je vais laisser ma voiture à Alex après sa colle, on prend la tienne et on part ?

-On part où ?

En enfer. J'avais envie de lui répondre ça mais je ne pouvais pas. Elle n'allait pas suffisamment bien pour ça.

-Tu verras. Au fait, comme j'ai eu un trou d'une heure, je suis parti à la maison faire nos valises.

-Tu as fouillé dans ma commode ?

-J'ai pris la pile sur ta commode et je l'ai mise dans un sac de voyage, répondis-je un brin exaspéré. Point. J'ai pas sniffé tes culottes ou autre perversion de ce genre.

-Dieu merci ! Il ne manquerait plus que ça ! 

-Bref, après mon entrainement, on flie. Sois à l'heure, sinon je peux te jurer que je te traine parce ce qu'il te reste de cheveux, comme un homme des cavernes.

Je lui fis un clin d'œil pour qu'elle comprenne la boutade. J'eus un léger sourire et je remis mes lunettes avant de quitter la bibliothèque.

Alors que j'étais à mon casier, Alex me sauta dessus. Ça me faisait du bien de la voir. Je la trouvais particulièrement jolie ce jour-là.

-Je me suis faite collée à cause de cette saleté de prof de chimie. Cette grognasse. Parce que j'ai souri quand McAllister a quitté le cours tout à l'heure. Enfin bref, tu fais quoi de beau ce soir ? 

-Tu sais que je vais en week-end avec Sarah..

Alexandra reprit une tête plus sérieuse et se fourra dans mes bras.

-Ah oui, pour savoir si elle fait une dépression ou pas. Je t'ai dit que ça ne m'étonnerait pas. Tu sais que ma tante a fait une dépression l'an dernier et elle se comportait un peu comme elle peut le faire elle. Après peut-être que je me plante. Je ne suis pas psy. C'est gentil de ta part de t'occuper d'elle alors que tu l'aimes pas.

-Certaines choses ne dépendent pas de moi, tu le sais Alex. 

-Je sais que tu le fais pour ta mère et je trouve ça encore plus admirable... Tu sais quoi ? Je pense qu'on devrait louper l'heure du déjeuner et aller faire un truc un peu plus.. intéressant. Qu'est-ce que tu en penses ?

-Tu me rends faible Alex.. je passe te prendre à la fin de ton cours.

-On va chez moi ? 

-Je vais te cuisiner.

-J'espère bien. 

Je souris. Je savais pourquoi elle faisait ça. Elle avait peur de me perdre de nouveau. C'est pour ça que j'y allais. Pour lui faire comprendre que rien n'avait changé entre nous. Elle était ma rouquine et j'avais l'intention de la garder. 

Nous avions roulé jusque sa maison sous un soleil éclatant.

-C'est le bordel. Ne fais pas attention, me dit-elle alors que je me garai.

-Ton père ré-emménage ?

-Apparemment. Ma mère ne voulait plus de lui, il est parti, et il revient parce qu'elle l'appelle au secours. Va comprendre la logique là-dedans. J'ai eu la paix pendant un petit moment. Au moins, ils n'ont pas passé leur vie à s'engueuler pendant le repas. J'espère que ça va tenir cette fois.

-Je te trouve cynique, dis-je en lui ouvrant la portière.

-Honnêtement Brian. J'en suis venue à me demander si le mieux ce n'est pas qu'ils divorcent. Je crois que si je ne t'avais plus, je n'y arriverai pas. Avec les filles ce n'est pas pareil tu vois..

-Elles ont une petite vie parfaite, bien lisse et sans défaut. Tu sais que tu peux compter sur moi mon Alex. 

Je l'arrêtai dans l'allée de sa maison.

-Tu le sais n'est-ce pas ?

-Oui, me répondit-elle avec une voix pleine d'émotion. 

Cette fille m'avait ouvert la porte de son cœur. Je devais le manier avec précaution maintenant qu'il était entre mes mains. Il y avait en effet, des cartons partout et nous allâmes directement dans la cuisine.

-Alors ? Je te propose de la soupe, de la quiche et du fromage. 

-Parfait pour moi. 

-Je vais devoir aller faire les courses tout à l'heure. Ça me saoule. On mange dans ma chambre, ça te va ?

-Pourquoi ça ne m'irait pas. Je dois t'avouer que je n'ai jamais tenté de manger de la quiche sur quelqu'un. 

Elle rit aux éclats. C'est ce que j'avais aimé en premier chez elle. Son rire. Pas celui qu'elle faisait au lycée mais celui qu'on avait quand on était juste tous les deux. Il lui arrivait parfois de rire tellement qu'elle était obligée de reprendre son souffle. 

Ensuite, j'avais aimé son soupir, celui qu'elle avait fait après notre tout premier baiser et notre première fois ensemble. Et là, alors que je lui caressai les seins, elle avait le même. Cette fille était réactive à mes caresses. J'aimais ça. C'était indéniable.

-Tu es à moi Alexandra Pilgrim. À moi et à personne d'autres. Je ne tolèrerai pas que tu sois à quelqu'un d'autres que moi. 

-Je suis à toi.

Je l'avais Millerisé. Non. C'était une expression à la Martin Miller et je ne pouvais pas penser à lui maintenant. Alexandra enfonça ses ongles dans mon dos. J'espérai que j'allais pas avoir de marques. Sarah n'aurait pas fini de se moquer de moi. Sarah. Son expression quand je m'étais envoyée en l'air avec Pim me revint en mémoire. Le pire moment de mon existence. Non je ne devais pas penser à elle alors que j'étais si près du 7è ciel. Ce n'était pas possible. 

-Ryan. Regarde-moi.

Oui. Elle avait eu raison de me distraire. Alexandra m'embrassa et resta à me fixer. Elle aurait voulu savoir à quoi je pensais. Mais la seconde d'après, elle ferma les yeux et se mordit la lèvre. Ça veut dire que j'allais pouvoir me décharger de toute cette pression en toute sérénité. 

-Tu ne me quitteras pas, n'est-ce pas Brian ?

-Pas avant que tu aies brisé mon cœur Alexandra. 

Ou que je tombe sur l'amour de ma vie, la seule, l'unique, la future mère de mes enfants. Mais ça, je ne pouvais pas lui dire. Je lui embrassai l'épaule et je commençai à grignoter. Cette petite entrevue avec ma petite amie m'avait ouvert l'appétit. Elle avait réussi son coup. Elle était dans toutes mes pensées pendant tout l'après-midi, jusqu'à ce que j'entende mon prénom dans les couloirs, devant la salle de retenue. C'était Sophie Harper, où je ne m'y connaissais pas. Je poussai un peu la porte de la salle de retenue. Ils étaient tous dans le fond entrain de parler autour de Sarah, l'air revêche, et ma petite amie. Ça me faisait bizarre de les voir toutes les deux entrain de parler, enfin, je devrai dire comploter. 

-Et pour cause, disait Sarah. Je n'étais pas pour, mais là, en fait, je crois qu'il ne faut aucune pitié ! 

-Qui s'y colle ? demanda alors Alexandra en regardant Sarah. Il faut ça ait l'air crédible et sans vouloir vous vexer, aucun des mecs de notre classe n'a assez de.. charisme pour ça.

Oh elle parlait de mon plan pour jarter la prof de chimie.

-Moi je vais le faire.

Ils se retournèrent tous. J'étais adossé au chambranle de la salle de retenue. J'écartai ma mèche rebelle. Sarah me demanda ce que je foutais là. Elle était vulgaire cette fille ! 

-Je viens donner mes clefs à Alex. Mais je veux bien le faire. C'est très simple en fait. Alex et moi on s'engueule devant tout le lycée. En mode bien trash. Il faut que quelqu'un siflle l'essence de la cible pendant ce temps là. Elle mange à la cafétéria tous les midis, ça fait plusieurs fois que je la vois. Je me propose pour la ramener chez elle, le soir venu quelqu'un nous prend en photo. C'est tout. Fin de la polémique. Au pire, ma mère sera convoquée, je lui dirai que j'ai essayé parce qu'elle est sexy. 

Alexandra commença à plisser des yeux. 

-Me regarde pas comme ça Alex, je me défendrai. Moi je ne serai pas inquiété et vous vous serez libre.

-Tu es machiavélique Brian.

-Merci Sophie.

Je lui décochai un sourire et je vis l'agacement chez Sarah.

-Ça ne change rien. Je peux lui demander des cours de chimie particulier parce qu'elle n'est pas ma prof. Vu comment est sa voiture, elle ne doit pas avoir beaucoup d'argent. Enfin bref. Il faut juste quelqu'un me suive. Et choppe le moment où j'essaierai de l'embrasser. Tout est une question d'opportunité. Ensuite, quelqu'un diffusera la photo en masse au lycée. Tu me pardonneras publiquement ma chérie et hop, on pourra refaire notre vie tranquillement. 

-Mais pourquoi toi ? On pourrait demander à n'importe qui ? s'exclama Alexandra visiblement peu rassurée.

