Chapitre 8 - un alpha choqué et un alpha éteint

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La chambre était jolie, plus que toutes celles qu’il avait pu occuper jusque-là. Lidseï commençait à s’en rendre compte. Il arrivait à présent à explorer visuellement les lieux. Il ne s’était pas redressé pour le moment même s’il le pouvant : Nath lui avait retiré les différentes contentions qu’il portait la veille, le libérant de nouveau. Marcher dans cette chambre lui semblait inapproprié. Son oméga l’avait sans doute mis là en attendant qu’il se remette, mais ça ne durerait pas. Personne n’aurait fourni un tel lieu à un alpha comme lui. Sa dernière punition en date ne faisait qu’alourdir son dossier, déjà bien chargé. C’était d’ailleurs très surprenant qu’il soit ici.

Nath avait dit que ce serait à lui de se déplacer pour lui rendre visite, bien-entendu, mais que ça ait lieu dans de telles circonstances… c’était improbable. Couché sur le flanc, Lidseï essayait d’ordonner ses suppositions pour se préparer à la suite. Seulement, il ne comprenait pas et l’idée d’y retourner le terrorisait littéralement.

Il sursauta quand un coup bref résonna contre la porte, juste avant qu’elle ne s’ouvre. Lidseï recula un peu plus au fond du lit et se crispa de la tête au pied. La frimousse qui apparut n’était pas celle qu’il craignait le plus. C’était Nath. Presque aussitôt Lidseï se détendit.

- Salut… Je t’ai amené un plateau repas.

Lidseï l’observa. Effectivement, le petit oméga portait un large plateau qui croulait sous les aliments. Presque aussitôt son ventre se tendit d’anticipation, lui révélant qu’il avait réellement très faim. Nath passa la porte et la referma derrière lui sans la verrouiller. En faites, Lidseï n’avait pas non plus entendu de bruit indiquant qu’elle avait été déverrouillée, mais personne n’aurait laissé un alpha dans une pièce ouverte. Il y avait sans doute des bêtas qui surveillaient, de l’autre côté du battant, déduisit-il. Peu importe. Il n’essaierait pas de sortir, il ne ferait rien qui pourrait donner une excuse à Nath de le renvoyer auprès d’Atkins.

- Est-ce que tu as faim ? demanda gentiment l’oméga.

Lidseï acquiesça doucement puis grimaça. Son cou était vraiment douloureux et le moindre mouvement le lui rappelait. Comme s’il ne le craignait absolument pas, Nath vint s’asseoir au bord du lit et posa le plateau sur ses genoux.

- Comme je te l’avais dit, ce n’est pas du grand luxe par ici, mais ils nous ont quand même bien gâtés. On commence par une salade de carottes est-ce que ça te tente ?
- Oui…

Nath lui fit un sourire doux. Lidseï semblait perpétuellement inquiet depuis son arrivée, mais ils allaient y arriver. Le grand alpha se redressa légèrement, se rencognant contre le mur pour pouvoir manger un peu plus facilement. Tout en machant doucement, malgré sa gorge qui le faisait souffrir, Lidseï se prit à penser à cette chance insolente dont il faisait preuve. Enfin… Nath était là, avec lui. Un lit confortable soutenait son poids et il était nourris. A aucun moment, l’idée que ce soit bien le minimum ne lui traversa l’esprit. Atkins avait réussi à lui montrer qu’un alpha pouvait réellement ne rien avoir.

Durant tout le temps du repas, Nath s’échina à parler de tout et de rien, juste pour essayer de détendre l’atmosphère. Lidseï écoutait sagement, répondait quand les questions lui étaient directement adressées, mais n’intervenait jamais en dehors de ça.

- Je sais que tu es encore très fatigué… Mais si ça te tente, cette après-midi, on pourrait aller faire une petite balade ? Te dégourdir un peu les jambes devrait te faire du bien.

Lidseï observa la porte close sans rien dire. Sortir ? Pour aller où ? Une partie de lui était sincèrement inquiète, en restant ici, il se sentait en sécurité.

- C’est encore en travaux un peu de partout… mais on pourrait commencer par te faire visiter nos quartiers et peut-être faire le tour de l’étage ? On ne devrait pas croiser grand monde. Ils sont surtout occupés en bas.

L’alpha baissa un peu les yeux, ce programme impliquait sans doute de réenfiler un collier, mais c’était quelque chose à laquelle il ne pourrait pas échapper bien longtemps encore. Par contre, cela supposait surtout de bouger près de son oméga ce qui augmentait drastiquement les risques de punitions et il ne se sentait absolument pas prêt à encaisser le moindre choc. Alors doucement, il murmura :

- Je suis vraiment fatigué…

Ce n’était pas faux, mais ce n’était pas non plus l’exacte vérité. Lidseï allait de mieux en mieux et une balade lui aurait effectivement fait du bien. Nath fronça un peu les sourcils, surpris, puis acquiesça en tentant de sourire, plus pour apaiser l’alpha qu’autre chose.

