La proposition

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Stella

Après une soirée à rire et discuter sans se prendre la tête, je suis allée me coucher. Sam s’est installé sur le canapé, ouvert en mode lit. Quoi qu’il en dise, il a besoin de repos.

Le lendemain, je me réveille alors que j’entends mon cousin bouger dans la pièce d’à côté. Après m’être étiré, je passe la tête dans le salon. Le bruit de l’eau qui chauffe dans la bouilloire attire mon attention.

– Moi qui pensais que c’était l’odeur du café qui allait te faire lever, ricane Sam.

– J’ai évolué depuis le temps.

D’un geste de la main, je lui désigne la salle de bain.

– Les serviettes sont rangées sous le lavabo. Je te laisse l’honneur, pendant ce temps-là, je prépare le petit déjeuner.

Mon cousin s’avance, dépose un baiser sur ma joue, puis récupère les vêtements qu’il a amenés dans son sac de voyage.

Pendant ce temps, j’arrive dans la cuisine. Comme je m’en doutais, personne n’est venu s’en prendre à moi au milieu de la nuit. J’espère que ça va rassurer Samuel et qu’il pourra partir travailler l’esprit tranquille.

Un coin d’œil par la fenêtre m’apprend qu’il ne se passe rien sur le parking. Tout est calme. J’en profite pour faire griller du pain. Ensuite, je pose deux assiettes sur la table, avant de sortir confiture et beurre du frigo.

Un sourire habille mes lèvres et ne les quitte pas. Je suis heureuse de ne pas être seule, ce matin. J’ai envie de prendre mon temps, même si je sais que Samuel ne peut pas forcément en fait autant.

Lorsque l’eau arrête de couler, je prépare les deux cafés. J’en profite pour couper une pomme en quatre. Mon cousin arrive, les cheveux encore humides. Il s’installe face à moi. Je pousse la tasse vers lui. D’un geste lent, il s’en saisit. Je sens bien qu’il n’a pas assez dormi. Cependant, il ne se plaint pas. Ce n’est pas son genre.

– Je t’ai préparé une pomme. J’ai aussi des yaourts à la…

Je n’ai pas le temps de terminer ma phrase qu’il enchaîne avec un petit sourire.

– À la vanille !

Un bruit m’apprend que le pain tente de s’échapper en sautant du grill pain. Pas de chance pour les tranches, j’interviens avant qu’elles ne puissent se sauver.

Samuel en récupère une et dispose du beurre dessus avec un air si concentré que j’ai envie de rire. Cependant, quand il prend la parole, je sens que quelque chose a changé en lui.

– J’ai eu une idée !

– Sous la douche ?

Il me lance un regard blasé.

– Tu aurais préféré que ça soit aux toilettes ?

Je secoue la tête.

– Non, pas spécialement. La salle de bain est un bon endroit pour réfléchir.

– Je pense que tu devrais prendre un garde du corps !

Sur le coup, je crois à une blague. J’ai même envie de rire, mais devant l’air sérieux de Samuel, je comprends qu’il imagine que c’est la meilleure solution. Comment en est-il arrivé à trouver cette idée ? Je me le demande.

– Quoi ?

– Juste le temps qu’on soit certain que la menace soit passée.

Mes sourcils se froncent.

– Donc jusqu’à la fin de ma vie ?

L’idée me paraît ridicule. Avoir un inconnu en permanence dans mon appartement avec rien à faire. Ça me stresse encore plus que la pseudo menace qui flotte sur ma tête. Comme si j’avais envie de faire des essayages de lingerie ou des shootings nu avec un type qui me surveille.

– Mais non, juste le temps que ça se calme.

– Est-ce que ce n’est pas déjà le cas ?

Je croise les doigts pour avoir la paix.

– Nous n’en sommes pas sûrs.

À la tête de Samuel, je devine qu’il ne plaisante pas avec ma sécurité. En même temps, je savais que c’est le genre d’homme très protecteur. Peut-être que son métier a déteint sur lui.

– Sam, je ne vais pas avoir un garde du corps pour rester chez moi. Ça devient ridicule.

– Alors pour la nuit et quand tu sors.

Je lève les yeux au ciel.