-Pas si vous voulez qu'elle sache que c'est de votre part. Réfléchissez. Quelle meilleure vengeance que celle où la victime sait que c'est vous sans pouvoir rien faire. Qu'est-ce qu'elle pourra dire ? Mademoiselle Pilgrim m'a piégée ?

-Tu as raison. Je t'autorise à coucher avec elle si ça peut nous aider. De toute façon, nous serons fâchés, non ? 

Je ne m'y attendais pas du tout et je sentais le rose me monter au joue. Remarque. Elle était vraiment sexy.

-Je ne pensais pas aller jusque là. Mais okay. Je vais demander à l'oncle de Sarah comment son père a fait pour choper une prof au lycée.

-Tu veux le numéro de James ? 

Sarah venait de nouveau de capter toute mon attention. 

-Je comptais sur ton oncle Eric mais à la limite...

-Mon oncle James était un serial fucker. Encore plus que les autres. Tu devrais lui demander. 

-Mon seul souci c'est que c'est le petit frère de ton père.

-Et ? 

Cette fille était exaspérante. Elle ne comprenait rien, et il fallait toujours tout lui expliquer.

-Les petits frères finissent toujours par lâcher le morceau. Je ne veux pas que John soit au courant de cette histoire.

-Il peut être au courant que tu veux te taper une prof sans savoir pour autant que c'est pour une vengeance machiavélique. 

-Ouais, il faut que je file en entrainement. Bon week-end amore. 

Je penchai vers Alexandra pour sentir ses lèvres et comme je savais que tout le monde nous regardait, j'y mis un peu plus de moi-même. Ma main vint caresser sa mâchoire alors que le baiser était plus.. passionnel. Je la laissai. J'étais satisfait de moi. 

Pendant mon entrainement, je donnai tout ce que j'avais. Je n'allais pas faire du sport ce week-end. Du moins, pas ce genre de sport. 

-Alors ? Tu vas où avec Sarah ? me demanda Paul alors que nous faisions des pompes. 

-Kernville. Vous m'avez convaincu John et toi.

-Et tu vas lui dire qu'elle est entrain de totalement débloquer ?

-C'est un peu l'idée. John ne le sait pas mais je pense qu'il faut que quelqu'un le fasse. 

-Oui. Tu as raison.

J'appréhendais ce week-end en tête à tête avec elle. Et s'il lui arrivait malheur et qu'avec une faute d'inattention de ma part, elle se jetait du haut d'une colline ? Je n'aurais peut-être pas dû m'engager là dedans mais.. elle souffrait. C'était indéniable. Elle semblait être l'ombre d'elle-même. Je ne la connaissais pas depuis suffisamment longtemps mais je savais reconnaître la détresse quand je la voyais et Sarah était en pleine détresse. Elle était trop fière pour l'admettre. C'était tout. Je regardai ma montre alors que j'attendais Sarah à la sortie. Elle était en retard. Elle était exaspérante. On avait de la route à faire et moi aussi j'avais une journée de lycée dans les jambes. Je la vis arriver avec Sophie, elle me regarda et quitta son amie. 

-Tu es en retard. Ça fait 10 minutes que je t'attends. Je prends le volant.

-Pardon ? 

-Tu m'as entendu. Je prends le volant. Toi, tu n'as qu'à te reposer.

Elle me tendit ses clefs et je pus ranger les sacs dans son coffre de voiture. Il y avait une roue de secours, une trousse de premier secours et une petite boîte à outil. Cool. Au moins John avait pensé à tout en offrant cette voiture à sa fille. Elle n'avait pas l'air rassurée de laisser son bijou entre mes mains. 

-Je n'abîmerai pas ton bébé, ajoutai-je en démarrant.

-Oui.

À nous Kernville ! Je n'étais jamais allée là-bas mais j'avais envie d'essayer avant d'y aller avec mes potes. Paul m'avait dit que c'était assez sympa et qu'on pouvait faire de belles randonnées. J'avais hâte. Le soleil baissait. C'est ce que j'aimais en Californie. C'était juste beau de voir le soleil se coucher. 

-Tu as mangé quoi ce midi ? demandai-je à Sarah alors qu'elle regardait dehors.

-Un cappuccino.

-Je t'ai demandé ce que tu as mangé, pas ce que tu as bu, m'agaçai-je en passant une main dans mes cheveux.

-Je t'ai répondu, je n'ai pris qu'un cappuccino.

C'était bien ce que j'avais entendu. Cette fille me rendait malade. Elle allait plus mal que je le pensais. 

-Mais tu n'as rien mangé ce matin ! m'exclamai-je en resserrant les mains sur mon volant.

-Si j'ai pris une banane chez Sophie.

-Donc tu as pris une banane et un cappuccino dans toute ta journée, soupirai-je. Autant te le dire, tu vas devoir manger là où on va. 

-Et on va où ? 

-À Kernville.

Il y eut une seconde de silence. 

-Tu es sérieux ? Qu'est-ce que tu veux que j'aille faire là-bas ? 

-Que tu te détendes... Face à la nature.

-On ne va rien capter du tout ! bougonna-t-elle. Y'aura que ça la nature Brian.

-Tu n'aimes pas la nature ? 

-Ce n'est pas ça. Je ne pensais pas que toi tu aimerais ça à ce point. 

-Tu m'as vu au Texas pourtant, ajoutai-je avec un peu d'amusement et de surprise. 

-C'est vrai, fit-elle. L'amoureux de la nature, c'est une des nombreuses personnalités de Brian Miller. 

Elle était entrain de me regarder, je le savais. Je sentais des picotements là où son regard se posait et un frisson me parcourut. Je devais faire quelque chose pour arrêter ça. J'étais dans les embouteillages de toute façon.

-Ce n'est pas une de mes personnalités. Je n'ai pas de dédoublement de personnalités, j'ai simplement plusieurs facettes. 

Je pris des barres de céréales dans mon sac et je lui en tendis. 

-Tiens, prends une barre de céréales. Ça te redonnera des couleurs, le temps qu'on arrive, je ne pensais pas que tu étais anorexique. 

-Je ne le suis pas, j'avais pas faim, c'est tout. Merci pour la barre, ajouta-t-elle en croquant tout de même dedans.

Ça me rassurait de l'entendre mastiquer. Je mis un peu de musique et je tapai en rythme sur mon volant.

-Tu as passé une bonne journée ?

-Oui, très bonne. J'ai bien profité de ma copine. On a pu avoir un peu de temps tous les deux. En fait, ça se passe bien entre Marc et toi ?

-Pourquoi ça ne se passerait pas bien ?

Parce que tu n'en parles jamais à la maison par exemple ? 

-Je demandais juste ce que ça faisait de sortir avec un étudiant. Je sais que les filles ont besoin constamment d'être rassurée dans leurs sentiments et de nous voir.

-Tu serais pas un tout petit sexiste ?

-Je me considère comme un féministe.

Elle éclata de rire et croqua dans une seconde barre de céréales qu'elle prit directement dans mon sac sans me demander.

-Quoi ?

-Toi.. un féministe ? Avec tout ce que tu balances sur les filles ?

-Je veux dire, dans le fond, je suis un féministe. Je suis pour une parfaite égalité entre les hommes et les femmes. Je suis pour le partage des tâches. Je suis pour l'égalité des salaires. Je suis pour que les les femmes partout dans le monde aient le droit au même traitement que les hommes, qu'elles puissent s'habiller comme elles veulent, manger ce qu'elles veulent, aller à l'école. Je suis un féministe parce que j'ai été élevé par une féministe. Y'a rien de troublant là-dedans. 

Elle ne savait plus quoi dire.

-Non c'est vrai. Et puis il faut dire que tu vas même acheter des tampons pour ta mère alors.. partant de ce principe, il est sûr que tu n'es pas misogyne. 

-Encore heureux. De toute façon, j'épouserai aussi une féministe comme ça, l'affaire sera réglée.

-Parce que tu as l'intention de te marier Brian.

Je me tournai vers Sarah.

-Évidemment. Le mariage ou encore les partenariats enregistrés c'est simplement dire à la société, oui je suis avec cette personne, c'est elle qui partage ma vie et mon cœur. Je ne vois pas ce qu'il y a de mal à ça. Même si je n'ai jamais d'enfants avec elle, je trouve ça bien de clamer au monde son amour. Pas toi ?

-Oh si, j'ai prévu les détails de mon mariage depuis l'âge de 4 ans, je te signale.

-Ah ouais ?

-Oui, quand je me suis mariée avec le cousin de Paul dans le jardin de McDust. C'est Paul qui a présidé le mariage. Et Sophie s'est mariée avec Paul après. C'était super mignon. Je pense que je dois avoir une photo de ce moment.

Je comprenais mieux pourquoi il ne lâchait pas l'affaire dans ce cas. 

-Et tu l'as revu après.. ton mari ?

