Chapitre 1 : Haine

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J'étais dans le train. Betrayed de Lil Xan dans les oreilles, le regard perdu dans la vitre de l'UrbExpress, ligne 45B direction Lanceur. Ce genre de musique me faisait partir en vrille, dans le bon sens. De l'inspiration, de la motivation, bref, pas d'idée noires quoi. Arrêt Martre-la-Hops, masse de monde sur le quai, des gamins qui chialent, des daronnes qui galèrent, des vieux lents, des mecs en Paquetages et des policiers en civils cramés à deux milles tranchements, rien de fou. Sauf que contrairement aux autres jours, enfin les jours où je ne suis pas en position étoile de mer sur cinq sièges, les flics ont chopé un type. Une voix dans les haut-parleurs m'interrompit dans mon observation et annonça qu'à partir de maintenant, la Société des PolyTransports du Middle, la putain de SPTM venait de tous nous baiser et, accessoirement, que l'UrbExpress numéro 12 de la ligne 45B en direction de Lanceur était stoppé jusqu'à nouvel ordre, et, bordel, c'était celui où au moins 578 fesses étaient posées, ainsi que les miennes, mais aussi où 200 autres attendaient de l'être. Ceci étant dit, je retournais à mes deux poulets qui s’étaient éloignés avec un vieux qui ne me paraissait pas être né avec des lingots dans les poches arrière du jogging. Et là, y’a eu une douille. Jusque-là l’arrestation se déroulait normalement, le vieux se débattait comme il pouvait mais ce n’était pas grand-chose pour les deux montagnes qui le tenaient. Et d’un coup, toute la foule s’est retournée vers les trois guignols, une sorte de cercle s’est formé et, même à travers la quadruple couche de titaverre du train, j’entendais un mec gueuler en direction du vieux et ses acolytes.

A partir de maintenant va falloir s’habituer parce que la suite va arriver comme la décharge que mon cerveau a envoyé à mes jambes à ce moment-là. Ouais parce que y’a un truc que je vous avais pas dit : les deux flics étaient humains, le vieux était wax, et il existait ici une magnifique invention : le racisme.

J’ai sauté de mon siège et descendu l’escalier (j’étais à l’étage). J’ai ensuite sauté du train et ai couru vers la foule. J’ai dû bousculer une bonne dizaine de gens avant de rentrer dans le cercle où y’avait drame. J’entendais toujours le gars qui gueulait toute l’heure.

« Calme-toi Harper ! T’énerve pas, ils ont tous les droits, personne peut rien faire mais ça va leur retomber dessus plus tard t’inquiète pas, criait le mec au vieux.

- Eh toi, lui lança le flic de droite, ferme ta gueule ou on t’embarque.

- Ferme ta gueule ? Vous êtes sérieux là ? s’exclama le défenseur.

- Ouais ferme ta gueule, lançais-je.

- Hein ? Que… hoqueta-t-il en se retournant vers moi.

- J’AI DIT, FERME TA BONNE GROSSE GUEULE.

- OH ! Nan mais ça va pas nan ?! Vous savez ce qui est en train d…

- FERME. TA. GUEULE.

Le gars arrêta de parler, même moi j’étais surpris. C’était méchant mais l’objectif était atteint, l’attention des flics et de la foule était attirée.

- Merci, dis-je en adressant un regard et un sourire provocant à l’homme. Bon, vous deux-là, y’a moyen vous m’expliquiez ce que vous êtes en train de faire ?

- Monsieur je vais vous demandez de reculer et de nous laisser accomplir notre devoir ou je devrais vous arrêter vous aussi pour refus d’obtempérer.

- Ooooooooh, c’est trop mignon… Il est où le « ferme ta gueule » monsieur l’agent ?

- J…

- Nan ta gueule vraiment, dis-je en souriant.

- Monsieur, vous n’avez pas l’d…commença-t-il à crier.

- J’AI DIT TA GUEULE ! ON N’EST PAS CHEZ TA MERE ICI, TU FERMES LA FOSSE SCEPTIQUE QUI TE SERT DE BOUCHE OU J’T’ARRACHE LES CORDES VOCALES AVEC LES DENTS ET J’EN FAIS UN COLLIER POUR TA DARONNE !

Tout le monde était choqué, le flic, son collègue les gens, le vieux, le mec, moi. J’avoue j’étais fier, j’pourrais dire à mes gosses « papa a cloué la gueule à un keuf une fois ». Pas besoin d’être Heisenberg pour savoir que la fierté du « représentant de l’ordre » prendrait le dessus après ça. Il commença alors à diriger sa main droite vers le taser à sa ceinture et je fis semblant de ne rien voir.

- TU SAIS A QUI TU P…P…PAA…ppp…pp…pp…pa…a…

Il convulsait sur le sol grisâtre du quai et bavait comme un bébé, ou un drogué. L’autre policier mit du temps à réagir. Il commença par lâcher le vieux wax et saisi sa matraque et son taser avant de se diriger vers moi. C’est là que j’ai senti l’hésitation de la foule, du coin de l’œil je voyais les visages se consulter : « Est-ce qu’on n’aiderait pas le mec qu’a des balls mais qu’est aussi un peu stupide ou est-ce qu’on reste ici, comme des faibles mais des faibles intelligents ». Ce petit silence gênant de la foule fit tourner la tête de mon adversaire. C’est alors que l’intégrale des films d’action rempli de sueur et de mâles alphas que j’avais vu me revinrent à l’esprit en une fraction de seconde et, à peine consciemment, je sautais sur le flic, passais derrière lui et quelques instants plus tard, je le maitrisais totalement, soit il se déboitait un truc, soit il se laissait faire.

