Chapitre 5

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 Le travail est dur. Mais quel travail ne l’est pas ? Tout le monde s’observe, se juge. Il n’y a pas d’amour. Même pas un semblant de générosité. Juste de la politesse. Et encore. La camera est toujours là. Tous mes collèges sont identiques. Ils ont les mêmes gestes, les mêmes paroles et les mêmes pensées. Le brouhaha des conversations téléphoniques crée une ambiance froide.

 Je me suis encore fait raccrocher au nez. Et déjà le prochain appel se met en place. Un appel cache toujours un autre appel. La personne décroche. Je lis le script. Elle me parle fermement, avec agacement, puis raccroche brutalement. Voilà à quoi rime la majeure partie de ma journée, à me faire raccrocher durement au nez.

 Le soir arrive. Je me lève, me faufile dans l’ascenseur. Celui-ci est plein. Je sens toute la transpiration. D’autres rentrent encore. On me pousse. Je me retrouve collé à des gens que je ne connais pas. On s’agglutine comme des fourmis. Et il se met enfin à descendre. On ne reste jamais longtemps en haut. Juste pour travailler.

A la sortie, tous se bousculent afin de sortir le plus vite pour courir encore. Les autres rentrent sans même attendre. Je me retrouve à devoir jouer des coudes pour pouvoir sortir. Me rendant compte de la situation plus que pathétique, je m’arrête. Je regarde. Ils se frôlent, se rentrent dedans et repartent de plus belle. Un ballet. Ils dansent tous ensemble au ralenti. Alors je relève la tête, prends une bouffée d’air et rentre à mon tour dans la chorégraphie.

 J’arrive au restaurant au début du premier service. Je passe par derrière, mets mes gants. Les premières assiettes arrivent. Elles s’enchaînent. Les gants, trop grands, me frottent les mains. Je dois encore tenir trois heures. La chaleur de bas-fond du restaurant commence à me faire suer. On me dit que ma cadence est trop faible. J’accélère. Mais le travail ne finit pas plus tôt pour autant.

 Je rentre comme à chaque fois : épuisée. Plus personne n’est dans les rues. Je m’arrête à un croisement. Soit je rentre chez moi, soit je m’autorise un moment de calme en haut de la ville. Les marches pour arriver en haut de l’immeuble sont difficiles. Je ralentis de plus en plus. Et au moment où je choisis de finalement rentrer chez moi, la porte du toit est devant moi. Je la pousse, m’assieds sur le bord. Mes jambes dans le vide, à contempler la ville de haut.

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