Chapitre 38 Rencontre du drôle de type

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« Michael Jackson ?

-Humain.

-Lord Byron ?

-Vampire.

-Marilyn Manson ?

-Humain.

-Vincent Van Gogh

-Là j’ai un doute. Je dirais humain ! »

Pendant que nos hôtes nous guidaient à travers les appartements supérieurs, Lestat et Charlotte s’étaient pris à jouer aux devinettes. Il ne se lassait plus de lui proposer des noms célèbres afin qu’elle lui révèle s’il s’agissait ou non de vampires. Nous fûmes surpris de voir à quel point ces deux-là étaient faits pour s’entendre. Charlotte et lui partageaient les mêmes goûts pour le raffinement, la littérature romantique et l’Histoire. S’ils s’étaient connus plus tôt, ils n’auraient sûrement pas eu besoin d’avoir à se disputer Ella.

« Qu’est-ce que c’était ici, au juste ? Demandai-je.

-Un temple où l’on sacrifiait des bébés. »

Nous prîmes tous un air dégouté. Lestat se mit alors à rire chaudement.

« Allons mes amis, je plaisante ! En fait, à l’origine, il s’agissait d’un atelier de textile. À l’emplacement de la piste de danse, il y avait des dizaines et des dizaines de machines à coudre qui fonctionnaient toutes ensemble jours et nuits. La maison de couture s’est agrandie et a changé d’endroit. Les lieux sont ensuite passés entre plusieurs mains. Après avoir quitté l’armée, je suis arrivé à Paris et j’ai repris les lieux. Avec les potes on a tout rénové. Même les étages supérieurs. Je vais vous installer dans les anciens bureaux des stylistes. Est-ce qu’il vous faut des cercueils ? Ou quelque chose comme ça ?

-Non ne vous inquiétez pas. Ce sera très bien. Répondis-je. »

Les appartements supérieurs étaient luxueux et confortables. Lestat et ses amis avaient vraiment fait du bon travail pour rendre les lieux habitables. Pendant qu’il nous aidait à prendre nos marques, nous le mîmes au courant de ce que nous recherchions. Nous lui racontâmes tout depuis le début, ma rencontre avec Isa, le vampire Bibliothécaire qui nous menaçait, les forces de l’ordre qui nous poursuivaient, ainsi que les agents qui me surveillaient. Son attention se renforça lorsque j’eus évoqué avec lui le cas des mystérieux espions qui m’avaient photographiés.

« Vous pensez que c’était des militaires ? Me demanda-t-il.

-C’est ce qu’Ella assure. Elle a bien tenté de les suivre, mais elle a été semée… Et pourtant, vous devez savoir ce dont elle est capable derrière un volant.

-Oh oui ! Me répondit-il.

Il se gratta le menton pendant quelques minutes.

-Est-ce que tout va bien ? Lui demandai-je.

-Oui, oui, c’est juste que… Enfin je ne sais pas s’il peut y avoir un rapport, mais…

-Je vous écoute !

-C’est que,… Je ne suis pas vraiment autorisé à en parler, mais,… Vous vous souvenez que j’ai parlé tout à l’heure du fait d’avoir été dans l’armée ?

-Tout à fait !

-Et bien en fait, c’était il y a à peu près cinq ans, j’étais caporal dans le 2e REP.

-Vous avez été Légionnaire ? Dis-je étonné.

-Oui, Monsieur ! Répondit-il fièrement. Pour être honnête avec vous, j’avais fait pas mal de conneries dans ma jeunesse. Les parents d’Ella ne voulaient plus que je la fréquente, mes parents à moi ne savaient plus comment s’y prendre avec moi. C’était soit l’armée, soit entrer dans les ordres. J’ai préféré l’armée. Je m’étais dit à l’époque que c’était le mieux pour faire oublier mon passé. Pour en revenir au sujet, j’avais été envoyé en Guyane avec ma brigade pour assister la Gendarmerie. Ils avaient débusqué un mec bizarre qui s’attaquait au bétail. Il saignait les animaux, buvait leur sang et dévorait leur carcasse. Nous, avec les copains, on se disait qu’il s’agissait d’un malade mental.

