– 5 – Aventuriers et esclavagistes

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Régis se réveilla aux lueurs de l’aube, dont les rayons le frappaient continuellement, et par des secousses. Il se rendit compte alors qu’il était ligoté à l’arrière-train d’un cheval.

— Enfin sur pied, dit le goliath devant lui. J’espère que tu apprécies la balade.

Même s’il n’avait plus mal, il avait encore du sang dans la bouche et son goût prononcé lui causa des nausées. Il cracha à plusieurs reprises le liquide écarlate jusqu’à ce qu’il disparaisse complètement.

— Vous allez faire quoi de moi ? Ou du gamin ?

— Ne t’en fais pas, on veut juste pénétrer dans un endroit et tu es le meilleur moyen d’y parvenir. Quand on en aura fini, vous serez libre.

Plusieurs questions s’entremêlèrent dans sa tête, mais un fil invisible se dessina entre elles pour se relier à un seul point :

— C’est quoi un « Deuscien » ?

La monture ralentit brusquement jusqu’à l’arrêt total. L’imposant guerrier se retourna depuis sa selle et le fixa intensément.

— J’ai compris que ça n’a aucun lien avec la secte, continua-t-il. Je veux juste savoir ce que ça signifie.

— C’est ce que tu es, révéla-t-il avant de désigner sa collègue du doigt. C’est ce qu’elle est et c’est ce que je suis : nous sommes des êtres aux capacités extraordinaires. Et toi, mon ami, tu es de la première génération : un originel qui peut rapporter une fortune. C’est en utilisant ça qu’on va pouvoir ouvrir des portes et mener à bien notre mission.

— T’en dis trop, Owen ! lui reprocha-t-elle.

— Mais non, rassure-t-il d’une voix posée. C’est juste que ce serait affligeant qu’il ne sache pas dans quoi il s’embarque.

Estimant qu’ils avaient assez conversé, ils reprirent leur route, mais leur prisonnier n’en avait pas fini.

— En gros, vous êtes tous les deux des sortes de mercenaires, supposa-t-il.

— Je préfère le terme « aventurier », répondit le dénommé Owen d’un ton cassant sans le regarder. Tu ferais mieux de la boucler, on arrive à destination.

En levant suffisamment la tête, il aperçut une forteresse semblable à un pénitencier, entourée par une large muraille en pierres noircies ; et protégée par deux immenses portes, fait de bois et de métal. Plusieurs sentinelles montaient la garde à l’entrée et sur les remparts. Ils étaient tous équipés de la même façon : ils portaient un ensemble vert, des bottes hautes, une brigandine de couleur marron qui descendait jusqu’à la cuisse et d’une lance.

Après une courte vérification, sans que les gardiens repèrent quoique ce soit, le battant s’ouvrit dans un grincement sinistre. Les chevaux avancèrent dans une cour, où une centaine de personnes étaient agglutinées devant une importante estrade. Dessus, des prisonniers défilaient en haillons à la demande d’un annonceur : il s’agissait d’hommes, de femmes et d’enfants, tous reliés à une chaîne et un collier.

Un marché aux esclaves, devina Régis.

Ils furent accueillis par deux gardes qui prirent les rênes afin de permettre à leur cavalier de descendre. Un troisième s’approcha du captif, agrippant la corde qui l’enserrait, et le jeta au sol. Bien qu’il ait été blessé dans sa fierté, l’ancien étudiant ne répliqua pas oralement. Au lieu de ça, il se releva doucement et sans prévenir, il donna un violent coup de tête à l’individu, lui brisant le nez. Les membres en factions ne tardèrent pas à réagir pour le discipliner, mais ils furent aussitôt arrêtés par une femme en tenue à la fois élégante et aguicheur, sublimé par de précieux bijoux en tout genre.

Malgré ce sauvetage imminent, elle prit l’arme d’un des gardes et la lui planta dans la jambe. Le cri de douleur se perdit dans le brouhaha de la foule d’acheteurs qui scandaient des prix, le forçant à s’agenouiller.