-Oh non. On a divorcé l'heure d'après. Incompatibilité d'humeurs. Il voulait jouer aux petites voitures, moi à la poupée. Il m'a dit que « les poupées c'était pour les filles ». Je l'ai poussé, je lui ai dit : « je t'envoie les papiers du divorce ». Ma mère disait toujours ça à mon père pour rire. Et je suis partie jouer avec ma poupée. 

Nous arrivâmes à Kernville, une heure plus tard, après un peu plus de trois heures de route. Il faisait nuit mais les étoiles resplendissaient dans le ciel. Sarah ouvrit sa portière avant moi et je la vis contempler le paysage. Elle avait l'air sereine. Paul avait raison, l'endroit était.. magnifique. C'était la montagne dans toute sa beauté et c'était pas si loin de chez nous. The Kern Lodge. J'étais content de découvrir cet endroit. Je me rendis à l'accueil après avoir déchargé nos sacs.

-Bonjour madame, j'ai fait une réservation au nom de Miller. 

-Ah oui, la réservation d'hier, vous avez eu de la chance ! Vous avez le dernier bungalow de libre. J'espère que vous allez passé un agréable séjour ici.

C'était une vieille dame qui avait l'air sympathique. Je pris mon air petit fils de bonne famille. Elle me tendit les clefs, me fit signer le registre et je la remerciai chaleureusement. Je tendis les clefs à Sarah le temps de porter nos affaires. Je n'allais pas la laisser faire. Il y a certaines choses qui devaient rester la prérogatives des hommes et porter un sac lourd, c'était le cas. Notre bungalow était assez éloigné. Sarah ne parlait pas, trop occupée à regarder l'environnement avec un air enfantin. 

Le bungalow était super beau. J'aimais voir le bois apparent et il y avait une vue magnifique. Nous étions assez loin de l'accueil et de notre voiture mais ce n'était pas un souci. J'avais l'impression d'être seul avec Sarah. Tout était très calme. J'ouvris la porte du bungalow et je vis un grand lit. Et merde. Je scrutai la réaction de Sarah. J'étais un peu dégoûté de devoir dormir avec elle. Je ne voulais pas la gêner. J'avais tendance à avoir un sommeil agité depuis quelques jours. Je lui avouai que c'était le dernier logement disponible.

-Pour une vue comme ça Brian, il faut savoir faire des compromis et puis c'est pas la première fois qu'on finit par dormir l'un avec l'autre. Je vais aller prendre une douche.

Elle prit ses affaires de toilettes dans son sac et se dirigea vers la salle de bain comme si elle était chez elle. Elle se sentait à l'aise, tant mieux. J'allais en profiter pour aller faire des courses. J'avais vu une supérette pas loin. En plus j'aurais le temps de réfléchir un peu, tout seul. 

Je devais dire à Sarah que je voyais qu'elle n'allait pas bien mais.. elle allait prendre ça pour une agression verbale si je lui disais ça comme ça, sans pincette. C'était probablement avec Sarah que j'aurais pu le mieux m'entendre mais elle ne me laissait pas l'approcher. Elle n'avait pas compris que j'avais besoin de temps pour faire confiance aux gens et que oui, j'avais eu des doutes sur son père. Qui n'en aurait pas dans ma situation ! Ils s'étaient mariés très vite ! Et en plus de ça... c'est dans ma nature profonde la taquinerie. J'avais toujours taquiné Jay comme ça et ça ne l'avait jamais dérangé, lui.

Ma mère avait essayé de me mettre en garde avant qu'on emménage chez eux, une semaine après leur mariage. 

-Brian, tu devras être gentil avec Sarah.

-Pardon ? Je suis toujours gentil M'man.

Il ne restait plus que notre canapé et nos affaires personnelles dans notre appartement. Il n'avait pas été longtemps notre appartement mais j'avais l'impression de quitter ma vie. Ma mère m'avait fait signe de m'asseoir sur le canapé.

-Je sais que tu es très doux et gentil quand tu le veux. Mais il faut que tu le veuilles et je te demande de le vouloir avec la fille de John. 

-Je sais me comporter avec les gens de mon âge, t'inquiète..

-Ce que je veux dire par là Brian, c'est que Sarah n'est pas seulement quelqu'un de ton âge. Ce n'est pas Jay, ce n'est pas Dan et tous tes amis. Sarah n'est pas Tara. Elle va réagir différemment.

Bourgeoise coincée. C'était ce que pensait ma mère sans vouloir le dire. 

-On a eu le droit de se voir quelques fois avant le mariage. Au moins 4 ou 5 fois. Je sais comment elle est.

-C'est une fille douce qui a vécu la mort de sa mère. Elle est encore fragile. Et toi tu es.. tu es un garçon un peu plus brute de décoffrage. 

Ma mère avait souri.

-Je crois que tu es plus endurci qu'elle. Tu me promets de faire ton possible pour l'intégrer à votre fratrie ?

-Okay, mais je ne ferai pas tout. Je la traiterai comme n'importe qui. Pas comme un petit oiseau blessé. C'est pas mon genre Maman.

Je ne l'avais pas vraiment écouté. Et c'était peut-être de ma faute si Sarah était aussi mal. C'était ce que je pensais en arrivant dans la supérette. Il n'y avait que de super trucs bons à manger et j'avais faim. Je vis une fille s'étirer pour attraper une boîte mais elle n'y arrivait pas. Elle avait un derrière du tonnerre. Je passai à côté d'elle et je l'attrapai à sa place.

-Merci. 

Elle devait avoir à peu près mon âge. 

-De rien. 

Elle rosit et comme je vis qu'elle avait l'air gêné, je préférai passer mon chemin. Draguer une fille consentante, c'est un fait. Mais elle, elle était juste embarrassée. 

Lorsque que je poussai la porte du bungalow les bras chargés, je vis Sarah en sous-vêtement. Décidément, elle avait bien changé depuis le temps où je l'avais appelé Petit Bateau. Adieu les mignonnes petites rondeurs qu'elle avait. Elle avait beaucoup maigri, dessinant une silhouette qui ferait pâlir certaines de mes ex. Mais je ne devais pas m'attarder plus longtemps. 

-C'est cool, tu as terminé. J'ai été à la supérette du coin pour acheter de quoi nous sustenter un peu. Je vais faire la cuisine, tu peux ranger les courses le temps que je prenne une douche ?

Je posai les courses et je pris ma trousse de toilettes. L'eau chaude me fit du bien. Étrangement, elle me remit les idées en place. Ma mère avait laissé un mot sur mon gel douche : Acheté par ma Maman, c'est la meilleure,. Elle veut que je sente bon. Ma mère me faisait toujours rire. Même quand elle était loin de moi. Je n'avais pas pris de vêtements avec moi et je sortis en serviette. J'étais essuyé mais fumant. Je vis Sarah poser son regard sur mes épaules et le descendre petit à petit vers mes pieds. À quoi pensait-elle ? Je me détachai de ses yeux pour l'observer dans sa globalité, elle avait faim.

-Je vais cuisiner et le temps que ça mijote, on va faire un tour dehors.

-Okay. Je vais sur le balcon. 

Elle se redressa, prit son manteau et sortit. Je m'habillai et préparai du thé. Il faisait froid. Rien de mieux qu'un bon Chai Tea pour aller mieux. Je lui en sortis une tasse et je préparai une sorte de ragoût. J'aimais tellement cuisiner. C'était un véritable plaisir pour moi. Et en plus, je savais que Sarah aimait ma cuisine. Elle aimerait forcément et elle mangerait. Au moins, j'aurais la satisfaction de la voir avaler quelque chose. Je la rejoignis sur le balcon et je me mis à lui parler du programme de demain mais encore une fois, elle était partie dans un monde où elle était seule. Elle ne m'avait pas écouté une seule seconde. Je soupirai.

-On aura qu'à aller se promener après si tu veux. 

Elle me regarda, regarda à l'intérieur de la maison et je compris qu'elle avait les crocs.

-J'ai la dalle.

Elle rentra dans le bungalow, prit un cuiller et souleva le couvercle.

-C'est chaud, tu vas te brûler.

Elle goûta se brûla mais elle fit quand même un sourire. Elle me faisait rire avec sa petite tête coupable.

-Je te l'avais dit ! Et il faut lui laisser encore une quinzaine de minutes pour qu'il soit encore meilleur.

Elle leva les yeux au ciel. Elle avait récupéré cette tendance de moi, c'était pas possible ! Elle attrapa un paquet de Pringles, elle me lança une canette et me rejoignis sur le lit. On avait une table mais c'était moins drôle. On était encore jeune, on pouvait se permettre de manger des chips au lit. On ne le ferait plus après. Je vis à ses yeux qu'elle voulait se confier. 

-La dernière fois que je suis venue ici.. c'était après la mort de ma mère. 

Bingo. J'avais raison. Certains signes ne trompaient pas.

-Papa avait besoin de prendre le large mais il ne voulait pas aller au trop loin au cas où. Ce n'était pas dans cet hôtel par contre. Je ne me souviens plus du nom. Mais on a parlé, parlé, parlé. Je crois que j'en ai plus appris sur le couple de mes parents en un week-end qu'avant le décès. 

