CHAPITRE 19

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Sylvia fût inquiète toute la semaine. Elle sursautait à chaque fois que ses parents l’appelaient, pensant qu’ils avaient tout découvert. Elle avait hâte de leur annoncer, pour enfin ne plus être aussi angoissée et ne plus se cacher et en même temps, elle redoutait ce moment encore plus que lorsqu’elle avait dû annoncer sa grossesse à Lionel. Plus les jours passaient et plus elle angoissait. Elle repoussait ce moment chaque jour, sachant pourtant qu’il faudrait bien qu’elle le fasse à un moment où à un autre avant que son état ne soit trop voyant. Son ventre commençait à poindre légèrement. Pour le moment en évitant de porter des vêtements trop près du corps, personne ne pouvait deviner qu’elle était enceinte, mais dans quelques semaines, elle ne pourrait plus le cacher.

Sylvia se réfugiait le plus possible chez Angélique, pour éviter au maximum de voir ses parents et donc limiter les risques qu’ils découvrent son état. Passer du temps avec son amie, lui changeait les idées. Elle pouvait être elle-même. Elle n’avait pas à faire attention à son apparence. Elle n’avait pas à se cacher pour pleurer.

Angélique était un soutien incomparable. Elle était une amie extraordinaire. Toujours aux petits soins pour Sylvia. Elle pouvait passer des heures à l’écouter et à la réconforter. Elle faisait toujours des blagues pourries ou des pitreries pour essayer de faire rire son amie lorsqu’elle était triste. Sa porte était toujours ouverte pour Sylvia, si elle avait besoin d’un endroit rassurant et amical.

La rentrée approchait à grand pas. Il fallait qu’elle se décide à parler à ses parents avant de reprendre les cours. Dès qu’elle essayait de leur parler, ses mains devenaient moites, elle avait l’estomac noué, la tête qui se mettait à bourdonner et le souffle court. Elle se sentait tellement mal qu’à chaque fois, elle renonçait de peur de faire un malaise devant eux.

Cette fois, elle ne pouvait plus reculer. Elle faisait sa rentrée en terminale le lendemain. Elle devait absolument trouver le courage de parler à ses parents. Elle se motiva toute la journée. Devant son miroir, elle essaya de mettre en ordre ses idées et ses arguments. Elle était au comble de l’angoisse. Louise l’appela pour le diner. Elle prit une profonde inspiration, expira longuement jusqu’à vider complètement ses poumons et descendit diner.

Elle s’installa à sa place autour de la table de la cuisine. Elle était pâle, elle transpirait et son cœur battait si fort dans sa poitrine, qu’il lui faisait mal. Louise leur servit leur repas. Elle commença à manger, mais elle n’avait pas faim. L’angoisse lui nouait l’estomac. Louise s’en aperçut :

- « Sylvia, chérie, ça ne va pas ? Tu es toute pâle ? »

Sylvia su que c’était le moment. Il fallait qu’elle leur parle maintenant. Elle eut du mal à déglutir, sa gorge était sèche.

- « Maman, papa, il faut que je vous parle ». Commença-t-elle.

Elle avait la tête qui tournait et du mal à respirer, mais elle ne pouvait plus reculer, il fallait qu’elle leur dise maintenant.

- « Qui a-t-il ma chérie ? » s’inquiéta Louise.

Henry ne dit rien mais il s’arrêta de manger et posa sa fourchette dans son assiette, attentif à ce qu’allait leur dire sa fille.

- « Ce n’est pas facile à dire… » Elle bu une gorgée d’eau pour se laisser quelques secondes de plus et hydrater sa gorge très sèche. « Je suis enceinte » lâcha-t-elle d’une toute petite voix à peine audible.

Elle ferma les yeux attendant la réaction de ses parents. Louise et Henry restèrent bouche bée quelques minutes. Leurs cerveaux avaient du mal à assimiler ce qu’ils venaient d’entendre.

- « Tu quoi ? » demanda Henry stupéfait.

- « Je suis enceinte ». Répéta Sylvia un peu plus fort et avec un peu plus d’assurance.

Elle vit le visage de son père devenir rouge de colère. Comme elle le prévoyait Louise était au bord des larmes.

- « Bon sang Sylvia mais comment est-ce possible ? » Cria Henry en tapant du poing sur la table, les faisant toutes les 2 sursauter.

- « Et bien… » Voulut-elle commencer à expliquer.

- « Tais-toi ». Ordonna Henry furieux.

