Chapitre 3

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Il était complexe de prélever et encore pire de conserver un échantillon du sang hyper acide des aliens. Divers alliages avaient été testés sans succès jusqu'à ce qu'un des scientifiques imagine un contenant magnétique où une petite bulle de 2 cm cubes de sang pouvait flotter indéfiniment au centre d'un champs de confinement. Après plusieurs tentatives et contenants perdus lorsque le sang entrait en contact avec l'enveloppe externe de l'emballage, l'opération s'avéra un succès! La sonde fut rapatriée illico jusqu'au satellite laboratoire et la moitié des scientifiques ajustèrent leur casque de réalité virtuelle pour être témoin des premières analyses. Un tirage au sort avec élu le Dr Huan pour procéder au premier test, soit la chromatographie. En brûlant une goutelette, les résidus gazeux pourraient être analysés. Évidemment, comme il était hors de question de risquer le laboratoire et donc de reproduire l'expérience plusieurs fois, la vaporisation/incinération aurait lieu dans un contenant éjectable garni d'une centaine de "goûteurs". Une seconde et demie après la vaporisation, ce qui était amplement suffisant pour les goûteurs, le contenant serait éjecté dans l'espace, garantissant l'étanchéité du laboratoire.

Il apparut malheureusement que le sang s'oxydait au bout de quelques secondes et perdait toute efficacité. Le temps que mettait la sonde après le prélévement se comptait en heures malgré des moteurs puissants. L'équipe en vint à discuter de l'ultime étape de leur expédition : la capture d'un spécimen vivant et sa vivisection. Un alien adulte était hors de question, autant par la difficulté que posait sa capture que sa conservation ou son transport jusqu'en orbite. Par contre, un oeuf...

Le principe du contenu magnétique faut transposé pour restreindre et transporter un cocon et son contenu. Bien mesuré, celui-ci ne pourrait s'ouvrir avant d'avoir rejoint sa destination et il avait été démontré que l'enveloppe résisterait au vide et au froid de l'espace. Un androïde bricola un contenant éjectable plus grand et s'assura que la poussée serait suffisant pour que l'alien ne puisse s'accrocher à un élément du laboratoire s'il parvenait à s'extraire malgré les mesures de contrainte. Pour plus de sécurité, deux lasers étaient parés et programmés pour suivre le signal d'identification de l'alien. Immédiatement après l'éjection, ils devaient faire feu. Pas question de laisser un échantillon se balader sans surveillance.

Une fois la sonde modifiée pour cueillir l'oeuf, les deux autres passèrent aussi à l'atelier pour être équipés d'armes. On prévoyait une réaction plus intense car les adultes défendaient jalousement les oeufs. Ils pouvaient sacrifier 100 d'entre eux pour un seul oeuf. Ils restaient trois sondes et pas assez de matériel pour en fabriquer d'autres avec ce dont ils avaient à leur disposition. Le poids faillit être un problème, car l'enveloppe s'avéra un peu plus dense que prévue. Heureusement, les moteurs avaient été ajusté pour un poids encore plus grand, à la suggestion d'un des scientifiques.

L'opération se déroula impeccablement et toutes les précautions furent prises pour surveiller en tout temps leur hôte alien une fois à bord du laboratoire. Ils démolirent plusieurs instruments et utilisèrent tous les outils imaginables pour transpercer la coquille de l'oeuf puis, une fois l'alien extrait de force, sa peau et sa chair. Trois androides furent démolis dont l'un lorsqu'un morceau de paroi fondu par l'acide se sépara brutalement et transforma sa tête en l'équivalent électronique d'une crêpe.

Au bout de quelques jours, l'alien mourut sans qu'on puisse expliquer pourquoi. Ils avaient essayé de l'alimenter, y compris avec une culture de cellules humaines et un bain de fluides nutritifs basé sur ce qui avait été prélevé dans l'oeuf. Il semblait toutefois qu'un fois "éclos", l'alien s'apparentait à un éphémère. Il n'avait pas besoin de se nourir ou de boire et ne vivait que pour pondre. Les examens sur plusieurs oeufs et l'étude de l'environnement prouvaient que certains coques encore refermées existaient depuis des dizaines d'années, voir des siècles. L'alien dans sa phase primaire pouvait résister à presque tout, mais son temps était limité une fois qu'il avait quitté le nid.

Finalement, même si certains avaient très envie de ramener un spécimen vivant, le bon sens prévalu, de même que l'affirmation solenelle du commandant que si "une de vos grosses têtes essait de faire passer en douce un de ces trucs, je vous ramène illico ici et je vous jette dans leur nid". La discussion ne dura pas très longtemps et il n'y eut pas de contestation.

