Echec critique

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Le croisement des ruelles était un lieu de passage si important qu’Ysna passa inaperçu enrouler dans sa grande cape. Les pancartes se dandinaient mollement au grès des courants d’airs et il les vérifia une par une. Dans un recoin, une ouverture discrète menait à une petite ruelle descendante. Il s’arrêta devant le lot de panneau qu’il lut avant de s’engouffrait le long du chemin. Là, tout au fond de la petite allée, derrière une série d’arche se trouvait l’objet de sa recherche.

C’était une boutique de portails comme on pouvait en trouver dans les grandes rues principales. Tout le monde avait l’habitude de s’y rendre à l’achat d’une demeure pour faire poser quelques portails magiques donnant à l’extérieur, le plus souvent sur le lieu du travail ou vers l’école des plus jeunes. Ainsi, il n’y avait aucun temps de trajet mais une route directe. Les plus riches poussaient le vice à en équiper leurs propres demeures rendant l’usage des escaliers purement caduques ou s’offrant des petites fantaisies architecturales.

Ysna n’avait jamais eu les moyens de s’offrir une maison. Il habitait dans une collectivité de nymphe, toute plus pauvre les unes que les autres, mais s’il ne faisait rien, très bientôt il déménagerait. Il irait dans l’une de ses maisons sublimes aux multiples portails. Il prendrait des bains dans de petites piscines toutes équipées. Il se baladerait dans le grand parc attenant à la maison… et ce serait là, sa seule forme de liberté. Un de ces riches allait simplement le prendre pour l’engrosser, encore et encore, tout en le faisant vivre dans une cage dorée. Heureusement, il avait trouvé une parade contre cet avenir qui ne lui convenait absolument pas.

Il poussa la porte de la boutique et fut submergé par l’odeur épicée. Les portails dégageaient toujours une petite fragrance mais leur concentration était telle qu’il en éternua, attirant l’attention du maître enchanteur qui apparut tout près de lui.

- Bonjour… petite nymphe.
- Monsieur.
- Voudriez-vous m’acheter quelque chose pour votre maître ?
- Non. Je voudrais me vendre.
- Oh !

Le maître enchanteur l’observa de la tête aux pieds avant de répéter.

- Oh… En entier ?
- A la découpe.

C’était le mieux pour sa sécurité et le maître enchanteur acquiesça.

- Combien me donnez-vous par morceau ?
- Et bien… Votre pénis est fonctionnel ?
- Oui.
- 3 pour votre pénis alors. 2 par main, donc 4. 6 pour votre anus. 3 pour votre bouche. 1 pour chacun de vos pieds, donc 2. 18 donc. Et je veux également vos tétons et vos pieds pour rien, ils couvriront tout juste les coups de portails.

Ysna baissa la tête, c’était moins qu’il ne le pensait.

- Je suis un nymphe fertile… et vierge.
- Hum… certes. Disons un peu plus pour votre anus alors. 20.

Ysna acquiesça, les joues un peu rougies. 20 crédits. Il pourrait acheter une petite maison et avoir de quoi nourrir l’enfant qui naitrait de ce coït pendant quelques années. C’était un bon prix. Alors qu’il l’emmenait aux portails, le mage fit un arrêt.

- Si vous désirez vraiment plus de crédits, je peux vous proposer de doubler votre temps.
- Pour 40 crédits ?
- Non, non. Une fois souillé vous n’attirez plus le même public. 20 pour les premiers. 13 pour les seconds, après tout, vous ne serez plus vierge non plus.

33 crédits. Une maison avec un petit jardin, de quoi s’occuper dignement de son enfant et l’assurance de ne pas avoir à travailler, et donc de pouvoir l’élever, pendant plusieurs années. Il accepta.

Alors on le conduisit dans une petite salle minuscule où des sangles de cuir étaient suspendues depuis le plafond à intervalles réguliers.

- Déshabillez-vous et couchez-vous dedans quand vous serez prêt. Les portails s’activeront automatiquement.

Il laissa passer un moment de silence avant d’ajouter lentement.

- Bon courage.

