Chapitre 20 - Dette envers moi

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Tout le monde se regarde en chien de faillance. Seul El Huerfano semble tranquille aux côtés de ses deux femmes crispées à l’idée de se prendre une balle qui visait le chef.

Je remarque deux hommes de El Huerfano tomber à terre tandis que le bruit des tirs accompagne la musique. Le DJ arrête la musique et lorsque les danseurs nous remarquent, ils s’enfuient en courant et en hurlant vers la sortie. Je vois des bandanas rouges armés sortir de tous les coins et nous encercler.

De nouveaux tirs se répercutent et une fusillade s’engage entre les deux camps. Je suis projetée en arrière et Vicente manque de m’écraser. El Huerfano est en train de s’enfuir mais une balle le touche dans le dos et il s’écroule.

Mon instinct de survie prend le dessus et je commence à ramper au sol pour quitter le carré VIP. La porte de secours me tend les bras et mon espoir de liberté grandit. J’entends les cris des combattants dans mon dos.

Lorsque j’arrive près de la porte, je me relève prête à partir. Un bruit strident m’oblige à me retourner. Je remarque du sang qui s’écoule autour de Vicente. Ce dernier se tient le bras en grimaçant.

Il est au centre de la fusillade et risque de se prendre une balle mortelle même si les hommes de El Huerfano se retrouvent en minorité. Sans réfléchir, je quitte mes talons puis je m’élance vers le blessé à quatre pattes.

Arrivée près de Vicente, je le tire vers moi mais sa carcasse est vraiment lourde. Il m’aide à pousser avec ses jambes et au bout de ce qui me semble être une éternité nous arrivons à couvert près de la porte de sortie.

Cette dernière me tend à nouveau les bras mais Vicente perd beaucoup de sang de son bras et je remarque également une blessure à la jambe.

- Je ne suis qu’une putain d’idiote, je grommelle pour moi-même.

Je me penche vers le criminel puis je lui arrache une grande partie de la chemise. Ensuite, je fais un garrot autour de son bras pour éviter le sang de sortir de son corps. La blessure à la jambe saigne beaucoup mais la balle l’a juste éraflée. Vicente me lance un regard étrange tout au long de mon intervention.

Lorsque les coups cesses, des gémissements se fond entendre et les hommes debout aident les quelques blessés. Lejos et l’Italien viennent vers nous et aident Vicente à se lever. Je récupère mes chaussures pour les mettre aux pieds.

- On décampe ! s’écrit Lejos en poussant la porte de secours.

Deux hommes que je ne reconnais pas viennent près de moi et m’invitent à suivre la troupe. Je monte dans la voiture aux côtés de Vicente et Lejos. Le véhicule s’élance à toute allure sans attendre les autres voitures.

Le quadragénaire sort une boite de premier secours dessous le siège passager. Il pose une préparation alcoolique sur le bras de La pantera. Je remarque sa crispation et je sais qu’il ne veut pas que je le voie comme un faible.

Trop concentré sur leurs affaires, personne ne remarque que je tremble comme une feuille. L’adrénaline est retombée mais je suis encore terrifiée par ce qui vient de m’arriver.

- Quelle merde ! grogne Vicente.

- Tu as pris la bonne décision en ramenant les troupes, approuve Lejos. Nous n’avons aucuns morts et quelques blessés de notre côté. C’est réellement un exploit !

- Une fusillade n’était absolument pas dans nos plans, se plaint-il. El Huerfano est mort et La pantera va passer pour un conquistador qui emporte tout sur son passage.

- Cette organisation est faible et même s’ils n’adhèrent pas à nos idéaux, nous devons recruter ses membres avant qu’ils partent ailleurs. Le marché de la drogue est maintenant à nous, et je vais mettre en place la fusion entre nos deux groupes.

Lejos tapote rapidement sur son téléphone tandis que je me tiens contre la vitre en prenant soin de ne pas me coller contre La pantera. Ce dernier déchire une partie de son pantalon pour soigner sa blessure à la cuisse.

Lorsque nous arrivons à la maison, des gardes nous attendent déjà. Vicente refuse l’aide de son ami et marche en boitant jusqu’à la porte. Lejos et moi le suivons jusqu’à sa chambre puis il récupère une boite dans la salle de bain pour me la tendre.

