29 septembre – Kraï de Krasnoïarsk, Russie

Un petit mot à la lueur de ma lampe frontale, emmitouflé sous trois pulls et un sac de couchage dans lequel je me sens comme un asticot à l’abri d’une feuille. Lorsque j’ai entendu qu’il était interdit de camper dans le parc, j’ai déduit que notre prochain pied-à-terre serait un refuge tout ce qu’il y a de plus officiel. Je ne pensais pas que le guide serait de connivence avec Olivia et ses idées extragavantes extravagantes : bivouaquer au milieu de la toundra arborée, par zéro degré, à deux pas d’une chute d’eau immobile. Discrétion totale requise. Pas de feu, pas de lumière. « Nous ne sommes pas les seuls randonneurs dans cette vallée, m’a affirmé Olivia, et les employés du parc veillent jour et nuit à ce que tout se passe bien. » Je lui ai demandé si Alekseï appartenait bien à une entreprise privée spécialisée dans les randonnées à Poutonara. Elle ne m’a pas répondu. Je ne veux pas aller au goulag, je ne veux pas mourir de froid. Je viens d’entendre un bruit derrière le tissu ridicule de la tente. Ça peut être un mouflon, un ours ou un garde forestier. Je vais éteindre la lampe.