Chapitre 4

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Emmitouflé dans une des écharpes de Marie-Anne, David repartit en direction de la plage, ivre de sa journée. Il titubait sur le chemin, une bouteille de son père à la main. Il avait passé l’après-midi à peindre les deux enfants et leur château de sable, n’arrivant pas à se sortir cette histoire de sa tête. Il pensait perdre la raison, son esprit s’embrouillait et l’alcool ne l’aidait pas à y voir clair. En les peignant, il avait remarqué que les mêmes enfants étaient peints sur d’autres tableaux qu’il avait fait, entassé dans une pièce sombre.

Il atteint son banc avec difficulté et alluma sa pipe. Il s’allongea pour observer les étoiles, l’alcool tournant dans sa tête. Il était en admiration devant ces points lumineux, n’ayant jamais trouvé quelques choses d’aussi magnifique de toute sa vie. Il pensait à sa femme, lui disant qu’il l’aimait et ce pour toujours, peu importe où elle se trouvait. Après quelques larmes, David bu les dernières gorgées de sa bouteille et partie la jeter dans la poubelle à côté de son banc. En se relevant, il regarda la plage pour la énième fois de la journée et vit, à son grand désespoir, les enfants en train de faire un château de sable.

David était en incompréhension totale, il pensait devenir fou. Il était en colère, triste et pensait que ces deux mômes se foutaient de sa gueule. Il se releva d’un bond et courut en direction de la plage. Cette fois il ne prit pas le temps d’enlever ses chaussures, ni de retrousser son pantalon. Il dévala la pente en courant mais, sous l’emprise de l’alcool, il tomba au sol. David resta quelques minutes à terre, le temps de comprendre ce qui lui arrivait. Il voyait son genou saigner, son bras aussi. Sa tête tournait, il voyait flou, des tâches lui brouillant la vue. Il se releva avec mal et repartit en direction de la plage, titubant, boitant. Il se précipita en direction des rochers vers la gauche, là où devait se trouver les enfants. Mais une fois de plus, il n’y avait rien. David se mit à hurler sur la plage, seul dans la nuit : « Où êtes-vous ?! Qui êtes-vous ?! » sans jamais avoir de réponse. Il pleura, tournant sur lui-même à la recherche des deux enfants fantômes. Il se rapprocha de l’eau, enleva tout de même ses chaussures avec maladresse et partit dans l’océan, à la recherche de quelque chose. En cette saison le vent était violent, les vagues dangereuses, et il n’avait que le phare comme lumière dans la nuit. David s’enfonçait dans les vagues, doucement, la froideur de l’eau le ramenant à la réalité. Il continuait à crier, d’appeler les enfants disparus. Il avait un pressentiment, un instinct qui le poussait à retrouver ces enfants à tout prix. Il était à présent entièrement dans l’eau, il commençait à nager sans vraiment savoir pourquoi. Ses vêtements mouillés le rendaient lourd, l’alcool le déstabilisait, son cerveau allait exploser. Sans savoir où il allait, il continuait de nager ; bientôt, il n’avait plus pied. David se prit une vague dans le visage, puis deux, puis trois. Il n’arrivait plus à reprendre son souffle, les vagues étant trop hautes et trop fortes pour lui. Sans aucun espoir, David se laissa couler comme une pierre, se laissant emporter par les rouleaux de l’océan, espérant rejoindre sa femme dans les profondeurs aquatiques.

Le lendemain matin, Christophe prenait son café sur sa terrasse, une couverture sur le dos. Il était parti acheter le journal tôt ce matin ; n’ayant pas vu son voisin David sortir, il en avait même pris un pour lui, ça lui ferait plaisir. Christophe tournait les pages, tranquillement, parcourant les nouvelles inintéressantes de sa ville. Il resta une bonne heure à lire des articles de poissonneries et de commerces quelconques. En arrivant à la fin de son journal, il fit les mots-croisés comme il avait l’habitude de le faire lorsqu’il avait du temps. Il commença à marquer le mot « épices » mais fut absorbé par la page de gauche, contenant les faits divers. Christophe lâcha son stylo, laissa tomber son café, son cœur s’emballant. L’homme lu avec attention, apprenant la noyade de David Fermier, la nuit-dernière. En-dessous de la mort de son voisin se trouvait une nouvelle encore plus terrible, deux autres noyades, celles de ses enfants : Clara et Léo Fermier. Christophe s’était occupé d’eux à la suite de la mort de Marie-Anne, David ayant effacé cette partie de sa vie. Le vieil homme le savait : David était mort sans avoir le souvenir de ses enfants, sans jamais savoir qui ils étaient.

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