Et il referma la porte derrière lui. Ysna hésita un moment avant de se déshabiller. Ce n’était pas si compliqué que ça. Il allait se déshabiller, se coucher et se faire engrosser. Il porterait l’enfant d’un inconnu, se dévalorisant aux yeux de tous ces riches qui avaient cru pouvoir le posséder. Ainsi, personne ne voudrait de lui, personne ne le réclamerait et il serait libre. Alors pourquoi hésitait-il ? Ce n’était qu’un mauvais moment à passer se promit-il.

Il fit de son mieux pour ne penser à rien tout en se déshabillant. Puis il grimpa péniblement dans les lanières et se coucha dedans. Mue par une volonté qui leur était propre, les lanières le saisirent et le placèrent différemment, le surprenant. Puis des cercles de fers se rapprochèrent de son corps. C’étaient les portails qui se plaçaient sur lui avant de s’ouvrir. Il observa les cercles se refermer sur sa poitrine, se plaçant au plus près de sa peau, puis il y eut un courant d’air. Ils y étaient. La vente avait débuté.

Ses tétons furent les premiers à être assailli, ils ne valaient effectivement presque rien, mais il y avait des gens qui appréciaient de les sucer tendrement, de les mordiller voir un peu plus encore. C’était son premier contact intime et cela le fit rougir de gêne et de plaisir mélangés. Contre ses doigts, des corps chauds s’installèrent et une tape sèche lui rappela qu’il se devait d’être actif.

Son corps était à présent relié à une dizaine de maison close différente, vendu au détail pour satisfaire des formes d’envies variées. Si chaque client n’avait accès qu’à un petit bout de lui-même, ça ne l’empêchait pas de tout ressentir en même temps. C’était beaucoup. C’était trop en faites. Très vite, il se mit à couiner, à gémir et à se lamenter, puis sa bouche aussi fut envahie. Une verge fine était entrée en lui et remuait pour se faire plaisir. Il fit de son mieux pour la lécher, ne voulant pas provoquer la colère d’un second client.

Il eut énormément de mal à continuer de bouger lorsqu’il sentit la masse chaude contre son anus. C’était maintenant. Il ne savait pas à qui appartenait ce sexe, mais il lui volerait sa virginité et lui offrirait un enfant dans le même temps. Inconscient de tout cela, le sexe s’engouffra en lui et s’arrêta en le sentant sursauter. L’inconnu prit le temps de le flatter, de ressortir, de le lubrifier davantage avant de revenir plus doucement avec une prévenance à laquelle il ne s’attendait pas.

Bientôt, il ne fut plus que sensations. Ça venait de toute part. Tout son corps était employé, utilisé, malmené comme cajolé, sans lui laisser la moindre forme de répit. Au milieu de tout cela, la main sur son sexe finit par lui permettre de jouir et il reçut de la semence, là, au plus profond de lui. En pleine période fertile, il n’avait que peu de doute, cet amant qui avait su être délicat serait le père de son petit. Il resta immobile entre les liens, haletants, surprit d’avoir pris du plaisir dans un tel moment.

Lorsqu’on le toucha à nouveau, il repensa à ce qu’avait dit le propriétaire. Doubler le temps. Son corps était couvert de sueur et de semences, qui cela pourrait-il bien intéresser ? Les claques sur ses fesses lui donnèrent un début de réponses. Un nouveau sexe s’enfonça au fin fond de sa gorge, le faisant s’étouffer et se débattre. En vain. Le portail restait stable et il n’avait aucun moyen de s’échapper. Heureusement très vite, l’envie monta à nouveau. Son sexe était bien trop sensible, mais les contacts joueurs finirent par avoir raison de lui. On le remplit de spermes, plus qu’il n’aurait pu l’envisager. C’était dans son ventre, dans sa gorge, sur ses mains, sur ses pieds, sur son torse aussi. Tellement de sperme goutait sous lui qu’une petite flaque finie par se former.

Au bout du second temps, il était épuisé et soulagé que les liens le libèrent enfin. Il s’essuya comme il put, avec la serviette qu’il avait prévu à cet effet puis s’enroula dans ses vêtements et dans sa cape, posant une main protectrice sur son ventre qui finirait par s’arrondir. Deux mâles y avaient pourvu. En recevant sa somme d’argents, il fut rassuré de savoir qu’il pourrait élever le petit. Il avait fait tout ce qu’il fallait, tout ce qu’il pouvait aussi.

