Rendez-vous

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Stella

Deux jours s’écoulèrent sans que rien ne vienne troubler mon quotidien. Comme je l’avais imaginé, personne ne s’en prit à moi. Bon, en même temps, je ne bougeais pas de mon appartement, ce qui limite les problèmes. Samuel m’appelle tous les soirs pour savoir si je vais bien ou si j’ai remarqué des choses étranges. Il n’en est rien.

La vie continue. Devant mon ordinateur, je m’occupe de préparer des visuels pour les poster par la suite, lorsque mon téléphone sonne. Sans quitter des yeux l’écran, je décroche.

– Allô ?

– Stella, c’est moi. Tout va bien ?

Je souris en reconnaissant la voix de mon cousin.

– Je suis encore en vie.

– J’espère bien !

– Il ne se passe rien non plus dans l’immeuble.

– Tant mieux.

Va-t-il se rassurer, un jour ?

– Est-ce que tu pourrais me rejoindre dans un café ?

– J’ai la permission de sortir ?

Je l’imagine sans peine froncer les sourcils et faire les gros yeux.

– J’ai quelqu’un à te présenter.

En temps normal, j’aurais pensé qu’il avait rencontré une fille qui lui plaisait. Là, je me prépare au pire.

– J’aurais mon mot à dire sur le sujet ?

– C’est juste pour les salons, et toutes tes activités en extérieur.

Un soupir m’échappe.

– Tu veux me marier avec lui, pour avoir l’esprit libre ?

Cela a, au moins, le mérite de faire rire mon cousin.

– Je n’ai casté que des beaux mecs pour cette raison.

Mes yeux se lèvent vers le ciel alors que je secoue la tête.

– En vérité, je tente de te marier pour me débarrasser de toi.

– Attention, Sam, après ça sera à moi de choisir ta future fiancée.

– Tant qu’elle a deux yeux, un nez et une bouche, ça me va…

Même si j’en plaisante, cette rencontre ne m’enchante pas. Cependant, je ne me vois pas la refuser à mon cousin qui s’inquiète pour moi.

– Du coup, tu veux qu’on se retrouve où ?

– Comme d’habitude. Dans deux heures, ça te va ?

– Je ne peux rien te refuser…

– Merci, Stella.

La joie perceptible dans sa voix m’aide à relativiser.

– À tout à l’heure.

Je le salue et raccroche. Maintenant, je dois me préparer pour aller pour sortir. Adieu le sweat tout doux qui me réconforte à la maison. Au revoir le long jupon qui s’agite à chacun de mes mouvements. Il me faut quelque chose de plus classe.

Avant d’aller fouiller dans mon armoire, je décide de terminer ce que je faisais. Ou au moins, l’enregistrer. Une panne de courant est si vite arrivée. Je profite pour noter quelques remarques dans le carnet noir posé près de mon ordinateur. Je m’en occuperai plus tard.

L’appareil mis en veille, je me dirige vers ma chambre. La lumière du soleil tombe directement sur ma couette. La pièce a toujours été très claire. C’est l’une des raisons pour lesquels j’ai choisi cet appartement : sa luminosité. Ajouté à cela qu’il se trouve dans un coin tranquille, et c’est le combo gagnant.

En face du lit est installé mon dressing, dans un renfoncement, où j’ai posé des étagères. Je tire le rideau argenté à rayures noires qui me sert de porte. Une petite merveille que je me suis offerte avec mon premier salaire sans savoir qu’en faire par la suite. Finalement, il a trouvé sa place chez moi, preuve que ce n’était pas un achat inutile.

J’observe les piles de vêtements et ma penderie. J’évite les robes et jupes, en anticipant les remarques de Samuel : « Et si tu dois courir ? ». Du coup, je pars sur une tenue avec laquelle je pourrais conduire un poids lourd, braquer une banque et sauter d’un hélicoptère en vol. À moins que je me sois trompée de film.

J’en reviens à l’éternel jean. Que ferait-on sans lui ? Autant prendre mon préféré. J’y ajoute un haut noir avec de la dentelle sur les manches. Ça ira. Pas besoin d’en faire des tonnes. Tant que je suis présentable, c’est l’essentiel.

Rideau en place, je pars me coiffer et me maquiller. Une odeur fruitée m’accueille. Je souris à mon reflet puis me saisis de ma brosse à cheveux. Un rouge à lèvres écarlate et un peu d’ombre à paupières me mettent en valeur. Je n’en ajoute pas plus. Pas besoin de surcharger, je ne vais pas défiler sur le podium.

Alors que je récupère mon portable pour le glisser dans mon sac, je m’aperçois que j’ai un message de mon cousin.

« Fais attention, en sortant de chez toi ! Ne prends aucun risque ! »

Je secoue la tête. On ne sait jamais des fois que je croise ma voisine de soixante-dix ans qui promène son chien, il y aurait des risques. Peut-être qu’elle cache un taser dans sa manche.

Pour faire plaisir à Sam, je ne mets pas d’escarpin, mais une paire de bottines plates. Ainsi, je pourrais fuir plus vite. Est-ce qu’il faut que je prenne mon parapluie ? Au cas où je serais agressée dans l’ascenseur. Je chasse ces idées de mon esprit.

D’ailleurs, je vais commander un chocolat chaud, ça me fera plus de liquide brûlant à envoyer sur mes adversaires. Après les films, je me crois dans un jeu vidéo. Ce colis aura raison de ma santé mentale.

Comme je m’y attendais, je peux rejoindre ma voiture sans croiser qui que ce soit. Direction : la zone industrielle. C’est plus simple pour mon cousin de retrouver là-bas parce qu’il n’a pas besoin de rentrer en ville et peut directement repartir chez lui.

Nous avions pris l’habitude d’aller ensemble dans ce café, parce qu’ils servent une grande variété de boisson chaude donc l’irish coffee, le péché mignon de Samuel. En été, il y a aussi des frappés. Pour ma part, j’ai pour ambition secrète de goûter chacun de leur produit. Comme il propose des produits spéciaux chaque mois, je crois que je ne réussirai jamais à y parvenir.

Ma voiture s’engage sur la voie d’accélération de la nationale. Vu l’heure, il y a du monde. Par chance, je me contente de contourner la ville et sors vers la zone commerciale. Là aussi, les véhicules s’agitent : entre ceux qui veulent rentrer chez eux et ceux qui veulent faire leurs derniers achats avant la fin de la journée.

Je gare la voiture devant un grand bâtiment avec une ambiance industrielle. Des verrières et du métal peint en noir mettent tout de suite dans le ton. À l’intérieur, les murs sont couverts d’une imitation de briques apparentes, une horloge faite à partir d’une ancienne roue de charrette est accrochée au fond.

J’entre. L’odeur de café parvient jusqu’à mes narines et me fait saliver. Mon regard parcourt les tables en bois. Samuel n’est pas présent. En même temps, je n’avais pas vu sa voiture sur le parking. Dans un coin, un homme attend seul. Il relève les yeux alors que je me tourne dans sa direction. Ses iris sombres s’attardent sur moi. Je me force à ne pas grimacer. Ce n’est pas la personne que j’avais envie de voir, mais je ne veux pas me montrer impolie.

Lui aussi semble surpris de me rencontrer. Il se lève, et s’avance vers moi, oubliant la tasse fumante sur la table.

– Stella ?

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