Attends.. quoi ? Je ne pus empêcher un rire de franchir mes lèvres. 

-Quoi ? 

Elle avait l'air fâchée, je devais m'expliquer. 

-Il prend le large.. à Kernville ?Alors qu'il a une maison à Malibu ??? Ton père ne finira pas de m'étonner.

-C'est clair. Et encore, tu ne l'as jamais vu faire un feu de camp. C'est tout une histoire, il est tyrannique. Il était scout quand il était petit et vraiment.. c'est terrible. 

Elle prit une autre chips et bu du soda. Est-ce qu'une anorexique mangerait comme ça ?

-Ce n'est pas étonnant. Tu ne m'as jamais vu camper nul part. Moi aussi. Je le comprends. C'est pas le moment que quelqu'un ne fasse pas ce qu'il doit faire quand toi tu te fais chier à faire le feu pour tout le monde. Allez bouge ton gros cul. On va danser.

-Danser ? s'étonna-t-elle.

-Et oui, on va mettre de la musique. Y'a personne à côté de nous. Personne ne nous entendra. On va danser et on va se faire plaisir. Parce que dans la vie, il faut savoir profiter de chaque instant. Allez !! DEBOUT.

J'avais envie de m'amuser un peu. Je la tirai par le bras et elle se retrouva contre moi. Je la fis tourner et je mis de la musique sur mon iPod. Elle ferma les yeux, laissa peu à peu la musique l'envahir et elle se mit à danser. En plus c'était un morceau de Mozart l'Opéra Rock. Six Pieds sous Terre. Heureusement qu'elle ne comprenait pas les paroles, elle aurait pu le prendre mal. Elle dansait en rythme avec la musique. Je dansai avec elle pendant cette chanson et dès que la chanson changea, j'allais finir le dîner. Je la gardai en ligne de mire. Elle bougeait vraiment bien quand elle se lâchait totalement. Cette fille avait besoin de ça. De se lâcher. De faire fi des conventions qui la brimaient. Je regardai ses hanches bouger en rythme avec la musique. Elle ouvrit les yeux et me regarda. Son regard était intense, tout comme le sourire qui était sur ses lèvres. 

Et en plus elle adora ma cuisine. Je vais devenir obèse si je mange comme ça tous les jours mais rien à foutre. C'est hyper bon Brian. Après le repas nous nous promenâmes pour digérer. Il y avait un lac en contrebas. Elle me dit qu'elle allait prendre une photo. J'étais entrain de faire des ricochets et elle me regarda. Elle essaya et son galet fit juste un gros « plouf ». Je me mis à rire et elle me lança de l'eau dessus. Je savais que c'était pour jouer mais je voulais la faire marcher. Comme à chaque fois. Je cessai de sourire instantanément et je la fixai méchamment. Elle recula et se mit à courir. Elle était complètement malade cette fille. Je la poursuivis. Elle allait forcément se viander et se péter un truc. C'était pas le genre de fille très.. adroite. Je la vis se prendre les pieds dans une racine que personne d'autre n'aurait pu louper. Elle avait la tête à deux centimètre d'une flaque de boue. Elle se retourna et je m'assis sur elle, lui plaquant les mains au sol. Elle riait tellement que des larmes coulaient de ses yeux. On entendait qu'elle. J'entendis du bruit et je vis un couple nous regarder. La femme me fixait choquée, alors que son mec lui, était plutôt.. intéressé parce que je pouvais bien essayer de faire. Il avait visiblement envie d'arracher le string de sa partenaire fissa et de s'y loger le temps d'un plaisir fugace. 

Je me dégageai soudainement et j'aidai Sarah à se redresser. Il l'observa. Je n'appréciai pas du tout. Je la pris par la main et je l'entrainai loin de ce regard graveleux. Mais je ne voulais pas l'inquiéter, elle ne semblait pas spécialement à l'aise. 

-Tu as vu la tête du mec ? lui dis-je en riant, comme pour exorciser mes propres pensées. Je crois qu'il mourrait d'envie de voir ce que je pouvais bien te faire alors que tu étais allongée sous moi. 

-N'importe quoi !

Elle réfléchit quelques secondes. 

-C'est vrai qu'il avait un regard lubrique.

-Non mais grave. Maintenant, il doit sûrement penser que je vais te culbuter contre un arbre ou quelque chose dans le genre, ajoutai-je en constatant que j'avais raison. 

-Sûrement. Vu que vous les mecs vous ne pensez qu'au sexe.

-Parce que tu n'y penses pas souvent ? 

Elle eut un sourire si similaire à celui de son père que ça me fit un choc. 

-J'ai été élevé par mon père. 

-Wow. La justification de merde. 

-Oui, c'est vrai. Ou alors, dis-toi, que tu as déteint sur moi. Ou que le sexe avec mon mec c'est.. mirobolant.

-Hum. Évidemment. Je commence à avoir froid, on devrait aller se coucher.

Je n'avais pas spécialement envie de cesser cette promenade mais j'avais vraiment froid. 

-J'ai un sens de l'orientation pourri, avoua-t-elle avec une charmante timidité, alors dans le noir, ça va être dur.

-Moi qui allais te proposer un cache-cache, ironisai-je.

-Ça ne me dérange pas ça mais.. pas pour rentrer au bungalow.

-On fera ça demain.

-Demain ? 

-On reste jusqu'à dimanche matin. Tu ne le savais pas ?

-Tu n'avais pas précisé cette donnée en fait, soupira-t-elle.

-Lol. J'ai un idée. Ferme les yeux.

Elle m'obéit instantanément. J'avais établi un lien de confiance. C'était bien. Je pris le foulard que j'avais autour du cou et je lui bandai les yeux. Je m'éloignais de trois pas devant elle. Elle ne pouvait pas voir quelque chose. C'était impossible.

-Dirige toi avec ma voix. Aie confiance, je te laisserai pas te faire du mal.

-Tu m'as pourtant dit que c'était ta prérogative.

Touché. Cette fille était de plus en plus drôle. 

-Oui. Mais je te donne ma parole que je ne te ferai pas de mal. Avance de trois pas. 

Je reculai encore mais j'étais suffisamment près pour ne pas qu'elle tombe. Elle tendit les bras devant elle et sur les côtés aussi. Elle avança de trois pas. 

-Il y a un arbre sur ta gauche. Fais attention et continue à avancer.

J'étais revigoré. Je n'avais pas envie de rentrer en fait. Elle avait confiance en moi. Ça voulait dire beaucoup pour moi. Il faisait nuit, nous étions en forêt, personne ne pouvait venir l'aider si ce n'est moi. Elle remettait sa vie et sa sécurité entre mes mains. Je ne devais pas en abuser. Même si au fond de moi, j'avais envie qu'elle se prenne un arbre, juste pour rire. C'est ce que j'aurais fait en temps normal mais là. J'étais en mission de sauvetage. Quand elle se prit les pieds dans une racine, je la rattrapai avant qu'elle ne tombe. Ses mains m'entourèrent. Elle en avait assez. Nous étions rendus de toute façon. Elle arracha son foulard avant de me pousser. 

-Le dernier arrivé est une poule mouillée.

Elle fila comme une flèche. Je ne pus m'empêcher de rire et je la laissai gagner. Elle le méritait bien. J'étais crevé et elle me laissa choisir le côté du lit alors qu'elle passait dans la salle de bain. Elle me demanda un pansement alors que j'étais entrain de me servir un verre d'eau. Je l'orientai vers ma trousse de toilettes et je lavai le verre. Ce qui était pratique quand on dormait en caleçon c'est que se mettre en pyjama était..rapide.

-Je peux savoir pourquoi tu as ça dedans ? Je dois vraiment venir dormir avec toi ou tu as l'intention de me violer ?

Je me retournai et je la vis agiter une capote. Et merde. Je les avais oublié. Je lui répondis mécaniquement que je ne l'ouvrai jamais- ce qui était vrai- et que je me devais de toujours « sortir couvert »

-Mouais, me répondit-elle non convaincue. Pervers. Tu vas pas tirer ton coup avec moi en tout cas.

-Je n'en ai jamais eu l'intention. Tu as trouvé les pansements ? 

-Oui, merci.

-Qu'est-ce que tu as ? 

-Je saigne là, derrière le genou. Je crois que c'est en tombant tout à l'heure. 

-Donne moi le pansement, je vais te le mettre, tu vas galèrer à le mettre là.

Je l'aidai à l'installer derrière son genou et elle grimpa sur le lit. J'observai ses jambes.

-Quoi ? me fit-elle.

-Je crois que j'ai déterminé ce que nous sommes l'un pour l'autre.

-Ah ? 

-Oui, on est des colocataires particuliers. Parce que genre, je peux te voir en sous-vêtement et ça me fait pas bander.

-Charmant Brian. Charmant.