Le spécimen fut déclaré mort après de multiples examens, découpé en morceaux pour plus de sécurité et sa carcasse placée dans l'azote liquide puis dans un conteneur spécial avant d'être rapatrié à bord par l'une des sondes, qui fut soigneusement examinée, intérieur comme extérieur. Après l'annonce du commandant, personne n'avait envie de risquer une visite dans le nid alien.

Vraiment personne.

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En 72 heures, Ripley ne parvint pas à obtenir plus de détails sur LV-426. Ses tentatives de communication se soldèrent par un très poli mais très ferme : "Cette opération est close et la colonie a été rasée. Veuillez vous présenter au Spritzer dans les temps requis."

"Et pour New... pour Rebecca Jorden?", demanda Ripley qui entendait l'enfant chantonner tout doucement dans la pièce voisine. Elle était probablement cachée sous le lit, dans le coin le plus éloigné de la porte. Elle réagissait ainsi quand elle se sentait démunie et elle était très sensible au stress dans la voix de Ripley.

"La garde temporaire vous a été accordée. Vous pouvez l'amener à la nurserie des employés de la compagnie avant votre départ. Selon votre dossier, vous connaissez déjà la procédure puisque vous aviez une fille lors de votre dernier voyage," fut la réponse froide de l'employé. Il s'agissait peut-être même d'un programme informatique et d'une voix artificielle, pour toute la sympathie qu'elle émettait.

Le coeur de Ripley se serra. Sa fille Amy appartenait à une époque lointaine, avant les aliens, avant les cauchemars, avant Newt. Sa fille qui avait veillit et était morte pendant que sa mère flottait dans l'espace durant cinquante ans. Ripley se demandait comment trouver le courage de conduire la petite Newt à la nurserie de la compagnie, de partir en lui promettant - comme à l'autre - de revenir aussi vite que possible.

Et il y avait Newt elle-même! L'enfant était née sur une colonie, avait perdu ses parents, son frère et tous ceux qu'elle connaissait, dévorés (et pire encore) par des monstres. Elle était encore traumatisée et avait besoin de se sentir protégée, de rester en contact avec la même personne et de réapprendre à vivre normalement. Par exemple, de dormir dans un lit et d'aller à l'école sans examiner toutes les sorties possibles en cas de danger.

"Je ne peux pas laisser Rebecca durant 15 mois. Si la Compagnie ne comprends pas notre situation, je vais démissionner."

"Libre à vous. Par contre, je dois vous prévenir que la garde vous a été accordée de façon temporaire parce que vous aviez une situation fiancière suffisante pour lui assurer une éducation et une vie saine. La Compagnie parlera en votre faveur parce que vous êtes à son emploi et il est vraisemblable que vous obteniez la garde permanente si tel est votre souhait."

"Mais si je démissionne..."

"Une célibataire sans emploi fixe et sans logement adéquat et sans moyens financiers suffisants n'obtiendra jamais gain de cause. Désolée." ajouta la voix après un temps.

Ripley pouvait se battre, mais les procédures pouvaient traîner si la Compagnie le décidait et c'est Newt qui en paierait le prix, trimballée de famille d'accueil en orphelinat. Et qui comprendrait la détresse d'une enfant qui avait survécu aux monstres d'Achéron?

"Je comprends." fit Ripley en coupant la communication. "Newt, on part, ma chérie."

"On va où?"

"Il va falloir se cacher."

"Il y a encore des monstres?"

"Oui, pas les mêmes, mais oui, ce sont des monstres. On ne peut pas rester ici."

À l'astroport, elle fit ses adieux à la Terre, l'oeil sec et farouche, et trouva à s'embarquer, elle et Newt, à bord d'un cargo rouillé dont les moteurs dataient d'au moins 90 ans.

"Vous savez où se trouve Ganima 5?"

"Oui. Ils ont encore ce problème de vermine?"

"La cale est pleine de vermifuge pour eux. Vous savez programmer une trajectoire?"

"Si le clavier ne tombe pas trop en morceaux. J'ai besoin d'arracher les couilles d'un de vos gars pour qu'on laisse ma gamine tranquille?"

"Nope. On est tous gentils sur l'Aurélius. La paie n'est pas terrible par contre."

"M'en fiche, sauf si je dois chasser les rats de votre rafiot pour ma gamelle."

"Vous l'aimez rôti ou bouilli votre rat?"

Ils échangèrent un sourire et Ripley, Newt sur les talons, grimpa la rampe. Moins de vingt minutes plus tard, l'Aurélius décollait.

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