Le pire reste à venir

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Ses jointures blanchissent tandis que la colère bouillonnait à l’intérieur d’elle, et Romain continuait de parler avec aisance et rapidement. Il était si volubile. Il ne cessait de parler. Une vraie pipelette, celui-ci ! Si seulement, il pouvait se taire. Elle se tenait immobile, inexpressive, en face de son compagnon du soir. Mais quelle idée d’accepter à aller à un rendez-vous Happen quand tout allait mal.


C’est une bonne chose, chuchota une voix épicène dans son esprit manquant de la faire frémir tandis qu’elle posait son verre de coca sur la table. Ce dîner, continua-t-elle avec ce sourire qu’elle voyait très bien en dépit qu’elle n’existait pas - ou existait-elle ? - te servira pour ce soir.


Romain cessa de parler, le temps de prendre son verre et d’avaler quelques gorgées de coca. C’était un jeune homme de vingt-neuf, célibataire depuis trois mois.. Son visage était ovale, décoré d’une paire d'yeux marrons chocolat et d’un nez rond et encadré par ses cheveux châtains. Il était peut-être mignon mais il était terriblement ennuyant.


Il ne le sera plus… bientôt, ricana la voix dans sa tête.


Elle voulait s'agripper la tête avec ses mains néanmoins elle ne voulait pas attirer l’inquiétude de Romain. Il avait clairement une personne autre qu’elle. Elle ne comprenait pas comment il avait pu être attiré par elle.


Qui sait.


Ou peut-être, c’était une mise en scène.

  • En tout cas, j’ai passé une bonne soirée avec toi, Alena, termina Romain avec un sourire sur le visage.

Alena esquissa un sourire - faux, bien entendu. Le serveur revint avec la note. Romain proposa de payer intégralement la note cependant la jeune femme refusa net. Il tenta d’insister mais dû se résoudre à respecter le choix d'Alena lorsque celle-ci lui envoya un regard glacial. Ils payèrent chacun leur part et quittèrent le restaurant. La jeune femme jeta un regard à son compagnon de soirée, il était mal à l’aise et ne savait plus où se mettre.


Ramène le à la maison, lui ordonna soudainement la voix d’un ton ferme qui ne laisse place à aucune question.


Un nœud se forma. Alena ferma les yeux tandis que la panique montait en flèche. Des souvenirs la frappaient de plein fouet. Si elle ne le faisait pas... Iel la ferait subir le diable à nouveau. Sa respiration le coupa.

  • Hm.. Est-ce que ça va ? demanda Romain en voyant son expression.

Alena déglutit. Elle acquiesça mais Romain n’était pas convaincu. L’inquiétude se lisait sur son visage. Alena lui offrit l’un de ses plus beaux sourires, cela eut l’effet de faire fondre son inquiétude comme de la neige au soleil.

  • Puis-je te raccompagner à ta voiture ?

Au lieu de répondre ‘non’ comme Alena le souhaitait, un autre mot sortit :

  • Oui.

La jeune femme ne comprenait pas ce qu’il s’était passé. À moins que cela soit à cause de… ? Cela pouvait être luiel. Iel était LE MARIONNETTISTE.


Ne me désobéit pas ou alors… menaça la voix épicène, glaciale et ferme.


Des images gores et traumatisantes envahirent son esprit. Sa respiration se coupa derechef. Son visage devint aussi blanc qu’un drap cependant elle se reprit rapidement et offrit un sourire au jeune homme. Elle n’avait pas le choix.


Ils marchèrent le long de la rue ensemble, des lampadaires éclairaient celle-ci, peu de personnes s’y trouvaient. Alena s’était garée au fond d’un parking isolé à une dizaine de minutes de marche du restaurant. Un plan s’était déjà formé dans son esprit. Et l’autre riait, riait si fort qu’iel lui causait une migraine. Le moment où ils arrivèrent devant le véhicule, Alena assomma Romain et l’attrapa avant qu’il ne tombe. À haute voix, la jeune femme déclara nonchalant qu’il avait sûrement trop bu. Elle le mit à l’arrière de sa voiture et se précipita sur son siège conducteur.


Drogue-le, lui susurra LE MARIONNETTISTE.

Et elle obéit. Elle fouilla dans son sac à dos une seringue. Elle la saisit et la planta doucement dans le bras gauche de Romain injectant une substance dont elle avait oublié le nom.

Le véhicule s’arrêta devant une grande bâtisse située au plein milieu de nulle part. Une manière de cacher le plus grand secret de cette demeure et ainsi laisser au MARIONNETTISTE de continuer ses affaires.