-Tu peux me voir en caleçon sans que tu aies envie de me sauter dessus. Donc clairement on est pas dans une phase de séduction. Et puis on peut dormir ensemble, on peut rire ensemble, on peut se détester et ne pas se parler. Donc on n'est pas des amis parce que si tu étais mon amie et que tu m'avais fait la moitié de ce que tu m'as déjà fait, je t'aurais plus jamais adressé la parole. Alors des colocs particuliers je..

-Brian, m'interrompit-elle. Et si tu disais simplement la vérité ? On est une famille. C'est tout. On ne s'est pas choisi, clairement mais on est une famille pas tous les deux mais.. avec nos parents et Tom. Tu es mon quasi-frère et moi je suis ta quasi-sœur. C'est pour ça qu'on peut dormir ensemble sans tension sexuelle, qu'on peut s'engueuler et se réconcilier et qu'après le lycée, si on se déteste on ne sera jamais obligé de se voir autrement que pour les fêtes de famille. Maintenant, mets toi dans les draps, tu es une bouillotte humaine, je commence à avoir froid.

-Je peux te réchauffer d'une tout autre manière. 

-Qu'est-ce que je t'ai dit sur la tension sexuelle ? 

Je me mis à rire et je me glissai dans les draps. Étonnamment, je n'avais pas envie de dormir. Pas plus qu'elle. Nos jambes se touchaient et elle me parla de sa mère à ma demande. Ses yeux brillaient. Sa mère devait être une femme exceptionnelle. J'avais déjà vu une photo d'elle et John m'en avait parlé. Elle avait fait de lui l'homme bien qu'il était. Il me l'avait dit. Je n'ai pas eu de père moi non plus, du moins, pas celui que je méritais d'avoir et c'est son père et elle qui m'ont appris à être un homme et j'ai appris à être un homme à mon frère. Quand elle me parla soudainement de mon père, tout me revint en mémoire. La douleur immense, ma mère qui pleurait. Elle avait tellement tourné mieux que moi.

-Ça veut dire quoi ?

J'avais parlé à voix haute. J'allais devoir m'expliquer. Je ne voulais pas en parler mais dans une relation de confiance, c'était normal. Je fixai le plafond, hagard.

-J'ai eu des mauvais exemples dans la vie. J'ai un sang pourri de toute façon.

-Un sang pourri. 

-La moitié de mes gênes me viennent de mon père. J'ai une chance sur deux de devenir un connard comme lui. Je suis tellement attiré par le côté obscur de la Force que c'est inhumain. La gentillesse tout ça c'est pas inné chez moi, je dois faire un effort surhumain pour être sympa.

C'était la pure vérité. Même ma mère ne le savait pas. Elle pensait que j'étais doux. Mais c'était faux. C'était un masque. Encore un foutu masque. Mais que pouvaient-ils tous comprendre à ça ? Seul Jay me comprenait. Sarah venait de donner un coup dans le nid de frelons de mon esprit. Elle ne s'en rendait pas compte. J'avais envie de faire comme pendant mon enfance et appeler Jay en plein milieu de la nuit. 

-J'aimerai bien comprendre pourquoi tu essayes de faire croire à tout le monde que tu es un connard sans cœur alors que.. ce n'est pas le cas. Enfin, il ne me semble pas que tu sois sans cœur. Tu aimes profondément ta famille. Je crois que c'est indéniable. 

-Je suis un vilain petit canard Sarah. 

-Tom n'est pas le seul à avoir peur de lui ressembler, constata-t-elle après quelques secondes de silence.

Je sentais ses cheveux caresser mon visage. Elle devait être tournée vers moi. Mais ce n'était pas ça qui me choquait. C'était sa phrase. M'étais-je trompé ? Est-ce qu'une autre personne que Jay arrivait à y voir clair dans mon esprit ? 

-J'en suis terrifié. Bien plus que Tom parce que lui ne l'a pas connu.

-Il était comment ?

-Il était fort, il était drôle. Je l'admirais tellement. C'était mon père. Juste mon père. Et il m'a abandonné sans même un au revoir. Alors oui, je suis terrifié à l'idée d'être comme lui. Parce que rien ne laissait présager qu'il allait m'abandonner... nous abandonner. Rien du tout. Je sais que j'ai dit à Tom que je ne le laisserai pas devenir comme lui, mais.. est-ce que je pourrais vraiment le faire ? Et est-ce que moi-même je..

-Je pense que tu devrais avoir confiance en ton frère. Vous veillez l'un sur l'autre. Tu ne le laisseras pas tomber et lui ne te laissera pas tomber. Et honnêtement, vu la franchise de ta mère.. jamais elle ne te laissera faire du mal intentionnellement à une femme. Tu le sais aussi bien que moi. 

Je tournai les yeux vers elle. Elle luttait contre le sommeil. 

-Tu devrais dormir, tu as l'air fatiguée Sarah.

-Bonne nuit Brian et ne t'en fais pas pour ton avenir. Nous sommes la somme des erreurs de nos pères. Tu ne le savais pas ?

-Hum. Depuis quand tu cites Mozart l'Opéra Rock, toi ?

-Je ne sais pas de quoi tu parles, tu m'expliqueras demain. 

Elle s'endormit immédiatement. Je fermai les yeux et je rêvai de mon père. Il était là devant moi. Il m'ouvrait les bras et je m'y réfugiai. Tesoruccio. J'avais de nouveau 8 ans, j'étais heureux mais je me rappelai soudainement qu'il allait m'abandonner. Mais il ne voulait pas me laisser partir. Il serrait mon poignet à m'en faire mal. J'essayai de toutes mes forces de m'échapper mais.. je n'y arrivai pas. J'étais pris au piège. Je me réveillai en sursaut avant que sa main gigantesque ne s'abatte sur moi. 

Sarah me fixait et voir ses grands yeux verts me fit du bien. Elle se leva pour me chercher un verre de jus de pomme. C'était sympa. Mais je me sentais mal. Je pliai mes jambes et sa voix douce me demanda de les remettre « normalement » pour qu'elle puisse se servir de moi comme un oreiller. Aucune fille ne m'avait jamais dit ça. Elle me força même et elle se colla à moi, tout simplement. 

-Je ne pensais pas qu'un jour je ferai un câlin au lit avec une fille qui n'est pas ma copine.. ni ma mère.

-Moi non plus, avoua-t-elle.

Je commençai à rire et quand elle me parla de ses cheveux, je compris que ma copine l'avait vraiment fait souffrir. Elle ne tarda pas à dormir mais j'eus plus de mal. Beaucoup plus de mal. C'est probablement pour ça que j'étais réveillée devant elle. Je l'observai entrain de dormir. Elle était mignonne comme tout quand elle dormait. Elle frémit et se retourna vers moi. Je préparai le petit déjeuner en fredonnant. Je l'interpellai et lui proposai la rando quand elle serait prête. Elle accepta sans rien dire. De toute façon, je ne lui en aurai pas laissé le choix. C'était mon WE, c'était moi le chef. Elle partit se laver et je me rendis compte que je ne lui avais pas demandé si elle préférait boire du café. J'ouvris la porte de la salle de bain et je vis sa silhouette se découper derrière le rideau de douche. Je déglutis et baissai les yeux. 

-Tu préfères un café peut-être ? J'ai fait du thé mais..

-Ça me va pas de souci. Tu peux me passer la serviette blanche ?

Elle en voulait pas non plus que je vienne lui frotter le dos ? Je pris la serviette et je lui lançai par dessus le rideau. J'étais à, à peine un mètre d'une fille plutôt bien gaulée à poil sous l'eau. Je ne devais pas penser à ça. Sarah n'était pas une fille. C'était Sarah. Et mon cerveau malade commença à imaginer l'eau ruisselant, sur ses hanches, sur ses seins. Je secouai la tête au moment où je me demandai de quelle couleur pouvait être ses tétons et je mis la table du petit déjeuner. Elle sortit de la salle de bain et se mit à me parler de ma barbe. C'était bizarre mais je répondais à ses questions avec plaisir. C'était étrange d'avoir une conversation tout à fait normal avec elle, comme si nous étions des amis. Mais contrairement à mes amis, elle avait tendance à se rabaisser..

-Tu te sous-estimes. Tu as un bon accent quand tu parles français et en espagnol aussi. D'ailleurs, tu n'oublieras pas d'appeler ta tante pour ton rendez-vous quotidien.

-Je vais le faire pendant la rando.

J'allais lui rappeler. Au moins, les membres de sa famille allait savoir qu'elle allait bien. Sa tante était très gentille, elle me faisait penser à la mienne. D'ailleurs, il allait falloir que je l'appelle. Je souris en pensant à Martin et Natalia. Ils allaient avoir un petit Miller. Ils avaient refusé de nous donner le prénom par contre. J'avais hâte de voir ce petit bout. Est-ce qu'il allait avoir nos yeux ? Peu importait en réalité. Ils m'avaient demandé d'être le parrain et j'étais fou de joie. Je me devais d'être un modèle pour lui maintenant. 

