Flagrant délit

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Après les congés, les anomalies d’expression semblaient s’être atténuées, et l’on reprit les tâches laissées en suspens. David poursuivit la synthèse du deuxième produit pendant que les filles et Vincent reprenaient l’exploration de l’établissement. En questionnant les exécutants du délit, ils espéraient remonter à la source. Le neurologue n’avait pas encore subi d’interrogatoire. Léa tenait à le rencontrer seule afin de ne pas éveiller sa méfiance.

« Tiens! Bonjour Jacques. As-tu le temps de prendre un café? »

Carballo ne semblait pas embarrassé par cette offre... À moins qu’il fût bon acteur.

- Bon… Tu ne m’as jamais vraiment expliqué ce que vous mijotiez dans ce laboratoire.

- J’en suis vraiment désolée, parce que je te suis reconnaissance pour l’instruction que tu m’as apportée. Il est en effet nécessaire que nous masquions nos recherches, mais elles pourront bientôt être dévoilées. Je te promets que tu feras partie des premières personnes informées, avant toute déclaration publique.

- Très bien. Restons-en là à ce sujet pour aujourd’hui. Comment vas-tu? Je sais que tu arrives dans la période de ta vie comprenant des risques de complications. Si tu remarques le moindre problème, viens me voir immédiatement et je ferai mon possible pour retarder le phénomène. Cela commence en général par quelques défauts de langage.

Ces paroles semblaient sincères et ne collaient pas avec le personnage imaginé, qui souhaiterait se débarrasser de son interlocutrice.

- Merci, je n’y manquerai pas. Et toi, es-tu pris par des projets intéressants, en ce moment?

- Ah… Nous jouerons cartes sur table le moment venu. Quand tu en dévoileras un peu plus sur tes occupations, je parlerai des miennes, imposa le neurologue avec le sourire. Après cela, tu seras conviée aux expériences que je mène.

- Marché conclu! S’exclama son élève, rassurée de retrouver un Jacques sans rancune.

- Mais peut-être qu’avant ça, Monsieur Godard, lui, daignera m’en dire un peu plus, ajouta-t-il sur le ton de la plaisanterie.

- Cela m’étonnerait. Il était au courant sur les grandes lignes de nos recherches au moment de notre installation, mais il n’en sait pas plus que toi sur nos occupations actuelles.

L’air jovial du professeur s’effaça aussitôt.

- J’accepte tes cachoteries, mais ne pousse pas l’affront jusqu’au mensonge.

- Pa… Pardon?

- Vous le conviez dans votre laboratoire : je l’ai aperçu y entrant hier. Il doit donc bien voir ce qu’il s’y passe.

- Hier? À quelle heure?

- Vers dix-huit heures. Je sortais de mon bureau. Je n’ai pas pu confondre son visage avec le tien! Il se trouvait à dix mètres de moi.

- Impossible! Nous avions quitté la cale… La salle une demi-heure plus tôt.

- Ça ne l’empêche pas d’utiliser sa clé.

- Sa…

Les jours suivants, l’un des membres de l’équipe restait monter la garde afin de vérifier cette accusation. Léa en était dispensée car le neurologue, ayant évidemment remarqué son défaut d’élocution inhabituel en état de stress, l’obligea à accepter une consultation et à s’éloigner de la pression impliquée par la situation. Le volontariat de Cyril, le premier soir, n’aboutit à rien. Emmanuelle n’obtint pas de meilleur résultat le lendemain. Cela commençait à sentir la calomnie. Vincent quitta la pièce bredouille le troisième soir. On finit par dissimuler une caméra déclenchant l’enregistrement au premier mouvement. L’opération porta ses fruits dès le lendemain matin car le directeur ne s’introduisait pas systématiquement après la sortie des occupants, mais parfois bien avant leur arrivée.

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