- On va peut-être pouvoir discuter maintenant, lui dis-je dans l’oreille.

- Tu ne sais pas ce qui t’attends, me répondit-il, une pointe de seum dans la voix.

- Honnêtement j’y avais pas vraiment réfléchis avant de taser ton collègue, mais bon, ça soulage tu peux pas savoir.

- Soulagé de quoi ? T’as vécu des choses avec les forces de l’ordre, on n’est pas tous comme ça t’étais pas obligé de faire ça.

- Oh la vache ! Tu joues si bien c’est incroyable. Nan, j’ai jamais rien vécu de traumatisant avec les forces de l’ordre ni avec qui ou quoi que ce soit. Mais y’a du vrai dans ce que t’as dit, tous les flics sont pas comme toi et ton pote hein, ils sont pas tous racistes, oh bordel heureusement.

- Racistes ?! Comment ça ?

J’ai même pas eu besoin de répondre, le regard de la foule lui fit très rapidement capter qu’il était 1 versus 450 et que ce n’était pas une bonne idée de répliquer.

- Oh mon dieu ! entendis-je derrière moi.

Le vieux wax était au sol, face contre terre, une femme penchée au-dessus de lui, les yeux paniqués. Je compris rapidement ce qui se passait, mes cours d’extrabio revenaient au galop, chapitre III : L’espèce Wax, Grand A : Anatomie, Petit 4 : système « cardiaque » : les wax ne possède pas un cœur à la manière des humains mais néanmoins un système d’irrigation de leur enveloppe, la circulation de ce dernier est assuré par huit organes appelés « draines » situées symétriquement le long de leur deux membres supérieurs. Le nombre, la localisation ainsi que le fonctionnement des draines rendent impossible leur redémarrage avec des électrodes à la manière d’un défibrillateur. Conclusion, le vieux était mort, et on ne pouvait rien y faire. Je me retournai alors vers la foule qui avait saisi l’idée en même temps que moi : certains éclatèrent en pleurs, d’autres crièrent sur le flic agenouillé dont je tenais toujours la tête. Le gars qui avait défendu le vieux plus tôt fut le premier à comprendre ce que je voulais faire. Il me fixa alors dans les yeux et changea son expression de haine en un regard de pitié. Je le lisais : « Nan, ne fais pas ça », il avait le même comportement que les mecs dans les films qui s’approchent d’un suicidaire sur un toit. D’autres comprirent alors à leur tour et tous n’osèrent pas bouger de peur de me voir passer à l’acte. Des larmes me montèrent, mon cœur se serra. Que pouvait-il m’arriver ? La prison à perpète ? Ouais y’avait que ça, même si au moins 400 à 500 personnes étaient sur les lieux peut-être 200 se diront avoir été présent, 70 peut-être 80 l’auraient vu de leurs propres yeux mais au final 20 voire 15 protesteront vraiment pour ma libération.

Mais putain au final qu’est-ce qu’on en a à foutre. Actuellement c’est le code Sith dans ma tête : la tristesse mène à la haine, c’était pas ça mais j’avais beaucoup trop la haine pour y réfléchir. Une Valkyrie se détacha de l’assemblée. Putain elle était jolie. Les Valkyries m’ont toujours fascinées, une espèce à 85% composée de femelle mais pouvant s’accoupler avec toutes les autres espèces intelligentes actuellement connues. Elle était blonde, les yeux d’un bleu à vous rendre aveugle. Elle faisait ma taille et devait avoir à peu près mon âge. Son corps me semblait avoir été sculpté par Dieu lui-même, et, bordel, je crois en aucun putain de Dieu. Elle se rapprochait de plus en plus. Je devais avoir une sale gueule. Mes muscles du visage étaient crispés par la haine et le dégoût. Les larmes gouttaient de mes joues et le silence était tel qu’on les entendait claquer sur le carrelage du quai. La jeune fille me portait un regard doux et bienveillant, elle avançait lentement tout en me fixant, les mains croisées devant elles, comme si elle contemplait un enfant perdu.

J’étais paralysé, si elle avait pas débarqué le bonhomme entre mains serait mort et jeté sur les rails depuis un bail. Partagé entre la vengeance et le pardon, je ne bougeais plus et fixait la jeune Valkyrie s’approcher. Elle arrivait à mon niveau et je cru qu’elle allait m’embrasser à la manière d’un mauvais film romantique à petit budget. Nan, elle s’approcha de mon oreille et m’y chuchota quelque chose.

- T’es sûr de toi ?

Putain cette voix…C’est la première qu’un son me faisait autant de bien. Elle mit ses mains sur mes épaules et m’adressa un regard indescriptible. Ce genre de regard qu’y te rend amoureux d’une fille. Mais pas juste amoureux tu vois, genre si elle mourrait, là, maintenant, je me pendais avec la cravate du flic j’en avais rien à foutre. C’est le regard qui change le fait que tu la trouves « bonne » à « belle ». Celui qui te fait commencer à réfléchir aux prénoms des enfants que t’aura avec elle, celui qui te fait réfléchir à comment tu vas pouvoir la rendre la plus heureuse du monde.

Je commençais à partir en vrille alors qu’elle faisait glisser ses mains le long de mon torse puis le long de mes bras. Je savais dès le départ où elle voulait en venir, ce n’était pas mon âme sœur débarquée de nulle part ni une déesse ayant pris forme humaine. Son regard craquant, ses mains baladeuses, sa voix mielleuse, certaines filles savaient faire ça, le vécu parlait… Au moment où elle approcha de mes poignets, j’enlevai mes mains de la tête de ma victime et pris les mains de la Valkyrie.

- Vous me pétez tous les couilles » lançais-je avant de mettre un coup de genou dans la nuque du policier.

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