Chapitre 5 - entre confrontation et abandon

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Atkins n’avait découvert qu’en fin de journée que Nathsinka s’était rendu dans la chambre de Lidseï, non pas pour l’utiliser mais pour lui permettre de dormir. Son sentiment immédiat avait été un mélange de pleins de choses différentes. Il était surpris, atterré même, en colère bien-sûr, mais ça l’avait d’abord fait rire. C’était bien la première fois qu’il se confrontait ainsi à un oméga. Oh ce n’était pas la première fois qu’il y avait des réclamations, Leyn l’oméga de Merwan, en avait été un très bon exemple. Mais normalement, les choses se passaient dans les règles, en douceur, dans une recherche de compromis. Entre Atkins et Nathsinka, il n’y avait aucune forme de négociation. Ils tentaient de s’imposer leur volonté l’un l’autre. Un autre oméga aurait plié tout simplement. Un autre serait venu uniquement aux rendez-vous programmés, dans la salle prévue pour, en suggérant gentiment des aménagements qu’Atkins aurait pu refuser sans que cela ne fasse d’histoire. Même avec Leyn, même en terminant avec une procédure rarissime, à aucun moment il n’y avait eu ce type de bras de fer. Nathsinka ne jouait pas suivant les règles habituelles.

Après avoir bien rit, Atkins était resté tranquille, un sourire aux lèvres, en se disant qu’ils étaient de la même trempe. Oui, il aimait beaucoup ce jeune oméga. Oh, ça ne l’empêcherait pas de continuer à s’y confronter car il pensait sincèrement que Nathsinka avait tort en croyant que la douceur allait fonctionner avec les alphas. Néanmoins, Atkins était de plus en plus certain qu’il ferait le nécessaire au bout du compte, ce qui ne serait pas de trop pour gérer quelqu’un d’aussi dangereux que Lidseï, mais également pour gérer tous les autres alphas qu’on allait lui confier au fil du temps.

En s’adressant aux bêtas présents, Atkins annonça gentiment :

- Très bien… Puisque c’est comme ça. Faites inscrire au programme que le matin, Lidseï sera emmené dans mes propres quartiers. Je le veux correctement attaché bien-entendu et qu’une trayeuse soit disponible, je m’en voudrais de le négliger. Il ne sortira de là que pour aller à ses rendez-vous prévus. Oh… et la prochaine fois que je demande à ce qu’un oméga précis ne voit pas un alpha précis… faites passer le mot.

***

Les travaux n’étaient toujours pas finis, mais ils avançaient bien. Nath était toujours admiratif en voyant les choses se construire et se concrétiser enfin. Il avait imaginé les plans pour faire de cet endroit quelque chose de véritables agréables pour ses résidents comme pour les personnes de passages et en franchissant les portes principales, il s’y voyait déjà. Oh ce n’était pas terminé, mais le plus gros était effectivement fait.

D’ici quelques mois, ils seraient pleinement opérationnels pour recevoir les premiers alphas et les premiers omégas en souffrance par la même occasion. Tionne, un oméga d’âge mur que Nath aimait beaucoup pour sa grande douceur, s’approcha, un sourire aux lèvres. Il était accompagné par deux bêtas spécialisés dans le bâtiment, qui habituellement, transmettaient les demandes aux alphas présents. Drischta et Kern étaient adorables, comme tout ceux qu’il avait rencontré sur le chantier jusque-là.

- Les boites viennent d’être installées ! Est-ce que tu veux venir voir ce que ça rend ?

Nath hocha la tête, un peu amer malgré tout. Il n’était pas spécialement à l’aise avec les boites, ces espèces de cercueils géants qui venaient emprisonner les alphas pour les transformer en pur objet de luxures et il avait été tenté de les supprimer totalement. Les arguments pour leurs conservations étaient surtout liés à la sécurité. Une fois cadenassé, l’alpha n’avait strictement aucune chance d’agresser qui que ce soit. C’était effectivement une bonne chose, mais une partie de Nath se disait que s’il fallait de telles mesures alors l’alpha devait être en grande souffrance d’une manière ou d’une autre. Ensuite, on lui avait présenté d’autres arguments, bien pire à ses yeux. Les boites demandaient des chambres de tailles réduites et effectivement, des pièces particulièrement fines pouvaient les accueillir. A la conception des plans, là où il aurait pu mettre deux chambres et demi de taille tout à fait classique, il avait pu faire installer cinq petites chambres contenant cinq boites. Alors bien-sûr, pour gérer beaucoup d’alpha, c’était la solution idéale… Mais lui, il ne comptait pas monter une « usine » et ça lui semblait très glauque de construire des pièces inadaptées aux alphas pour une simple question de praticité.