Dans les mois qui suivirent, il acheta une petite maison pourvue de deux chambres et d’un petit jardin où se dressait un grand chêne. Il l’aménagea de son mieux. Les grossesses des nymphes n’étaient pas les plus longues et son ventre prit bientôt une forme qui ne laissait planer aucun doute. Dans la rue, les inconnus le regardaient de travers en comprenant le déshonneur dans lequel il s’était mis. Enceint et sans soutien. Enceint et sans compagnon. Ça le faisait sourire. Ce qui les faisait grimacer, c’était tout ce qui le rendait heureux.

Jayia et Huys, deux vieux nymphes vivants dans la pauvreté la plus totale vinrent l’aider à mettre au monde son petit trésor. Cet enfant à venir, il l’aimait déjà. Là, couché sur son lit, entouré de ses amis, il mit au monde son fils. Une peau brune surprenante et des yeux bridés qui ne mentaient pas sur ses origines. Tout en lui racontait son héritage génétique. Ysna était encore en train de s’émerveiller devant son tout petit nez, que les contractions reprirent avec force, le faisant pleurer de douleurs. Ce n’était pas le placenta, mais un second petit, très différent du premier qui naquit. Ses yeux remplis de paillettes qui l’observaient avec surprise volèrent son cœur dans l’instant et il l’aima tout autant que son premier fils. Deux petits garçons.

Huys les lava avec soin et durant quelques semaines, ils vécurent tous ensembles, puis les plus âgés repartirent, fatigués et las. Eux aussi avaient eu des enfants, il y a bien longtemps. Pas comme Ysna, pas avec cette liberté honteusement salvatrice. Non, mais comme beaucoup de nymphes, ils avaient vieillis et finis par déplaire. On les avait simplement remplacés par des plus jeunes car les cages dorés finissaient souvent par s’ouvrir en direction du caniveau.

Ysna vit ses fils grandirent peu à peu. Naän, son premier né, avait fait ses premiers pas lorsque ça arriva. Il était dans le jardin, autour du chêne, entrain de montrer les textures des feuilles à ses tout petits et au portail, cet inconnu s’arrêta.

Il était grand. Il était beau aussi. Ses yeux remplis de paillettes lui apprirent tout ce qu’il avait à savoir. Il était le père d’Oly. Il serra son enfant, un peu plus fort contre lui en l’observant, atterré.

- Bonjour.

Tout était beau dans cet homme, même sa voix.

- Je suis content de t’avoir enfin retrouvé. De vous avoir retrouvé tous les deux. Savoir que le père de mon enfant et mon enfant allaient vivre seul, ça ne m’allait vraiment pas.

Ysna recula d’un pas mais c’était déjà trop tard. Le bel inconnu était là pour eux et il ouvrit le portail, avançant d’un pas conquérant jusqu’à poser les doigts sur la joue de son fils.

- Bonjour mon grand.

Il se releva et l’observa en penchant la tête sur le côté avant d’avouer :

- Faire tracer les portails n’a pas été évident et remonter jusqu’à toi encore moins. Désolé pour le retard, mais dis-moi, qui est ce petit ange ? Il n’est pas de moi, c’est sûr.

Le regard bas, le souffle court, Ysna répondit.

- C’est mon fils. J’ai eu des jumeaux.
- Deux pères différents. Hum. Tant pis pour l’autre, je te revendique, toi, et les deux petits.

Ysna finit de s’effondrer, vaincu. Il venait de perdre sa liberté, son indépendance et sa maison. Cet inconnu, cet étranger, venait de tout lui arracher, aussi simplement que ça. Et il leva la main pour lui caresser doucement le visage en lui promettant que tout irait bien, qu’il vivrait dans un endroit aussi magnifique que luxueux… Peut-être crut-il que ses larmes étaient des pleurs de soulagement ? Ou peut-être que ça ne l’intéressait pas, mais il l’emmena avec lui.

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