J'inspirai l'air pur de la montagne. C'était parfait. Il faisait super beau. Sarah ne boudait pas du tout, elle prenait même du plaisir à marcher et à prendre des photos. Nous croisâmes assez peu de randonneurs. C'était agréable. Je regardai mon téléphone, je captais encore. J'allais parler à Sarah mais elle s'était arrêtée et regardait d'un air émerveillé le paysage. Je la saisis par le bras pour lui rappeler d'appeler sa tante. Elle sursauta et soupira quand je lui dis d'appeler sa tante. Elle était entrain de rire au téléphone. Ça faisait du bien de la voir comme ça. Je pris mon téléphone pour la prendre en photo et l'envoyer à John pour lui montrer que son bébé allait bien. Il m'avait envoyé un SMS tout à l'heure, j'avais répondu très rapidement. Elle mit fin à la conversation avec sa tante aussi vite et me demanda ce que je faisais. 

-Des souvenirs. Je crée des souvenirs. D'ailleurs je pense que tu devrais faire la même chose. Tu viens ? 

Nous marchâmes jusqu'à la falaise. Jay adorerait ce paysage. Il aimait autant la nature que moi. C'était assez étrange quand on savait que j'étais un citadin dans l'âme qui avait du mal à tenir sans son téléphone. Sarah s'approcha du bord. Elle n'allait pas sauter, n'est-ce pas ? 

-Brian. Viens par là. Viens, je te dis.

Je laissai tomber mon fardeau pour m'approcher d'elle. Son visage était rayonnant. Elle prit son téléphone pour un selfie et je fis la même chose tout en la ramenant contre moi. Nos yeux ressortaient et s'accordaient à la perfection. Étrangement, ma photo représentait assez bien la Sarah sauvage et heureuse que je voyais parfois. Cette fille était vraiment photogénique. Elle avait un air taquin alors même qu'elle faisait une grimace dessus. J'avais entendu ma mère et ma tante dire un jour que Sarah pourrait faire du mannequinat avec ses pommettes et son visage légèrement anguleux. Je voyais ce qu'elles voulaient dire à présent. Je lui avouai que j'allais l'envoyer à ma mère et ma grand-mère.

-Allez, finis-je par redire, on reprend la marche, sauf si tu as faim ? Je voulais monter encore un peu dans les hauteurs.

-Non, c'est bon. On y va. Allez, du nerf camarade, tu nous ralentis avec tes conneries. Je vais prendre le sac. 

Sarah souleva le sac et fit une mimique hilarante. Il était assez lourd mais elle tint bon.. pendant près de trois quarts d'heure. Elle se laissa tomber sur un rocher et refusa d'aller plus loin. Je décidai de continuer pour savoir si le chemin était praticable en plus haut. J'en restai ébaubi. C'était magnifique. Elle allait adorer. Quand je redescendis, elle avait les yeux baissés vers le sol. Elle devait m'attendre. 

-Y'a un super beau chemin plus haut et.. qu'est-ce que tu as ?

Elle avait relevé les yeux et j'avais vu son air désespéré, colérique et choqué. 

-Tu as problème, Judas ?

-Judas ? 

-C'est quoi ce complot avec mon père ?

-Quel complot ? De quoi tu parles ? 

-J'ai vu son message. Ça lui fera du bien et à nous aussi. Qu'est-ce que ça veut dire Judas ? 

-Arrête de m'appeler comme ça ! Tu as encore fouillé dans mon téléphone, va falloir arrêter à un moment donné. Fouiller dans mon téléphone c'est comme si tu fouillais dans mes papiers, ça ne se fait pas. 

-Je n'ai pas fait exprès et.. putain Brian. Je te faisais confiance et..

Elle se mit à sangloter et j'en étais tout retourné. J'avais l'impression d'avoir une boule dans mon estomac. Je m'approchai d'elle, je devais très bien jouer. Si elle décidait de me laisser en plan et de courir, ça pourrait vite partir en couille. 

-Je..je ne sais pas de quel complot tu parles Sarah. Viens, on est presque arrivé et.. arrête de pleurer, s'il-te-plaît. 

J'essayai de la saisir mais elle me repoussa avec la force de la colère. Je faillis tomber. Je ne savais pas comment réagir face à ça. J'allais la perdre. Elle me demanda la véritable raison et je lui expliquai. Quand je prononçai le mot dépression, je la vis entrain de braquer. Je ne fais pas de dépression. Elle niait. Je ne pensais pas lui expliquer maintenant mais je n'avais pas le choix. Les mots se bousculaient dans mon crâne et je parlais, parlais, parlais encore ne la laissant pas en placer une. 

-Tu ne te rends pas compte à quel point je me suis reconnu en toi en te voyant comme ça et à quel point j'ai reconnu ma mère après le départ de mon père. Peut-être que tu es assez forte pour te sortir de là, mais il faut que tu te vois telle que tu es Sarah. 

-Tu te trompes. Je ne suis pas déprimée, je suis juste.. c'est juste un.. non tu te trompes.

-Bien sûr que non et si tu veux tout savoir à l'instant où je te parle, nos parents sont entrain d'essayer de trouver une solution à ton souci. Il faut juste que tu l'admettes. Tu iras mieux après. 

-Je ne vois pas pourquoi ne pas s'aimer serait un signe de dépression.

-Je n'ai pas parlé de ça.

-Je ne suis pas en dépression. 

-Si tu l'es Sarah !

Je n'en pouvais plus. Elle ne pouvait pas voir les choses en face ? Elle m'agaçait ! Je savais de quoi je parlais. Mais elle ne voulait pas m'entendre.. jusqu'à ce que je parle du malheur que ça procurait à son père. Son visage changea.J'avais été dure mais parfois dire la vérité était nécessaire, elle se laissa glisser le long de la roche.. vidée de toute énergie. Ma pauvre Sarah. Je ne pus m'empêcher de la prendre dans mes bras et elle s'y abandonna totalement. Elle était tremblante et en larmes. J'avais l'impression que j'allais pleurer moi aussi. Mais je ne le pouvais pas. Je devais être fort pour elle. Je passai une main dans ses cheveux. Je voulais lui passer ma force. Je l'avais enfoncée. J'étais un crétin de la pire espèce. Un idiot de première. J'essayai de la rassurer du mieux que je le pouvais mais pour ça, je savais que je devais la toucher de nouveau. Qu'elle m'ouvre la porte de son âme. Alors je lui parlais de nous, de notre famille. Nous serions toujours là pour elle. Je serai toujours là pour elle. Je pensais qu'elle l'avait compris avant mais je ressentis de nouveau le besoin de lui exprimer. Je te donne ma parole que tu iras mieux. Tu sortiras grandie de tout cela. Tu as l'impression d'être dans des abysses mais.. ça passera. Y'a des jours où tu auras l'impression que personne ne sera là pour toi. Et ces jours là, tu viendras frapper à ma porte ou à celle de n'importe qui de ta famille. À toute heure du jour et de la nuit. Et on sera là, je te le jure. Tout ce qu'il faut, c'est que tu admettes que tu as un problème et que tu as besoin d'aide. 

Elle avait cessé de pleurer et elle m'écoutait, la tête collée contre mon torse, ses mains entourant son frêle corps. Elle était meurtrie, elle était blessée et si je pouvais être le pansement de son âme, je le serai. Jay avait été le mien. Je savais faire maintenant. Elle allait mieux. 

-Mais pas maintenant meuf. On est bientôt arrivé et je commence à avoir la dalle. Alors bouge ton gros cul maintenant.

Elle releva les yeux. Ses yeux étaient un peu bouffis mais.. cette fille était jolie, ça lui rajoutait un côté dramatique qui pourrait faire fondre n'importe lequel de mes copains. Pas étonnant qu'elle ait aliéné Marc McDust si elle lui a fait ce regard humide. 

- Mon cul n'est pas gros. Connard.

Elle était revenue. Ma Sarah était revenue avec sa verve. Je la pris par la main et je ne la lâchai plus. Elle avait besoin de moi pour lui donner de la force alors qu'elle n'en avait plus une once en elle. Je n'avais pas besoin de parler. J'avais appris ça de ma grand-mère qui avait été psychiatre dans son temps. Parfois, il valait mieux se taire. Nous arrivâmes sur un plateau et je vis du plaisir dans ses yeux. Nous parlâmes sur un ton assez badin. Comme si je ne lui avais rien dit. C'était très étonnant. Cette fille pouvait passer des larmes à la joie le temps d'un sandwich. Elle était marrante. 

-Au fait, tu t'es bien amusé à San Francisco ?

