Chapitre 46 - Apprentie criminelle

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Vicente n’est pas là lorsque j’arrive dans la cuisine. Inutile de le chercher, je sais qu’il doit travailler. Je remarque un petit mot sur la table :

Je suis parti travailler, j’expliquerais à Sam que tu ne peux pas venir.

Repose-toi bien, je rentre ce soir.

V   

Le ciel est gris et je ne suis pas d’humeur à faire quoi que ce soit. Je soupire en me disant que je n’ai rien à faire dans cette maison complètement vide. Je récupère mon téléphone mais le réseau est très faible donc impossible de télécharger des jeux. Il faudra que je dise deux mots au criminel concernant les loisirs existants dans cet endroit.

Je regrette de ne pas pouvoir me déplacer pour aller travailler avec mon homme. De plus, je suis un peu triste de ne pas revoir Sam car c’est une personne que j’apprécie beaucoup.

Etant donnée que le temps est très lourd et qu’il ne va pas tarder à pleuvoir, je décide de grimper à l’étage. Je m’aide d’une rampe dont le bois est craquelé pour monter. A chaque pas que je fais, j’ai peur que la rambarde cède et que je dégringole les escaliers.

Enfin, j’arrive à l’étage indemne mais il fait un peu sombre. La lumière jaunâtre grésille au plafond lorsque je l’allume. Le minuscule couloir mène à quatre portes dont la peinture bleue est complètement élimée.

- Vraiment digne d’un film d’horreur tous ça, je ne peux m’empêcher de grommeler.

J’appuie ma main contre le mur pour m’aider à marcher et le parquet craque sous mes pieds. L’étage est décidément en moins bon état que le rez-de-chaussée. Si je n’avais pas échappé à un kidnapping, j’aurais fait une scène à Vicente.

Je sursaute lorsque j’entends des bruits venant du toit mais en regardant par la lucarne je constate que la pluie est très forte.

J’ouvre une première porte qui grince sur ses gonds. La pièce est complètement vide avec un papier peint tout déchiré. La seconde porte sont les toilettes qui dégagent une odeur douteuse. Ensuite, la troisième chambre comporte une armoire imbriquée dans le mur. Quand je l’ouvre, deux gros cartons me font face.

Heureuse de trouver quelque chose, je décide de fouiller un peu. L’un des cartons contient plusieurs vieux livres aux pages jaunis tandis que l’autre semble beaucoup plus intéressant. Je remarque quelques babioles sans intérêt puis un album photo.

Lorsque je l’ouvre je vois plusieurs images dont certaines ont mal vieillit. Une famille de quatre personnes vivait ici avant mais ils ont l’air d’être parti brutalement. La date s’arrête il y a sept ans et ensuite il n’y a plus rien.

Je soupire puis je décide de laisser le souvenir de ces personnes tranquilles. Je range les boites mais je garde un roman en espagnol dans ma main. Lire est la seule chose que je puisse faire pour me changer les idées.

***

La pluie s’est calmée depuis plusieurs heures et je suis installée dans le canapé pour lire le vieux livre que j’ai emprunté. Lorsque je vois le soleil pointer le bout de son nez et éclairer l’eau sale de la piscine, je me redresse pour observer le spectacle.

Au même moment, la porte d’entrée s’ouvre. Le criminel est vêtu d’un blouson en jean et se place près de moi en quelques pas. Mon cœur bat rapidement et je suis très heureuse de le retrouver.

- Tu es en avance, je lui fais remarquer.

- Tu n’es pas contente ? questionne-t-il en me lançant un sourire faussement contrit.

- Bien sûr que si mon amour.

Le criminel me prend dans ses bras quelques instant et j’en profite pour sentir son odeur virile.

- Il est l’heure ! s’écrit-t-il soudain en s’écartant de moi.

- De quoi faire ? je demande étonnée.

Mon homme ouvre la baie vitrée puis me désigne le fond du jardin près de la falaise. Je remarque des boites de conserves alignées sur un énorme tronc d’arbre.

- Je vais t’apprendre à tirer, explique-t-il.

J’écarquille les yeux de surprise avant de reprendre contenance. C’est vrai qu’il m’avait dit que je devais apprendre à tirer. J’enfile une chaussure puis je protège les orteils de mon pied blessé avec un bout de tissu.

Vicente me prend dans ses bras puis nous nous dirigeons au fond du jardin. Quand il me dépose sur l’herbe fraiche et encore un peu humide, je me tiens à lui pour ne pas tomber. Le criminel fouille dans un sac puis prend une arme de poing.

