Marin

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Les vagues roulaient à un rythme régulier, scintillantes sous le soleil. Loin des côtes, un bateau aux voiles blanches glissait sur le lac, et tanguait doucement dans la brise. Ils regardaient l’étendue gris bleuté, accoudés au bastingage, profitant du temps à la fois doux et ensoleillé.

« Nous avons de la chance avec les températures, remarqua-t-elle, il fait bien meilleur depuis quelques jours. J’espère que ça se maintiendra encore longtemps, pas toi ?

- Ce serait bien, oui.

- À dire vrai, j’aime aussi beaucoup la neige, mais après avoir quitté l’Orient ce genre de températures agréables me convient tout à fait. »

Un bref silence s’ensuivit.

« Azzur ?

- Oui ?

- Tout va bien ? Tu me parais bien silencieux depuis tout à l’heure.

- J’ai le mal de mer. » soupira-t-il.

Elle parut étonnée, puis sourit.

« Eh bien, commenta-t-elle, voilà qui est surprenant. Tu viens pourtant d’un pays où la majeure partie de la population est liée à l’océan.

- C’est ça, moque-toi. Je te rappelle que j’ai grandi à l’intérieur des terres.

- Je ne me moque pas, le corrigea-t-elle, je te taquine.

- Si tu le dis, mais je ne suis pas d’humeur. »

Elle le considéra avec une sorte d’attendrissement. Comme d’habitude lorsque quelque chose le contrariait, il évitait de la regarder et ses yeux paraissaient plus clairs. Il avait remonté un peu son écharpe, comme s’il avait froid, et laissait aller les bouts du tissu dans le vent.

« Tu es mignon quand tu es agacé. » déclara-t-elle.

Il se tourna vers elle, surpris.

« Tu fais de drôles de compliments.

- Je n’ai pas ton expérience dans le domaine de la galanterie, plaisanta-t-elle, mais je suis contente que tu ne l’aies pas mal pris.

- Je n’en ai pas l’énergie… expliqua-t-il avec résignation.

- Pauvre enfant, que ta situation est dramatique ! Tiens, je vais te donner un remède pour te rendre de l’énergie. »

Elle se rapprocha de lui et l’embrassa sur la joue.

« Alors ? demanda-t-elle. Tu te sens mieux maintenant ?

- Un peu, s’amusa-t-il, mais je serais totalement guéri si tu m’en avais donné plus. »

Elle rit et lui ébouriffa les cheveux.

« Hé ! protesta-t-il. Arrête ! »

Elle retira sa main et il prit un air faussement consterné.

« Tu as la fâcheuse tendance de retomber facilement en enfance dès que tu es heureuse, Astrée. déclara-t-il sans parvenir à cacher son sourire.

- Regardez qui parle ! répliqua-t-elle.

- Disons que c’est un trait que nous avons en commun. » reconnut-il.

Elle acquiesça, un éclat espiègle dans le regard.

Ils remarquèrent que quelqu’un venait vers eux. C’était l’une des passagères du bateau, une femme d’un certain âge dont la tenue sobre mais soignée indiquait qu’elle devait être une riche veuve, probablement de retour d’un pèlerinage à en juger par le chapelet à sa ceinture. Elle avait une attitude digne, mais quelque chose dans son expression avenante laissait deviner une grande vivacité d’esprit. Elle s’arrêta près d’eux et ils se saluèrent mutuellement.

« Beau temps, n’est-ce pas ? commença-t-elle.

- Oui, répondit la jeune femme, cette journée est particulièrement agréable.

- Vous vous rendez dans l’ouest de l’Europe ? » s’enquit la nouvelle arrivante.

Les deux jeunes gens se consultèrent du regard et Azzur répondit :

« En effet, nous allons en France, et vous ?

- Je regagne ma maison en Prusse après avoir effectué un pèlerinage à Rome.

- Vous avez de la chance, répondit Astrée, on dit que c’est une très belle ville.

- Certes, et j’aime m’y rendre lorsque j’en ai l’occasion. Et vous, quel est le motif de votre voyage ? »

Voyant qu’ils hésitaient, elle leur sourit d’un air complice et reprit :

« C’est un secret ?

- Plus ou moins… avoua la jeune femme.

- Ne vous en faites pas, les rassura-t-elle, je n’ai nullement l’intention de vous nuire. En tout cas, vous formez un très beau couple. »

Azzur et Astrée rougirent et cette dernière tenta de dissiper le malentendu :

« Ce n’est pas vraiment ça…

- Ah, je vois, s’amusa leur interlocutrice, vous ne vous êtes pas encore mariés, mais vous êtes partis ensemble pour cela ?

- Pas exactement… soupira le jeune homme, gêné.

- Excusez-moi, dit-elle d’un air espiègle, je suis assez curieuse et j’aime plaisanter.

- Ce n’est pas grave. » l’assurèrent les deux autres.

Ils étaient un peu mal à l’aise, mais en même temps ne pouvaient lui en vouloir. Quelque chose chez cette dame leur inspirait confiance, peut-être cette bienveillance et cette vitalité pleine de jeunesse qui transparaissait dans chacun de ses mots.

« Au fait, reprit l’aînée, comment vous appelez-vous ?

- Astrée Cyaniphade.

- Azzur.

- Et votre nom de famille ?

- Je n’en ai pas. Et vous, quel est votre nom ?

- Erika von Nebelmond-Werner. »

Elle laissa passer un temps puis ajouta :

« Votre histoire me paraît tout à fait intéressante, accepteriez-vous de me la raconter ?

- Eh bien… commença Astrée. Je n’y serais pas opposée, mais peut-être dans un endroit moins exposé.

- Vous pouvez venir dans mes quartiers, nous y serons plus au calme.

- D’accord, accepta Azzur, mais vous devez nous promettre de garder ce que vous entendrez pour vous.

- Bien entendu ! Suivez-moi. »

Alors qu’ils se rendaient à l’intérieur Astrée plaisanta :

« Vous serez l’unique détentrice de notre secret. »

Erika sourit et répondit dans le même jeu :

« Je le garderai en mémoire pour le raconter aux générations futures. »

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