Un argument pourtant l’avait fait flancher. Un argument qui venait expliquer la construction de ces cinq petites chambres. Ce n’était pas un argument d’oméga, parce qu’il n’y aurait pas cru, mais parmi les différentes questions posées aux alphas, un certain nombre avait avoué préférer les boites aux autres possibilités. Être contenu leur permettaient de se relâcher, de ne pas avoir à faire attention et ça les soulageait. C’était plutôt rare, mais au final, les boites étaient demandées par certains, alors à partir de là, comment refuser d’en avoir ?

Nath suivit le trio à travers le grand hall avec ses six guichets différents, toujours en construction, ils empruntèrent l’un des couloirs entre deux guichets pour s’avancer dans l’une des parties dédiées au sexe et là, un alignement de portes peu espacées révélait la présence des chambres à boites. Chaque porte portait un numéro. Ici, il y avait le onze, le douze, le treize, le quatorze et le quinze. Chaque porte avait également été stylisée avec soin, pour révéler l’ambiance à l’intérieur. Nath ne voulait pas juste un endroit fonctionnel et agréable pour les alphas. Il voulait un endroit agréable pour tout le monde.

La chambre onze avait une porte majoritairement brune. Un immense tronc d’arbre y avait été peint avec soin. Dans un nœud de l’arbre, on pouvait voir -comme gravé- le chiffre « onze » qui se détachait assez nettement. A l’intérieur, la pièce était étroite mais elle se divisait en trois parties. La première était un vestiaire tout à fait modeste composé de quelques crochets, d’une fontaine permettant de se rafraichir et de quelques étagères où poser le reste de ses affaires. La seconde partie était davantage axée sur le repos. Deux gros fauteuils, bruns, avaient été installés pour permettre aux omégas de souffler un peu plus loin de l’alpha. Et enfin, la troisième partie, arrivait. C’était la plus travaillée. Au lieu de simplement installer le caisson au milieu, les décorateurs avaient proposés de l’intégrer à une structure de banquettes, dissimulant ses bordures très efficacement. Tout le long des murs des arbres avaient été peint. Le plafond était très lumineux. Les lumières avaient été disséminées à différents endroits comme des points perçant entre les feuilles. Les tons de la chambre allaient du vert luminescent au vert le plus sombre tout en étant ponctué de bruns sombres. L’ensemble parvenait à être particulièrement doux.

- C’est du très joli travail, complimenta Nath tout en testant la sortie du caisson.

Il l’ouvrit doucement. Sa texture était particulièrement agréable à l’extérieur, mais ce n’était pas le point qui l’intéressait le plus. Il palpa le matelas qui y était installé.

- On a fait coudre les trois gammes de sur-matelas possibles, intervient Kern.
- Et on a rajouté différents amortisseurs qui pourront être installé en fonction des goûts de chacun, ajouta l’autre bêta.

Nath acquiesça doucement. Il avait consenti à avoir ce type d’équipement dans l’intérêt des alphas avant tout, même s’il comprenait parfaitement les omégas qui choisissaient de les utiliser. Alors le confort lui avait semblé capital. Hors de question d’avoir des caissons tout juste dignes de zones communes les plus vieilles. Ici, tout serait qualitatif.

La chambre douze était en tout point similaire. Seule la décoration et quelques menus détails changeaient. Nath avait laissé les décorateurs s’amuser à leur gré en leur proposant seulement un cahier des charges. Cette pièce était également sur le thème de la forêt, mais elle présentait une clairière remplie de petites fleurs bleus. L’ambiance était finalement assez différente. La chambre treize était habillée d’un champ de coquelicot. La quatorze se détachait plus nettement, présentant un lac de montagne et les fontaines s’étaient faites plus nombreuses remplissant la pièce d’un doux bruit d’eau. La dernière des chambres, la quinze, était sur un thème lié à la mer, le sol jauni et quelques cocotiers venaient casser le bleu omniprésent.

