Pour ce sourire

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Mais que pouvais-je faire d'autre que tordre du cul en descendant l'escalier de cette foutue boite?

J'avais emprunté une robe à Chloé, enfin un bout de tissu qui crachait des éclairs mordorés. Un truc minimaliste à peine assez grand pour me planquer les fesses, noué autour du cou et échancré jusqu'au bas du dos. Il ne devait y avoir au plus qu'un mètre carré de tissu, fluide et brillant comme une peau de serpent avais-je pensé en l'enfilant mais j'avais vite zappé cette idée car ça m'écœurait un peu.

Impossible de porter un soutif la dessous et j'avais hésité à mettre une culotte du coup. Et puis j'avais retrouvé un bout de dentelle blanche veiné de fil d'or, un tanga vivant et chaud comme un chat. Quitte à montrer mon cul autant être en accord avec l'esprit putasse de la robe.

La boite était une sorte de bunker qui se voulait chic et tendance: les murs de lumière changeaient en permanence et imprimaient des ambiances surréalistes ou psychédéliques éclairant des fauteuils et des canapés couleur taupe qui semblaient vouloir aspirer leurs occupants.

Le bar, tel une piste d'atterrissage attirait les hôtesses de l'air esseulées et les pilotes sans avion en quête de jolis seins où s'amarrer.

Tout ça baignait dans une musique hésitant entre techno et dance, le DJ, un mec chauve au torse piercé ayant depuis longtemps renoncé à la vraie musique et ne jugeant de la qualité d'un morceau que sur le beat répercuté par l'aiguille de sa console.

Descendre l'escalier en tordant du cul donc.

Ignorer la main de Steph qui est déjà sur mes reins. Chalouper jusqu'à un canapé-absorbeur, m'y installer sans me soucier de montrer mon tanga qui fait des étincelles et commander un coktail au nom improbable, " Fraîcheur des îles" ou une connerie du genre.

Deux types assis face à moi ont les yeux plongés entre mes cuisses. Les filles avec eux sont des petites nanas nerveuses et un brin hystéro qui se trémoussent comme si elles étaient assises sur une fourmilière.

Je sirote mon mélange des îles paradisiaques en remarquant la chaleur de la main de Steph sur ma cuisse. L'autre en face semble à l'étroit dans son pantalon et se dandine en ignorant sa copine qui a quasiment les seins à l'air à force de gesticuler. Va danser chérie puisque ton corps ne semble plus t'appartenir. Mais non, elle reste sur son fauteuil couleur de funérailles, en transe, telle une épileptique en pleine crise.

Sans prévenir, je pose mon verre dont le pied ressemble à un talon aiguille transparent et me lève, suivie de Steph. Les autres restent immobiles comme des jouets mécaniques soudainement privés de pile.

Steph est face à moi, on s'effleure à peine. Je ressens encore l'empreinte de sa main sur ma cuisse. On danse et il me sourit.

Et tout devient évident. La robe de pute, les cheveux relevés, les talons hauts, le tanga de sex-shop.

Pour ce sourire...

Que pouvais-je faire d'autre que tordre du cul?

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