Le week-end avec ma mère s'était déroulé à la perfection. J'avais revu Gyôsei, certains de mes amis et j'avais parlé avec ma mère. Être un fils unique, parfois, ça a du bon, c'est indéniable. J'avais bien mangé, j'étais bien et ça ne me dérangeait pas de me confier à Sarah. Nous étions dans une bulle de confiance. C'est sûrement pour ça que je fus totalement abasourdi quand elle m'apprit que notre maison lui appartenait par moitié. La vache. C'était quoi encore cette histoire ? J'habitai.. chez Sarah ? Ma mère ne me l'avait jamais dit. Est-ce qu'elle le savait ? Il fallait que je lui en parle. J'aurais pu rester des heures ici en compagnie de ma folle quasi-sœur, mais nous devions rentrer et puis j'avais une question qui me brûlait les lèvres depuis tout à l'heure.

-Pourquoi tu ne vas pas bien ? 

-Même si je doute de ton diagnostique parce que vu que je suis devenue une baleine à force de manger, je ne risque pas d'avoir perdu du poids..

-Sans vouloir dire que je te mate tout le temps, je t'observe de temps à autres. Tu as perdu du poids. Essaye de remettre la robe que tu avais pour le mariage.. tu vas flotter dedans, je pourrais le parier.

-Tu pourrais le parier combien ?

-Une séance de shopping pour toi à mes frais si je perds et un service si c'est moi qui gagne.

-Ça marche.

-Mais ça n'explique pas pourquoi tu ne vas pas très bien, même si tu doutes de ta dépression alors que clairement tu l'es..

-Je me déteste. Je déteste ma personnalité, je déteste d'être une faible, je déteste mon physique. Rien ne trouve grâce à mes yeux. Je me trouve laide à l'intérieur comme à l'extérieur. Et je déçois tellement de personnes. Elijah m'a dit une chose très juste pendant les vacances. Ma propre mère aurait eu honte de moi et de la personne que je suis devenue. Je me mens à moi-même. Je pensais devenir une personne bien. Mais je ne suis qu'une garce.

LOL. Bourgeoise coincée, petite fille à papa, fille de bonne famille, oui. Mais pas garce. C'est sûrement pour ça que je ne pus qu'exprimer un rictus.

-Toi ? Une pute ? Tu te fais rémunérer pour coucher ? Intéressant.

-Arrête, tu vois très bien ce que je veux dire. 

-En l'occurrence, pas tellement ! Mais je crois que tu as une image négative de toi alors je vais pas pouvoir discuter. Je ne suis pas sûr que tu me croirais en plus. Tu crois que si on crie suffisamment fort, on pourra provoquer un écho ?

Elle se laissa aller encore une fois, comme dans le bungalow. Cette Sarah était fun. Comment avait-elle perdu confiance en elle ? Avais-je été trop dur avec elle ? Je poussai un cri de loup et je vis qu'elle me filmait.

-Miaou ? finis-je.

Elle éclata de rire, dévoilant ses petites dents blanches. Elle fronçait un peu du nez, c'était mignon. Non, Brian, c'est la fille de John, me rappela ma conscience rabat-joie. Nous devions rentrer, je ne voulais pas être dans une forêt avec miss-dégringolade alors qu'il allait pleuvoir. Ce serait signé son arrêt de mort. Elle me parla du petit chaperon rouge et je fus projeté en arrière avec mon avant dernière petite amie. Elle était douce et je l'avais déçue. Elle m'aimait plus que je ne l'aimais. C'est sûrement pour ça qu'elle avait couché avec mon pote. Tu n'es qu'un horrible connard, je ne veux plus jamais te revoir. J'espère que tu finiras seul Brian Miller, tu ne mérites pas l'amour. Tu comprends ça ? Tu n'as pas de cœur. Va au diable. Je secouai la tête. Pauvre conne. Je n'avais jamais prétendu l'aimer d'ailleurs. Pas une seule fois « Je t'aime » était sorti de ma bouche et Dieu sait à quel point je suis bavard ! Mais je devais avouer que la larguer alors qu'elle avait acheté une robe et des accessoires une fortune était.. libérateur. Mais je voulais changer de sujet et puis j'avais toujours voulu savoir combien Sarah McAllister avait attiré de gars dans son lit. Et je tombais des nues. Marc était son premier. Enfin, son second, mais son premier petit ami. C'était.. presque une pucelle des relations de couples. Oh putain, mais quelle tocarde. C'était pas possible. Je remarquai qu'elle s'était arrêtée. Et merde, j'avais encore parlé à voix haute. Je devais me reprendre, avec un peu de chance, elle n'avait pas entendu.

-Tocarde ? Tu es sérieux ?

Elle m'avait entendue. Comment allais-je rattraper cela maintenant ? 

-Excuse-moi. Ça m'a échappé. C'est juste une expression. J'étais surpris parce que tu es loin d'être horrible alors je ne comprenais pas. Désolé. Mais tu es timide. C'est pour ça.

-Je ne suis pas si timide.

-Si tu l'es.. enfin tu l'étais. Mais je pense qu'être amoureuse t'a un peu libéré. Comme la Reine des Neiges.

J'avais réussi à caser la Reine des Neiges. Si avec ça elle ne riait pas.. un son sortit de sa gorge et son visage s'illumina comme à chaque fois qu'elle riait. Ouf, j'avais échappé au pire et puis.. j'avais réussi à caser la Reine des Neiges en plus ! Elle prit mon bras et nous rentrâmes en parlant de l'anniversaire de son père. Elle m'apprit encore des choses sur la maison (il y avait une chambre noire ? WTF ???). Quand nous croisâmes le couple de la veille, alors que Sarah était crevée et avait mal aux pieds. je fus pris d'une idée, je soulevai Sarah sur mon épaule et je vis le gars me faire un clin d'œil. Sale pervers. 

-Tu voulais que je te porte. Arrête de geindre femme ! 

-Mais pas comme ça !! Lâche moi.

Ce n'est qu'une fois sur le lit qu'elle lâcha les mots que je voulais lui entendre dire depuis tout à l'heure. 

-Merci Brian. J'ai adoré cette journée. Je suis morte, mais je suis bien. Je suis bien. 

Je posais ma main sur son épaule. Encore une fois, je ne devais pas insister. Je lui demandai si elle voulait aller au restaurant et elle s'inquiéta de la source d'argent. 

-Heu Sarah. Je ne t'ai pas payé ce week-end, j'ai pris la carte bleue de ma mère. Faut pas déconner, j'ai pas les moyens d'emmener Alex en week-end alors que j'aurais passé un bon moment.. je parle sexuellement parlant. Tu es d'agréable compagnie. Je m'enfonce. Je vais me taire. 

Je m'éloignai un peu d'elle et je me rendis dans la salle de bain alors qu'elle faisait une remarque sur le racket de son argent de poche par mes soins. Ce n'était pas de ma faute si elle pariait toujours sur le mauvais cheval, à savoir, elle. L'eau me fit du bien. Cette journée avait été forte en émotion. Si Sarah avait compris qu'elle avait un problème ? Je le pensais. Est-ce qu'elle irait mieux ? J'avais promis à son père de prendre soin d'elle et j'allais tenir ma promesse. C'était une évidence. 

Elle n'était plus dans la chambre mais sur le balcon et elle me fit signe de la laisser. Je m'habillai directement dans la chambre en fredonnant et en dansant à moitié. Je faisais ça parfois le matin, ça me mettait de bonne humeur. Je me jetai ensuite sur le lit alors que Sarah allait se laver. Quand elle en sortit, elle était.. wow. Du moins, c'est ce qu'aurait dit Jake. J'avais bon goût. Elle avait été mon Dobby pendant quelques semaines mais elle avait gardé un peu de moi en elle. J'aimais ça. Elle me dit d'ailleurs que j'étais arrogant. C'est vrai que je l'étais mais je travaillais dessus pour moins l'être. Je lui tendis mon bras puis je me ravisai. Il ne fallait pas qu'elle pense que je venais de la voir comme une jeune femme et non comme ma demi-sœur. Mais pourtant.. cette robe lui allait vraiment, vraiment bien. Tout était bien censé se passer. Le restaurant était sympa, l'ambiance parfaite, nous allions pouvoir continuer dans notre bulle de confiance jusqu'à ce que ses yeux changent et que j'y vois le désespoir. La voix de Chris me parvint. Qu'est-ce qu'elle foutait là cette petite conne ? 

-Ce n'est pas moi qui est entrain de dîner aux chandelles avec Troll Snot alors que sa copine est à Los Angeles.

Elle était d'une connerie effarante et je voyais qu'elle gênait Sarah. Je voulais qu'elle parte mais elle s'imposa. Alexandra avait des doutes sur mon amour pour elle. Elle avait peur que je la quitte. Chris le savait et elle venait de s'installer uniquement pour faire chier Sarah. Elle s'éloigna et Sarah se pencha vers moi, elle était furieuse. 

-Tu te fous de ma gueule ? Je ne veux pas dîner avec cette fille !! 

Elle la haïssait, je pouvais le voir dans ses yeux. 

-Comme si j'avais le choix, tu sais ce qu'elle ferait sinon ? Une rumeur, elle ferait circuler une rumeur dégueulasse et tu sais quoi ? Ça bousillerait nos plans pour ta prof. 

