2.    Au commissariat

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Je retrouvais Miguel devant la porte de ma chambre d’hôtel. Il m’accueillit d’un ton renfrogné :

  • Mais où étais-tu passé ? Ça fait une demi-heure que je poireaute ici. J’étais même prêt à aller chercher le gérant pour m’assurer que tu ne gisais pas au sol.

Je haussai les épaules et l’attaquai de nouveau sur sa situation familiale :

  • Je n’ai pas de femme ni de gosses à rassurer. J’en ai profité pour commencer l’enquête.
  • Oui, mais c’était super important, renchérit mon coéquipier. Consuela a fait ses premiers pas aujourd’hui. Tu te rends compte ? Elle a à peine huit mois et demi et déjà elle marche. Elle est tellement précoce et…

Je l’écoutai débiter des éloges sur sa fille d’une oreille inattentive. Des dizaines de gamins font ça tous les jours, à quoi bon s’extasier ? Au bout de cinq minutes, je l’interrompis irrévérencieusement.

  • Au fait, je vais manger un bout ce soir avec le légiste, histoire de discuter un peu de ses rapports d’autopsie.
  • Ah cool, répliqua Miguel. Comme ça on pourra en savoir plus sur ses théories.

Je tiquais lorsque j’entendis cette phrase. Il ne comptait quand même pas venir me tenir la chandelle. Mais je me rassurais vite, ça ne doit pas manger asiatique un Mexicain. Je pris un air faussement gêné.

  • On va dans un japonais. Je ne suis pas sûr que…
  • Oh ! Mais j’adore les sushis ! s’exclama-t-il.

Et merde ! Le boulet sera là ! Tant pis, j’improviserai comme d’habitude.

***

Notre première visite fut au commissariat de la ville. Histoire d’emmerder un peu les flics en clamant qu’ils étaient trop cons pour finir leur enquête. Un accueil chaleureux que nous avons reçu là ! La police n’aime pas voir le FBI marcher sur ses platebandes, Paradise Corner ne faisait pas exception. L’atmosphère se glaça lorsque Miguel exhiba son badge. On reprenait leur affaire, ils pouvaient retourner aider les enfants à traverser la rue et verbaliser les véhicules mal garés.

L’inspecteur chargé de l’investigation nous reçut plus ou moins cordialement. C’était un vieux briscard qui semblait presque soulagé de nous refiler le bébé. Il nous fit un portrait détaillé des trois victimes. À première vue, rien ne les liait les unes aux autres. Le premier était un videur de bar ; une petite brute qui avait eu quelques démêlés avec la justice pour aimer un peu trop frapper sur les gens qui ne sont pas d’accord avec lui. La seconde bossait chez Genix et c’est tout ce qu’on apprit sur elle. Le dernier travaillait dans l’épicerie du coin. Les trois morts avaient des âges différents, des situations familiale différentes, des vies différentes. Ils n’avaient qu’un seul point en commun : on les a retrouvés agonisants sur le pavé, le ventre ouvert et les boyaux à l’air.

Tout comme la légiste, l’inspecteur, malgré moult détails, paraissait esquiver toutes nos questions portant sur ses soupçons. Comprenant que je n’aurai aucune des réponses que j’escomptais, je laissai Miguel terminer sa conversation et quitta le commissariat pour « prendre l’air ». J’ai la vilaine manie de vouloir m’allumer une clope dès que ça peut m’aider à collecter des informations intéressantes. J’eus le nez fin. Les trois flics qui fumaient là écourtèrent leur pause à mon arrivée, mais peu de temps après, une petite rouquine sortit inhaler sa dose de nicotine. S’engagea alors une discussion informelle. Je cherchai un lieu où je pourrai emmener la légiste, une fois Papy Miguel trop crevé pour nous suivre. Elle me proposa le Paradis Perdu, le seul bar branché du coin. Tous les week-ends des artistes locaux venaient y chanter, mais la semaine, l’atmosphère était assez cool.

  • Par contre, m’exhorta-t-elle, ne faites pas trop de vagues là-bas. M est assez… spécial.

Je tiquais sur le nom du tenancier. M ? C’est quoi ça ? Le pseudo d’un rappeur californien ? La policière enchaîna :

  • Il a le bras très long. Il possède pas mal de choses ici. Il fait vivre le commerce, dirons-nous. Lui et ses hommes, ce ne sont pas des enfants de chœur, mais on n’a jamais eu aucune preuve pour le coincer.

Je n’en crus pas mes oreilles. Un type louche, des sbires pas tendres. Il y avait une pègre dans ce trou à rats !

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