Chapitre 25 - Menteur

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Je reprends mon assiette puis je commence à manger les petits fours. Vicente observe les convives comme un prédateur prêt à bondir sur sa proie. Dès que nous somme à l'extérieur de la villa, ses instincts prennent le dessus et il reste toujours aux aguets.

- Felipe Salazar est là avec sa femme, chuchote-t-il à mon oreille. Dès que tu es prête fais-moi signe.

Je bois d'une traite mon verre de champagne puis je pose mon assiette vide sur le buffet. Je renie la pression qui s'empare de moi. Je dois le faire pour pouvoir retrouver ma liberté. Je révise le speech que j'ai préparé dans ma tête puis je prends le bras du criminel.

- Au fait, il y a un micro caché dans la boucle de ta ceinture, ajoute-t-il. Lejos écoutera en direct la conversation.

Cela ne m'étonne pas de sa part d'enregistrer des preuves. Nous traversons la salle pour rejoindre notre cible alors que sa femme s'est éclipsée.

- Bonjour monsieur Salazar, commence amicalement Vicente.

- Nous nous connaissons monsieur ? questionne l'intéressé avec surprise.

- Je ne crois pas que nous ayons été présentés. En revanche vous devez peut-être connaitre mon amie Emma David, une collaboratrice d'Antoine Portier.

- Si je connaissais une femme aussi jolie que vous je m'en souviendrais, s'amuse l'homme en me tendant la main.

Malgré mon dégout pour ce personnage au crâne dégarni et aux rides pendantes, je lui offre mon plus sourire ainsi que ma main.

- Antoine m'a beaucoup parlé de vous, je commente.

- Je vais vous laisser discuter, je viens de repérer un ami, m'interromps Vicente avant de s'éloigner.

Je remarque le criminel est à quelques mètres de moi pour discuter avec un homme tout en gardant un œil sur moi. Un quadragénaire s'approche alors de nous et salut Salazar.

- Mademoiselle David, voici León Nuñez un ami d'Antoine.

- D'où connaissez-vous Portier ? demande Nuñez sceptique.

Tout sourire, je serre la main au nouveau venu. Vicente m'a recommandé de tenir la conversation et d'être le centre d'attention.

- J'ai travaillé plusieurs années en Espagne avec Antoine et son équipe diplomatique, j'explique en souriant. Je me suis occupée de ses filles Marina et Lina quand il avait besoin de moi. Il est devenu comme un second père pour moi et m'a très bien formé. Même s'il est parti vivre au Mexique, nous sommes toujours en contact. Vicente Alcarón m'a invité à le rejoindre alors je me demandais si j'allais croiser des amis.

- Vous avez la chance de connaitre un homme tel qu'Antoine, approuve Felipe. Il s'investit beaucoup dans la collaboration entre notre pays et la France.

- Il a beaucoup aidé ma mère dont la santé était fragile, je confirme. Grâce à lui, elle a pu avoir des rendez-vous rapidement avec les meilleurs médecins.

Un serveur apporte un plateau de coupes de champagne et je m'en sers une. Nuñez ne semble pas me faire confiance, mais je n'ai pas le temps de l'amadouer.

- D'ailleurs, Antoine a reçu un message de Percy Anderson qui voulait le mettre sur un projet, je lâche en serrant mon verre.

Mes deux interlocuteurs me regardant avec étonnement.

- Vous êtes au courant de nos... arrangements avec Anderson ? questionne Felipe Salazar.

- C'est étrange qu'il vous en ait parlé, ajoute Nuñez en fronçant les sourcils.

- Antoine a beaucoup de travail alors je continue de l'assister à distance, j'explique. Il me confie beaucoup de choses afin de ne pas encombrer sa femme. En tant qu'amie, je l'aide à gérer la pression.

- De quoi parle ce nouveau projet exactement ? demande Salazar.

- Antoine m'a dit qu'il vous en parlerait bientôt. Pour le moment, il faut le laisser profiter de son road trip avec sa famille.

En me déplaçant sur le côté, je fais exprès de laisser tomber quelques gouttes de champagne sur ma robe.

- Veuillez m'excusez messieurs, je suis maladroite ! je m'exclame.

- Je vous en prie mademoiselle David, me sourit Salazar.

Je quitte la salle de bal avec une serviette à la main pour rejoindre les toilettes. La porte s'est à peine refermée que Vicente me rejoint près des lavabos. Je passe l'objet en tissue sous l'eau puis je frotte la tache jaune sur ma poitrine.

- Alors ?

- Ils magouillent quelques choses avec Anderson, j'avoue avec inquiétude après une légère hésitation.

Impossible de lui mentir alors que Lejos a enregistré la conversation. Cela ne va pas arranger mes affaires en ce qui concerne ma libération. Si mon père a fait une bêtise, je ne veux pas que La pantera m'utilise contre lui.