- D’accord. Ce n’est pas grave, l’important c’est que tu te reposes et on pourra peut-être essayer demain ?

L’alpha resta silencieux, refusant même de soutenir son regard, alors Nath finit par ajouter, tristement.

- Ou peut-être un peu plus tard…

***

Assis dans le joli jardin de sa zone, Atkins observait les très jeunes alphas qui y travaillaient. Ils étaient trois actuellement et trois bêtas les surveillaient de près, leur interdisant tout contact. Ils sortaient de l’école et cette zone commune était leur première et avec un peu de chance, ce serait la seule qu’ils connaîtraient. Actuellement, ils vivaient dans des chambres tout à fait agréables. C’étaient les premières choses qu’Atkins avait conçus lorsqu’il était arrivé dans ce très grand bâtiment à rénover. Elles étaient grandes, confortables et plutôt bien équipées pour pallier à l’ennui potentiel.

Quand les alphas dérapaient, ils étaient conduits ailleurs, dans des locaux moins confortables, moins agréables et petit à petit, ils perdaient en privilèges. Souvent ces chambres dans lesquelles il avait mis tant de soin n’étaient occupées que très temporairement, à la façon d’une transition entre l’école des alphas et l’oméga qui s’occuperait d’eux. Alors Atkins ne connaissait pas l’identité de ces jeunes alphas et si tout allait bien, il ne connaîtrait jamais leur nom. Ce seraient des anonymes ou autrement dit, de très bon alphas.

Ou peut-être devrait-il connaître leur nom… Il y a longtemps, il s’était tenu sur ce même banc, à observer trois autres alphas un sourire aux lèvres. Il les avait trouvés vraiment très sages et il aimait les regarder accomplir des tâches douces. Le souvenir des mains si fortes de Ferson rempotant délicatement une fleur était restée comme gravée dans sa tête. Cet alpha avait l’air si doux, Atkins c’était même dit qu’il ne resterait pas longtemps. Quelle grossière erreur ! Tout le souci était là, Merwan avait foulé ces petites allées entre les massifs. C’était également le cas de Lidseï, Jiers, Pietro, Maelon, Ginger et tant d’autres qui peuplaient à présent ses cellules les plus sécurisées. Tous les pires avaient eu leur chance, mais ce n’était pas une manière de se consoler pour Atkins. Non ça ne retirait rien à ce qu’on lui reprochait ! Simplement, il était là, assis, à contempler trois très jeunes alphas qui pouvaient sembler inoffensif et lui, contrairement à bien d’autres, il avait parfaitement conscience de la réalité. Parmi eux se trouvait potentiellement un monstre et il ne pourrait rien y faire.

Atkins laissa son visage partir vers l’arrière et observa le ciel. Il était gris, rempli d’une couche de nuages lisses, sans textures. Maelon devait partir dans l’après-midi pour rejoindre un jeune oméga inexpérimenté mais « très bien accompagné » lui avait-on répété par trois fois en tentant de le rassurer. Maelon… cellule 12. Ce n’était vraiment pas le plus délicat et ça s’était vu très rapidement. Un alpha colérique, incapable de gérer ses hormones. Il avait déjà neuf blessés à son actif et Atkins avait vraiment cru que ce chiffre ne bougerait plus…

Il redressa la tête en entendant l’un de ses bêtas parler un peu plus fort. Le jeune alpha devant lui refusait de rentrer, malgré les négociations douces. Il avait pris un air buté et s’était un peu grandi, sans doute inconsciemment, pour impressionner son interlocuteur. Ce n’était presque rien et d’ailleurs, le bêta était encore très calme. Il bougeait lentement les mains dans un geste qui se voulait apaisant.

Voyant qu’il ne se calmait pas, Atkins saisit la télécommande très tranquillement et l’actionna en direction de l’alpha. Le collier le punit, déchargeant une dose de venin. C’était sans doute sa première fois et il ne s’y attendait pas. L’alpha tomba sur les fesses en poussant un cri, ses mains saisirent le collier et il recula en poussant sur ses jambes. Ses yeux écarquillés semblaient énormes à présent et maintenant que toute trace de dominance était effacée de son visage, n’importe qui pouvait voir à quel point il avait l’air jeune.

Le bêta se tourna vers Atkins, incrédule. Que s’était-il passé ? La situation était encore très largement sous contrôle et ne méritait absolument pas ce type de punition.

- Installe-le dans la 12, ce soir.
- La 12 ? En bas ?

Atkins haussa d’une épaule et ajouta :

- Puisque la place se libère autant en profiter … tant qu’on le peut encore.

Il s’éloigna sans observer l’air horrifié du bêta. Ce dernier se retourna vers l’alpha, toujours au sol, particulièrement choqué et d’une voix douce s’excusa pour ce qu’il allait devoir faire à présent, achevant de traumatiser le plus jeune.

