Chapitre 18. PREPARE

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Le mardi matin, je me levai précipitamment. J'avais envie de parler à tout le monde de ce que j'allais entreprendre mais il ne fallait surtout rien divulguer. Ayant prévu de rendre visite à Andie dans l'après-midi, je résolus d'aller voir Kyle au matin. Je m'habillai et déjeunai en vitesse avant de faire route en direction de la maison de mon ami. Je sonnai à la porte et il m'ouvrit, son expression joyeuse trahissait un air de désolation en me voyant. Je ne lui laissai pas le temps d'ouvrir la bouche :

- Je sais parfaitement ce que tu penses, je perds mon temps. Mais à présent que je sais ce qui est arrivé je sais que j'ai raison de m'obstiner. Je ne peux pas te dire ce que je sais pour l'instant car de toute manière tu ne voudrais pas me croire. Je te le montrerai bien assez tôt. Il faut que tu m'aides à oublier cela un moment, je sens le stress monter en moi.

- Pourquoi du stress ? Que se passe-t-il ?

- Je m'apprête à...

Je pensai : «Je ne dois pas en parler.»

- À rien; rien qui t'intéresse du moins.

- Tu peux me le dire, Debbie; je suis ton ami.

- Je sais, mais si je te le dis tu ne seras pas d'accord avec moi et tu pourrais vouloir m'empêcher de faire ce que j'ai à faire.

- Ne te suicide pas surtout.

- N'aie aucune crainte là-dessus, loin de là mon intention. Je vais faire bien pire que cela.

- Tu me fais peur Debbie, je t'en prie dis-moi ce que tu projettes.

- Je ne peux pas te le dire. Bon, je vais te donner un indice : c'est interdit.

- Ça ne m'avance pas beaucoup.

- Tant pis. Viens, allons marcher un peu.

J'ouvris la marche et Kyle me suivit. Il semblait chercher vainement quelles étaient mes intentions, mais évidement il ne pouvait se douter de rien. On marcha jusqu'à une rivière, d'un bon pas, ne parlant de rien. Je sentais la présence de Kyle près de moi et c'était amplement suffisant. S'il avait ouvert la bouche, il aurait probablement gâcher l'instant exquis que je passais en sa silencieuse compagnie, à essayer de déchiffrer ses pensées, à regarder son visage en tentant d'en mémoriser chaque trait, à écouter son souffle délicat, à peine audible, à admirer le contraste que le soleil provoquait entre ses cheveux châtains décoiffés par le vent et le ciel bleu d'été, à imaginer qu'il me disait des choses qu'il ne me dirait probablement jamais. Je sentais comme un poids soudainement dans ma poitrine, je ne savais pas comment expliquer ça. Je n'avais plus envie que ce moment s'arrête. J'aimais être là, silencieuse, et sentir la présence de Kyle à mes côtés. Mon cœur commençait à faire d'étranges petits bonds dans ma poitrine, j'avais envie de rire et de pleurer en même temps. C'était l'une des rares fois depuis la mort de Wendy où je me sentais bien, où je me sentais... libre, libérée du souvenir de ma parfaite meilleure amie, ne pensant plus au crime, juste à être heureuse et profiter de ce moment. Je frémis, son regard s'était posé sur moi. Je n'osais pas le regarder, je savais que ses beaux yeux bleus parcouraient chaque millimètres de ma personne, comme s'il avait été capable de lire à travers moi, de me déshabiller de ce regard; ce regard assez troublant devais-je avouer. J'évitai son regard mais cela ne suffit pas, sans trop savoir pourquoi, en y pensant, je commençai à rougir. Il le remarqua, heureusement je pense qu'il n'avait pas compris ce qui se passait en moi. Il me demanda :

- Tu te sens bien, Debbie ?

- J'ai un peu chaud, répondis-je le plus naturellement possible, ce qui parut assez normal pour un mois de juillet.

Kyle me sourit. Je ne savais plus comment réagir, respirant de plus en plus fort, les lèvres entrouvertes, je m'efforçai de sourire aussi.

- Je pense que je devrais rentrer, dis-je. Je n'ai pas beaucoup dormi la nuit dernière, je crois que j'ai besoin de me reposer un peu. Merci Kyle, merci pour tout ce que tu fais pour moi.