— Ne vous inquiétez pas, rassura la maîtresse des lieux aux aventuriers. Nous avons des Stellas vertes pour ce genre de désagrément… pour ne pas baisser le coût des marchandises.

— Ça ne fait rien, répondit sadiquement la jeune femme. Il faut bien dresser les futurs jouets des autres.

— Alors, énonça-t-elle, qu’est-ce que vous me ramenez ?

— Un gosse que nous avons trouvé par hasard, dit le géant en montrant l’adolescent, qui venait de se réveiller. Il s’est sûrement échappé d’un convoi de Partisans : ils ont l’habitude d’habiller les captifs avec de vieux vêtements nobles, pour ajouter de la valeur.

— Content d’apprendre ça, car j’attendais justement son arrivée : il est une commande très spéciale ! J’aurais aimé avoir le lot avec la mère, mais elle a déjà été vendue autre part…

En entendant cela, le garçon fondit en larmes, comme si tout le désespoir du monde venait de s’abattre sur lui.

— Et l’autre ?

— C’est un Deuscien, affirma Owen. Première génération.

D’abord étonnée, elle commença à se pincer les lèvres en imaginant la somme qu’elle pouvait en tirer, mais elle se reprit et entra en négociation.

— Quelle preuve avez-vous pour garantir son authenticité ? Ce n’est pas la première fois qu’on essaye de m’escroquer et ce n’est pas avec des vêtements propres, en guise de vestiges, que vous allez me convaincre. Les derniers à l’avoir fait sont encore là pour en témoigner.

Pour attester sa menace, elle désigna les têtes décapitées, plantées sur des piques autour d’eux en tant qu’avertissement.

Doucement, le géant sortit la photo et la lui montra. La dame prit le cliché avec précaution et délicatesse, regardant ensuite le jeune homme. Elle n’arrêtait pas de murmurer « c’est impossible ».

— Je pensais… que le cycle de leur éveil était terminé il y a plus de trente ans, prononça-t-elle d’un air stupéfait.

— Il faut croire que non… Je suppose qu’avec ça, nous avons le droit d’être des hôtes de marque.

Toujours médusée par l’homme qu’ils avaient apporté, elle ne répondit pas tout de suite. Un inquiétant sourire se dessina sur la commissure de ses lèvres, puis elle éclata soudainement de rire. Elle finit par acquiescer à leur demande et agita la main pour interpeller des sentinelles, leur ordonnant qu’on emmène Régis dans les « quartiers prestigieux ».

Ce qu’elle appelait comme ça était en réalité une série de cellules aménagée, entre trois murs pierreux et de larges barreaux. Après avoir été de nouveau soigné par le mystérieux cristal et libéré de ses cordes, Régis fut jeté dans l’une d’elles, sous l’hilarité générale des gardes en factions.

— T’es sûr que c’est une bonne idée de l’enfermer sans lien ? demanda l’un des gardiens.

— T’inquiète pas, répondit son collègue. Selon les hôtes, il vient de se réveiller : il ne connait rien au Don… pas encore.

Ils partirent la minute qui suivit, laissant leur prisonnier reprendre ses esprits. Il parvint à s’approcher du lit et à s’accrocher aux barreaux avec ferveur pour se relever. Il se glissa sur le matelas, chutant de tout son poids lorsqu’il se tourna sur le dos, et fit le point sur la situation.

Bon… Résumons : je me réveille dans un temple, où une espèce d’hologramme me met en garde un peu trop tard contre un bracelet bizarre, qui fut remplacé par un tatouage ; puis je me retrouve dans les montagnes, au milieu de nulle part, et tombe sur un gosse au pouvoir étrange, des esclavagistes et un monstre qui n’a absolument rien à voir avec les diverses mythologies. Je me fais ensuite malmener par des individus, Owen et Ama, appelé aussi « Aventurier » et qui veulent m’utiliser pour un objectif inconnu, mais qui a un rapport avec cet endroit : un marché aux exclaves. C’est un bon résumé… Régis, t’es dans la merde jusqu’au cou !

Il se mit debout et observa son logement temporaire : un lit classique, avec un matelas usé et plein de moisissures, et des toilettes assises tellement sales que pour rien au monde il ne se poserait dessus.