Alena ouvrit la porte de sa voiture et sortit en prenant son sac à dos. Le laissant pendouiller à son épaule droite, elle se pandicula quelques instants puis vint ouvrir la porte arrière. Romain était encore inconscient. Le jeune homme était aussi léger qu’une plume, ce qui arrangeait les choses pour la jeune femme.


Le pantin allongea sa victime sur une table métallique et l’y attacha pour qu’il ne puisse pas fuir durant la GRANDE OPÉRATION - dixit LE MARIONNETTISTE. Alena lui banda les yeux avec un vieux tee-shirt dont une sale odeur s’y dégageait. Elle renifla affichant une

goût. La drogue ne faisait plus effet, nota-t-elle en continuant de préparer la salle d’opération. Il commençait à se réveiller, prendre conscience que quelque chose n’allait pas et qu’il était coincé.

  • Que… Hey ! Libérez-moi !

Volubile. La colère revint soudainement. Alena serra les dents. Il criait. Il hurlait à quiconque de l’entendre en gigotant dans tous les sens. La jeune femme dont le prénom n’était et n’avait jamais été Alena laissa échapper un soupir en prenant un chiffon. Elle lui enfonça dans la bouche en guise de bâillon.


Ô doux silence ! songea-t-elle en commençant son travail.

Le pantin prit un scalpel et se tourna vers le corps étalé comme une crêpe. Il arracha le tee-shirt noir de sa victime et se pencha vers l’estomac. La jeune femme fit glisser le scalpel sur le ventre, l’enfonçant légèrement pour faire une entaille. Romain cria. La douleur le prenant comme un pénis s’enfonçant violemment dans ses fesses. Du sang coula. La jeune femme plongea sa main dans le trou saignant, cherchant quelque chose en particulier. Ses intestins. Elle les retira et les déposa dans un bocal vide. Son patient agonisait.


Puis, elle lui mit des points de suture et des bandages. Enfin, elle s’occupa de lui enlever le cœur encore battant la chamade. La raison ? LE MARIONNETTISTE le souhaitait. Pourquoi ? Elle ne savait pas. Les intestins, eux, elle les avait pris pour les offrir à un pantin. Elle baissa les yeux apercevant ses mains couvertes de sang. Elle fut prise d’un haut le cœur et se recula de la table métallique. Elle ferma les yeux, emboutillant ses émotions pour reprendre son travail.


Le cœur flottait dans un bocal fermé. Le pantin mit une étiquette dessus et se tourna vers le cadavre. Elle nettoya la table et le corps - ayant déjà fait l’erreur de tout laisser en plein - avant de mettre le cadavre sur un chariot. Une personne masquée entra dans la salle d’opération et prit le chariot sans un mot, ressortant avec. Alena posa une main sur sa bouche, les yeux écarquillés, dégoûté avec elle-même.


Alena - ou PANTIN 345 comme LE MARIONNETTISTE la surnommait - se recroquevilla dans un coin de la pièce, laissant place à toutes les émotions qu’elle avait mis dans un vase lors de son acte. Les larmes coulaient sur ses joues tandis que le dégoût l’enveloppait dans une bulle. Le monde disparaissait, le pantin s’abandonna à ses pleures, désespérant face à la cruauté qu’elle avait usé, haïssant elle-même pour commettre un meurtre.


Si seulement, elle avait refusé ce dîner. Non, pensa-t-elle, cela n’aurait rien changé car elle n’était qu’un pantin, aux mains d’un personnage inconnu qui avait une forte emprise sur elle et un tas d’autres pantins.

  • Je suis un monstre.
  • Un monstre formidable, corrigea LE MARIONNETTISTE en prenant son pantin dans les bras comme un enfant prenant son jouet. Bon travail, pantin 345.

Le pantin se laissa faire, ne prononçant aucun mot tandis qu’iel continuait de la complimenter tel un parent fier de son enfant. Ils arrivèrent au troisième étage de la demeure, iel la déposa sur un grand lit.

  • Rien n’est laissé au hasard, dit-iel en s'apprêtant à fermer la porte. Repose-toi.

Quand la porte se ferma, le pantin fut immédiatement enveloppé par des souvenirs profonds et douloureux. L’espoir s’effaçait aussi vite que l’encre, le désespoir prenait place et l’enveloppait dans une couverture.


À quoi bon d’essayer de fuir quand elle était déjà condamnée ?


Le pire restait à venir.

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