Chapitre 10

11 minutes de lecture

            Comme prévu, la planète où Bardy et sa troupe arrivèrent était désertique. À travers le pare-brise du vaisseau, Rune ne vit qu’une grande étendue de sable à perte de vue. La naine rouge brulait tout ce qui pouvait s’y trouver, avec ses températures avoisinant la quarantaine de degrés.

            Bardy resta en orbite quelques instants pour scanner les alentours. À la recherche d’une quelconque embuscade, il se méfiait de ce traquenard. Rune utilisait toute la technologie qu’ils disposaient pour faire son travail, mais rien ne s’afficha. Aucun signe de vaisseau et d’énergie dans les parages.

            Bardy atterrit non loin des coordonnées que lui avait données le chat. Il se méfiait toujours de ce qu’il pouvait arriver. Rune recommença son job et dénicha des formes de vie féline. Huit formes se dessinèrent sur son radar. Lorsqu’elle les afficha sur l’écran de Bardy, celui-ci grogna.

            – Bon, préparez-vous. On y va, mais soyez sur vos gardes, ordonna-t-il au reste de son équipe.

            Rune et ses compagnons filèrent jusqu’aux vestiaires pour prendre leurs armes, puis se rendirent dans le sas. Bardy arriva, toujours ses lunettes de soleil sur le nez, avec un canon scié dans les bras.

            – Vous êtes prêt ?

            Tout le monde acquiesça. Zaz joua avec sa lame, puis la rangea dans le fourreau à sa ceinture. Chloé avait déjà revu ses drones et avait la télécommande dans la poche arrière de son mini short. Yuki portait un long manteau en cuir rouge avec deux énormes pistolets électromagnétiques. Rune avait son arme et toutes ses grenades dans un ceinturon, prête à en découdre.

            Quand le sas s’ouvrit sur l’atmosphère de la planète, la chaleur frappa le groupe. Rune sentit le vent chaud lui fouetter le visage. Elle mit la main devant ses yeux, alors qu’ils descendirent la passerelle. Le souffle emportait de la terre et du sable, gênant la vision du groupe.

            – Quelle planète de merde ! se plaignit Rune. Qu’est-ce qu’un chat fou ici ?

            – Sa fourrure doit cramer, non ? s’étonna Chloé.

            – Arrêtez de dire des conneries et surveillez les alentours, ordonna Bardy.

            Rune opina du chef et balaya le regard. Ils se dirigèrent vers le seul monticule de rocher à des kilomètres à la ronde. À moins qu’une bande de tueurs se cachait sous le sol, personne ne pouvait les surprendre, sachant que Rody gardait un œil sur les scanners.

            Lorsqu’ils arrivèrent près des rochers, ils se séparèrent pour couvrir plus de terrain. Rune accompagna son chef près d’une caverne qui s’enfonçait dans les entrailles de la planète. La sueur perlait le long de son corps. Ses vêtements lui collaient à la peau. Elle en avait déjà marre de cet astre beaucoup trop chaud.

            Elle posa une main sur sa hanche, alors qu’un chat sortit de l’ombre. Marchant comme un être humain, il possédait une fourrure en écaille de tortue. Elle brillait sous les rayons de la naine rouge. Vêtu d’un pantalon et d’une veste en cuir, il s’approcha d’eux en les menaçant d’un pistolet électromagnétique.

            Ses yeux jaunes aux pupilles félines se posèrent sur Rune et Bardy. Il s’arrêta en respectant une distance de sécurité.

            – Vous êtes les pirates d’Avracham ? siffla-t-il.

            – Yep ! Confirma Bardy. C’est vous qui nous avez appelés ?

            Le chat remua la truffe avant de baisser son arme.

            – Ah bah enfin, s’exclama-t-il. Putain, on vous attend depuis un moment déjà !

            Rune et Bardy, surpris, se fixèrent d’incompréhension. Rune le trouvait gonflé de parler de cette manière alors qu’ils venaient à sa rencontre.

            – Oui, ben on a fait tout notre possible pour répondre à votre appel, souligna Bardy en gardant son calme.

            Le chat ricana.

            – C’est ça, ouais. Fous-toi de ma gueule. Bon, j’ai ma femme et mes gosses à sauver. Cachez-nous sur votre planète de dégénérés Humains et je vous livre des informations capitales.

            Les autres membres de l’équipage vinrent à la rencontre de cet étrange félin. Chloé le fixa avec mépris, tandis que Zaz et Yuka le contournaient pour aller fouiller la caverne. Il se mit en travers de leur route, arme en main.