— Putain de « Isekai » ! J’aurais pas pu me réveiller dans un monde féérique, avec des elfes, de la magie et tout le machin mythologique ?

— Eh ! s’énerva un garde. Ferme-là ou je te corrige !

Il regarda ensuite l’extérieur, constatant que d’autres personnes étaient prisonnières de ce lieu, parfois dans des conditions bien pires : de simple cage pour animaux, avec pour seule latrine un seau.

Il y avait aussi des créatures étranges : le lion à qui il avait échappé ou le chien en armure osseuse qu’il avait affronté avant sa capture, ainsi que des bestiaux plus imposants comme un ours, recouvert de plaques métalliques, ou une sorte de rhinocéros possédant un crâne plus large que la normale. Sans corne frontale, l’animal avait deux grandes protubérances courbées de bélier.

C’est une véritable foire aux monstres !

Ayant assez vu, il se rassit sur le lit et réfléchit au pourquoi de tout ça. Et il ne constatait qu’une chose l’avait amené ici : il avait changé d’univers. Cette confirmation venait du monde qu’il avait observé en reflet dans le ciel, ce fameux jour, de la comète d’énergie et du mystérieux éclair. Pourtant, quelque chose lui échappait : il n’arrivait plus à se remémorer ce qui s’était passé, hormis quelques brides. Il revoyait la scène avec Malika, en train de se faire recouvrir par le cocon lumineux, et celle où il résistait aux fibres pour la secourir. Mais ça s’arrêtait là ; y compris la façon dont il avait été enfermé dans le monolithe.

Chaque fois qu’il tentait de se souvenir des événements, c’était le noir total et une violente migraine se déclenchait, lui lacérant la tête au point de se retenir de hurler.

Il finit par abandonner, préférant plutôt se concentrer sur un moyen de s’échapper. Du peu d’informations qu’il disposait ; et il était content d’avoir une excellente mémoire malgré cette amnésie partielle, il se doutait que les « Aventuriers » ne l’avaient pas livré aux esclavagistes que pour le vendre : il y avait autre chose et cela avait à voir avec ce qu’il était.

Deuscien… Première génération…

Il retourna ces mots dans son esprit à plusieurs reprises, sans parvenir à une conclusion et la faim ne l’y aidait pas. Justement, ce fut l’heure pour les gardiens d’apporter les repas : il reçut un plateau, sur lequel étaient posés un morceau de pain sec et un bol de bouillon. Par précaution, il se contenta de ce qu’il connaissait, ne préférant pas savoir ce qu’il y avait dans le récipient, mais il se rendit compte très vite de sa condition « prestigieuse ». Pour les autres prisonniers, les sentinelles leur jetaient des déchets : des os en grande partie rongés et des restes avariés.

Malgré le tiraillement de son ventre, il mangea à contrecœur.

Après plusieurs heures, où il avait rassemblé tout ce qu’il avait entendu, un garde vint lui ouvrir, lui ordonnant de sortir sans discuter. Il fut aussitôt enchaîné aux poignets, il fut escorté jusqu’à un salon richement décoré. Occupés par des individus aux allures de noblesse, certains faisaient tout de même tache dans leurs habits à cause du surplus de bijoux ou de leur bedaine. Il fut emmené sur le devant d’une scène pour y être exposé avec d’autres exclaves, qui se portaient bien mieux que ceux qui avoisinaient sa cellule. À ses côtés, il vit l’adolescent, mais il ne semblait pas réagir à sa présence.

Il avait toujours son collier métallique autour du cou, mais il le remarqua aussi sur la plupart des esclaves. La maîtresse des lieux entra en trombe dans la pièce, visiblement impatiente de procéder à la transaction, accompagnée de ses gardes du corps.

— Mes seigneurs, comtes, dames de cour et privilégiés, annonça-t-elle après s’être positionnée devant les prisonniers. Bienvenue aux ventes aux enchères catégories « Élite ». Nous vous proposons des biens de qualités pour votre plus grand plaisir, mais aujourd’hui, nous avons reçu de bienfaiteurs une marchandise exceptionnelle : il sera le clou de tout ceci.

