CHAPITRE 27

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Sylvia était à 2 mois de son terme désormais. Elle avait un beau ventre qu’elle ne pouvait plus du tout cacher. Elle avait rendez-vous 2 semaines plus tard pour sa dernière échographie, mais pour le moment c’était à l’organisme d’adoption qu’elle avait rendez-vous. Henry et Louise l’y accompagnaient. C’était la première fois que ses parents l’accompagnaient à un rendez-vous qui concernait le bébé et elle était persuadée que c’était pour s’assurer qu’elle ne leur mente pas encore une fois et qu’elle faisait bien toute les démarches en vue de faire adopter son bébé.

Il régnait un silence pesant dans la voiture et c’est tout aussi silencieusement qu’ils patientèrent dans la salle d’attente. Henry s’était assis à l’opposé de Sylvia et Louise, comme s’ils ne se connaissaient pas. Sylvia était très nerveuse et n’arrêtait pas de se ronger les ongles. La secrétaire les appela et les conduisirent vers le bureau de la responsable des adoptions. Son sourire chaleureux et plein de compassion ne suffit pas à détendre Sylvia. Elle entra d’un pas hésitant dans le bureau. Tout à coup, elle eut l’impression que tout l’air était aspiré de la pièce. L’ambiance y était lourde et pesante. La décoration chargée et les meubles massifs accentuaient cet effet étouffant. Une grande femme aux cheveux grisonnant, vêtue d’un tailleur noir et d’un chemisier blanc, les accueillit avec un grand sourire.

- « Bonjour. Je suis Mme LENFANT. Vous êtes bien Sylvia DE MONTFORT ? »

- « Oui ». Répondit Sylvia au comble de l’angoisse.

- « Et vous devez être ses parents, Henry et Louise, c’est bien ça ? »

- « Oui ». Répondit Henry.

- « Asseyez-vous ». Dit Mme LENFANT en leur indiquant des sièges alors qu’elle prenait place dans son fauteuil de l’autre côté du bureau. « Je suis la directrice de cette agence et c’est moi qui serais en charge de votre dossier ». Commença-t-elle.

« Dossier » ce mot fit frémir Sylvia. Alors son bébé n’allait être qu’un « dossier » parmi tant d’autres ? Quelle horreur. Il ne serait même pas reconnu en tant qu’être humain, mais juste comme un objet, un numéro, un « dossier ». Elle en eut la nausée.

- « Pour commencer, j’ai besoin de savoir quelques petites choses vous concernant Sylvia. Bien sûr, si une question vous dérange, vous n’êtes pas obligée d’y répondre ».

Sylvia hocha la tête positivement.

- « Pouvez-vous m’expliquer les circonstances de votre grossesse ? »

- « Je sortais avec un garçon de mon lycée. Ça faisait plusieurs mois que nous avions des relations protégées jusqu’au jour où le préservatif a craqué ». Dit-elle très gênée de raconter une nouvelle fois son histoire devant ses parents.

Elle vit Henry serrer les mâchoires et Louise pinça les lèvres.

- « Quelle a été la réaction de votre petit ami lorsque vous lui avez annoncé votre grossesse ? »

- « Il a piqué une colère et m’a laissé tomber ». Dit-elle en baissant la tête le cœur serré.

- « Je suppose que si vous êtes ici, c’est qu’il ne compte pas s’occuper de l’enfant ».

- « Oui ».

- « Pourquoi souhaitez-vous proposer votre bébé à l’adoption ? »

Elle ouvrit la bouche pour répondre qu’elle ne voulait pas le faire adopter, mais son père pris les devants et répondit à sa place.

- « Madame la directrice. Ma fille est trop jeune pour élever un enfant. Elle n’a pas fini ses études et elle n’a pas de travail. Elle n’est pas capable de prendre soin d’un bébé. Elle n’arrive déjà pas à s’occuper d’elle ».

- « Monsieur DE MONTFORT, j’aimerais que ça soit Sylvia qui réponde ». Coupa sèchement Mme LENFANT.

Sylvia avait gardé la tête baissée, essayant de contrôler son envie de pleurer.

- « Sylvia ? » Demanda la directrice.

Elle leva enfin les yeux vers elle et répondit d’une voix étranglée :

- « Je ne veux pas faire adopter mon bébé ».

Louise se pencha vers elle

- « Sylvia, enfin. On en a déjà parlé, tu ne peux pas élever ce bébé toute seule. On était d’accord ».

Sylvia se tourna vers sa mère et la fusilla du regard.

- « Vous étiez d’accord tous les deux. Moi, je n’ai jamais dit que je voulais le faire adopter. Je t’ai déjà dit que je ne poursuivrais pas mes études et que je travaillerais pour subvenir à nos besoins ».