***

L’alpha se tenait parfaitement immobile, plusieurs liens épais avaient été retirés tour à tour sans que cela n’y change quoique ce soit, rappelant au bêta que ces attaches étaient plus là pour l’apparat que pour la contention. Il força sur l’arrière de la cagoule sans lui tirer davantage de mouvement, si l’alpha n’avait pas tenu en équilibre sur ses genoux, il aurait tout aussi bien pu le croire mort. Osin détestait travailler avec lui. Comme tout le monde, il préférait les alphas doux qui obéissaient sagement, mais avec celui-là, ça allait simplement trop loin.

La cagoule s’ouvrit enfin, le cuir épais avait du mal à coulisser. Les cheveux bruns de l’alpha se glissèrent entre les attaches où ils avaient dû se retrouver coincés. C’était très difficile de l’enfiler sans les attraper involontairement. Pas que Kavri se serait plaint, il ne se plaignait jamais. Au pire, Osin l’avait déjà entendu gémir et même pleurnicher une fois, mais il suffisait que son oméga dise un mot pour le réduire au silence. Le bêta ne fut pas spécialement surpris de trouver un bandeau couvrant ses yeux en plus de la cagoule pourtant intégrale. Atkins détestait ses yeux et il ne s’en cachait pas. Avec douceur, Osin le lui retira, finissant de libérer son visage. Pendant un instant, le bêta tenta de capter son regard, en vain. Kavri avait conservé les paupières closes, sans doute trop habitué à se faire punir quand il osait les ouvrir.

- Nous ne sommes que tous les deux, chuchota Osin comme si c’était un secret.

L’alpha ne réagit pas davantage finissant de rendre mal à l’aise le bêta qui s’occupait de lui. Le programme était simple, il devait lui permettre de manger et de passer aux toilettes, lui faire prendre une douche, vérifier que ses équipements intimes du moment étaient correctement installés puis le rééquiper de la même manière qu’il l’avait trouvé. Atkins avait donné des ordres pour que ce soit fait chaque jour, mais régulièrement, il les chassait sans permettre à l’alpha d’assouvir ses besoins vitaux. Alors Osin commençait toujours par le conduire aux toilettes pour lui permettre de se soulager. Kavri ne l’en remerciait jamais, mais ce n’était pas étonnant vu qu’il ne lui adressait jamais la parole. C’était l’alpha le plus silencieux dont il devait s’occuper.

Pour se faire obéir de lui, il suffisait de demander, c’était le travail le plus tranquille qui soit et si les boyaux du bêta ne s’était pas tordu à chaque ordre, ça aurait pu être agréable. Kavri avait toujours un peu de mal à se relever, alors il l’aidait en lui tenant un avant-bras, mais l’alpha faisait très attention à ne pas s’appuyer sur lui. Une fois complètement déplié, son corps s’avérait surprenamment grand. Malgré tout, il n’avait pas l’air impressionnant, pas avec ce visage bas, ses paupières à demi-closes et ses membres décharnés. Il avait l’air malade et prêt à s’effondrer.

- Ok… C’est très bien, Kavri. On commence par les toilettes ?

L’alpha se dirigea gentiment vers la porte dissimulée qui conduisait à la salle d’eau, il allait jusqu’au toilette et s’arrêta, comme toujours, attendant d’avoir l’ordre de se déshabiller. La combinaison de cuir qu’il portait toujours moulait parfaitement bien son corps. Osin l’aida à la retirer, comme à chaque fois que c’était lui qui s’en occupait, sachant à quel point elle pouvait être rigide et difficile à manipuler. Il retira les menottes que l’alpha portait aux poignets et aux chevilles, puis soupira devant la cage de chasteté complexe qui venait l’enserrer. Ça arrivait parfois, quand Atkins le punissait. Osin grimaça néanmoins en s’approchant du modèle en question, étonnamment étroit et court. Il devait pincer cruellement sa chaire en permanence. Après vérification, Osin en conclut que ça ne l’empêcherait pas d’uriner.

- Ça devrait aller… Je te laisse passer aux toilettes ?

Kavri s’assit sagement et Osin essaya de ne pas soupirer tristement en entendant le jet d’urine qui n’en finissait plus. Depuis combien de temps l’alpha se retenait-il ? Ce n’était pourtant pas ses affaires, mais la négligence que subissait l’alpha était difficile à supporter. Comme pour se faire pardonner de ne pas faire davantage, Osin prépara la serviette la plus douce qu’il put trouver et une éponge au moins aussi moelleuse pour pouvoir faire de sa toilette un moment d’apaisement et il l’espérait de réconfort.

Durant la totalité des manipulations, Osin n’eut pas peur une seule fois de ses mains, de ses dents ou de son corps. Il n’y avait pas la moindre trace d’agressivité chez lui. Si ça n’avait été sa maigreur et ses yeux, totalement éteint, ça aurait pu être agréable pour le bêta. Seulement, comme à chaque fois, il dut l’aider à réenfiler ses contentions lourdes, emprisonnant ce corps trop faible dans une situation abusive puis, il fallut partir et l’abandonner derrière lui. Il reviendrait le lendemain ou peut-être le jour suivant avec un peu de chances. Au moins souvent il s’en occupait, au mieux il se portait…

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