- Tu as fait du bon travail et tu mérites de recevoir un Oscar car je ne pensais pas que tu serais capable de jouer aussi bien la comédie, s'exclame-t-il heureux de tenir Anderson.

- Quand est-ce que je serais libérée ? je demande en soupirant.

- Pas avant deux semaines, réponds-t-il en allumant une cigarette.

Je me précipite vers lui puis je lui arrache l'objet des mains. Je le jette au sol puis je l'écrase sous mon talon.

- Tu avais dit que je serais libre ! je crie.

- J'ai besoin de deux semaines pour rassembler des preuves sur Anderson, se justifie Vicente pas du tout impressionné. Si ton père est blanchi dans cette affaire, tu seras libre.

Malgré mes talons de dix centimètres, je suis toujours aussi petite face à lui. Pour me provoquer, il sort une nouvelle cigarette de sa poche. Je le vois souvent fumer dans le jardin par la fenêtre de ma chambre.

- Cabrón* ! je hurle en le fusillant du regard.

Une vielle dame entre dans les toilettes et nous regarde d'un air surpris. Elle jette un regard mauvais à Vicente mais ne dit rien.

- Tu n'es qu'un putain de connard qui ne tient pas ses engagements ! je rajoute en posant un doigt sur son torse.

- Je ne t'ai rien promis princesa, ricane-t-il en rallumant la seconde cigarette.

Furieuse, je quitte la pièce en marchant le plus rapidement possible. La porte de service ne se trouve pas loin et je la pousse pour me retrouver sous le soleil de Mexico. Vicente me rattrape sans difficulté et me barre le chemin.

- Tu veux te casser Marina ? demande-t-il en colère. Alors on se barre de cet endroit de merde. Tu peux m'insulter autant que tu veux, je ne te laisserais pas t'enfuir.

- Je n'essayais pas de m'enfuir, je réplique. Je ne veux plus regarder ta salle tronche.

Vicente ricane en saisissant son portable pour appeler le chauffeur. Ce dernier ne tarde pas à arriver derrière la petite rue du palais présidentiel. Je reste sur le trottoir en croisant les bras, défiant le criminel.

- Amène-moi où tu veux mais pas à la villa, je grogne. Il est hors de question que je reste dans un endroit clos avec toi.

Le criminel me lance un regard assassin avant de parler à son chauffeur.

- Tu n'es vraiment qu'une salle petite princesse de merde, me dit-il en me pointant du doigt. Grimpe dans la bagnole, on va dans un endroit que toutes les princesses dans ton genre adorent l'été.

Je n'ai pas confiance en lui mais le regard qu'il me lance me pousse à obéir. Je monte dans la voiture tandis que Vicente pianote rapidement sur son smartphone. Ça fait tellement de temps que je n'en ai pas tenue un en main.

Je suis étonnée lorsque nous arrivons à l'aéroport de Mexico, l'endroit où je me suis fait enlever.

- Il est hors de question que je quitte le pays !

- Du calme, on reste au Mexique mais l'avion c'est beaucoup plus rapide que la voiture.

Le criminel m'invite à descendre et je n'ai pas d'autre solution que de le suivre. Nous traversons le hall sous le regard étonné des passagers. Il faut dire que nos tenues élégantes et l'absence de bagages détonne avec le lieu. Plusieurs gardes de Vicente nous attendent de l'autre côté du pôle de sécurité.

En quelques minutes, nous sommes dans la zone d'embarquement. Au lieu d'attendre avec les autres personnes, deux hôtesses nous invitent à les suivre, non sans détailler le bel homme. Nous sommes conduits sur la piste vers un avion couleur crème.

- Je n'arrive pas à croire que tu te payes un jet privé, je grommelle en montant dans le luxueux appareil.

- C'est ça d'avoir des privilèges princesa, dit-il en me faisant un clin d'œil.

Les gardes du corps s'installent loin de leur patron. Vicente me fait signe de m'asseoir en face de lui. Moi qui ne veux pas voir sa figure, je suis mal servi. Immédiatement après, une hôtesse vient nous offrir des rafraichissements.

L'avion décolle et je prends un magazine posé sur la table basse en face de moi. Le criminel ne fait plus attention à ma personne et se préoccupe de son téléphone. Je grimace en remarquant que la tâche de champagne n'est pas partie.

Je me lève pour aller aux toilettes, plutôt grandes pour un avion. Je prends une serviette puis je continue à frotter avec du savon. Quelle idée de mettre un vêtement blanc ! Après avoir arrêté le massacre de la robe, je reprends ma place en face du criminel.

Cette fois-ci, je le vois m'observer avec attention. Ses yeux verts s'implantent dans les miens et il passe une main sur son menton. Gênée, je me concentre sur mon magazine totalement inintéressant.

Salop*

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