            – Je vous interdis de vous approcher d’eux, bande de crétin fini !

            – Hé ho, on va se calmer un peu ! s’énerva Yuka. On vient vous aider !

            – Ouais bah emmenez-nous sur votre planète !

            – Je…

            – Sylver !

            Une voix plus aiguë survint de la caverne. Tout le monde observa le chat blanc tacheté d’or en sortir avec ses cinq enfants.

            – Tu devrais être un peu plus poli quand même ! Ils viennent nous aider !

            Sylver, le chat qui les avait appelés, se renfrogna. Il grogna avant de hocher discrètement la tête.

            – Et tes enfants t’on entendu dire de gros mots ! Excuse-toi tout de suite.

            Le félin roula des yeux avant de subvenir à la requête de sa femme.

            – Qu’est-ce qu’on fait ? demanda Rune.

            Bardy pesa le pour et le contre. Sachant que ce n’était pas à lui de prendre cette décision, il prit congé quelques minutes pour appeler Ornella via l’émetteur du vaisseau. Rune croisa les bras, examinant Sylver du coin de l’œil. Il retourna près de sa famille pour leur expliquer que tout allait bien. Il était bien plus poli avec ses enfants, mais Rune ne se laissa pas attendrir. Elle se demandait toujours pourquoi un membre du Saint Ordre Félin avait déserté sa patrie.

            Depuis qu’ils avaient fondé leur clan, les chats gouvernaient en maître une partie de la galaxie. Petit à petit, ils grattaient du territoire sur les Humains. À chacune des attaques, ils n’hésitaient pas à réduire les humains en esclavage, les attachant avec des laisses. Ils se vengeaient du traitement que les Humains leur avaient fait subir pendant des décennies.

            Alors que faisait-il là ?

            Bardy lui mit une main à l’épaule.

            – Bon, Ornella est d’accord, annonça-t-il d’une forte voix.

            Sylver revint sur ses pas d’un air hautain.

            – Bah c’est pas trop tôt ! Elle est lente à la détente votre chef.

            Bardy grimaça. Après tout, c’était sa mère. Il s’approcha du chat et le domina de toute sa hauteur.

            – Je t’interdis de parler de cette manière de notre cheffe ! Nous allons vous héberger en échange de vos informations. Si elles valent le coup. Sinon, vous serez ramené ici de force. Est-ce clair le matou ?

            Sylver croisa les bras et l’affronta du regard.

            – Amène-moi donc là-bas, et vous aurez vos infos !

            Bardy grogna, puis fit signe de la tête de le suivre.

            Toute l’équipe retourna dans le vaisseau et décolla immédiatement. Rune resta dans le cockpit avec Bardy. Elle mit une chaine d’information sur un des ordinateurs et écouta ce qui se passait en ce moment. La journaliste parlait de quelques batailles contre le Saint Ordre Félin et des nombreuses défaites que subissait la république de Karos. Ensuite, cela parlait de la découverte de planètes garnies de ressources.

            Rien n’expliquait la raison de la désertion d’un membre du Saint Ordre Félin. Rune soupira en éteignant l’émission.

            – Qu’est ce qui a ? demanda son chef.

            – J’essaye de savoir pourquoi Sylver trahit sa patrie. Mais rien…

            – Prends ton mal en patience, on va vitre rentrer et en savoir davantage. Ornella est prête à tout. Les défenses d’Avracham nous protègeront d’une attaque, et s’il nous double, on le balance dans l’espace.

            – Beau programme. Mais cela reste dangereux d’héberger un membre de ce culte complètement dingue…

            – Je sais, mais nous n’avons pas d’autre choix. Le fait qu’il soit là prouve que quelque chose de tourne pas rond. C’est du jamais vu, non ?

            Rune leva les yeux vers la grande baie vitrée qui donnait sur l’espace. Il était vrai qu’elle n’avait jamais entendu parler d’un traitre dans le Saint Ordre Félin. La jeune femme se leva pour aller patrouiller dans le vaisseau. Elle croisa le reste de l’équipage dans la cantine, en train de discuter sur ce qui se passe. Chloé et Yuki cherchaient une explication, mais Zaz tentait quelques blagues pour détendre l’atmosphère.

            Personne n’avait vu Sylver sortir de sa chambre. Il préférait rester enfermer avec sa femme et ses enfants, sans se mélanger aux pirates. Et aucun de ses amis n’avait envie d’aller les déranger pour aller lui tirer les verres du nez.

