Chapitre 27 Le don de l'obscur

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Mes dents me faisaient mal, si mal. Mes canines, qu’était-il arrivé à mes canines ? Je les avais perdues. Quelque chose d’autre était en train de prendre leur place. J’allais avoir de vrais crocs, profondément encrés dans mes gencives, mais bon sang, qu’est-ce que cela faisait mal !

« Il lui faut du sang pour le soulager. Affirma Charlotte.

-J’ai fouillé tout l’hôpital, impossible d’en trouver. Répondit Ella.

-Et en chirurgie ?

-Il est sous clé, gardé sous haute surveillance. Laissez faire je vais donner le mien.

-Ella, vous m’en avez déjà donné ce matin, vous ne tiendrez pas le coup.

-Ne me sous-estimez pas, Madame, je suis solide, occupez-vous de faire le guet. »

Ella déboutonna son chemisier et se pencha vers moi. Alors que ses cheveux me chatouillaient, je pouvais sentir son parfum de manière beaucoup plus subtile que lors de notre rencontre. Je pouvais en capter toutes les nuances, chaque essence et même leurs proportions. Cependant, une telle proximité de la part de cette femme m’empêchait de me concentrer.

« Madame, je crois qu’il ne sait pas mordre !

-C’est normal, voyons ! Isa, n’a pas eu le temps de l’initier. Je vais voir à côté si je trouve des seringues, on prélèvera au bras. »

Après un court laps de temps, Charlotte revint avec du matériel de transfusion. Elles faisaient leur possible pour murmurer pendant qu’elles procédaient au prélèvement. Elles chuchotaient mais j’entendais tout, comme si cela avait lieu directement à côté de moi.

« Madame, aviez-vous déjà vu un vampire avec des yeux comme les siens ?

-Oui, c’était il y a longtemps,… Cette couleur s’est perdue. Il a les mêmes yeux que son grand-père.

-Vous ne voulez tout de même pas dire que…

-Si Ella, il appartient désormais à la lignée des seigneurs. Nous allons devoir le protéger, les autres vont chercher soit à s’en emparer, soit à le faire taire. Isa devait être au courant, c’est sûrement pour cela qu’elle voulait tant s’approprier le cœur de Lorenzo.

Ella eut alors comme un trouble de l’équilibre, Charlotte stoppa immédiatement la séance de prélèvement.

-Je crois que je vais m’allonger, si vous le permettez. Je vous laisse vous occuper de « notre petit protégé »

-Reposez-vous, Ella, je m’occupe du reste. »

Charlotte, me présenta la poche à demi remplie de sang et m’aida à l’ingérer. Je commençais à savourer mon premier repas d’immortel et mes aïeux, qu’est-ce que cela faisait du bien. La souffrance de ma transformation s’estompait et je sentais une certaine vigueur m’envahir. Mes jambes purent enfin bouger à nouveau, bien que péniblement. À peu de choses près c’était tel qu’Isa me l’avait décrit et plus encore. Je ne percevais plus le goût du sang de la même façon. En fait, cela pouvait avoir n’importe quel goût. Fraise, tomate, cerise, framboise, vin ou même poisson ! Je n’avais qu’à y penser très fort et le goût changeait automatiquement. En revanche, ce qu’Isa oublia de me dire est que pendant que je m’abreuvais, je pouvais ressentir en mon fort intérieur certains sentiments qu’Ella gardait d’ordinaire, pour elle. Alors, les vampires pouvaient lire les pensées à travers le sang de leurs victimes ? Je n’en revenais pas. Autre chose, j’étais devenu synesthésique, les odeurs avaient un goût et les sons, une forme dans l’espace. Un bruit formait dans l’air une ondulation que je pouvais palper, comme les ronds dans l’eau. Grand-mère Éva, je l’ai fait ! J’ai eu accès au monde invisible dont tu m’avais tant parlé. Tu as renoncé à ta transformation afin de pouvoir élever ma mère, mais tu as pu voir toutes les merveilles que j’ai sous les yeux aujourd’hui.

Alors que j’avais commencé à me délecter, la porte de notre chambre s’ouvrit. Le médecin qui s’occupait de nous était venu aux nouvelles, en apprenant mon réveil.

« Mais, Enfin ! Que faites-vous avec cette poche ! Et vous, le chauffeur, pourquoi êtes-vous toujours ici ? Dit-il.

-Ella ne se sent pas bien, elle voulait à tout prix donner son sang.

-Il y a des infirmiers pour cela, jeune demoiselle !

Le médecin confisqua la poche et la donna à l’un de ses subordonnés.

-Je suis flattée que vous me trouviez jeune, mais mon âge réel pourrait vous surprendre…

-Ce n’est pas le problème, Madame Forestier. Nous devons répondre à des procédures d’hygiène très strictes, voyez-vous. Bon, passons, je vois que vous allez mieux. On m’avait fait un rapport de coups multiples et d’un traumatisme crânien, il doit y avoir erreur.

-Une recette de grand-mère qui me permet de cicatriser très vite.

-Et ce monsieur, il parvient à bouger ? Je l’ai opéré moi-même, sa colonne était brisée, c’est incompréhensible !

-Les voies du seigneur sont impénétrables ! C’est un miracle ! Bon, on peut sortir ?

-Hors de question, je dois tirer cela au clair. Je veux bien croire aux miracles, mais il y a des limites. Je dois savoir ce qui a pu provoquer cette guérison fulgurante.

Un infirmier vint interrompre notre visite pour s’adresser à son tour au médecin.

-Monsieur, on a un problème à la morgue !

-Comment ? Répondit le médecin.

-Le légiste, ne veut plus y retourner, il est persuadé d’avoir vu un corps bouger.

-Il ne manquait plus que cela ! Bon, le chauffeur peut rester ici, je repasserai plus tard. Pour vous, Madame Forestier, je ferai faire de nouvelles radios. En attendant tenez vous tranquille. »

Je doutais pendant quelques secondes. Se pouvait-il que… Non c’était impossible, Isa, je t’ai vu mourir, j’en suis sûr, cela ne pouvait pas être toi, c’était certain. Mais alors, qui était à la morgue ?

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