49. Craquera ? Craquera pas ?

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Théo

— Elle t’a dit quoi, alors ? C’est quoi le plan, maintenant ? demandé-je alors qu’elle raccroche en souriant.

Je regarde Suzie qui s’est incrustée dans ma chambre et me dis que, contrairement à la dernière fois où je me suis retrouvé à me cacher dans un tel établissement, ma situation s’est améliorée. J’ai une belle blonde avec moi et une encore plus jolie rousse qui est en train de rappliquer. Si seulement Priscillia pouvait voir ça, je suis sûr que ça la ferait sourire. Peut-être même que ça l’amuse si elle peut nous voir de là où elle est.

— Heu… Tu veux la version longue et parsemée de ses humeurs, ou la version courte ?

— Vu qu’on n’a rien de mieux à faire, je veux bien les deux, souris-je.

— Eh bien, elle est rassurée de te savoir en sécurité, inquiète à l’idée que je te saute dessus, flippée que tu aies été suivi, et autoritaire en prime. Flippante, quoi.

— Ça, c’est la version courte, alors ? Et ça donne quoi en version longue ?

— Oh là, là, qu’est-ce que vous êtes lourds, les amoureux ! Tu ne veux pas plutôt qu’on fasse un petit câlin ? Ça te changera les idées en l’attendant, me dit-elle en me faisant un clin d’œil coquin.

— Tu ferais vraiment ça à ta propre sœur ? lui demandé-je. Je croyais avoir compris que vous aviez un code d’honneur, je me trompe ?

— Dis-donc, l’espion, t’as fini un peu ? Je veux juste te changer les idées, moi, rit-elle. Je n’ai pas envie de lui faire de peine, mais si t’es tenté, pourquoi pas ? Et puis, elle n’est pas obligée de le savoir...

Elle se relève et commence à ouvrir le haut de son chemisier en esquissant quelques pas de danse. Le sourire coquin qu’elle me lance est à croquer et un instant, je suis vraiment tenté de céder à ses avances. Il faut dire que non seulement elle est plutôt jolie, mais qu’en plus, je suis sûr qu’une relation avec elle serait plus simple qu’avec Lyana.

— Arrête ton jeu, Suzie. Tu es vraiment jolie comme femme, mais je n’ai pas envie de faire ça à Lyana. On a peut-être eu un différend avec elle, mais ça ne justifierait en rien que je passe à autre chose sur un coup de tête. Pour toi, je ne ressens rien, juste un désir physique peut-être. Je suis sûr que tu saurais me faire plaisir, un truc un peu mécanique, mais…

— Eh bien… Tu es bien accro à ce que je vois. Tu sais qu’elle pense qu’elle ne te mérite pas, quand même ? Je ne veux pas être pessimiste, mais Lyana n’est pas vraiment du genre à se poser et faire des bébés, Théo.

— Parce que tu crois que c’est mon genre, à moi ? Ce n’est pas parce que je ne veux pas céder à tes charmes que je suis casanier non plus. Tu devrais lui demander, mais je crois qu’elle n’a pas à se plaindre de ce qu’on fait au lit. Même sans faire de bébés !

— Je ne dis pas le contraire, mais tu m’as l’air d’être quelqu’un de bien et de réfléchi. Lyana… elle a toujours aimé les mauvais garçons. C’était une rebelle, déjà gamine, elle s’attirait des ennuis… Enfin, ce n’est que mon avis, après tout, j’ai passé une grosse dizaine d’années sans la voir. Mais tu ne te retrouves pas là à fuir pour rien, à mon avis.

— Après le casanier, tu me prends pour le mauvais garçon maintenant ? m’amusé-je. Elle t’a dit pourquoi je fuyais ou pas ?

— Non, elle m’a dit d’arrêter de lui poser des questions et de faire ce qu’elle demandait, me dit-elle avant de faire un salut militaire.

— Et tu fais toujours ce qu’elle dit ? J’aimerais bien avoir une sœur comme ça, moi. En tout cas, elle peut venir, je ne me remettrai pas avec elle après ce qu’elle m’a fait. C’est mort. Je devrais peut-être céder à la tentation et passer à autre chose avec toi, c’est peut-être ça, la solution.

— Je lui fais une confiance aveugle, alors oui, je fais ce qu’elle me demande. Peut-être que c’est illégal, mais en même temps, avec le père qu’elle a eu, difficile de finir nonne ou une petite instit’ rangée. Je veux bien qu’elle t’ait fait de la peine, mais je doute que tout ait été négatif entre vous, sinon tu ne serais pas aussi chamboulé, soupire Suzie en refermant son chemisier. C’était si terrible que ça, d’être avec elle ?

