Sa réplique était séduisante et je manquerais de tomber si je n’avais pas le canapé derrière moi. Je n’ai pas le temps de répliquer que Vicente ouvre la porte. Noyée dans un brouillard, je n’entends pas ce qu’il dit avec son interlocuteur.

- Marina tu m’entends ? demande-t-il.

- Oui je suis là, je réponds en me levant brutalement.

Je remarque un homme d’une trentaine d’années vêtu comme mon amant. Je m’approche d’eux car il me fait signe.

- Sam travaille au service juridique, tu peux rester avec lui jusqu’à la pause déjeuner, m’indique le financier. Je viendrais te chercher ensuite.

- Bonjour, je suis Marina, je me présente.

Sam me fait signe de le suivre puis la porte du bureau se referme. L’employé a des mimiques efféminées et à sa manière de regarder Vicente je suppose qu’il aime les hommes.

Je le suis dans le couloir mais je manque de le percuter lorsqu’il s’arrête brusquement. Il se tourne vers moi et me détaille d’un air hautain des pieds à la tête. Je commence à paniquer en me disant que cet homme me déteste mais il finit par avoir un sourire franc et malicieux.

- Je suis heureux que le patron ait trouvé une femme, se réjouit-il en me prenant dans subitement dans ses bras. Tu sembles un peu jeune mais il a des goûts si compliqués !

Sam lève les yeux au ciel puis pénètre dans la grande salle des traders. Il s’installe dans une petite pièce fermée qui est son bureau. L’employé ferme immédiatement les stores puis vient déplacer une chaise pour la mettre à côté de son bureau.

Il tapote l’endroit pour me signifier que je peux venir près de lui. Sam vérifie que personne n’est dans les parages et que les rideaux sont bien fermés puis il se tourne vers moi avec un air de conspirateur.

- Alors, raconte-moi, il est doué en la matière ? demande-t-il avec un accent américain.

- Quoi ?

- Vu vos têtes à tous les deux ça se voit que vous vous êtes envoyés en l’air, explique-t-il en souriant. De plus, Lisa et Javier ont entendu des bruits suggestifs.

Je suis complètement tétanisée, je ne sais pas quoi répondre face à ça. Sam remarque ma gêne et rit doucement.

- Pardonne-moi mon indiscrétion, mais il faut dire que le patron est un spécimen particulier, se reprend-t-il.

Je pense que Sam va lâcher l’affaire mais il se retourne une nouvelle fois vers moi en chuchotant :

- N’ai pas peur de te confier à moi, je suis muet comme une carpe. J’aime beaucoup le patron mais comme tout le monde, je le crains un peu.

Je n’y crois pas, j’ai l’impression d’avoir un gamin en face de moi. Cependant, je peux peut-être apprendre des choses sur mon amant grâce à Sam, alors je décide de jouer le jeu.

- Vicente est plutôt doué avec sa langue, j’avoue en me penchant vers mon interlocuteur.

- J’en étais sûr ! s’exclame-t-il en frappant dans ses mains. Monsieur Alcarón est toujours sérieux et repousse les avances des femmes qui travaillent pour lui, mais je me doutais bien qu’avec un physique pareil c’était un dieu du sexe.

J’observe Sam en écarquillant les yeux. J’imagine Vicente en train de coucher avec moi dans des positions suggestives. Je secoue la tête en rougissant violement pour chasser ses pensées peu chrétiennes.

- Ne me dis pas que tu n’as pas encore sauté le pas avec lui ?

- Je suis encore vierge, je lui explique en levant les mains en l’air.

- Plus pour longtemps à mon avis, jubile-t-il.

Je sais que Sam a raison, je coucherais avec Vicente avant que je ne parte. Je ne devrais pas faire ça, mais je sais que je ne pourrais pas le quitter sans lui avoir donné cette partie là de ma personne.

Sam passe en revue une pile de dossier après avoir repris son sérieux. Il me montre différentes choses concernant le pôle juridique dont il est le chef.

- Les deux autres employés qui travaillent pour moi sont là-bas, m’indique-t-il en tendant la main vers deux bureaux séparés. A présent, je te montre comment fonctionne mon service.