La plupart des clients se désintéressaient de cette nouvelle, plutôt occuper à choisir leur futur achat ; mais une bonne partie avait tourné de l’œil, visiblement intrigué de cette surprise.

Elle présenta la première personne, qui dépassait tout le monde de plusieurs têtes, y compris l’aventurier à l’écu.

— Pour commencer, je vous propose un mets de premier choix : une Gaëenne et pas n’importe laquelle ! Il s’agit de la championne du Colisée de Régulus ! Oui, vous avez bien entendu : c’est bel et bien la combattante qui a bravé contre les créatures les plus dangereuses de l’arène. Promis à la liberté après un dernier affrontement, la gladiatrice n’a pas pu s’empêcher de massacrer son maître et sa famille à cause de sa soif de sang. Voici… Aloy, la Sanguinaire !

La femme en question avait une apparence assez étrange : d’une stature athlétique, elle avait une peau cendrée et craquelée sur tout le corps. Elle ne portait rien de plus qu’un pagne de tissu autour de sa taille, sûrement parce qu’il n’y avait aucun vêtement assez grand pour elle, laissant sa poitrine à nue. Son visage était couvert par ses longs cheveux couleur ocre qui brillaient très légèrement, ce qui était inhabituel, mais on pouvait distinguer, au niveau de ses yeux, une faible lueur violette. Tout comme l’adolescent, elle semblait résignée à son sort.

— Vous pouvez venir tâter, il ne bougera pas. Et la somme commence à 20 Lys d’or !

Pendant que le prix montait en flèche, certains n’hésitèrent pas à toucher son corps, non sans plaisir malsain. La maîtresse des lieux passa aux suivants rapidement, faisant de brèves descriptions, jusqu’à atteindre le jeune garçon.

— Pour terminer, voici le fils bâtard du seigneur Oris. Oui, vous avez bien entendu ! Vous vous doutez que le détenir apportera un avantage de poids contre l’honorable Alastor Oris, descendant d’Arkos Aeon. Cependant, avant de procéder au prix, je me dois de rajouter la dernière possession pour en faire un lot…

Elle s’écarta pour présenter Régis, qui fut bousculé de force par un coup de lance, et sortit la photo qu’elle montra bien haut au-dessus d’elle.

— Que serait la progéniture d’Arkos sans un Deuscien de Première génération ?

La foule s’emporta subitement à cette mention, nommant des montants ahurissants sans attendre qu’il y en ait un. Puis un homme, aux cheveux gras et à la barbe opulente, repoussa tous les clients. Aidé de ses deux gardes du corps, de jeunes femmes élancées, qui écartaient les autres avec leur sabre, il s’avança jusqu’à la scène et déposa un énorme sac en cuir aux pieds de la maîtresse des lieux.

— Mille Lys d’or pour les deux, affirma-t-il sans négociation.

Il défia les nobles du regard, qui baissèrent les yeux. Après un court décompte, elle les décerna à ce dernier. L’aristocrate obèse s’approcha de ses nouvelles acquisitions, réjouit de l’état docile du premier. Il se tourna vers Régis, qui le toisait par provocation.

— Vous ne lui avez pas mis d’annihilateur ?

— Il vient de se réveiller, raison pour laquelle il est encore… sauvage.

— Ce n’est pas grave, déclara-t-il en se léchant les lèvres d’un air pervers. Je sais mâter les bêtes !

La dernière phrase résonna dans son esprit et avant qu’il tente quoi que ce soit, la situation bascula brusquement : le salon trembla, sous l’explosion de quelque chose. N’écoutant que son instinct, le jeune homme se jeta sur le côté, bousculant la ligne d’esclaves avec lui. Son action hasardeuse leur permit d’échapper au triste sort qui s’en suivit : la pièce s’écroula sur eux alors qu’un morceau de forteresse écrasa une partie des invités. Les survivants, dont le noble obèse et la maîtresse des lieux, se mirent à paniquer. Certains cherchèrent à s’emparer des prisonniers qu’ils n’avaient pas pu acquérir, mais une multitude de flèches se fichèrent dans leur dos.