– Tu crois que quelqu’un va venir défoncer ma porte pour me faire du mal ?

Ce n’est pas comme si j’habitais dans une banlieue mal famée. Je vis dans un petit immeuble proche d’une base militaire. Ici, c’est plutôt calme. Quand il y a du bruit, c’est que les gamins font du roller sur le parking. Actuellement, je n’entends que le chant d’oiseau sur mon balcon. J’imagine que ce ne sont pas eux qui m’envoient des colis de menace.

– Tu n’as pas de shooting en plein air de prévu ? Ou de salon ?

Aïe ! Il n’y a rien de pire qu’un homme qui écoute ce que vous dites.

– Si, mais…

– Alors au moins pour ça. C’est là où tu seras la plus vulnérable !

Comme je ne veux pas m’avouer vaincu, je tente de lui opposer mes arguments.

– Il y a un service d’ordre dans ce genre de convention…

– Ils ne seront pas focalisés sur toi. Comme je ne suis pas sûr de pouvoir t’accompagner, c’est mieux si quelqu’un veille sur toi.

– Si je demande à Victorien de m’accompagner, ça te rassura ?

Au plissement de nez de mon cousin, je sais tout de suite ce qu’il pense de mon idée.

– Avec tout le respect que je dois à Victorien, je doute qu’il soit de taille à lutter contre un adversaire entraîné. En plus, je ne pense pas que ça soit bien pour vous de passer du temps ensemble tant que vous n’avez pas mis les choses au clair.

Pour le coup, je suis blessée.

– C’est fait. On est plus ensemble.

Samuel tend son couteau plein de beurre vers moi.

– La belle affaire ! Vous êtes tous seuls chacun de votre côté et vous n’attendez qu’un mot pour courir vers l’autre !

– Ce n’est pas…

Mais mon cousin est plus rapide que moi.

– Il a une copine ?

Je secoue la tête.

– Tu as un copain ?

Je grimace. Mon expression doit être plus parlante que n’importe quel mot.

– Tu vois, j’ai raison…

Partagée entre deux sentiments, je n’ose pas lui raconter de l’échec de ma dernière relation. Un moment aussi intense qu’il a été court. Mais surtout une rupture qui m’a fait mal.

– Laisse-moi trouver quelqu’un de confiance pour te protéger lors de tes sorties !

Comme je ne réponds pas, il me pince la joue.

– Tu ne veux pas que ton cousin s’inquiète ?

D’une tape, je repousse sa main. Si j’y réfléchis, je peux bien le laisser chercher. D’ici le salon, le calme sera revenu et je serais tranquille. Je doute qu’il trouve la bonne personne en une journée.

– D’accord. Mais si je ne le sens pas. C’est non.

– Ne t’en fais pas. Je vais trouver le meilleur pour veiller sur toi. En plus, si ça tombe il sera beau gosse !

Un ricanement suit cette déclaration.

– Je préfère qu’il soit professionnel.

– Ma cousine mérite le meilleur !

Je croque dans ma tartine avant de m’apercevoir que je n’ai même pas mis de confiture sur le pain. Toute cette histoire me stresse plus que je ne veux l’avouer.

– En attendant, ta cousine te dit de faire attention à l’heure. Il ne faudrait pas que tu sois en retard pour protéger les honnêtes citoyens.

Il se redresse, mais prend quand même le temps de porter sa tartine à sa bouche.

– Tu me mets dehors après que je sois venu te protéger.

Comme à son habitude, il arbore un air malheureux et agite les bras d’une façon théâtrale.

– Je ne voudrais pas que tu loupes une occasion de venir en aide à la veuve et l’orphelin !

Sur un ton plus sérieux, il reprend.

– Tu ne sors pas aujourd’hui ?

Je secoue la tête. Me voilà confinée par obligation alors que je n’avais même pas prévu de sortir. Je me rassure en me disant que ça lui passera.

– Non, je serais très sage et resterais à la maison.

Ça a au moins le mérite de le convaincre. Après l’avoir serré dans mes bras pour le remercier de sa visite, je lui souhaite une bonne journée. De la fenêtre de la cuisine, je le regarde courir jusqu’à sa voiture, avec un petit sourire. Mon travail peut commencer : retour à la réalité.

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