Chapitre 3 - La soirée d'Harry

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Quelques jours ont passé depuis la confrontation avec mes parents concernant mon avenir. Ma mère reste distante avec moi et semble très contrariée.

J’attends qu’Estella arrive pour commencer à me préparer. Le soleil est presque couché à l’horizon et j’observe mon amie trottiner vers ma maison.

Ce soir a lieu la fête chez Harry et mon amie tenait à ce qu’on se pomponne ensemble. Après tout, il s’agit de « la fête du siècle » d’après les mots d’Estella. Je n’ai pas le temps d’aller ouvrir qu’elle est déjà dans ma chambre avec une trousse de maquillage et une robe à la main.

- C’est le moment de se faire belle, s’exclame-t-elle en sortant ses palettes et ses pinceaux.

- Ne passe pas cinquante ans à te prépare, je lui indique. On doit rejoindre Palma devant chez elle avant d’aller à la soirée.

- Ne t’inquiète pas, je sais déjà comment je vais me maquiller.

Nous nous installons toutes les deux à ma coiffeuse puis nous commençons à nous maquiller en silence et concentrées. Estella m’aide à faire mon trait d’eyeliner. Je n’ai pas vraiment l’habitude de me maquiller avec autant de produit. Mais mon amie tient à ce que je sois parfaite pour cette dernière soirée en tant que lycéenne.

Une fois le maquillage terminé, Estella enfile une robe noire très courte. Cela met en valeur sont corps de mannequin. Ses cheveux noirs sont relevés en un chignon flou et ses boucles d’oreille créoles brillent. Les talons sont trop hauts pour une fille de sa taille mais je ne lui dis rien. Heureusement que Juan possède une dimension imposante sinon il aurait fui. Pour ma part, j’opte pour un short noir et un croc top blanc qui dénude mes épaules. Je laisse mes cheveux onduler dans mon dos et choisis de ne porter aucun bijou.

- Tu es sûre de vouloir mettre des sneakers ? demande-t-elle horrifiée.

- Ils sont avec des paillettes dorées, je réplique en lui montrant mes chaussures. Je les ai achetés spécialement pour les soirées. Tu sais que je n’aime pas trop les talons.

Estella lève les yeux au ciel avant de prendre ma pochette noire pour mettre nos téléphones à l’intérieur. Nous descendons les escaliers pour signifier à mon père que nous sommes prête à partir. Etant donné la situation avec ma mère, celui-ci est d’accord pour nous conduire à la soirée. D’ailleurs, cette dernière en profite pour regarder discrètement comment je suis habillée depuis le canapé. Comprenant que j’ai son approbation, je fais signe à mon père que nous pouvons partir.

Nous montons à l’arrière dans l’Alfa Roméo de location puis nous nous rendons à la porte principale. Un léger frisson me parcourt en la voyant, me rappelant dans quelle prison dorée je vis. Nous avons l’occasion d’avoir des chauffeurs privés pour nous amener où nous voulons mais mes parents préfèrent avoir un œil sur ce que je fais en me conduisant eux-mêmes.

Mon père nous dépose devant la luxueuse maison de ville de Palma. Le quartier de la Roma comporte beaucoup d’habitations historiques semblables au style haussmannien de Paris.

- Je viens vous chercher à trois heures du matin dernier délai, décrète mon géniteur. J’ai convenu cela avec ton père Estella. Si vous voulez que je vienne plus tôt, appelle moi Marina.

Sans faire plus attention à ces paroles, je me fraye un chemin pour sortir de la voiture. Toutes excitée, nous sonnons chez Palma qui se précipite pour nous ouvrir. D’habitude plus petite que moi, elle me dépasse de quelques centimètres avec ses talons. Elle porte un ensemble coloré et ses cheveux sont attachés en queue de cheval. En voyant mes amies, je me dis que j’aurais dû faire un effort.

- Suivez-moi, la maison d’Harry est pas loin de la mienne, nous indique Palma après l’avoir embrassé sur la joue.

Nous longeons les bâtiments en rencontrant d’autres jeunes qui se rendent à la soirée. La musique devient plus forte lorsque nous arrivons face à une maison semblable à celle de mon amie. Montée sur trois étages, la fête a l’air de s’être incrustée partout. Visiblement, les parents d’Harry ne doivent pas être dans le coin.

La porte est ouverte et nous nous engouffrons dans la maison. Malgré l’immensité de la pièce, il y a vraiment trop de monde. L’air est deux fois plus chaud qu’à l’extérieur. Je vois que mes amies sont à la recherche de Juan et d’autres garçons de notre lycée ou de notre quartier.