Sylvia était morte de peur. Ses parents avaient réagi exactement comme elle le prévoyait. Henry était dans une colère noire et Louise pleurait maintenant, à chaudes larmes.

- « Qui est le père ? » Demanda Henry.

- « Un garçon de ma classe d’Arts Plastiques, Lionel ». Dit-elle timidement.

- « Il est au courant ? »

- « Oui ».

- « Et il compte t’épouser ? »

- « Non. Il m’a largué dès que je lui ai annoncé ma grossesse ». Répondit Sylvia en s’attendant à un nouvel excès de rage de son père.

- « Parfait. Ce petit con met ma fille enceinte et ensuite n’assume pas. Bravo ma fille, sur ce coup-là tu as fait fort ».

Louise pleurait toujours. Jusqu’alors elle n’avait pas prononcé un seul mot, choquée. Sylvia n’osait pas les regarder dans les yeux, elle fixait son assiette.

- « Comment faisiez-vous pour vous voir, entre tes cours et les cours de soutien que tu donnais ? Et puis cet été tu n’es sorti que pour aller chez Angélique. A moins que tu nous ais menti pour aller te vautrer avec ce petit con ? » demanda Henry en la foudroyant du regard.

Elle devait tout leur révéler : ses mensonges, leur relation cachée, Angélique qui la couvrait, etc…. Tout. Elle avait des vertiges et la nausée, mais elle devait leur raconter. Ses parents attendaient des explications.

- « C’est à cause du cours d’Arts Plastiques ». Commença-t-elle.

- « Qu’est-ce que ton cours d’Arts Plastiques vient faire là-dedans ? » demanda Louise qui sortait enfin de son état d’hébétude.

- « Maman tu te rappelles les costumes que l’on devait confectionner pour un défilé pour Mardi Gras. En fait mon binôme n’était pas Angélique mais Lionel. Les couples ont été formé par tirage au sort. »

- « C’était pas une raison pour coucher avec lui ». Dit Henry.

- « On s’aimait papa ».

- « Tu es trop jeune pour savoir ce qu’est l’amour. Tu as cru aux boniments de ce petit salopard. Il t’a manipulé pour coucher avec toi ». Dit Henry comme pour se convaincre que sa fille ne l’avait pas trahi.

- « Mais je ne comprends toujours pas comment vous faisiez pour vous voir ? » Dit Louise.

- « Je n’allais pas chez Angélique pour travailler sur le projet de Mardi Gras. J’allais chez Lionel. Je savais que vous ne voudriez jamais qu’il vienne ici pour travailler, alors j’ai dû vous mentir. Au départ c’était vraiment pour travailler sur le projet et puis au fur et à mesure …. »

- « Il t’a forcé ? » Demanda Henry ne voulant toujours pas croire que sa fille avait pu coucher intentionnellement avec un garçon.

- « Non. Il ne m’a jamais forcé ». Elle ne pouvait pas lui en dire plus. Ça n’était pas des choses qu’elle pouvait dire à ses parents. C’était trop gênant, trop intime.

- « Et ensuite ? » insista Louise, curieuse de savoir jusqu’où avait pu aller sa fille, dans son mensonge.

- « Il fallait que je trouve un moyen pour que l’on continu à se voir après le défilé de Mardi Gras, alors j’ai inventé cette histoire de cours particuliers que je devais donner aux élèves en difficultés en Anglais et en Espagnol ».

- « Tes professeurs ne t’ont jamais demandé de donner des cours de soutien ? » demanda Henry interloqué.

- « Non, j’ai tout inventé pour pouvoir voir Lionel. Je savais que vous ne voudriez jamais que l’on se voit, que vous n’accepteriez pas que je sorte avec un garçon. Mais je l’aimais tellement que j’étais prête à tout pour le voir derrière votre dos ».

- « Cet été aussi, tu nous mentais lorsque tu passais tes journées chez Angélique ? »

- « Non. J’étais bien chez Angélique. Lionel m’a largué au début des vacances ». Dit Sylvia en réprimant un sanglot.

Henry et Louise restèrent silencieux un petit instant. Assimilant toutes les révélations que venait de leur faire Sylvia. Ils étaient sous le choc. Leur fille leur avait menti pendant plusieurs mois et en plus elle était enceinte. C’était difficile à avaler.

- « Sylvia, comment as-tu pu me cacher que tu fréquentais un garçon ? Je croyais que l’on était proche toi et moi ? Que l’on se disait tout ? » Dit Louise essayant de comprendre le comportement de sa fille.