-Vous pensez qu’il s’agissait d’un des nôtres ?

-Pour ma part, je n’ai que très peu de connaissances des vampires vivants en Amérique. Répondit Charlotte.

-Pourtant, cette histoire me dit quelque chose… J’ai déjà dû l’entendre quelque part.

-Oui, elle circule sur Internet ! Reprit Lestat. Certaines infos ont dû fuité. C’est comme Roswell ou l’extraterrestre capturé au Brésil, c’est connu, mais personne ne sait vraiment. Le truc c’est que moi, j’y étais et j’ai tout vu. Ce que la légende urbaine ne dit pas, c’est que le gars en question, on l’a choppé !

-Comment, vous êtes sérieux ?

-Tu ne m’avais jamais parlé de ça ! S’indigna Ella.

-Hé inspecteur, je te rappelle que t’avais coupé les ponts ! De toute façon, j’avais signé un accord de confidentialité. Même encore aujourd’hui je risque des poursuites. Mais vu que maintenant, j’abrite des vampires recherchés par la Police…

-Qu’avez-vous fait de l’homme en question ?

-Je n’en sais rien. En fait, l’opération ne s’était pas déroulée comme prévue. Quand on s’est approché du gars, l’un de mes équipiers lui a tiré dessus sans sommation. Évidemment, notre adjudant-chef lui a confisqué son arme, mais le mec s’est relevé !

-Quoi !

-Comme je vous le dis ! Il s’était pris cinq bastos dans le buffet, mais il s’est relevé comme si de rien n’était. Il était vivant ! Il a essayé de s’enfuir, mais on a réussi à le maîtriser. À douze, sur lui hein, parce que c’était un balèze ! Il m’a envoyé valsé contre un arbre d’un seul geste.

-Et encore, vous avez eu de la chance, jeune homme, s’il s’était nourri de sang humain, il vous aurait taillé en pièces. Affirma Charlotte.

-Peut-être… À l’époque j’avais cru à des expériences de l’armée, ou quelque chose du genre. Il nous a été interdit de le voir ou de lui parler. On lui a mit une cagoule et on l’a ramené au camp en pleine nuit. C’était quelque chose, il a fallu contenir la population et empêcher les curieux de regarder ce qu’on avait trouvé.

-Qu’est-ce qu’il est devenu ?

-Malheureusement, je n’en sais rien. Au camp, une équipe médicale l’a pris en charge et des huiles hautement gradées sont venues spécialement depuis la métropole pour l’emmener en fourgon spécial. Moi et toute l’équipe, les douze, comme on nous appelait, nous avons tous comparu devant une commission. Ils nous ont dit gentiment qu’on devait oublier ce qu’on avait vu. Ils m’ont même montré une photo de toi, Ella, avec la porte de ta maison. Ils m’ont clairement fait comprendre que si je l’ouvrais, les conséquences seraient désastreuses.

Charlotte fut profondément troublée par cette histoire.

-Ils savent… Dit-elle.

-Attendez ! M’écriai-je. N’allons pas trop vite. Ils ont peut-être réussi à capturer un vampire vivant, mais rien ne prouve qu’ils nous recherchent nous en particulier.

-Si,… Ils savent et ils vont tout faire pour nous trouver. Tout va recommencer, comme en 1890, ainsi qu’en 1940. Nous allons devoir changer de pays et apprendre une autre langue.

-Non, répondit Lestat. Vous êtes ici depuis plus de quatre cent ans, Madame, nul en ce pays ne saurait être plus Française que vous. Vous n’êtes plus seule à présent. Nous vous aiderons. Toute la communauté gothique de France est avec vous.

-Je vous remercie Lestat, répondit Charlotte, émue.

-Oh, vous pouvez m’appeler Maximilien, maintenant. »

En l’espace d’une nuit, Lestat, ou plutôt Maximilien, avait profondément changé. Il ne gardait plus aucune rancœur envers Charlotte et s’était vite lié d’une amitié sincère avec la vieille reine byzantine. Sa vision avait également changé. Ce que nous représentions pour l’avenir de l’humanité, ce que nous étions, il en réalisait l’importance et s’engageait enfin avec Ella sur la voie des gardiens du secret.

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