Chapitre 38 - Sans cœur

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Vicente me lance un regard surpris puis sombre. Il se redresse rapidement puis époussette ses mains pleines d’herbe. Ce retournement de situation ne me dit qui vaille. Le criminel ne me regarde plus et glisse dans le mutisme de longues secondes.

- Qu’est-ce qu’il y a ? je finis par demander.

Mon amant se tourne vers moi puis me fixe sans aucune chaleur dans le regard.

- Je ne peux pas te donner ce que tu veux Marina, dit-il. Cette vie-là est trop dangereuse et je ne peux avoir aucune attache qui me rendrait faible.

- Je sais, j’avoue en baissant la tête vaincue.

- Je vais te libérer demain.

- Non ! je m’écris.

Il me dévisage avec surprise ne comprenant pas pourquoi je ne souhaite pas être libérée.

- Laisse-moi cette dernière semaine avec toi, comme c’était prévu.

Le regard neutre, Vicente finit par acquiescer solennellement. A ce moment-là, je regrette de lui avoir dit ces derniers mots. Je me suis enflammée et j’ai gâché le peu de temps qu’il me reste avec lui. Que va-t-il se passer maintenant ?

J’entends le criminel parler au téléphone pour commander un taxi. Sans me jeter un regard, il s’éloigne de notre coin d’herbe. Je le suis jusqu’à un trottoir en face du parc. Les mains dans les poches, il observe le bâtiment droit devant lui. Il m’est impossible de savoir ce que mon amant pense et je plonge dans le désespoir.

Je me rends à peine compte que le taxi se place devant nous. Mécaniquement je monte à côté de Vicente puis le véhicule démarre. Mon esprit divague dans le passé.

La voiture nous dépose devant la villa. Nous sommes accueillit par quatre gardes du criminel qui le salut. Sans un regard en arrière, mon amant monte à l’étage. Je remarque un objet rose posé sur le plan ce travail de la cuisine.

Je fixe mon téléphone plusieurs secondes comme s’il s’agissait d’un inconnu. Pourtant, c’est bien le mien avec des paillettes rose et un dégradé de bleu sur la coque. Je le saisi puis j’observe l’écran noir.

Mon cœur commence à battre de plus en plus vite. Je monte les escaliers en le tenant dans ma main. Je ne sais pas pourquoi j’ai cette appréhension. Est-ce que j’ai peur d’avoir des tonnes de messages ? A moins que je sois terrifiée à l’idée que mes parents découvrent la vérité. Il y a presque deux mois, j’aurais donné n’importe quoi pour que ma famille me cherche. Maintenant, je veux juste être avec Vicente.

Je m’allonge sur le lit et le tissu duveteux me fait prendre conscience que mon corps est en pilotage automatique. Je prends mon courage à deux mains puis j’allume mon smartphone. Je saisi mon mot de passe puis il se déverrouille. Il est tel que je l’ai laissé : même fond d’écran et les applications sont à leur place.

Mon sang se glace lorsqu’il affiche quatre nouveaux messages. Le doigt tremblant je regarde celui d’Estella envoyé aujourd’hui même.

Coucou, ça fait un moment qu’on ne s’est pas parlée au téléphone. Je sais que tu es occupée chez tes grands parents mais appelle moi quand tu peux.

Ce n’est pas du tout le moment de lui parler, sinon elle va sentir qu’il y a un truc qui ne va pas. Je lui donne une excuse pour aujourd’hui mais je me promets de l’appeler plus tard. Je remarque cependant que plusieurs messages ont été échangé en juillet et août. C’est dingue, celui qui a répondu a utilisé les mêmes expressions que moi. Impossible qu’Estella devine que ce n’est pas moi derrière l’écran.

Le message de ma grand-mère est plus rassurant. Elle pense que je suis au Mexique avec mes parents. Les informaticiens de Lejos utilisent un logiciel dernière génération qui reproduit ma voix au téléphone alors que c’est une autre personne qui parle. De ce fait, ni mes parents ni mes grands-parents ne se doutent de rien concernant mon enlèvement.

Je remarque que j’ai peu échangé avec mon père mais beaucoup avec ma sœur. Dans l’annuaire il y a beaucoup d’appels qui ont été passé. J’ai encore du mal à me rendre compte que tous cela ait fonctionné. Je me rappelle encore du désespoir que j’ai ressenti lorsque Vicente m’a expliqué que personne ne viendrait me sauver. Cela me parait si loin à présent.

Je n’ai pas envie d’appeler mes parents mais ma mère tient à avoir de mes nouvelles. Je respire un grand coup puis je fais le vide dans ma tête. Il ne faut pas que j’ai l’air d’être au bord de la dépression. J’appuie sur le bouton d’appel puis les sonneries résonnent dans mon oreille.