            Rune se contenta de faire le voyage dans le cockpit. Elle discuta un peu avec Bardy. Elle voulait savoir s’il comptait retourner en mission après avoir ramené Sylver. Il ne préféra pas s’avancer sur la suite des évènements. Tout allait dépendre de ce que le félin allait leur annoncer.

            Une fois arrivé sur Avracham, Ornella et une troupe de guerriers les accueillir. Lorsque Sylver descendit avec le reste de l’équipage, il fut immédiatement encerclé. Les armes braquées sur lui, il insulta toutes les personnes qui se trouvaient autour de lui, tandis que sa femme et ses enfants levèrent les mains.

            Ornella s’avança jusqu’à Sylver.

            – Aucun mal ne vous sera fait, signala la cheffe. Mais je vais avoir besoin de vos informations, monsieur le chat.

            Le museau de Sylver tressauta. Il fronça les sourcils, puis jeta un œil à sa femme. Elle hocha la tête pour le pousser à accepter la proposition des pirates.

            – Emmenez dans une maison, ordonna Sylver. Je veux qu’ils aient une belle vie ici !

            Ornella ricana.

            – Vous n’avez pas d’ordre à me donner. Ils vont rester là, jusqu’à ce que vous me dîtes quelque chose d’intéressant. Si ça n’en vaut pas la peine, je vous renvoie sur votre caillou. À vous de voir.

            Un silence s’empara des félins. Sylver observa autour de lui un instant, avant d’acquiescer la demande. Ornella sourit et l’invita à la suivre. Elle demanda à Bardy et son équipe d’en faire de même, et ils lui emboitèrent le pas. Rune se retourna pour voir la famille de Sylver être installée dans une cabane, toujours sous escorte, tandis qu’ils se rendirent dans une grande salle de réunion.

            Tout le monde prit place autour, puis Ornella invita Sylver à dévoiler ce qu’il savait.

            – Nous t’écoutons.

            Rune trépignait d’impatience. Sylver se leva et se posta face aux pirates, au bout de la table. Il les regarda un à un avant de croiser les bras.

            – Bon… dit-il en fermant les yeux.

            Il laissa un silence quelques instants avant de rouvrir les paupières.

            – Je vous ai demandé de l’aide pour arrêter Félix aux coussinets d’argent, le chef du Saint Ordre Félin.

            Rune écarquilla les yeux. Et elle ne fut pas la seule. Ses amis n’en revenaient pas non plus. Une expression surprise gagnait chaque visage.

            – Il a découvert l’existence des croquettes légendaires !

            Rune haussa un sourcil. Était-il sérieux ? Le premier à pouffer fut Zaz. Bardy soupira en secouant la tête, prêt à se lever pour quitter cet endroit. Ornella roula des yeux. Elle avait perdu son temps et elle allait lui faire regretter.

            – Vous croyez que c’est drôle ? s’énerva Sylver. Si Félix met la main sur ces croquettes, la race des chats va devenir bien plus puissante !

            C’est Chloé qui se mit à rire désormais. Yuki s’appuya sur ses coudes.

            – Soyons sérieux, dit-elle. C’est quoi cette histoire de croquette ? Tu te moques de nous ?

            Sylver semblait déçu.

            – Bon, vous avez l’air vraiment d’une bande de guignol. Je vais demander l’aide de la république de Karos.

            Ce n’était pas une bonne idée. Rune savait très bien ce que le président allait faire d’une famille de chat appartenant au Saint Ordre Félin. Ornella lui fit signe de s’assoir.

            – Dis nous en plus, car pour l’instant, j’ai juste l’impression que c’est une vaste blague, signala Ornella.

            Lorsque Zaz ricana à nouveau, Ornella le foudroya du regard. Tout le monde se tut et Sylver reprit la parole.

            – Il y a une légende qui court dans le Saint Ordre Félin. Des croquettes permettraient à n’importe quel chat qui les mange à se transformer en une bête très puissante. Jusqu’a aujourd’hui, cela ne restait qu’une histoire à dormir debout. Le problème, c’est que Félix les cherche depuis qu’il est au pouvoir. Et sur la dernière planète conquise se trouvait un temple où il a découvert le nom de la planète où ils se trouvent.

            Rune commençait à y croire. Tout cela semblait surréaliste, mais Sylver semblait tellement sûr de lui.

            – Félix va se rendre sur l’astre et récupérer ces croquettes. Une fois qu’il aura transformé ses soldats en bête, il va lancer une guerre totale. Il compte envahir les Humains et même la fédération blanche. Personne ne sera épargné.