Je l'embrassai sur la joue et me hâtai de partir, sans lui laisser le temps de réfléchir à une réponse. Je ne rentrai pas chez moi.

Je courus chez Andie et appuyai mon doigt une dizaine de fois sur la sonnette, plus impatiente que jamais. Sa mère m'ouvrit. Je la saluais rapidement et courus rejoindre Andie dans sa chambre. J'entrai précipitamment.

- Comment vas-tu, Debbie ? me demanda-t-elle.

- Ça peut aller; et toi ?

- Je me sens horriblement mal, à vrai dire. Je n'ai pas fermé l'oeil de la nuit. Depuis notre conversation d'hier après-midi, j'ai comme l'impression que je vais exploser. Je ne peux plus taire toute cette histoire. Je ne peux plus vivre ainsi, Debbie ! Je ne peux plus !

- Calme-toi, ça va aller.

- Dis-moi ton plan tout de suite, je ne tiendrai pas ici sans savoir une minute de plus.

- Cette nuit, nous allons entrer chez les Brooks.

- Comment veux-tu que nous entrions ?

- Justement, je pensais que tu aurais une brillante idée.

- Eh bien... Il nous faudra forcément forcer une serrure. Je crois savoir qu'il y a une porte dans le garage qui donne dans la maison. Le garage se trouve à l'ouest de la maison, la chambre de Mr. Et Mrs Brooks à l'est. Ils ne nous entendront donc pas entrer. Mais, il faudrait que quelqu'un soit capable de forcer la serrure.

- On trouvera un moyen. Tes indications sont déjà précieuses.

- Une fois rentrées là-dedans, que ferons-nous ?

- Ma sœur Beckie rentrera avec nous dans la villa tandis que Sam montera la garde là où nous le jugerons le plus judicieux. Il faudra que l'on cherche des preuves. Il nous faudra fouiller toute la maison, le plus discrètement possible, jusqu'à ce qu'on trouve quelque chose de crédible à présenter aux policiers.

- Et si quelqu'un arrive ? Si Mr. Brooks nous surprend ?

- Il faut prendre le risque, Andie. Je dois venger Wendy. Et tu veux venger Jane n'est-ce pas ?

- C'est ce que je veux, oui, plus que n'importe quoi au monde. Ma vie a perdu toute raison depuis que j'ai perdu Jane.

- Alors, nous aurons le courage d'aller là-bas.

- Nous l'aurons. On dénoncera ce salopard !

- Dis-moi, connaitrais-tu quelques autres informations utiles sur cette villa ?

- Voyons, je sais à peu près où se trouve chaque pièce. On n'aura pas trop de mal à s'orienter je pense. Je sais également qu'il y a une cave, Jane m'en avait parlé. Je sais aussi qu'Alie a été vue là-dedans pour la dernière fois.

- Dans la cave ?

- Oui, c'est ça. Mais j'ignore où en est l'entrée.

- Nous verrons bien, une fois dans la maison.

- Je sais aussi à peu près à quelles heures Mrs. Brooks a tendance à se lever la nuit. Je l'avais déjà guettée certaines nuits où l'insomnie me prenait.

- Alors, cette nuit, disons vers minuit et demi, une heure, retrouvons-nous devant chez moi.

- Minuit et demi, ça me va. On va y arriver, Debbie.

- Bien sûr que nous y arriverons !

Je quittai Andie et rentrai chez moi. Ma mère était en train de faire des expériences culinaires; encore un de ces horribles gâteaux que nous devrions nous forcer à avaler au repas du soir. Je laissai entrevoir un air de dégoût. Je me dirigeai à l'étage. Sam était dans sa chambre à feuilleter divers magasines qui présentaient des articles sur des affaires criminelles en tous genres, tentant de mieux connaître le sujet pour notre intervention nocturne. Je trouvai Beckie en train de préparer des lampes de poche, vérifiant les piles et en préparant une provision. Je poussai la porte de ma chambre; moi aussi il fallait que je commence à préparer l'escapade de la nuit. Ça n'allait pas être de tout repos.

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