- Tu ne peux plus te rendre à tes bureaux, explique le bras droit. Si quelqu’un fait le lien aves tes blessures, tu es mort. Repose-toi et laisse Marina t’aider à te soigner.

- Je n’ai pas besoin d’une infirmière à domicile, grogne le concerné en retirant son bandana. Ce n’est pas la première fois que ça m’arrive, je peux m’en sortir tout seul.

- De toute façon Marina est là, insiste-t-il. Je te rappelle qu’elle a fait plus pour toi que tu n’as fait pour elle.

Sur ses mots, Lejos quitte la pièce en colère. Vicente jette un gobelet en plastique par terre sans cacher son mécontentement. Je me tourne pour partir mais il m’interpelle :

- Pourquoi tu n’es pas partie ? C’était la chance de ta vie mais au lieu de ça tu m’as aidé à sortir de ce guêpier.

- Je ne sais pas, j’avoue sans me retourner.

- Tu ne sais pas, réplique-t-il. Ça me tue de le dire mais Lejos a raison. Ton aide mérite bien une petite récompense princesa.

Je me retourne vers lui d’un air surpris. Son regard vert intense croise mes yeux apeurés avant de se poser sur mes mains. Il fronce les sourcils puis redevient sérieux.

- Je suis désolé que tu ais du vivre ça ce soir, s’excuse-t-il dans un grognement. Les chances étaient minces pour que cette soirée termine en bouse.

Ne parvenant plus à contrôler mes nerfs, je commence à sangloter en me laissant tomber au sol.

- Je ne comprends pas ce que tu attends de moi, alors laisse-moi partir, je m’écris en pleurant. Je ne veux plus rien à voir à faire avec toi, tu amènes la mort et la destruction avec toi.

La pantera me regarde avec surprise avant de s’approcher de moi. Instinctivement je me relève pour reculer dans le couloir jusqu’à ma porte. Il tend la main vers mon épaule mais la baisse en soupirant. Je rentre dans ma chambre puis j’entends la porte de la sienne se fermer.

Je vais dans la salle de bain pour retirer ma robe et mes talons qui révèlent mes pieds meurtris. Cet évènement était la goutte de trop. Comme si le kidnapping n’était pas une expérience traumatisante. A ce moment-là, je remarque à quel point ce criminel me pompe de l’énergie.

J’enfile mon pyjama et sans me démaquiller je me réfugie dans mon lit. Même si ce n’est pas le mien, c’est le seul endroit où je me sens un peu en sécurité. Je n’aurais pas dû le sauver et sacrifier ma seule chance de m’enfuir.

- Bordel mais pourquoi j’ai fait ça ? je m’écris dans le noir.

J’ai fait preuve d’humanité envers lui alors qu’il m’a toujours traité comme un jouet, même pas un être humain. Le visage de ma sœur, de mes parents, d’Estella et de Palma s’invitent dans mon esprit. A l’heure qu’il est, je serais peut-être à leurs côtés. Ou peut-être pas. Eventuellement kidnappée par un autre groupe de criminel qui m’aurait envoyé me prostituer à la chaine.

Je dois me dire que c’est le cas pour ne pas me maudire le restant de mes jours d’avoir sauvée ce salaud de criminel. Ça fait presque un mois que je suis dans cette merde et que je ne vois pas le bout du tunnel.

***

Dans la nuit, j’entends quelque chose se briser suivit de jurons. Je me lève pour voir de quoi il s’agit et je remarque Vicente en train de préparer une seringue avec la moitié des éléments par terre. Avant qu’il me dise de partir, je pénètre dans la chambre pour lui prendre l’aiguille des mains. Avec précision, je récupère la morphine dans un flacon minuscule.

Et voilà que je suis encore en train d’aider ce fils de chien. Ce dernier ne m’arrête même pas et me dévisage avec intérêt. Je passe un coton alcoolisé sur son bras étonnamment musclé. Sans lui prêter attention je le pique avec l’aiguille puis j’enfonce lentement la morphine dans son bras.

- Où as-tu appris à faire ça ? demande-t-il d’une voix rauque.

- J’ai suivi beaucoup de stages de premier secours, dis-je simplement.

Une fois que j’ai terminé, je jette le tout dans une poubelle puis je le laisse seul se démerder avec la trousse de secours. J’ai à peine franchi le pas de la porte qu’il m’interpelle une dernière fois :

- Met une robe légère demain.

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