Chapitre 62. Pourquoi avec toi Ninon ?

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À la fin de son service du soir, un jour qu’elle et Louis avaient un horaire différent, Rachel fit un détour par le service de néonatologie.

— Bonsoir, je viens voir Ninon.

Prévenante, l’infirmière de garde l’interpella avec de la gaité dans la voix,

— Oui, je vous reconnais, Ninon a déjà vu passer une collection de vos foulards… Et ça fonctionne vraiment bien ! Vous voulez la prendre ?

— Euh… Oui, mais j’aimerais d’abord évaluer comment elle va, elle ne me reconnaîtra probablement pas.

En balayant les doutes de Rachel, l’infirmière renchérit,

— Ça, j’en doute… C’est avec votre odeur qu’elle se permet de manger.

Arrivée à hauteur du lit où était Ninon, Rachel la vit et l’observa, elle avait effectivement pris du poids, cela faisait d’elle un bébé plus joli, même s’il lui manquait encore au moins un bon demi kilo pour pouvoir sortir de l’hôpital.

En se penchant au-dessus de l’enfant et en lui caressant le visage, Rachel lui chuchota des petites choses gentilles, Ninon se réveilla et attrapa l’un de ses doigts, Rachel sourit.

— Tu veux venir dans mes bras Ninon ? Moi j’ai envie de savoir ce qu’il se passe avec toi, pour moi… Tu représentes tout ce que j’appréhende, je ne veux pas m’attacher à toi et en même temps, toi, tu ne sembles vouloir que moi pour rester en vie ; sans mes foulards, tu ne t’alimentes pas. Pourquoi ne t’attaches-tu pas à ta tante ? C’est avec elle que tu iras vivre dès que tu seras arrivée à un poids correct.

Ninon la regarda, elle ne lâcha pas son doigt, mais commença à pleurer.

— Eh, ma petite, qu’est-ce qu’il y a ?

Rachel soupira puis la prit dans ses bras, Ninon continua à pleurer, des pleurs plaintifs.

— Mais, qu’est-ce que tu as ma petite, un gros chagrin ? Raconte-moi tout.

Ninon sanglota encore un bon moment puis fini par se calmer contre la peau de Rachel. Elle ouvrit les yeux et sortit la langue, elle avait probablement faim. Rachel interpella l’infirmière et reçu un biberon.

— Je vous en donne un grand, je suis sûre qu’avec vous, elle va le vider !

— Vous m’avez l’air bien sure de vous… Je vais faire de mon mieux.

Rachel proposa la tétine à Ninon qui téta vigoureusement tout en la regardant, les yeux de Ninon suivaient tous les gestes de Rachel. Ninon soupira à chaque fois que Rachel l’incita à faire de petites pauses. Rachel sourit de la découvrir si impatiente face à l’ingestion de son biberon.

— Eh, n’engloutit pas tout en une fois ma petite, prend le temps de déguster et de bien digérer, sinon, tu auras mal à l’estomac.

Rachel se tut puis la rassura,

— Tu as le temps Ninon, tu as le temps, je vais rester un peu avec toi.

Là, ce fut Rachel qui soupira. Elle ne savait que penser de la situation ; il semblait clair à tous ceux qui avait croisé Ninon, que l’odeur, son odeur, imprégnant ses foulards, était ce qui rassurait et stimulait Ninon. Aux dires de l’infirmière qui l’avait accueillie, l’équipe soignante s’en servait même pour calmer ses pleurs, lui donnant comme exemple que s’ils mettaient trop de temps à replacer le foulard du jour après le change du lit, Ninon sanglotait beaucoup. Ces pleurs cessaient dès qu’elle retrouvait la proximité dudit foulard.

Durant cette réflexion, Ninon resta dans ses bras. Alors qu’elle lui caressa la tête, le nourrisson se colla à Rachel, tétant un peu la peau de son décolleté, Rachel en eut les larmes aux yeux… Cela lui rappela tellement ses autres enfants, cette proximité, le fait de ressentir l’apaisement du bébé qui est dans les bras. Elle ferma les yeux et des larmes coulèrent sur ses joues. Elle songea, tristement,

Non… Je ne peux pas m’attacher à elle.

Pourtant, elle ne put s’empêcher de la bercer et de la réconforter comme elle le faisait avec ses propres enfants.

Pendant ce temps, Ninon goûta sa peau, elle fit littéralement « ventouse » sur la peau de Rachel, qui finit par sourire et lui demander,

— Dis-moi, Ninon, tu comptes me faire un suçon ?

Prenant le temps de transmettre un peu de douceur à Ninon, Rachel resta encore une heure avec elle, la berçant et la cajolant.

Ninon fini par s’endormir, sereine. Rachel la déposa dans son lit et quitta l’unité.

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