Chapitre 5. La révélation

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De leurs côtés, les garçons avaient passé une matinée un peu tendue. Aucun n'avait osé aborder les questions qui les taraudaient. A chaque changement de vitesse, Alexis frôlait légèrement la cuisse de Michel. Soit il ne s'en apercevait même pas, soit cela ne lui procurait aucune sentation, se dit le policier. Son copilote regardait le paysage comme s'il n'avait jamais vu de campagne de sa vie. Alexis était déçu. Il avait secrètement espéré qu'Anaïs avait vu juste. Il se dit tout de même qu'à midi, il lui poserait la question ouvertement ! Il avait passé l'âge des sous-entendus.

- Michel ! S'exclama-t-il le moment venu.

- Alexis ! Répondit son ami sur le même ton grave. Pourquoi tu m'apostrophe comme ça ? Demanda-t-il en riant.

- J'ai une question à te poser... Et peut-être que tu vas mal la prendre...

- Crache ta valda !

- Est-ce que... Est-ce que tu aimes les hommes ?

- Non, répondit Michel sans appel.

- Je... J'avais cru... Je ne sais pas. J'ai cru à un moment qu'il y avait quelque chose entre nous.

- Je n'aime pas "les" hommes. Ça ne veux pas dire que je ne peux pas être attiré par "un" homme.

- Hooo, rougit Alexis.

Michel lui expliqua alors qu'il avait connu quelqu'un, bien avant de rencontrer Anaïs, à l'adolescence. Il était sûr que cela ne voulait rien dire, que c'était juste un espèce de rite de passage. Il ne se sentait pas spécialement attiré par tout les hommes et il bandait devant certaines femmes. Il avait fini par se dire qu'il était charmé par une personnalité, peu importe le sexe biologique de cette personne. Avant sa femme, il n'avait pas cherché à multiplier les conquêtes, jugées vides de sens pour lui. Il cherchait l'âme soeur et il l'avait trouvé en la personne d'Anaïs.

- Et puis... Je t'ai rencontré à la soirée de Jacques. J'avais l'impression qu'on se connaissait depuis si longtemps, qu'on se comprenait directement. J'ai failli craquer ce soir là.

- J'avais envie que tu craques, dit le policier en lui prenant la main.

- Mais je ne pouvais pas faire ça à Anaïs. Je l'aime tellement. J'ai envie de toi ! Mais je ne pourrais pas passer ma vie sans elle, dit Michel en embrassant sa main avant de la repousser.

- Pourquoi m'avoir recontacté après le repas chez vous ? Nous aurions pu rester chacun dans nos vies, comme avant ?

- Je voulais te revoir, en toute amitié. J'aurai pu me contenter de t'avoir comme ami à mes côtés. C'est toujours possible d'ailleurs... Etre ami ?

- Je ne pense pas.

Le policier expliqua alors à Michel sa discussion avec Anaïs et le plan qu'ils avaient échaffaudé ensemble. Michel se dit qu'il devrait avoir une sacrée discussion avec sa femme à son retour ! Quelle manipulatrice. Pourtant, il ne lui en voula pas. Il était sûr que si elle lui en avait parlé, il aurait nié et trouvé des excuses.

- Mais pourquoi est-ce que tu a accepté ça ? Demanda-t-il à Alexis.

- Parce que moi aussi j'avais envie de savoir. Savoir si ce que je ressentais était partagé ou non, dit-il en s'approchant de Michel.

- Oui... Mais non. Anaïs, dit-il troublé par le regard de braise du policier.

- Elle m'a donné la permission de t'embrasser... Pas plus.

Sans chercher à connaitre la vérité sur le sujet, Michel se rapprocha un peu plus de son ami et lui effleura la joue de sa main. Il caressa sa machoire de son pouce et lui dévora les lèvres, comme si sa vie en dépendait. Alexis s'accrocha à son cou comme à une bouée de sauvetage. Il plongea sa langue dans la bouche de son amant, qui la lècha avidement. Les mains de ce dernier ne surent pas rester sage bien longtemps. Il caressa le torse musclé du policier, agrippa ses flancs et l'attira un peu plus à lui. Ils s'embrassèrent jusqu'à manquer d'air. A contre coeur, Michel mit fin à ce baiser passionné.

- Je... Je veux plus... Et je ne peux pas avoir plus.

- Un baiser d'adieu ? Dit le policier. On ne pourra pas rester amis...

- Non. On ne pourra pas, dit-il la gorge serrée.

Ils restèrent enlacés de longues minutes supplémentaires. Le parcours du rallye n'était pas terminé, mais les deux hommes n'avaient plus le coeur de continuer. Ils s'avaient qu'ils devraient se dire aurevoir après ces quelques heures ensemble. Le trajet de retour se fit en silence. Aucun mot n'aurait pu apaiser leur souffrance. Mais le serment que Michel avait fait à Anaïs comptait trop pour lui. Il ne pouvait pas le bafouer, même pour sa deuxième âme soeur. Arrivé dans l'allée de garage, Alexis coupa le moteur, voulant prolonger un peu plus l'inévitable.

- A jamais alors, dit-il les yeux humides.

- Je ne t'oublierai jamais.

Michel sortit, claqua la portière et entra dans la maison sans se retourner. Il n'en avait pas la force.

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