Chapitre 13. LEARN

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- Debbie !

- Deborah !

J'ouvris les yeux. J'étais par terre, aux pieds de mon lit.

- Qu'est-ce qui s'est passé ? demanda Beckie.

- Je me suis endormie. J'ai dû tomber dans mon sommeil.

- Non, tu ne peux pas imaginer la peur que tu nous as fait. Tu étais debout devant la fenêtre et tu parlais toute seule. On t'a appelée plusieurs fois sans que tu nous entendes. Puis tu t'es retournée, tu as dit «Un café pour elle et pour elle un whisky, pour lui des pilules, pour moi un somnifère.» et tu es tombée par terre.

- J'ai dit ça ? Vraiment ?

- Oui.

- Et en dormant en plus. Il ne manquait plus que je sois somnambule.

- Maman a appelé le médecin. Mets-toi dans ton lit, il va arriver.

- Non, je ne veux pas le voir ! Il va me prendre pour une folle, je ne suis pas folle !

- On sait, on sait que tu n'es pas folle mais...

- Je vais sortir par la fenêtre. Retrouvez-moi dans vingt minutes au salon de thé sur la place avec la fontaine.

- Mais...tu... D'accord.

Je mis ma veste sur mes épaules et j'ouvris la fenêtre. J'enjambai le rebord et descendis sur le toit du garage. De là, je sautai dans l'herbe devant la maison. Je courus sans regarder derrière moi, comme une voleuse, une criminelle. Il ne fallait pas que l'on me voit. Je courais sans vraiment faire attention où j'allais. Je ne voulais pas que ma mère pense que je délirais. Mais je ne pouvais pas me taire, le poids de tout ce que je savais pesait trop lourd sur mes épaules et je n'arrivais plus à tout garder pour moi. Je courais, je ne voulais plus m'arrêter, pas avant de me sentir enfin en sécurité. Je ne regardais plus devant moi, je ne regardais plus rien, comme si j'avais eu les yeux fermés. Mais mes yeux étaient bien ouverts. Soudain, je me heurtai à quelque chose, cela stoppa ma course. Reprenant mes esprits, je réalisai que ce quelque chose était quelqu'un. Relevant la tête, je me retrouvai nez à nez avec Mrs. Brooks. Elle me dévisagea et demanda :

- Ça va, Deborah ? Tu ne t'es pas fait mal ?

- Non, je vais bien. Désolée de vous avoir percutée je....

- Ce n'est rien. À l'avenir regarde mieux où tu vas.

- Mrs. Brooks, je peux vous poser une question ?

- Oui.

- Avais-vous déjà haï quelqu'un si fort; avais-vous déjà eu envie de tuer quelqu'un au point de le faire ?

- J'ai souvent eu envie de tuer une personne, mais je ne l'ai pas fait. J'ai souhaité sa mort. Mais ce n'est pas par haine, c'est par amour.

Je ne trouvais rien à répondre. Que pouvais-je répondre à cela ? Je remerciai poliment la mère de Wendy d'avoir bien voulu répondre à cette question et me remis en route lentement, chamboulée par la réponse de la femme.

J'entrai dans le salon de thé où je devais retrouver mes sœurs. Elles n'étaient pas encore arrivées. J'attendis en réfléchissant, en regardant le plafond en profondeur. C'était un enduit blanc et crasseux, avec du relief. Une toile d'araignée pendait dans un coin. Il y avait une tâche à un autre. Le milieu était marqué par une lampe en plastique bleue turquoise. Ce plafond blanc, neutre, vide, seulement habité de quelques saletés, me rappelait mon enquête sans indices, sans preuves et dont les suspects étaient des personnes folles et totalement charmantes. La porte claqua. Samantha et Rebecca venaient d'entrer. Je leur fit signe et elles me rejoignirent à ma table. Je passai ma main dans mes cheveux et, posant mes deux poings sur la table, j'entrelaçai mes doigts. Je demandai alors :

- Quoi de nouveau ?

Samantha répondit la première :

- Andie n'a pas bougé de chez elle de la matinée. L'après-midi, elle est allée dans son jardin. Elle a arrosé les rosiers, elle a replanté une orchidée et elle s'est allongée pendant un long moment contre le gros sapin qui est devant la fenêtre de sa chambre. Elle a regardé le ciel et s'est endormie. Quand elle s'est réveillée, elle est rentrée dans la maison et je ne l'ai plus vue.

- Ça ne nous apprend pas grand chose, mais ça a déjà une importance capitale.

- Je ne vois pas vraiment en quoi ça nous avance.

- J'ai décidé de faire confiance à Andie. Si elle ne sort pas beaucoup de chez elle, c'est qu'elle n'a pas d'affaires suspectes en ville.

- Mais elle peut très bien cacher ce qu'elle fait de suspect chez elle.

- J'ai passé plusieurs après-midi chez elle et je n'ai jamais rien vu d'étrange. Mis à part sa folie évidement. Et toi Beckie ? Quoi du côté de Mrs. Brooks ?

- Elle est allée au marcher ce matin. Elle a acheté des poireaux, des tomates, des oranges. Elle est allée dans une supérette et en est ressortie avec quatre bouteilles d'alcool. Ensuite elle a lu sur un banc dans le parc et a regardé des enfants jouer.

- Elle a fait exactement la même chose lorsque je l'ai suivie.

- En bref, elle n'a rien fait d'extraordinaire.

- Mais toi tu as fait un très bon boulot, Beckie ! Ce que tu me dis confirme mes suppositions.

- Lesquelles ?

- Mrs. Brooks a un grave problème avec l'alcool et elle a des habitudes précises.

- Ça n'avance à rien dans ton enquête.

- Bien sûr que si. En connaissant plus ou moins les habitudes de Mrs. Brooks, je peux reproduire son alibi quand j'en aurais besoin. Et si je la trouve dans un état étrange, ça voudra dire qu'elle est saoule.

J'étais optimiste pas idiote. Mon enquête stagnait et ne tarderait pas à croupir dans un coin si de nouvelles preuves ne venaient pas vite m'éclairer.

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