- « Sylvia, s’il te plait, on ne va pas de nouveau avoir cette conversation. Tu es trop jeune pour avoir un enfant. Tu dois finir tes études pour te créer un bel avenir ».

- « Sylvia, vos parents ont raison, vous êtes jeune et il est important que vous puissiez finir vos études pour avoir une bonne situation et fonder votre famille dès que vous aurez une situation stable. Vous êtes jeune Sylvia, vous avez le temps d’avoir d’autres enfants dans de meilleures conditions. Aujourd’hui, que pouvez-vous offrir à ce bébé ? Vous êtes étudiante et n’avez aucune rentrée d’argent, vous vivez chez vos parents et vous êtes célibataire. Clairement votre situation est trop précaire pour élever un bébé dans de bonnes conditions ». Intervint Mme LENFANT.

Elle se tourna vers la directrice, les yeux écarquillés. Elle n’en croyait pas ses oreilles. Elle était du côté de ses parents. Elle aussi voulait la convaincre qu’il serait mieux pour elle et pour son bébé, qu’elle le confie à un couple qui pourrait prendre soin de lui correctement.

Mme LENFANT lui exposa les différents types de contrats d’adoption qui existait. Libre à elle ensuite de choisir.

Elle pouvait accoucher sous X, auquel cas son identité serait cachée et son nom ne figurerait même pas sur l’acte de naissance du bébé. Elle pourrait laisser une lettre ou un objet qui serait gardé secret dans le dossier de l’enfant. Il pourrait y avoir accès à sa demande, à partir de ses 18 ans. A tout moment, elle pourrait déposer des indications, des lettres ou autre dans le dossier de l’enfant si elle désirait qu’il puisse la retrouver plus tard.

Elle pouvait le reconnaitre à la naissance. Son fils porterait son nom et elle figurerait sur son acte de naissance. Elle pourrait ensuite le confier à l’adoption. Soit en adoption plénière, dans ce cas l’enfant porterait le nom de ses parents adoptifs. Soit en adoption simple et là l’enfant garde son identité.

- « Il y a une autre option, mais je vous la déconseille très fortement. Vous le reconnaissez à la naissance, mais dès sa sortie de la maternité il sera placé en famille d’accueil. Vous aurez des jours de visites de défini par le tribunal. Vraiment je ne vous conseille pas cette option. Ça n’est vraiment pas bon pour le développement et la sécurité affective de l’enfant. Il ne comprendra pas pourquoi il vit avec des gens qu’il va considérer comme ses parents, puisque se sont eux qui vont l’élever, et pourquoi une femme qui se présente comme sa mère, vient bouleverser son équilibre une à deux fois par semaine. Pour vous aussi ça ne serait pas bon. Ça sera très difficile à chaque fois de le quitter et de savoir qu’il vit avec une autre femme, tout ce que vous auriez dû vivre avec lui. Je vous assure que psychologiquement et émotionnellement parlant, c’est très très difficile à vivre pour la mère et pour l’enfant. Ça n’est vraiment pas la meilleure solution dans votre cas ».

Mme LENFANT lui donna quelques brochures et documents résumant tout ce qu’elle venait de lui exposer, afin qu’elle puisse les étudier chez elle tranquillement. Sylvia était dans un état second, comme sonnée. Elle avait bien compris tout ce que la directrice lui avait expliqué et une option avait retenue plus particulièrement son attention. Tous les arguments que cette femme avait avancés, semèrent le doute dans son esprit. Peut-être devait-elle confier son bébé à l’adoption pour son bien ? Les 3 personnes qui se trouvaient dans cette pièce avaient peut-être raison, elle était trop jeune. Que pouvait-elle offrir à son fils hormis tout son amour ? Mais est-ce que ça serait suffisant ? Elle ne savait plus. Elle était perdue.

- « Sylvia, je vous laisse réfléchir. On va se revoir dans 3 semaines pour en rediscuter. En attendant, lisez bien tous les documents que je vous ai donné. Etudiez la question avec sérieux. Ne laissez pas vos sentiments guider vos choix, mais écoutez plutôt votre raison. Pensez au bien-être et à l’avenir de votre bébé ». Dit Mme LENFANT avec plus de douceur.

- « Merci ».

C’est tout ce que Sylvia pu répondre. Elle se sentait complètement vide, complètement perdue. Elle n’était plus capable de réfléchir. Elle voulait seulement rentrer et dormir pour tout oublier pendant quelques heures. Elle voulait que tout s’arrête. C’était devenu trop dur à supporter.

Ils quittèrent les locaux de l’agence d’adoption quelques minutes plus tard. Dans la voiture, Sylvia posa sa tête contre la vitre et ferma les yeux, épuisée. Elle n’était plus sûre de rien, plus du tout sûre de ses choix. Elle nageait en pleine confusion. Pour le moment elle était trop fatiguée pour pouvoir réfléchir. Elle voulait juste dormir.

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