Sam est une personne compétente et sérieuse dans son travail. Même si c’est quelqu’un de très bavard, je l’apprécie. Je n’apprends pas grands choses de plus sur mon amant. Le juriste le décrit comme un patron juste, attentif et imposant.

- Je viens chercher Marina, me fait sursauter la voix du criminel.

Je me lève puis je le rejoins. Avant de fermer la porte, Sam me fait un signe de la main et un clin d’œil. Je pique un fard puis je suis Vicente vers les ascenseurs.

Nous arrivons dans un grand lieu de restauration pour les employés de l’immeuble au rez-de-chaussée. Je suis impressionnée par le standing de haut niveau. Il y a toutes sortes de choses à manger et je ne sais pas quoi prendre. Vicente salut quelques personnes au passage puis nous allons nous asseoir.

Je suis un peu mal à l’aise lorsque je remarque que mon amant a pris moins de choses que moi à manger. Je me suis peut-être emportée un peu sur ce coup-là.

- Qu’est-ce qu’il y a ? je demande en le voyant manger avec un sourire malicieux sur le visage.

- Alors comme ça, je suis douée avec ma langue ?

Je rougis violement en baissant les yeux vers mon assiette bien garnie. Vicente s’esclaffe avant de reprendre son air malicieux.

- Sam a un gros défaut, il parle beaucoup trop mais c’est un très bon juriste d’entreprise, explique-t-il. Il s’est absenté pour aller aux toilettes dans la matinée et n’a pas pu s’empêcher de cancaner avec la secrétaire et les gens qu’il croisait. Je sais tous ce qui se passe dans mon entreprise.

- Je suis désolée, je soupire.

- Tu n’as rien à te reprocher, me rassure mon amant. Ce genre de comportement m’amuse plus qu’il ne me contrarie. De plus, je sais des choses que tu n’oseras jamais m’avouer.

Le regard du criminel est pénétrant mais il continue de manger tranquillement. Je n’ai plus faim tout à coup. J’ai mangé la moitié de mon assiette mais je ne peux pas finir le reste à mon grand désespoir. Vicente interpelle un employé avec des carafes d’eau.

- Pouvez-vous emballer les restes ? demande-t-il.

Je remonte avec une poche de nourriture. Les bureau open space sont presque tous déserts car les employés sont partis déjeuner. Je fais une petite sieste sur le sofa tandis que mon amant continue de travailler.

- Il est temps de partir, déclare-t-il en se levant.

Je me redresse vivement en observant l’horloge. Il est presque seize heures, c’est un peu tôt pour quitter le travail. Le criminel me lance un regard appuyé et ça fait tilt dans ma tête. Je comprends que c’est le moment de vaquer à d’autres activités.

Le chauffeur de Vicente nous dépose devant une petite boutique de vêtements pour hommes plutôt luxueuse. Nous passons par derrière pour arriver dans une arrière-cour plutôt propre. Mon amant pénètre dans une pièce avec une salle de bain.

- C’est la sœur de l’Italien qui tient la boutique, elle permet de me couvrir, explique-t-il.

Il commence à retirer ses vêtements et je me détourne. Vicente ne retient pas un éclat de rire. Lorsqu’il me fait signe de me retourner, il ébouriffe ses cheveux, met des lunettes de soleil puis retire le fond de teint afin de découvrir ses tatouages dans le cou. Maintenant il ressemble à un criminel avec son bandeau rouge qui recouvre son visage.

- En tant que général de La pantera, personne ne posera de questions sur ta présence à mes côtés. Mais, je ne veux pas que tu parles aux personnes que tu ne connais pas, me prévient-t-il.

Nous sortons par une autre porte puis nous longeons un petit couloir étroit. Ensuite, nous arrivons dans une impasse où un 4X4 nous attend. Je grimpe à la suite du criminel puis le véhicule s’élance.

Le conducteur s’éloigne de la ville pour nous amener dans une grande zone industrielle. La voiture se dirige vers un grand entrepôt repeint à neuf avec un logo de fruits et de légumes. Nous pénétrons dans un garage sombre mais je peux distinguer plusieurs voitures de différents modèles.

- J’espère que tu es prête pour l’aventure, courage princesa, s’exclame-t-il en retirant ses lunettes de soleil.