Régis repoussa l’un des acheteurs, décédé par ces dernières, mais il fut saisi violemment au bras par une des sentinelles, qui essayait tant bien que mal de réunir les marchandises humaines. Ne se laissant pas faire, il attrapa le sabre d’une des gardes du corps, qui avait glissé jusqu’à lui, et fendit l’air à l’aveuglette. Lorsqu’il ouvrit les yeux, il fut ébranlé par ce qu’il avait fait : il avait accidentellement tué l’esclavagiste, qui avait le visage surpris par le geste.

Il n’eut pas le temps de digérer cette information, car un nouveau projectile se planta dans l’orbite de sa victime, sous le rire sadique de l’archère qu’il reconnut à sa voix : l’aventurière Ama.

Elle s’approcha des derniers survivants, une arbalète rotative à la main, et les acheva sans remords par une salve de carreaux. Quand elle le vit, elle ne fut pas étonnée : elle lui fit un clin d’œil, puis se remit au travail. Sous son regard horrifié et celui des esclaves, elle fit apparaître une hache et trancha net la tête des nobles, qu’elle plaça dans un sac, puis coupa un lambeau de chair de la maîtresse des lieux. Elle observa autour d’elle, dressant une liste de ses cibles, et se dirigea vers la sortie avant de se retourner vers Régis.

— Merci pour ta coopération, Deuscien.

Le fracas continua après qu’elle fut partie, mais personne n’osa bouger. La plaie à la joue réveilla l’ancien étudiant, qui l’encouragea à fuir d’ici : c’était l’occasion inespérée. Toutefois, il ne pouvait pas abandonner ceux qui étaient enfermés dans les cages. Toujours l’épée à la main, il fouilla le corps de l’esclavagiste qu’il avait tué et trouva la clé des chaînes. Il se libéra de ses entraves et fit de même pour les survivants emprisonnés.

— Que ceux qui peuvent manier les armes me suivent ! ordonna-t-il sans réellement savoir ce qui lui prenait. Les autres, quittez cet endroit au plus vite !

Aucun d’entre eux ne bougea, puis la dénommée Aloy se leva. Elle tira ses cheveux en arrière, dévoilant l’origine de l’étrange lueur ; deux globes flamboyants de couleur violette à la place de ses yeux ; et poussa un cri de guerre. Ce fut le signal qui déclencha les réactions : à part eux deux, tout le monde détala.

Qu’est-ce que tu imaginais, Régis ? Ils tiennent à leur vie…

Il inspecta un dernier cadavre, celui de la maîtresse des lieux, et récupéra la photo qu’il rangea aussitôt. Il s’approcha de l’adolescent, qui était encore abattu par ce qu’il avait appris et lui enleva le collier avant de lui mettre une violente tape à l’arrière du crâne pour le réveiller.

— Je suis désolé pour ta mère, mais il va falloir que tu te bouges ! On n’est pas en sécurité ici !

D’un signe de tête, il acquiesça et se saisit d’une épée. Ils quittèrent ensuite la pièce en direction du « Quartier prestigieux ».

Ils déambulèrent dans les couloirs, ne rencontrant presque aucune résistance de la part des sentinelles ; la majorité ayant déjà été tuée par les éboulements.

— Tu n’étais pas obligé de me frapper, se plaignit le jeune garçon en pleine course.

— Vu que tu m’as menacé, je peux dire que tu t’en sors bien, sale gosse !

— Ne m’appelle pas comme ça, j’ai un nom !

— Bien content de l’apprendre, sale gosse, répondit Régis en un demi-sourire. Et donc ?