- Est-ce que ça te plait ? demanda Tionne. Nous pouvons encore faire des modifications importantes si besoin.
- Non, non. C’est parfait. Merci beaucoup vous avez dû travailler dur.

Le sourire si franc et si doux de l’autre oméga fut comme un baume au cœur. C’était tellement facile de lui faire plaisir. Nath aurait aimé que tout soit aussi simple.

- Les chambres natures sont également presque finies, annonça Drischta.
- Oui, j’ai cru comprendre qu’elles avaient bien avancées !
- Il faudra… et bien, les tester par contre. Beaucoup d’équipements sont des nouveautés.

Nath hocha la tête. On parlait ici d’un test en condition réelle avec un oméga en chaleur et un alpha. Les salles natures supposaient un alpha particulièrement doux et en qui ils auraient pleinement confiance.

- Je les garderais fermées tant que ce ne sera pas fait, acquiesça Nath.

Sans vraiment le dire, il se demanda s’il pourrait lui-même tester les locaux avec Lidseï. Ses propres chaleurs approchaient gentiment et il espérait pouvoir faire venir son futur alpha avant qu’elles ne se déclenchent. Si Lidseï avait été dans une autre zone commune, il n’aurait pas eu de doute quant aux délais possibles, mais Atkins était particulièrement peu coopératif. C’était vraiment un oméga surprenant ! Depuis que Nath était passé voir son alpha directement en chambre, il avait réagi en enfermant l’alpha quelque part pour le rendre réellement inaccessible. C’était tellement frustrant !

***

Le prix à payer était horriblement cher. Par deux fois, Lidseï avait pu s’endormir sur un lit avec des draps. Par deux fois il avait goûté au confort. Par deux fois, son corps avait sombré dans le sommeil avec une confiance étonnante envers le petit oméga à qui on l’avait promis. Une partie de lui en était à présent sûre, il partirait avec Nath. Une autre partie de lui, plus méfiante, se disait qu’on était juste en train de le torturer en lui montrant l’ébauche de ce qu’il n’aurait jamais.

En attendant d’avoir la terrible réponse, il avait été emmené au bureau d’Atkins et enfermé dans une petite pièce adjacente qu’il ne connaissait pas. Dès le premier jour, il avait été puni au collier trois fois de suite sans même comprendre pourquoi et les punitions en tout genre s’enchaînaient. Au second jour, en voyant qu’on le ramenait là, il avait un peu ralenti. Il avait été puni pour ça bien-entendu et puni pour avoir été puni, s’il avait bien compris.

Les yeux bandés, l’esprit embrumé, il essayait à présent de comprendre ce qui se disait autour de lui.

- Oui, oui… Faites les deux.
- Est-ce que nous retirons la cage ?

La voix d’Atkins avait marqué une très légère hésitation.

- Non. Il ne le mérite pas. Lavez-le à travers. Ça suffira.

Lidseï frémit. Il connaissait trop bien ce ton. C’était le ton qui indiquait une punition. Mais une cage ? Quelle cage ? Il n’en portait pas. Un gémissement lui parvint et il comprit alors qu’un second alpha était présent non loin. Un petit cri perça le silence ambiant. L’autre avait été puni pour avoir fait du bruit. Lidseï baissa un peu la tête, accablé par une tristesse et une fatigue un peu trop grande.

Lorsqu’une brosse humide toucha soudainement sa peau, il sursauta mais parvint à se taire. On frictionna sa peau, le dénudant sans vergogne, frottant avec la même régularité des zones diverses sans s’intéresser à sa sensibilité. Sur son dos, ce n’était pas gênant, au moment où l’on vient astiquer l’intérieur de ses cuisses puis son entre-jambe, ce fut moins évident. Il reçut le nettoyage comme il recevait les punitions, en essayant de rester aussi peu réactif que possible. Cela dut fonctionner car le collier ne le punit pas de nouveau. On l’abandonna finalement, humide et tremblant.

C’était le prix. Le prix de son espoir. Si au bout du compte, il partait, ça en valait la peine… Immobile, il se prit à imaginer la voix de son oméga qui lui disait doucement, presque tendrement « tu peux dormir maintenant » … que ce serait bon.

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