Chapitre 28 La résurrection

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Il faisait nuit, mais l’hôpital ne se reposait jamais vraiment. Je ne savais pas pourquoi, mais je n’arrêtais pas de tournoyer ma langue dans ma bouche. Je voulais à chaque fois m’assurer que les nouvelles canines qui étaient en train de pousser dans ma bouche fussent bien les miennes. Elles étaient tranchantes, en pointe et aussi fines que des serres d’aigle. Je pense que je devais être trop nerveux depuis que je savais qu’un autre vampire se trouvait à la morgue.

Il suffisait qu’elles gagnent encore quelques centimètres et j’étais prêt à prendre ma revanche. Si à la morgue se trouvait le corps du bibliothécaire, j’allais lui faire payer cher cette journée. Après avoir pris trois balles, il devait être mal en point.

Charlotte aurait dû regagner sa chambre, mais elle tenait à assister à chaque phase du processus de transformation. Ella, quant à elle s’était remise.

« On ne peut plus attendre, dit-elle. Il faut partir.

-Non Ella, nous devons rester !

-Madame, demain, nous passerons des radiographies, comment croyez vous qu’ils réagiront quand ils verront vos crocs ? Avez-vous une idée du mal que j’ai eu à faire disparaitre nos dossiers ?

-Je sais, mais notre ennemi se trouve peut-être ici, nous avons une chance unique de savoir qui il est et peut-être même de l’éliminer. D’ailleurs maintenant que j’y pense, pourquoi ne pas l’avoir décapité après lui avoir tiré dessus ?

-Figurez-vous, Madame, que je ne me promène pas à longueur de journée avec une machette.

Désireux de mettre fin à ce conflit stérile le plus rapidement possible, je pris la décision de les séparer.

-Allons mesdames, arrêtez ça ! Dis-je. Je vais y aller. Ella, vous passerez me prendre au parking,

-Alexandre, tu peux bouger ? Demanda Charlotte.

-Difficilement, mais je devrais pouvoir y arriver.

-Alors, il est hors de question que je te laisse y aller seul. Je viens avec toi, appuie-toi sur moi. Ella, allez chercher la voiture, on termine ce qu’on a commencé et on vous rejoint.

Nous n’étions plus que tous les deux, errant à travers les couloirs de l’hôpital. Je ne savais pas vraiment où je me dirigeais, mais grâce à mes nouveaux pouvoirs de vampire, je voyais le personnel de l’hôpital arriver à l’avance. Je les entendais parler entre eux à travers les murs et j’imagine que Charlotte aussi.

« Il faut aller plus bas. Dit-elle.

-Comment vous le savez, vous l’avez vu ?

-Je ne l’ai pas vu, je l’ai senti.

-Pourquoi vous le sentez et pas moi ?

-Mon garçon, c’est parce que j’ai huit cent ans de plus que toi. Cela fait très longtemps que j’ai appris à reconnaitre l’odeur de la mort.

-Alors, vous êtes vraiment la plus ancienne reine de France ?

-Bien sûr. Enfin, il y en a eu d’autres avant moi, mais elles n’ont pas survécues, malheureusement.

-Comment ça ?

-En des temps anciens, il pouvait être très risqué pour nous de dévoiler nos compétences. »

En fait, je me disais que cela devait toujours être le cas. À la vue d’Isa, la Police lui avait tiré dessus. J’étais à présent une cible potentielle, à la fois pour les autres vampires, mais également pour mes anciens congénères.

Nous arrivâmes devant la morgue, mais malheureusement, la porte était scellée.

« Charlotte, vous pouvez faire fondre la serrure ?

-Du tout ! Elle est en métal, je ne peux pas atteindre des températures aussi hautes, il faut rester réaliste, l’air ne chauffe pas à ce point. De toute façon, c’est un espace réfrigéré, ça ne marcherait pas. C’est toi, jeune homme, qui as le pouvoir de faire bouger les objets, alors vas-y !

-Vous n’êtes pas sérieuse ?

Elle me jeta un regard autoritaire qui devint encore plus intimidant par l’intermédiaire de ses beaux yeux argentés.