— Non, c’était formidable, ne puis-je m’empêcher de répondre immédiatement. Un vrai plaisir au quotidien, et je ne parle pas que du sexe. Franchement, elle et moi, c’était une évidence. C’était fou. Tu sais que je n’ai jamais connu ça avec aucune femme ? Un peu comme si c’était la personne que j’avais toujours attendue. Tu comprends que quoi que tu puisses faire, jamais ça ne sera pareil…

— Alors peut-être qu’elle mérite une deuxième chance, non ?

Une deuxième chance ? Après ce qu’elle a fait ? Jamais. Comment faire confiance à une femme capable d’aller vous vendre comme ça pour un peu de fric ?

— Si c’était aussi facile que ça, ça se saurait. Tu sais, quand tu as été trahi une fois, c’est compliqué de rebondir. Je ne suis pas comme ça, moi, je suis entier. Et tu voulais dire quoi sur son père ?

— Alors il faut se donner un peu de temps. Laisser une seconde chance, c’est ton choix. Si tu veux vraiment être avec elle, que tu as des sentiments pour elle… Je crois bien qu’ils sont réciproques, alors tu ferais mieux de te lancer. Parce que Lyana amoureuse, on n’est pas près de le revoir. En ce qui concerne son père… Ma mère m’a raconté que si elle était arrivée si jeune chez nous, c’est parce que son paternel travaillait pour la Mafia russe. Tu imagines, toi, grandir avec un homme comme ça ? Vive l’exemple !

Son père était dans la Mafia ? Tu m’étonnes qu’elle y soit aussi alors. Elle a sûrement voulu faire comme papa et suivre son exemple, sinon pourquoi les aurait-elle rejoints après avoir été abandonnée comme ça en étant jeune ?

— Tu crois vraiment qu’elle a des sentiments ? Parce que tu sais qu’elle ne m’a dit qu’une seule fois qu’elle m’aimait ? Et encore, vu les circonstances, c’était peut-être un je t’aime de pitié.

— On a vécu onze ans ensemble, elle et moi. Si tu savais le nombre de fois où je lui ai dit que je l’aimais, que j’étais fière d’être sa sœur, qu’elle comptait beaucoup pour moi, soupire-t-elle en se laissant tomber à la renverse sur le lit. Elle ne m’a jamais dit la même chose, elle. J’ai eu droit à quelques “je t’adore”, “t’es une sœur géniale”, mais elle n’est pas du genre à s’ouvrir et s’épancher, tu sais ? Tu as bien dû le voir, de toute façon. Tu lui as dit que tu l’aimais, toi ?

— Peut-être pas avec autant de mots… soupiré-je. Mais elle et moi, c’était juste que du sexe au début. Enfin, si je dis ça, je mens un peu car même au début, c’était plus que ça. Bref, ça, c’était avant qu’elle ne mette ma vie en danger. Parce que si je suis ici avec toi plutôt que dans notre maison avec elle dans mon lit, c’est entièrement sa faute ! m’énervé-je.

— OK, OK, respire un coup, mon chou, grimace-t-elle alors que Guizmo aboie en s’approchant de moi. Le mets pas en colère, il me fait un peu flipper, des fois, tu sais ?

— Ouais, ben comme sa maîtresse, quoi, maugréé-je en me renfonçant un peu dans les oreillers.

— Pourquoi tu dis qu’elle t’a mis en danger ? Il s’est passé quoi ?

— Il vaut mieux que je ne te dise rien, sinon toi aussi, tu vas te retrouver en danger. Tu as déjà pris assez de risques comme ça à venir à mon secours. Franchement, tu ne sais pas dans quoi j’ai mis les pieds, mais il vaut mieux que tu ne le saches pas. Il faut être fou comme Lyana pour se lancer dans de telles péripéties.

— Vous êtes tous les deux aussi chiants l’un que l’autre avec vos secrets… C’est moche, tout ça, et ça va vous pourrir de l’intérieur. En tout cas, si tu fais du mal à ma sœur, je te coupe ton service trois pièces, c’est clair ? Et pas la peine de me dire que c’est elle la méchante dans l’histoire, je l’ai compris, mais ça ne change rien.

— C’est pour te protéger qu’on fait ça, Suzie, pas pour te mettre à l’écart, tu sais. Ce serait dommage d’abîmer une aussi jolie fille que toi.

Je passe mon bras autour de ses épaules et elle vient se lover contre moi. Mais contrairement au début de cet échange, il n'y a plus aucune tension sexuelle entre nous deux. Guizmo le sent aussi car il vient poser sa tête sur mes genoux et nous passons quelques instants ainsi, en silence.