— Ixion…

Ils s’arrêtèrent subitement après être tombés sur des corps transpercés ou déchiquetés, sûrement dus aux créatures libérées de leur cage par les chutes de pierres. Heureusement, ils n’en croisèrent aucune : celles-ci avaient préféré quitter ce lieu, guidées par leur instinct de survie. Toutefois, il y avait encore des gardes ; les plus fidèles ou les plus avides de richesse, qui leur bloquèrent le chemin. Se remémorant ses combats durant les festivals médiévaux, Régis affronta les esclavagistes qui leur barraient la route. L’étroitesse du couloir lui donna un avantage contre leur lance et il se contenta de les assommer avec des coups de pommeau au visage. Aloy le suivit de près, utilisant sa force pour les envoyer valser contre les murs tandis qu’Ixion contrait les attaques avant de les électrocuter.

Après avoir erré pendant plusieurs minutes dans les corridors labyrinthiques, ils atteignirent le « Quartier prestigieux », mais peu de prisonniers avaient survécu à la destruction de la zone.

Grâce à la clé, qui faisait office de passe-partout, il déverrouilla les cages encore intactes et compta sur la puissance physique de la championne pour ouvrir celles qui étaient trop abîmées. Ils délivrèrent une vingtaine de détenus, plus ou moins en état pour courir, mais au moment de fuir, une nouvelle explosion fit effondrer le toit et condamna la sortie.

Par chance, la combattante avait anticipé cela et avec sa force herculéenne, il détruisit un pan de la cloison qui menait à l’extérieur, leur permettant d’échapper avant l’affaissement total de la pièce.

Cependant, à la vue du spectacle horrifique, ils auraient préféré rester à l’intérieur : tout autour d’eux, la cour était jonchée de corps, massacré par des aiguilles en métal et des éboulis. Certains avaient aussi été brûlés gravement par le souffle des déflagrations.

Vers l’entrée des portes d’acier, qui avaient été renversées, Régis reconnut les aventuriers, Owen et Ama. Le premier jetait des morceaux de la forteresse sans les toucher tandis que l’autre tirait sur les fuyards avec son arbalète.

Ils se foutent des innocents qu’ils tuent !

Le duo remarqua alors le nouveau groupe qui était sorti de la citadelle, cessant temporairement les hostilités. Ils se regardèrent sans parler, puis Owen déposa le rocher en lévitation avant de se masser la nuque.

— Je dois dire… qu’on aurait eu du mal à pénétrer ici sans toi, dit-il après s’être approché.

— Et le meurtre d’innocents, ça fait partie de votre quotidien, déclara-t-il froidement.

Il paraissait calme au premier abord, mais en réalité, il était terrifié. Il ne savait pas combien de temps il maintiendrait son état, mais il était sûr d’une chose : il devait se montrer stoïque s’il voulait s’en sortir vivant.

— C’est ce qu’on appelle des dommages collatéraux, répondit l’aventurier. Mais comme tu nous as été utile…

Il réfléchit faussement en regardant le carnage qu’il avait fait avec sa collègue.

— Je vais accepter ta requête, finit-il en un demi-sourire.

— J’ai rien demandé !

— Non, mais je l’ai deviné, rétorqua-t-il en haussant les épaules. Notre mission est terminée : on a assez fait de dégâts.

Owen lui tourna le dos avant de revenir sur ses pas et de jeter le couteau de chasse à ses pieds, qui était brisé et ensanglanté.

— On avait dû te le confisquer et… elle n’a pas pu s’empêcher de l’utiliser pour… enfin, voilà quoi…

À la vision de son arme, le seul souvenir de son père, Régis réagit spontanément, mais il fut repoussé par un souffle invisible qui le projeta brutalement dans les airs. Il fut quelque peu étourdi par le vol plané, mais il se releva aussitôt.

— Freine tes ardeurs, Deuscien. Il y en a d’autres de meilleure qualité, tu n’auras qu’à le remplacer et nous adresser la facture.

Sur ses mots, il se dirigea vers la sortie et prit le sac de têtes coupées. Ama envoya un signe de bise à Régis et suivit son compagnon.

Désormais débarrassés de leur destructeur, ainsi que de leur geôlier, les captifs survivants se précipitèrent en dehors de la forteresse. Encouragés par les dernières explosions à un peu partout, certains se bousculèrent au point d’écraser les plus malchanceux. Ils ne restèrent plus que trois personnes dans la citadelle ravagée : Régis, Ixion et Aloy.

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