-Concentre-toi, imagine chaque détail de cette serrure. Rappelle-toi son mécanisme, des pistons sont entraînés dans un ordre précis et la porte s’ouvre. »

Mon esprit faisait corps avec cette maudite serrure, mais je ne parvenais pas à trouver le bon ordre, celui qui correspondrait aux dents de la clé qui lui était associée.

« Pense à ce que tu as ressenti en voyant Isa se faire attaquer ! Remarqua Charlotte »

En songeant à cette journée funeste, mon sang ne fit qu’un tour et mon esprit frappa violemment la serrure, enfonçant la porte. Nous pûmes alors entrer.

« Pas mal du tout ! S’exclama Charlotte. »

C’était vrai, il faisait rudement froid dans cette pièce. Nous même étions si peu vêtus. Il n’y avait qu’un seul corps, couvert d’un linceul bleu. Prudemment, je soulevai le drap.

« Isa !

-Elle serait vivante ? C’est impossible ! Répondit Charlotte.

-Et si c’était vrai ?

Charlotte se tourna vers moi et me regarda droit dans les yeux.

-Mon garçon, je sais combien tu as dû être attristé par ce qui est arrivé, mais il y a très peu de chance pour qu’Isa ait survécu à un choc pareil. Toute son énergie vitale a été prélevée, sachant qu’elle était à jeun, cela implique qu’elle était dans l’incapacité de se régénérer…

Mais pendant qu’elle m’expliquait en détail les circonstances de la mort d’Isa, je vis derrière elle le linceul se soulever et le corps de la jeune reine aux yeux bleus se réveiller.

-Cha… Charlotte… De.. Derrière vous !

-Et bien quoi ?

Elle se retourna et sursauta en voyant Isa tenter de se mettre debout. Elle était de retour, mais quelque chose semblait changé en elle. Son regard était différent, comme celui d’un animal sauvage.

-Isa, Tu es en vie !

-Non attend ! Reste derrière moi !

Charlotte se mit devant moi dans le but de me protéger en faisant barrage avec son corps.

-Qu’y a-t-il ? Demandai-je.

-Ce n’est pas Isa… Ce regard, je ne le connais que trop bien.

-Alors, ce serait…

-Isabelle, la damnée. Celle que nous avions enfermée il y a longtemps, à cause de son pouvoir.

À la vue de Charlotte, Isabelle se mit à pousser un grognement menaçant.

-Isabelle, vous me reconnaissez ? Vous m’avez vu en rêve.

Mais pendant qu’elle me dévisageait, j’oubliais que j’avais le visage de l’homme qu’elle avait tué. Cet homme qui l’avait bannie.

-Isabelle, reste calme, ce n’est pas Charles ! C’est son petit fils ! Tu te souviens ? Le fils d’Élisa !

Pour seule réponse, elle fit briller ses yeux turquoise et utilisa sur nous son redoutable pouvoir. Charlotte eut juste le temps de se retourner pour me plaquer au sol pendant qu’une force mystérieuse s’affairait à découper tout ce qui se trouvait derrière nous dans un chaos innommable.

Charlotte m’était lourdement retombée dessus, mais nous étions vivants et indemnes. Après qu’elle m’eut aidé à me relever, nous constatâmes qu’Isabelle était partie. La morgue était devenue un champ de ruines. Sur plus de cinq mètres, la porte, les armoires, le mur et les poutres présentaient une gigantesque entaille, les séparant de part en part.

-Mais qu’est-ce que c’était que ça !

-Jeune homme, tu viens d’assister à une démonstration du pouvoir d’Isabelle.

-Une démonstration ! Mais c’était l’Apocalypse ! En quoi consiste ce pouvoir ?

-Si la gentille Isa était une voltigeuse, Isabelle, son alter ego, reste une découpeuse, elle peut trancher n’importe quoi d’un seul regard… Y compris la tête d’un seigneur.

-C’est dingue !

-Et encore, elle ne s’est toujours pas nourrie, tu ne l’as pas vu à son maximum ! Il faut la retrouver avant qu’elle ne tue quelqu’un. Viens nous n’avons plus rien à faire ici. »

Alors que les alarmes retentissaient, nous quittâmes l’hôpital en toute hâte. Ella était bien au rendez-vous. Nous montâmes dans sa voiture et nous nous mimes en route.

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