- Bonsoir ma chérie, répond ma mère avec enthousiasme. Comment se passe les vacances chez tes grands-parents ?

Sa voix m’avait manqué et je reste quelques secondes silencieuses pour la savourer.

- Ça se va très bien, j’ai appris à faire du surf récemment, je mens en essayant de garder le sourire. J’aime beaucoup ce sport et j’ai rencontré des personnes sympas.

- Je suis contente que tu passes un bon été même si je regrette que tu ne sois pas là avec nous. Mais je déplore que tu rentres au Mexique pour partir ensuite aux Etats-Unis.

- Je pourrais revenir pour les vacances, je la rassure. En avion se sera rapide.

- Oui tu as raison, je m’inquiète pour rien, avoue-t-elle.

Moi ce qui m’inquiète c’est de ne pas savoir où je vais aller. Il est trop tard, aucune université de voudra de moi. Il va falloir que je dise la vérité à ma mère qui va péter un câble.

Merde, Vicente me doit au moins ça après tout ce qu’il m’a déjà pris. Il pourra user de son influence pour me trouver une place quelque part. Mais même s’il fait ça, cela ne réparera jamais entièrement mon cœur brisé. Le criminel ne veut pas de moi et je sais que c’est pour me protéger. N’empêche, ça fait mal de se faire rejeter comme une ordure.

- Ma chérie ? appelle ma mère en interrompant mes pensées.

- Je suis fatiguée après toutes ces journées de surf, je me reprends. Ça ne te dérange pas que je te rappelle plus tard ?

- Bien sûr que non, nous venons de rentrer de notre road trip, explique ma mère. Je suis là toute la journée, alors repose-toi et appelle-moi quand tu veux.

- Merci maman, je réponds avant de raccroche.

Je laisse tomber mon téléphone à côté de moi. Vicente est doué pour enlever les espoirs aux gens. Je commence à être énervée par son attitude. Même si son but n’est pas de me faire souffrir, j’ai quand même mal au cœur. J’étais prête à tout pour lui, à mourir s’il le faut.

D’un autre côté, je m’en veux de lui avoir avoué mes sentiments. Si je ne l’avais pas fait, on serait en train de diner sur l’herbe avant que le parc ferme. Je frappe ma main contre mon front en lâchant des jurons.

Maintenant que j’ai merdé, je ne peux plus retourner en arrière alors autant continuer à vivre. De plus, Vicente voulait me libérer demain mais je m’y suis opposée. Le mieux que je puisse faire, c’est vivre ces derniers jours avec lui, même si je ne le verrais probablement par trop. Je ne connais pas bien les hommes mais je suis assez intelligente pour penser qu’il va s’éloigner de moi.

J’entends une porte claquer à l’étage puis des pas dans le couloir. Mon cœur ne peut s’empêcher de faire un bond dans ma poitrine. Je retiens ma respiration jusqu’à que les pas se soient éloignés.

Je me redresse doucement sur mon lit en me disant que ça ne sert à rien de faire l’idiote. Je vais me comporter normalement et affronter mon amant. Je passe la porte de ma chambre puis je descends les escaliers.

Le criminel est en train de sortir de la nourriture et de l’étaler sur le plan de travail. Il n’a pas perdu de temps pour reprendre ses vielles habitudes alors que je suis encore là pour faire à manger.

Il m’observe un bref instant puis prend deux boites avant de remonter tranquillement à l’étage. Ok, il compte vraiment m’ignorer jusqu’à que je retourne chez moi ?

- C’est vraiment la merde, je chuchote pour moi-même. Mais je ne dois pas me laisser abattre, il faut que je montre à Vicente ce qu’il perd en m’ignorant.

Tout d’abord, je m’installe sur l’îlot puis je prends une boite de pâtes à la sauce thaï. Je n’ai pas très faim mais je dois reprendre des forces après les fortes émotions que j’ai ressenti. Les idées me viennent plus facilement en mangeant.

Mon téléphone m’indique que j’ai un nouveau message. Je fronce les sourcils en voyant que le numéro n’est pas enregistré.

Demain, tu travailleras avec Sam si tu ne veux pas rester à la maison. 7h en bas. V

Sans le savoir ma chère pantera, tu viens de me donner une idée. Je termine de manger puis je range le plan de travail. Ensuite, je monte dans ma chambre pour commander des vêtements dans une boutique mexicaine où ma mère achète trois tonnes de fringues. Je laisse un message à Marta, la patronne qui est en capacité de livrer rapidement sa meilleure cliente. Ensuite, je préviens l’un des gardes pour qu’il ramène ma commande avant sept heures.

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