- Ceci est une arme standard utilisée le plus souvent par la police, m’indique-t-il. Il faut que tu te places face à la cible en tenant l’arme des deux mains. Il n’y a que dans les films où ils tirent avec une seule main.

Mon amant me lance un clin d’œil avant de se mettre en bonne position.

- Tu dois mettre une jambe devant et l’autre derrière en les écartant un peu l’une de l’autre, poursuit-il. Ensuite, tes doigts doivent se placer exactement comme cela sur l’arme. Si tu ne t’apprêtes pas à tirer, tu ne poses pas l’index sur la gâchette. Lorsque tu es prête, tu enlèves la sécurité qui se trouve ici puis tu vises avant de tirer.

La boite tombe mais le bruit du tir me fait sursauter et je manque de tomber. Heureusement, Vicente baisse rapidement son arme puis m’attrape par le bras pour me stabiliser. Un sourire narquois se dessine sur son visage quand il a vu que j’ai sursauté.

- Je suis habituée à ça mais toi non, avoue-t-il en me tendant un cache pour les oreilles puis l’arme. A ton tour.

Vicente vient se placer derrière moi puis il me prend la taille. Je sens que mon corps est un peu soulagé de son poids et je peux équilibrer mon organisme. J’imite la posture du criminel puis je souffle pour rejeter l’air hors de mes poumons comme j’ai pu le voir faire.

Cela me prend quelques secondes pour m’ajuster puis je vise et tire. Le recul aurait pu me faire tomber mais mon amant me tient parfaitement bien. La balle n’a pas trouée la boite de conserve mais l’a quand même fait vaciller.

- Pas mal pour une première fois, commente-t-il.

Je ne retiens pas un sourire sur mes lèvres et une exclamation de fierté. Mon homme me lâche doucement puis me montre une nouvelle arme moins rassurante. Je ne suis pas sûre que tirer avec un fusil d’assaut soit la meilleure chose à faire mais bon…

- Je sais que ça peut faire peur mais c’est ce qu’on utilise beaucoup dans la criminalité. Ça fonctionne à peu près comme une arme de poing.

Vicente se place à nouveau en position de tir en laissant reposer l’arme sur son épaule. Il me montre comment basculer de la rafale au coup par coup, ce qui est beaucoup plus adapté pour moi.

Ensuite, c’est à mon tour de jouer. Je déglutis pour me donner du courage mais la perspective d’avoir une arme aussi imposante contre ma peau est perturbant. Le criminel avance son visage vers le miens et je peux sentir son souffle contre ma joue.

- Tu vas y arriver, chuchote-t-il.

J’inspire, je vise puis je tire. La puissance du tir me fait reculer contre le torse de Vicente. Heureusement que je n’ai pas à subir le bruit assourdissant de l’arme à feu.

Je me redresse en même temps que Vicente puis je tourne la tête pour croiser son regard bienveillant. Un sourire se plaque sur son visage puis il me désigne le bout du jardin. La boite de conserve est renversée sur le côté avec un trou.

- J’ai réussi ! je m’écris en sautant dans les bras de mon homme l’arme à la main.

- Attention avec ça, rigole-t-il en me prenant l’objet des doigts.

Le criminel me tient serré contre lui puis il me repose doucement.

- Tu mérites un bon repas, dit-il en me faisant un clin d’œil. Attends-moi dans la maison.

Mon amant me dépose dans le salon puis je m’installe à l’une des chaises de la cuisine. Mes jambes commencent à me faire un peu mal. Je crois qu’il est temps pour moi de me reposer et de ne pas faire trop d’effort.

Vicente revient avec deux paquets en papier recyclé. Je remarque qu’il s’agit du logo d’un très bon restaurant populaire en centre-ville. Je devine qu’il est passé chercher à manger avant de venir ici. Voici notre nouveau livreur attitré !

- Merci beaucoup ! J’adore cette petite surprise, je m’exprime.

- Demain soir, nous pourrions faire un truc comme aller au cinéma ou au restaurant, propose-t-il.

Je suis un peu étonnée par cette initiative mais j’accepte en souriant. Vicente partage avec moi une omelette mexicaine et une soupe japonaise. Ce restaurant rassemble plein de spécialités mondiales et il est très populaire.

Mon amant et moi nous nous installons dans le canapé pour observer une nouvelle fois le magnifique spectacle du soleil se coucher derrière les montagnes.

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