            Ornella prit une profonde inspiration. Elle pesa le pour et le contre, peu convaincu par l’histoire de Sylver. Ce qui n’était plus le cas de Zaz et Chloé. Ils semblaient désormais bien plus concentrés et se regardaient avec angoisse.

            – Si vous ne me croyez pas, dites-le tout de suite, ordonna Sylver. Je n’ai pas envie de perdre mon temps ici !

            Ornella le toisa du regard.

            – Pourquoi trahir Félix s’il est si près de la victoire ?

            Le félin tapa du poing sur la table, tout croc dehors.

            – Vous croyez que je veux d’une guerre qui risque de détruire ma famille ? s’énerva-t-il. Si je vous ai demandé asile, c’est pour éviter de subir ce désir d’envahir l’univers !

            Un silence pesant s’installa autour de la table. S’il disait vrai, la galaxie risquait de sombrer dans le chaos à cause d’un paquet de croquettes. Rune avait dû mal à y croire, mais Sylver apparaissait si sûr de lui qu’elle ne pouvait pas douter de sa parole.

            – Quel est le nom de cette planète ? demanda la cheffe.

            Zaz hoqueta de surprise.

            – Quoi ? Vous allez vraiment le croire ?

            Sylver ne fit pas attention à sa question.

            – Nadundou. Félix préparait des troupes pour envahir le secteur comme il est encore sous la république de Karos. Mais nous n’avons pas beaucoup de temps avant qu’il n’arrive. Alors il serait temps que vous vous bougiez le cul, les nazes !

            Ornella s’enfonça dans son siège, silencieuse. Rune ne connaissait pas cette planète. Elle se tourna vers Bardy pour lui demander son avis. Il lui révéla qu’elle se trouvait en bordure du territoire de la république. Tout ce qu’il savait, c’est que des peuples issus de l’Afrique sur Terre s’y étaient installés.

            – Bardy, appela Ornella.

            – Ouaip ?

            – Prends ton équipe et partez pour Nadundou. J’aimerais savoir s’il dit vrai. Si c’est le cas, la galaxie court un grave danger.

            – Ça marche ! Aller, préparez-vous pour le prochain départ. On décolle dans une heure !

            – Je viens aussi ! s’exclama Sylver.

            Tout le monde le dévisagea. Rune n’avait pas vraiment envie de se coltiner un chat dans le vaisseau. Il était bien trop énervant à supporter.

            – D’accord, accepta Bardy. De toute façon, nous aurons sûrement besoin de toi.

            Content d’avoir gagné, Sylver se dirigea vers la porte.

            – Du coup, tu manges quoi ? demanda Rune. Des croquettes ? De la pâtée ? Faut aller faire les courses dans une supérette…

            Sylver la foudroya de ses pupilles félines.

            – T’a dit quoi là ? grinça-t-il des canines.

            – Quoi ? je demande quelle pâtée tu préfères ? Plutôt viande ou poisson ?

            Sylver s’avança vers elle, poings serrés.

            – Écoute-moi bien gamine, avec ta chevelure bizarre qui ne ressemble à rien. Je mange la même chose que toi, débile !

            Rune lui agrippa l’oreille d’un geste de la main et la tira. Il feula en essayant de la griffer, mais elle resta hors de portée de ses griffes.

            – Rody, apporte-moi une tartine, de la confiture et du fil.

            Le robot posa un doigt sur son menton.

            – Pourquoi donc ?

            – J’aimerais tester une légende, ricana Rune. Tu crois que ça va tomber sur la confiture ou sur ses pattes ?

            – Lâche moi saleté de bipède à la con ! Va chier ! Laisse-moi tranquille !

            Bardy lui ordonna d’arrêter ses bêtises et de se mettre en route. Rune le lâcha brutalement et emboita le pas de Zaz, tandis que Sylver les suivait de loin, grognant des insultes à tout va.

            Après une heure à préparer des armes et des vivres, la troupe de Bardy s’envolèrent pour la planète Nadundou, où ils dénicheront peut-être les croquettes légendaires…

Annotations

Versions

Ce chapitre compte 1 versions.

Vous aimez lire SeikiLumnis ?

Commentez et annotez ses textes en vous inscrivant à l'Atelier des auteurs !
Sur l'Atelier des auteurs, un auteur n'est jamais seul : vous pouvez suivre ses avancées, soutenir ses efforts et l'aider à progresser.

Inscription

En rejoignant l'Atelier des auteurs, vous acceptez nos Conditions Générales d'Utilisation.

Déjà membre de l'Atelier des auteurs ? Connexion

Inscrivez-vous pour profiter pleinement de l'Atelier des auteurs !
0