Chris fit comme si Sarah n'était pas là. Elle m'accaparait tellement que je ne pouvais pas regarder ce que Sarah mangeait. Elle me gavait et j'allais lui dire quand mon téléphone sonna. C'était la maison, Je me levai rapidement pour répondre.

-Allô.

-Allô Brian ? C'est moi, tu t'amuses bien avec Sarah ?

-On s'amuse très bien mon grand, dis-je à mon frère tout en essayant de voir ce que Chris pouvait dire à Sarah. 

-John m'a acheté une nouvelle cravate.

-C'est cool ça.

-Oui, je te la montrerai, elle ressemble à un de tes nœuds papillons. Tu sais, celui que tu as mis avec Diego.

-Oh. Il devait être magnifique. Je lui ai confié le plus beau de ceux que j'avais pour aller dans la tombe. Dis, tu devrais pas dormir par hasard ?

-Oh si, mais Sophie me garde, je lui ai piqué le téléphone.

-Et moi je suis entrain de manger au restaurant avec Sarah. On s'appelle demain mon grand.

-Ouais. Je t'aime Brian.

-Je t'aime aussi.

-Passe une bonne nuit, n'écrase pas Sarah et ne pète pas dans les draps.

Mon petit frère éclata de rire et ça me dérida un peu.

-Ça marche et si je fais un pet dégueulasse, je la prends en photo et je te l'envoies. Bisous Tom. Je raccroche. 

Je retournai m'asseoir à la table. Sarah était une mini-John. Elle se tenait droit, elle était froide. Je n'aurais pas dû répondre à cet appel. 

-C'était Tom. Il aimerait que tu l'appelles aussi.

-Je vais le faire tout de suite, je retourne au bungalow d'ailleurs, je suis crevée, tu me passes les clefs ?

-On a pas encore eu le dessert ? 

-Je n'ai pas très faim. Passe une bonne fin de soirée.

Elle se leva et moi aussi. Elle partit rapidement du restaurant et je la suivis des yeux. 

-Il s'est passé quoi ? 

-Oh rien du tout, on parlait du plan de la prof de chimie, Alex m'a raconté. D'ailleurs en parlant d'Alex. 

-Elle sait que je suis ici avec Sarah.

-Je m'en doute bien, c'était une blague Brian. Non, je veux que tu prennes soin de ma copine. Je la connais bien et elle tient à toi. Si tu lui brises le cœur encore une fois à cause de Troll Snot ou d'une autre, je te casse les burnes.

Elle me cassait déjà les burnes mais pour une autre raison. Sarah n'avait pratiquement rien mangé. 

-J'aime Alexandra Pilgrim. Elle le sait, mais comme tu dois le savoir, sa vie n'est pas toute rose, alors elle a peur, je sais, mais moi, je suis là pour elle tout le temps. 

-Je ne te parle pas d'amour. Je te parle d'abandon. C'est différent et puis tu crois que tu ne peux pas lui briser le cœur même si tu es amoureux d'elle ? Alex ne sait pas ce qui est bon pour elle.

-Et toi tu le sais ?

-Oui. Je le sais. Je savais que tu serais bon pour elle, c'est pour ça que je lui ai dit de s'intéresser à toi. Je l'ai poussée dans tes bras. Tu devrais me remercier.

Cette fille était folle. Comme si elle avait la moindre influence sur ma vie ? Il n'y avait que quelques filles et femmes qui pouvaient le prétendre et clairement, elle ne faisait pas partie de la liste. Ce n'était que la copine tarée d'un très bon ami à moi. 

-Désolé Chris, mais je pense que mon charme naturel a fait beaucoup du boulot. Enfin bref, qu'est-ce que tu fais là ? La vraie raison ? Tu as demandé à tes parents de venir pour me surveiller et faire un rapport à Alexandra ?

J'avais dit ça au pif, mais j'avais vu juste. Elle savait pertinemment que je serai ici. Elle voulait me prendre en flagrant délit d'adultère ? C'était quoi son délire ? Je comprenais de moins en moins cette fille.

-Alors tu vas dire ça à ma petite amie. Tu vas lui dire que j'ai passé un séjour super bien avec Sarah, que je me suis bien amusé et que je vais économiser suffisamment pour qu'on vienne dans cet endroit tous les deux un Week-end et qu'on fera un marathon de baise. 

-Un marathon de baise ? 

-Oui.

Je me penchais vers Chris et je la Millerisai. Je la fixai d'un air plutôt tendre et un sourire en coin. Elle baissa un peu les yeux. Je lui relevai les yeux et je vis ses parents nous observer du coin de l'œil. Elle était troublée. Je ne l'avais jamais vu comme ça. Était-elle comme ça avec Paul ?

-Et si comme je le crois, elle te raconte toute notre vie, tu sais que je suis capable de lui faire atteindre le septième ciel uniquement avec ma bouche. Alors imagine si mon corps et mon esprit sont concentrés uniquement sur son plaisir ? 

-Il parait que tu es très inventif..

-Il parait même que je suis doué. Et tu vois mes mains ? 

Elle les regarda le souffle court. Et elle prétendait avoir une influence sur moi ? Pauvre conne. 

-Elles savent exactement ce qu'il faut faire, au moment où il faut le faire. Que ce soit.. caresser un menton, ou une main.

J'accompagnai mes paroles de gestes et j'arrêtai quand le serveur nous apporta le dessert. Elle était sous mon contrôle. Visiblement, si j'avais envie de lui claquer son string, elle ne dirait pas non. 

-Tu sais ce qui est étonnant dans cette histoire Chris ? C'est que ce n'est pas Alexandra que j'ai vu la première en venant au lycée. C'était toi. Mais j'ai compris que tu étais prise alors j'ai tourné le regard vers une petite rousse pétillante aux lèvres charnues. 

Elle déglutit et ne dit plus rien jusqu'à la fin du dessert. J'avais réussi à la faire taire. Champagne ! Nous réglâmes la note tous les deux et je rentrai au bungalow. Sarah était entrain de se déshabiller. Elle portait un shorty en dentelle qui soulignait la rondeur de ses fesses. Putain, mais pourquoi je pensais à ses fesses maintenant ? Je n'aurais jamais dû chauffer Chris, ça se retournait contre moi maintenant. Je rentrai et l'interpellai, elle finit de s'habiller tout en s'insultant au passage. 

-Arrête de te dénigrer. Si Marc ne te trouvait pas mignonne, tu ne sortirais pas avec lui. 

-Il peut avoir mauvais goût. 

Je soupirai avant de me préparer pour la nuit, une fois dans le lit, je la plaquai sur le matelas en l'enserrant de mon corps. Je lui demandai ce qu'il s'était passé avec Chris. J'insistai et j'hallucinai. Chris était une petite connasse hypocrite et elle l'avait encore menti. Mais pire que ça, elle avait blessé l'estime que j'avais réussi à insuffler à Sarah. Je la lâchai.

-Tu veux un câlin ?

-Non merci. 

-Tu veux que je te serve d'oreiller ? 

-Non merci.

-Tu veux que je me taise et que je te laisse dormir ?

-Oui. En fait, si je veux bien que tu me fasses un câlin et que tu me serves d'oreiller.

Je souris et elle s'installa sur moi. Je refermai mes bras sur elle et un profond sentiment de sécurité l'envahit, je le sentis tout de suite. Elle se détendit et tapota légèrement sur mon torse jusqu'à s'endormir. J'aimais bien dormir avec quelqu'un. Et puis Sarah n'était pas gênante. Elle s'adaptait à moi et à la position de mon corps. Elle fut agitée toute la nuit et se réveilla en sursaut. Je la pris contre moi et lui murmurait des paroles douces. Quand elle pleura, j'embrassai sa tempe et la rassurait. Je m'en voulais tellement. C'était de ma faute. Tout était de ma faute. J'aurais dû faire plus attention à elle. 

Le lendemain, c'était le grand retour. Ce Week-end m'avait confirmé deux choses. Sarah avait bel et bien un problème et je me devais d'être là pour elle. Je la laissai me parler de son cousin. Elle avait une véritable admiration pour lui. En fait, j'admirai la relation de famille qu'elle avait avec ses oncles. C'était différent entre Martin et moi. On ne se voyait pas aussi souvent et il m'arrivait souvent de m'en vouloir de ne pas l'appeler plus souvent. Et ce que j'aimais aussi dans cette famille McAllister-Evans c'est qu'ils m'avaient inclus dedans sans souci. Sarah était comme eux dans le fond. Il fallait juste qu'elle se révèle au monde. C'est pour ça que lorsque je lui dis qu'il n'y avait qu'une seule et unique Sarah McAllister. Parce que je le pensais vraiment. Cette fille était totalement tarée mais d'un intérêt sans commune mesure à mes yeux. Je ne lui avouerai jamais pourtant. Il ne fallait pas qu'elle se prenne la grosse tête. Et puis.. notre relation serait tellement fade sans nos disputes hebdomadaires.. Rien de mieux qu'une petite engueulade pour mieux se réconcilier, non ?

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