Chapitre 3

4 minutes de lecture

Le lendemain matin, David se réveilla, surprit d’être dans son lit. La première chose qu’il vit lorsqu’il ouvrit les yeux fut un portrait de sa femme. Il regardait le même tous les matins, celui accroché en face de son lit. Marie-Anne était en robe blanche, assise sur leur banc. David ne s’était pas peint à côté, cela lui semblait trop réaliste et peindre un tableau d’eux deux le rendaient triste. Il regarda ensuite autour de lui, voyant les bouteilles de vins entassées au pied de son lit. Il les contourna et partit prendre une douche. Après son café, il fit sa routine matinale et croisa son voisin devant le seuil de sa maison.

- Bonjour David, lui lança Christophe, occupé à tailler leur haie commune.

- Bonjour Christophe.

- Vous allez acheter le journal ?

- Comme tous les matins, Christophe.

- Pourriez-vous m’en ramener un ? Ma sœur vient d’accoucher et elle doit passer dans le journal d’aujourd’hui.

David s’arrêta quelques secondes, songeant aux enfants de la plage.

- Pas de soucis Christophe, je vous ramène ça. Et mes félicitations à votre sœur.

- Merci, David. Je lui dirais.

David acheta deux journaux puis partit marcher sur la plage. Le vent était violent aujourd’hui, il l’entendait siffler dans ses oreilles comme un chant de sirènes. L’homme enleva ses chaussures et retroussa son pantalon pour marcher le long de la plage, les pieds dans l’eau. En cette période hors-saison, la plage était déserte : le temps ne se prêtait pas à la baignade. David préférait cette période de l’année lorsqu’il n’y avait personne ; il n’aimait pas l’été, redoutait le mois de juin, celui de juillet et celui d’août qui étaient pour lui les pires mois de l’année. Cette solitude était préférable, loin du jugement des vacanciers. David marchait dans l’eau froide, sa gueule de bois diminuant au fur et à mesure. Après sa marche, il alla s’asseoir sur son banc, alluma sa pipe et ouvrit son journal. Il parcourut le sommaire pour trouver la page des naissances. Il alla directement à la numéro vingt-trois et vit qu’une certaine Joséphine Clariso, la sœur de Christophe Clariso avait accouché la nuit-même, à l’hôpital de Royan. D’après le journal, Joséphine avait donné naissance à une magnifique petite fille du nom d’Andréa pesant deux kilos neuf. Au-dessus de l’annonce se trouvait une photo de Joséphine, un mince sourire aux lèvres, tenant sa fille Andréa dans ses bras au fond d’un lit d’hôpital.

David lut quelques articles inintéressants puis ferma le journal pour contempler l’océan. Lorsqu’il tourna la tête vers la plage, il revit, comme la veille au soir, ces deux enfants en train de construire un château de sable. Pas de doute cette fois, ces enfants étaient bien réels. Un garçon et une fille, ils faisaient des allers-retours dans l’eau pour remplir des seaux. Ils étaient tous les deux bruns et devaient avoir entre trois et cinq ans. David scruta la plage, cherchant un adulte non loin des enfants qui serait en train de les surveiller, mais non ; la plage était totalement déserte. Ces deux enfants l’intriguaient, n’avaient-ils pas de parents ? Ou avaient-ils des parents négligents ? David regardait la marée monter, les enfants étaient proches de l’océan et il avait peur qu’ils se fassent emporter. Le vent était violent et l’eau fraîche en cette saison ; ils ne survivraient pas. En regardant ces enfants jouer, David les revoyait lui et son frère George durant leur enfance. Il se remémora sa courte carrière de pirate et se dit que, petit, il prenait autant de risque avec George que ces deux enfants ce matin. Mais tout de même, lui et son frère étaient toujours surveillés par leur père, et plus âgés.

Ne sachant que faire, il se demanda, comme à son habitude, que ferait Marie-Anne. Durant un court instant il la vit assise à côté de lui, sur leur banc, lui disant d’aller voir ces enfants. Marie-Anne n’aurait jamais laissé deux mômes seuls sur la plage sans surveillance ; même-ci ce n’était pas les siens.

David se leva donc de son banc, éteignit sa pipe et partit en direction de la plage. À son arrivée, il enleva une nouvelle fois ses chaussures et marcha d’un pas rapide en direction des enfants. Les deux petits étaient sur la gauche de la plage, vers les rochers. David ne pouvait pas les voir tout de suite mais lorsqu’il arriva vers les roches, les enfants avaient disparus. Le château de sable était toujours là, tenant debout. David ne comprenait plus rien : comment ces deux enfants avaient pu disparaître ? Ils les auraient croisés s’ils étaient partis de la plage, il n’y avait qu’un seul chemin. David commença à s’avancer dans l’eau, faisant attention à ne pas mouiller le bas de son pantalon. Il chercha les enfants du regard, scrutant l’océan, la plage et les rochers : mais rien. Ils s’étaient évaporés. David repartit en direction de chez lui, hésitant à appeler la police mais pour signaler quoi ? Une disparition d’enfants ? La négligence de parents ? Des enfants sauvages ? Il ne se voyait pas l’expliquer aux policiers, se disant que ces enfants n’étaient pas les siens et donc pas sa responsabilité. De plus, appeler des policiers l’aurait forcé à avoir des contacts humains ; chose qu’il évitait par-dessus-tout.

Il rentra chez lui, déboussolé, prêt à ouvrir sa première bouteille de la journée.

Annotations

Versions

Ce chapitre compte 2 versions.

Vous aimez lire antiquaire ?

Commentez et annotez ses textes en vous inscrivant à l'Atelier des auteurs !
Sur l'Atelier des auteurs, un auteur n'est jamais seul : vous pouvez suivre ses avancées, soutenir ses efforts et l'aider à progresser.

Inscription

En rejoignant l'Atelier des auteurs, vous acceptez nos Conditions Générales d'Utilisation.

Déjà membre de l'Atelier des auteurs ? Connexion

Inscrivez-vous pour profiter pleinement de l'Atelier des auteurs !
0