Estella nous quitte pour se faufiler près de Juan qui semble heureux de la voir. Palma et moi nous nous regardons en souriant puis nous allons nous servir un verre. Deux filles de notre classe arrivent vers nous pour discuter mais je suis rapidement ennuyée par la conversation. Elles sont entrain de critiquer Lauren, une américaine et la seule « vraie » blonde de la soirée. Cette dernière n’a pas beaucoup d’amies car énormément de garçons sont sur elle, ce qui provoque des jalousies.

- Je vais prendre l’air car je commence à étouffer, j’indique aux filles.

Je passe devant Lauren en lui lançant un sourire d’encouragement. Elle est entourée de garçons et se prend au passage les regards féroces de pas mal de filles. Je n’aime vraiment pas ce type de soirée où la musique est vraiment trop forte, où le seul but est de se bourrer la gueule et de coucher avec quelqu’un. Je n’ai pas la bonne humeur d’Estella ni la sociabilité de Palma.

Je grimpe deux étages et je vois qu’il y a moins de monde. Je repère Jake, le mec que j’aime bien. Cependant, je redescends sur terre lorsque je remarque qu’il discute avec une fille que je ne connais pas. Je sors sur le balcon avec mon verre à la main pour être plus tranquille.

Comment ai-je pu penser que Jake s’intéresserait à moi ? Il est mignon, plein de filles le kiffent. Ce n’est pas en passant un peu de temps avec lui par ci par là que j’allais arriver à quelque chose. De plus, il est gentil avec tout le monde. Même si je compte partir à la fin de l’été, j’aurais aimé savoir ce que ça fait d’être plus intime avec un garçon.

- Tu n’es pas avec tes amies ? m’interroge une voix près de mon oreille.

Je me retourne vivement pour me retrouver face à Pablo. Une partie de moi aurait aimé que ce soit Jake. Mon camarade s’installe près de mon corps, un verre d’alcool à la main. Madame et messieurs, le retour de la gêne !

Estella et Palma m’auraient conseillé de lui dire la vérité au lieu de la faire mariner de la sorte. Il faut que je sois courageuse et que je lui dise les choses en face.

- Pablo, il faut que je te parle d’un truc, je commence.

- Je sais ce que tu vas me dire, réplique-t-il un peu déçu. J’ai vu comment tu as regardé Jake tout à l’heure. J’aurais dû le comprendre plus tôt…

Je reste muette ne sachant pas quoi dire d’autre. Un camion de pompier passe à vive allure devant la maison. Les lampadaires éclairent la rue presque déserte.

- Etant donné que nous sommes amis, je vais te faire une confidence, reprend Pablo. Jake est gay.

- Quoi ? je m’écris en me tournant subitement vers lui.

- Il ne l’assume pas du tout mais je peux t’assurer qu’il l’est, pouffe-t-il. Tu n’as pas remarqué comment il mate Giovanni.

Voyant mon air scandalisé, Pablo rigole de plus belle. Il me souffle un dernier mot avant de s’éloigner vers ses amis. Mon regard accroche celui de Jake qui ne discute plus avec la fille. J’en profite pour aller le voir avant qu’il ne soit à nouveau pris d’assaut.

- Salut Marina, dit-il avec un accent américain terriblement mignon.

- Bonsoir Jake, je le salue accompagnée par un vent de courage. J’aurais une petite question à te poser.

Je n’ai pas le temps d’enchainer car j’entends des hurlements venir d’en bas puis des coups de feu. Je jette un coup d’œil par la fenêtre et je vois une bande accompagnée d’un homme qui tire dans les airs. Les gens sont en train de s’enfuir par la porte d’entrée. Bordel de merde, mais qu’est ce qui se passe ?

J’abandonne Jake pour chercher mes amis. Je tombe immédiatement sur Palma au premier étage qui tente de s’enfuir. Je lui prends la main puis nous dégringolons les marches pour sortir d’ici à la suite des autres. Nous nous rapprochons dangereusement de la bande qui ne vient pas du tout du quartier. Mon amie me guide de l’autre côté et nous tapons un sprint jusqu’à sa maison.

Avec soulagement, nous retrouvons Estella qui nous saute dans les bras. Juan et d’autres sont là aussi le regard paniqué. Des sirènes de polices se font entendre et quatre voitures fonce vers la maison d’Harry.

- Il est dans la merde, commente Palma.

Mes mains tremblent mais je parviens à appeler mon père pour lui dire d’une voix nerveuse ce qu’il s’est passé.

- J’espère que tu comprends pourquoi nous habitons à l’intérieur des murs, me dit Estella en se tournant vers moi, le visage triste.

- Nous ne sommes en sécurité nulle part, je rétorque pour avoir le dernier mot.

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