- « Maman, le sujet de la sexualité était difficile à aborder avec toi. Rappel-toi déjà comment tu étais mal à l’aise pour m’expliquer pour les règles, alors parler sexualité avec toi, c’était impossible. Je sais que tu aurais tout fait pour éviter que l’on aborde le sujet. C’est comme si avoir des relations sexuelles étaient tabou ».

- « Sylvia ? » S’offusqua Louise.

- « Quoi maman, c’est vrai. Regarde comment tu réagis juste en entendant ces 2 mots, alors avoir cette conversation avec toi, était impossible ».

- « Vous ne vous êtes pas protégé ? »

- « Si, mais un jour le préservatif a craqué et comme je ne prends pas la pilule ».

- « Tu aurais dû m’en parler, je t’aurais emmené chez le médecin ». Dit Louise.

- « Maman, je ne pouvais pas t’en parler. Tu es tellement coincée à ce sujet, que tu aurais fuie la conversation ».

- « Sylvia, ne t’en prend pas à ta mère. Ce n’est pas sa faute si tu n’es qu’une trainée ».

Sylvia reçu cette accusation comme un gifle. Avec ces mots, son père lui avait fait bien plus mal que s’il l’avait frappé. Elle comprit qu’il avait perdu toute confiance et toute estime pour elle.

Louise s’était remise à pleurer de plus belle. Henry jouait avec son couteau. Il paraissait réfléchir. Sylvia n’osait plus faire un seul geste, ni dire quoique se soit. Un silence pesant c’était installé dans la petite cuisine. Ce fût Henry qui le brisa le premier :

- « Tu vas avorter ». Imposa-t-il.

- « Non ». Répondit Sylvia.

Pour la première fois depuis le début de cette conversation, elle regarda son père droit dans les yeux, déterminée.

- « Pardon ? » Demanda Henry ne s’attendant pas à ce que sa fille lui réponde.

- « J’ai dit non. Il est hors de question que j’avorte ». Dit-elle tout en soutenant toujours le regard de son père.

- « Tu es mineure, tu es sous notre responsabilité et si je te dis que tu vas avorter, tu le feras ». Répondit Henry dont la colère remontait.

- « Je ne peux pas ». Dit-elle.

- « Oh si tu peux et tu vas le faire ». Imposa Henry.

- « Non je ne peux pas, j’ai dépassé la date limite pour avorter. Je suis à 12 semaines de grossesse ». Dit-elle avec un petit sourire de satisfaction.

- « QUOI ? » Hurla Henry.

- « Je savais que vous m’obligeriez à avorter, alors j’ai fait exprès d’attendre d’avoir atteint les 12 semaines pour vous l’annoncer ». Dit Sylvia avec aplomb.

Henry se leva si brusquement, qu’il en reversa sa chaise. Il se pencha au-dessus de la table et décolla une gifle monumentale sur la joue de sa fille. Louise poussa un cri de surprise. Sylvia porta la main à sa joue douloureuse. Sa joue la brulait, mais la douleur qu’elle ressentait au fond de son cœur était encore plus forte. Elle ne pensait pas que son père en arriverait à la gifler. Il n’avait jamais levé la main sur elle. Elle le regarda, les larmes aux yeux. Il était dans une colère noire. Elle ne l’avait jamais vu si furieux. Mais elle n’avait pas peur, son instinct de protection envers le petit être qui grandissait au creux de son ventre, était plus fort que la peur que pouvait lui inspirer son père. Elle protègerait son bébé, coûte que coûte.

- « Tu n’es qu’une petite garce ». Persifla Henry. « Tu avais tout calculé depuis le début. Tu n’es qu’une trainée. A partir de maintenant tu n’es plus ma fille ». Dit-il en quittant la pièce pour se rendre dans son atelier.

Sylvia n’en revenait pas. Son père la reniait. Plus que les mots, ce qui lui avait fait le plus de mal, c’était le dégoût qu’elle avait lu sur son visage, lorsqu’il la regardait.

Louise était aussi stupéfaite qu’elle. Elle pleurait toujours et n’eut aucun geste envers sa fille. Sylvia se leva et monta dans sa chambre le cœur lourd. Elle s’attendait à ce que cette discussion soit difficile, mais jamais elle n’aurait pu imaginer que son père la gifle et ai des paroles si blessantes.

Elle alla directement se coucher et pleura une bonne partie de la nuit.

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