— Elle a de la chance de t’avoir, Lyana. Parce que si je décide de me barrer vraiment une fois qu’on aura discuté, elle pourra compter sur toi, au moins.

— C’est sûr qu’elle pourra compter sur moi. Je te ligoterai pour t’empêcher de la fuir, mon chou, rit-elle.

— C’est ton kif de jouer à la Dominatrix ? pouffé-je en m’imaginant attaché livré aux désirs et pulsions de ma jolie rousse.

— Ça peut l’être, oui. Mais… j’aime bien aussi quand on m’attache. Et toi alors, c’est quoi ton kif ? Vous vous amusez bien avec Lyana ?

Tout de suite, la température remonte alors qu’on évoque ma relation avec ma voisine, et je sens que je rougis un peu sous l’effet des questions de la blonde à mes côtés.

— Tu aimes être à la merci de ton partenaire, alors ? Parce que Lyana, ça la rend folle, ça. Je peux te dire que quand elle s’offre ainsi à moi, c’est un vrai feu d’artifice d’orgasmes et de gémissements. Et quand je la libère, elle se transforme alors en vraie furie et là, c’est à mon tour de côtoyer les étoiles. Tu vas tout savoir, ris-je, un peu gêné de ce que je viens de lui confier.

— Wow, attends, elle te laisse la main comme ça ? Vraiment ? me demande Suzie en se redressant. Tu veux dire que ce n’est pas elle qui mène la danse ?

— Bien oui, vraiment. Elle adore quand je lui bloque les mains et que je l’empêche de bouger. J’ai l’impression que ça la frustre tellement que ça l’excite.

Je joins le geste à la parole et repousse Suzie sous moi en lui serrant les poignets au-dessus de sa tête. Surprise, elle pousse un petit cri avant d’enrouler ses jambes autour de moi.

— Dis-donc, petit coquin, qu’est-ce que tu fais, là ?

Je réalise que je me suis laissé emporter par mon envie de Lyana et par l’impression que j’ai eue que c’était elle à mes côtés. Je dois devenir fou, mais ça n’a pas l’air de déranger Suzie le moins du monde car déjà elle ondule sous moi.

— Calme-toi, je voulais juste te donner une idée de ce qu’il se passe entre Lyana et moi. Je t’ai dit que tu étais tentante, mais pas assez pour me faire craquer.

Je dépose un bisou sur son nez après lui avoir relâché les mains et me dégage de son étreinte, provoquant chez elle un profond soupir de frustration.

— T’es pas drôle. Je peux être muette comme une carpe, tu sais ? Je ne dirai rien.

— Au contraire, je suis sûr que tu es aussi bruyante que ta sœur quand on s’occupe bien de toi, ris-je en m’écartant encore plus alors qu’elle se rassoit. Vous faites la paire, toutes les deux.

— Aucun doute, si tu es doué ! sourit-elle en me faisant un clin d’œil. En tout cas, sache une chose : Lyana ne lâche jamais prise. Peu importe dans quel cercle, elle est toujours dans le contrôle. Alors, si vraiment elle te laisse mener la danse… tires-en les conclusions que tu veux, mon chou, mais c’est pas rien, ça.

— Tu sais quoi ? Elle pourra te remercier sur un truc. J’ai envie de l’entendre maintenant, de comprendre pourquoi elle a agi comme elle l’a fait. Je suis désolé si je t’ai un peu frustrée, mais je te remercie pour cette conversation. Tu es vraiment quelqu’un de bien. Et franchement, ce décolleté… Miam, miam ! Celui qui en profitera aura de la chance, c’est sûr !

— Arrête de me flatter alors que tu ne comptes même pas en profiter, mon chou ! Je crois qu’une fois que Lyana sera là, j’irai voir le réceptionniste. Lui ne me dira pas non, c’est sûr !

— Je crois que si je t’avais rencontrée avant Lyana, je n’aurais pas dit non, non plus, mais plus je te parle, plus je suis convaincu que je vais avoir du mal à passer à une autre femme. Elle est tellement… tout quoi !

Suzie éclate de rire et se lève après avoir déposé un petit baiser bien chaste sur mon front. Je la regarde sortir sans regret. J’ai bien vu qu’à plusieurs reprises, j’aurais pu craquer et prendre du bon temps avec elle. J’ai rarement vu une femme aussi réceptive, mais je suis content d’avoir résisté. Parce que la femme que je veux dans mes bras, ce n’est pas elle. Malgré tout ce qu’elle m’a fait, malgré sa trahison, celle que j’aime vraiment et malgré tout, c’est Lyana. Aucune autre femme ne parviendra à la remplacer, j’en suis convaincu, peu importe que je parvienne à lui pardonner ou pas.

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