Chapitre 6 - Un éhcappatoire

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Le réveil d’Estella sonne toujours à dix heures quand elle n’a pas cours. Je me retourne dans le lit en grognant. J’ai dû m’endormir vers quatre heures du matin. Je n’arrêtais pas de penser à La pantera. Je me suis remémorée l’attaque et mon sauvetage en somnolant une partie de la nuit.

Estella se redresse puis quitte le lit. J’aimerais dormir encore un peu mais il faut absolument que je me lève. Ma mère est capable de venir jusqu’ici si je ne pointe pas pour midi. D’ici là, je dois encore discuter avec mon amie.

Je prends mes affaires de la veille puis je vais dans la salle de bain du couloir tandis que mon amie se douche dans la pièce attenante à sa chambre. Le miroir me renvoie une mine affreuse. Ma peau est plus claire que d’habitude et j’ai des valises sous yeux. J’emprunterais du maquillage à Estella pour ne pas que ma mère me voit dans cet état.

Une fois ma douche prise, je reviens dans la chambre. Mon amie me regarde avec inquiétude et me propose immédiatement sa trousse de beauté. Pendant plusieurs minutes nous restons silencieuses par peur d’engager le sujet fatidique. Pourtant, il faut bien que quelqu’un commence :

- Qu’est ce que je dois faire à ton avis ?

- Honnêtement, je ne sais plus, souffle Estella. La pantera et ses membres sont vraiment des hommes dangereux mais va-t-il réellement s’en prendre à toi sachant qu’il sait d’après ce que tu m’as dit que tu es une étrangère ?

Ses parents travaillent et nous sommes seules à la maison. Nous descendons pour prendre notre petit-déjeuner dans la cuisine.

- J’espère que non, je réponds en me servant un verre de lait.

- On ne peut pas espérer, s’emporte Estella. Il s’agit de ta vie !

- Alors je peux partir un moment le temps que cette histoire se tasse, je propose. Je prends un billet pour aller voir mes grands-parents paternels en France.

- Je ne pense pas que La pantera te retrouve mais il vaut mieux que tu quittes le pays le plus vite possible. C’est la meilleure chose à faire pour l’instant, approuve mon amie.

- Je ne dois pas partir trop vite sinon ma mère va avoir des soupçons, dis-je. Elle m’a à l’œil depuis la soirée chez Harry.

Je prends mon téléphone pour regarder les billets d’avion afin de convenir d’un créneau.

- Je pars dans quatre jours et d’ici là, je ne bouge pas de la maison.

- Cela me semble bien, approuve Estella. Même s’il essaye de te retrouver cela va lui prendre un temps fou.

- Mais il ne faut pas que je revienne au Mexique dans ce cas, je soupire.

- Tu seras plus en sécurité ailleurs, acquiesce mon amie.

Nous discutons pendant un moment des détails de ma fuite. Je regrette d’avoir mis ma vie en danger. Je n’aurais jamais dû aller seule dans des quartiers que je ne connaissais pas. J’aimerais revenir en arrière mais c’est impossible. De toute façon, je ne vais pas vivre en me disant qu’un criminel est peut-être à ma recherche. Je ne suis pas de nature psychotique et je pense qu’il a d’autres chat à fouetter.

Je reviens à la maison en serrant les lanières de mon sac à dos. Ma mère est assise sous la clim et lit un livre. Je la salut avant de prendre les escaliers.

- Pourquoi as-tu les mêmes vêtements qu’hier ? demande-t-elle sans bouger de son emplacement.

Je cherche une réponse valable à la vitesse de l’éclair.

- J’ai oublié de prendre un nouveau t-shirt. J’avais tellement de choses à faire que ça m’est sorti de la tête.

Avant que ma mère ajoute quelque chose, je monte les marches puis je ferme la porte de ma chambre. Mes vêtements sentent la transpiration et sont imbibés de poussière grise. Je les jette dans le panier à linge sale puis je me change.

Je redescends ensuite pour manger avec ma génitrice. Nous avons vécu dans des pays hispanophones mais mon père a insisté pour garder notre horloge interne française. Ma mère a donc été obligé de s’habituer à ce mode de vie. Par amour on peut tout faire à ce qu’il parait.

Heureusement pour moi, elle ne pose pas de questions précises sur ma journée d’hier. Je lui décrits ce que j’ai acheté car je sais qu’elle adore la mode. C’est une passion commune que nous avons longtemps partagée avant que je ne commence à faire du shopping avec mes amies. Je n’ai d’ailleurs plus de contacts avec celles que je m’étais faites en Espagne. Je ne les reverrais jamais de toute façon.

