Chapitre 5 : Un Petit Mot

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Je suis au lycée César-Frank en Terminale Scientifique. Pas plus tard que la semaine dernière, ma professeure de Français, Mme Hermeline me retient à la fin du cours.

— Votre comportement est inacceptable, il va vite falloir vous ressaisir Mr Choke, sifflait-elle.

Je ne me considère pas comme un élève perturbant mais il m’arrive de m’ennuyer… Tous les livres que j’ai eu à lire à l’école m’ont été une torture à finir. J’aime bien les livres comme le « Seigneur des Anneaux » ou même le « Trône de Fer » mais les textes de Mme Hermeline sont chiants à mourir, c’est peut-être parce que je suis obligé de les lire et que je n’y prends pas plaisir.

Il faut peut-être que je les lise chez moi, près du feu, chocolat chaud de Maman et là peut être que j’arriverais à m’y intéresser. Ce que je recherche dans un livre ce n’est pas la complexité des mots ni même des tournures de phrases complexes à chaque ligne. Je recherche un univers auquel m’attacher, me passionner ; et de l’action, du sang et du sexe ! Sang et sexe composent les romans de George Martin, j’adore cet écrivain. Peut-être qu’en grandissant mes goûts s’affineront, mais ce n’est pas gagné ! Je ne pensais pas dire ça un jour, mais la voix de Mme Hermeline va me manquer.

Je ne goûterai plus les délicieux plats de Maman, je ne lui ferai plus de câlin, je ne la verrai plus ; Lilou ne m’attendra plus le vendredi devant le lycée avec les croissants, je ne pourrai plus la serrer dans mes bras, je ne pourrai plus l’entendre me raconter ses dernières avec son père, je ne la verrai plus. Une foule d’habitudes s’envolent en une soirée, si près du but...

Perdu dans mes pensées, je ne m'aperçois pas que le vent souffle, que les feuilles bougent et que la forêt s’agite. On nous observe, des paires d’yeux reflètent le quartier de lune. Des hiboux et chauves-souris s’envolent à notre passage. La fraîcheur nocturne de l’automne commence petit à petit à devenir glaciale. On pédale aussi vite qu'on peut, en pleine forêt sur ce chemin irrégulier, dangereux et étroit, Lylian est devant moi. Notre champ de vision se limite à la fine traînée blanche de nos lampes.

On ne pense pas à ce qu’il vient de se passer, on a bien le temps. On va chez moi, il faut que je désinfecte la plaie, elle commence à devenir très moche. Les flics ont déjà dû le retrouver, ils ont sûrement appelé les secours et font les premiers gestes de secours. Ils connaissent déjà peut-être beaucoup trop de choses. On s’approche de chez moi, les lumières sont éteintes. Mon téléphone indique 00:44, ma mère dort, heureusement, je ne m’en serai pas senti capable…

On entre lentement et on s’avance. Ma maison n’est pas très belle de l’extérieur mais l’intérieur est agréable et chaleureux. Elle est petite mais suffit pour Maman et moi, jusqu’à aujourd’hui du moins. Je vais dans la salle de bain.

— Prends de la bouffe et tout ce qui peut être utile, tu connais la maison, chuchotai-je à Lylian.

Je lave la plaie avec de l’eau, la désinfecte et place un pansement en appuyant fort dessus. Pour finir je mets un strap autour de ma cuisse.

Je me dirige vers ma chambre. Elle est petite avec un lit en hauteur et mon bureau est juste en dessous. Une étagère est sous ma fenêtre avec quelques livres, elle s’agrandit lentement d’années en années. Des posters s’entassent sur les murs, principalement de Parkour. Au-dessus de mon bureau sont accrochées les photos de mes premières sorties avec Lilou, je regarde ma chambre avec mélancolie.

Combien de temps on a avant qu’ils débarquent ? Quinze minutes ? Une heure ? Dix heures ? Beaucoup trop peu pour se poser la question. Lylian vient vers moi avec un sac rempli de bouffe. Je croise son regard, la peur se lit sur son visage. Dans le mien aussi sans doute.

Je prépare mes affaires, l’essentiel : un slip, teeshirt, short, jean, sweatshirt et fourre-le tout dans mon sac à dos militaire. Je prends aussi une photo de Lilou et moi, un couteau suisse, une lampe torche, un duvet, des chaussures de Parkour et une foule d’autres objets que je trouve. J’enlève mes chaussures de soirée et mets des Nikes Sb.

— Prends ce que tu veux dans ma chambre, il y a un duvet sur le lit, c’est à toi.

— Okay, t’as pas un autre sac à dos ?

Je lui passe mon sac à dos du lycée, et me dirige vers le garage. J’ouvre ma caisse à outils dont je me sers principalement pour réparer mon vélo et prend quelques outils comme des pinces coupantes et multiprises ainsi qu’un cutter. Lylian s’avance vers moi.

— C’est bon, faut pas qu’on s’attarde.

— Oui, juste une minute, je vais chercher un truc.

J’avais prévu une casquette pour son anniversaire, j’en avais pris deux pour qu’il choisisse s'elle qu'il préfère et je prendrai la seconde. Je les lui tends, il choisit la rouge bordeaux au style vintage et je prends la bleue avec une coupe sportive.

— Je voulais t’en offrir une pour ton annive, vaut mieux en avance que jamais.

— Merci, dit-il avec une pointe d’ironie.

Je vais dans le salon et écris un petit mot sur un bout de papier « Je t’aime Maman », Lylian écrit un mot semblable aussi pour ses parents. On sait ce qui nous attend.

On sort de la maison, veste sur les épaules et casquette sur la tête. Je ferme la porte et lance les clés de toute mes forces vers un arbuste, on fait de même pour nos téléphones. Un arbuste que j’avais planté avec ma mère quand j’avais dix ans. Je le regarde un petit moment en me remémorant, je souris et avance vers la forêt. On ne réalise pas les dernières vingt-quatre heures.

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