- Ta sœur est au club de danse après les cours, j’irais la chercher vers dix-sept heures.

- Nous ferons notre leçon de pâtisserie une prochaine fois, dis-je.

Nous aimons partager les cours du soir d’un pâtissier mexicain renommé à la télé. La représentation de danse approche et Lina est de plus en plus retenue dans le professeur.

Luisa vient débarrasser la table alors que je monte dans ma chambre. Cela me fait bizarre d’avoir une domestique qui fait à manger. Dans les autres pays, nous avions une femme de ménage mais jamais d’employés journaliers. Ma mère a insisté pour engager du personnel car le taux de chômage est élevé au Mexique.

Je réponds à quelques messages reçus sur mon téléphone avant de le ranger dans la poche de mon short. Je commence d’ores et déjà à sortir ma valise du placard pour éviter de penser à La pantera. Je fais une liste de tous ce que j’ai besoin avant de me lancer dans les préparatifs.

Je finis par refermer mon énorme valise puis je m’assois sur mon lit quelques instant. Je parlerais à mes parents de mon retour en France ce soir. En attendant, je vais à la piscine pour faire le vide dans mon esprit.

Je croise Luisa qui fait le ménage dans la cuisine. Elle a un contrat de neuf heures par jours et dispose du week-end. Mon père ne veut pas exploiter les gens et a fait écrire un contrat clair avec un salaire plus que correct pour Luisa.

A la fin de la journée, ma sœur rentre avec ma mère. Elle me raconte avec entrain comment s’est passé son cours de danse. Mon cœur se serre à l’idée de ne pas la voir pendant plusieurs mois. Mais sur ce coup-là, je ne peux m’en prendre qu’à moi-même.

En attendant le retour de mon père, nous jouons à des jeux de société. Les effluves du repas du soir nous titillent les narines. Nous rangeons nos jeux pour mettre la table. Nous n’allons pas laisser Luisa tout faire et devenir des faignants de première.

Lorsque mon géniteur rentre, nous nous installons en face de nos assiettes. Le moment que j’attendais est enfin arrivé. J’ai presque préparé mots pour mots ce que j’allais dire.

- J’ai beaucoup réfléchi depuis la soirée et je pense que la meilleure solution serait de passer l’été en Europe chez papi et mamie, je commence. Je pourrais aussi en profiter pour aller en Espagne et faire un tour chez mes cousins.

Mes parents me regardent avec surprise et ma sœur semble déçue. En effet, nous avions prévu un road trip à travers le Mexique. Et je sais que mon père a très peu de vacances. Il vit presque uniquement pour son travail.

- Ce qu’il s’est passé chez Harry m’a vraiment fait très peur et j’ai envie de prendre du recul avec le Mexique, je reprends. Je suis terrifiée à l’idée qu’une telle chose se reproduise et je ne souhaite pas rester enfermée dans le quartier.

Je lance un regard d’excuse à Lina avant de me tourner vers mes parents.

- Je pense que ce n’est pas une mauvaise idée, déclare mon père. Si c’est ce que tu penses être le mieux pour toi alors tu as le droit de partir.

- De toute façon je ne peux pas te retenir, soupire ma mère.

- J’ai convenu des détails avec papi et mamie, ils sont contents que je vienne les voir, je mens. Je pars samedi à Paris.

A la fin du repas, je discute un peu avec Lina qui est un peu triste que je parte. Un message du lycée m’indique que dans quatre jours il y a les résultats du diplôme affichés. J’envoie un message à Estella et Palma sur notre groupe Messenger.

Moi : C’est étrange que les résultats arrivent si rapidement.

Palma : On est l’élite bébé, c’est normal.

Estella : On est trois fois moins nombreux que dans les lycées publics

Palma : Nous sommes les premiers à être diplômés !

Je laisse ma sœur seule dans sa chambre pour rejoindre la mienne. Je réserve un billet d’avion pour Paris et un billet de train pour Biarritz. Mes grands parents profitent de leur retraite au bord de la mer. Les résultats sont dans quatre jours et je pars en fin d’après-midi pour la France. C’est le seul moment où je vais quitter la maison.

Je suis enfin soulagée et tranquille que ce soit enfin rentré dans l’ordre. Tout est organisé et le potentiel visage de La pantera sort peu à peu de mon esprit. Je suis en sécurité dans mon quartier et il ne m’arrivera rien.

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